JUSQU’AU BOUT DE NOS RêVES à LA VOILE
Notre été 2014 dans la lumière de la Caraïbe et ses joyaux insulaires en bleu et blanc, que sont la Blanquilla, l’archipel des Roques et des Aves.
Certains voyagent pour vérifier leurs rêves…
Qui n’a pas rêvé un jour de se balancer au gré des vagues ? Qu’on le veuille ou non la mer porte en elle toutes nos espérances informes, tous nos désirs inconscients et nos nostalgies aussi…venus peut-être d’une autre vie ? Souvent le soir avant de m’endormir je m’imagine m’affranchissant de l’espace et du temps …En songes je colportais d’une manière itinérante mes rêveries pleines d’un charme inexplicable avec la sensation grisante, presque irrationnelle, que la liberté était un trésor irremplaçable…mon âme frisonne et s’attendrissait tout à la fois à la perspective de me retrouver seule face à cet élément liquide naturel mais complexe…j’éprouvais de frénétiques démangeaisons de « m’expliquer » avec le vieil océan…sans m bercer d’illusion candides pour autant ! Marcher sur les flots était une exclusivité divine que je voulais partager…
Nous avons enfin eu nos
papiers le 30 juillet (sur une seule feuille A4 (comme Grain Janus et tous les bateaux récents)
: aussitôt Jean a téléphoné à la Matmut de Lannion (qu’il avait rencontré en
février) pour faire passer Afrodite en tous risques (ça nous fait deux bateaux
en tous risques maintenant...)- puis avons attendu les avenants pour les
retourner avec AR et que tout soit réglé impec'
Départ le 7 aout (il y
avait déjà eu le passage d'Arthur et de la grosse Bertha !)après
approvisionnements et belle traversée inaugurale sur notre "Afrodite"
= tout s'est vraiment bien passé avec une bonne moyenne de 6 a 7 nœuds à 120
degrés du vent, un alizé de 15 a 20 nœuds avec quelques renforcements sous orages au début du
parcours à trente nœuds où il a fallu prendre un ris !
Sommes en mer - TVB - La
Blanquilla à 180 milles au 232, vitesse entre 6 et 7 nœud -> Hier soir à l'ouest, les derniers
rayons du jour s'accrochaient encre...Un crépuscule flamboyant se prenait pour
un tableau de maître...Quelques bancs de stratus persistaient à dessiner
diverse formes dans le ciel ...Que du bonheur !
Belle
traversée inaugurale sur notre "Afrodite" tout s'est vraiment bien
passé avec une bonne moyenne de 6 a 7 nœuds à 120 degrés du vent, un alizé de
15 a 20 nœuds avec quelques renforcements
sous orages au début du parcours à trente nœuds où il a fallu prendre un ris ! Ça
change de la grand voile à enrouleur d'Eolis !
Une
lune énorme s’est levée à l’est, avec ses vapeurs, ses rayons et ses ombres… Une
lune énorme qui distribue une palpitante clarté au ras des flots…
Le
lendemain matin dans une aube mauve un
doux zéphir favorable soufflant à doses homéopathiques nous donnait la oie de
respirer l’air pur du grand large…
Nous
voici donc bien arrivés au Venezuela !
BIEN Arrivés à la
Blanquilla en 50 heures TVB
Pour
parfaire cette merveilleuse arrivée, quelques dauphins comme comité d'accueil
et la lumière de la Caraïbe …
Le
bleu profond de la mer, éclaboussé de lumière, génère une réverbération intense
qui brûle sans répit nos rétines malgré la protection de nos lunettes teintées.
N’oublions pas que « la Blanquilla » signifie « la
blanche » !
Une autre bizarrerie : ici
le décalage horaire du pays n'est pas - 4 H par rapport à UTC, comme il se
devrait, mais ½ heure en moins soit 4h30 de moins au lieu de 4, histoire d'être un peu plus décalé, de toute
façon, personne n'est jamais à l'heure dans ce pays, le retard est une
véritable institution…
« Maniana, maniana »
Hier
soir à l'ouest, les derniers rayons du jour s'accrochaient encore...Un
crépuscule flamboyant se prenait pour un tableau de maître...Quelques bancs de
stratus persistaient à dessiner diverses formes dans le ciel -> que du
bonheur !
" BIENVENIDOS A
VENEZUELA"
13 AOUT
Escale à Gran Roque
l'ile-capitale de l'archipel des Roqués – prononcer « roquesses » - TVB
et nous sommes très heureux d'avoir retrouvé nos chères iles paradisiaques au
nord du Venezuela et qui nous avaient tant manqué l'été dernier ...nous pensons
rester deux mois,"peut-être"...selon la météo
Nous avons donc fait nos
formalités d'entrée à Gran Roque aux bureaux situés vers l'entrée de l'aéroport
: d'abord l'Immigration pour nos visas
(1016 Bs= avec reçu bancaire, nous leur avons fait comprendre que nous partions
aux Avès, ils ont donc accepté que nous ne payons pas le Parc maintenant mais à
notre retour car il est valable 14 jours dès la paiement et non morcelable -
ensuite nous avons été voir le bureau d'à côté pour avoir les papiers des Costa gardia - ensuite à la
"farmacia", sur la place du centre, juste à gauche de la posada Nueva
Cadiz : le taux a de nouveau changé depuis votre passage vu l'inflation
galopante gigantesque de ce pays --> pour 1 euro = 82 Bs (65 en juin! pour 1
$) - on a juste changé 100 euros - le premier supermercado était fermé mais
l'autre était bien achalandé et nous y avons dépensé la moitié de nos sous...il
vendait également des cartes téléphoniques et comme j'avais rechargé mon téléphone
venezuelien (qui date de 2006 !) j'ai acheté des cartes et pu parler à maman
pendant 11 minutes pour...50 Bs....ensuite on sera de nouveau hors réseau- heureusement
que j'ai SailMail pour avoir et recevoir des nouvelles, c'est vraiment super!
Nous avons ensuite levé l'ancre
pour traverser tout l'archipel cap à l'ouest sous génois seul à ...5 nœuds (20 nœuds de vent d'est) pour aller jeter
l'ancre à Bequevé, en face de Cayo de Agua et où il n'y avait personne et en suivant
la trace sur le vieil ordi de Jean que nous avions débarqué de Eolis- Beaucoup
de vent donc très rouleur, mais Gran Roque était rouleur encore plus, infernal,
avec des pélicans partout sur le pont à « meuter »...C’est curieux
comme tous ces goélands envoient sans cesse des cris de reproche au monde des
humains…
Le 14 en cinq heures cap
sur Barlovento où il y avait déjà trois voiliers sur le reef, nous sommes dans
le premier lagon bien tranquilles et Jean est en train de fourbir ses fusils de
chasse sous-marine : attention les langoustes
Très bonnes pêches : hier
un pagre (pargo) de 3 kilos - bêtes à
cornes = 4+4+5 = 13 prises
15 AOUT = BILAN DE LA PECHE
DU JOUR = 4 + un gros rouget et une carangue
Samedi 16 Aout
: 5 belles et magnifique calme plat dans "notre" mare -->
heureusement qu'il y a un bon frigo et un congèl', sinon il va falloir bientôt
que je fasse des "bocaux"!
Nous voici donc maintenant
aux Avès, archipel couvert d'oiseaux comme son nom l'indique, avec de belles
pêches journalières = déjà 16 bêtes à cornes ! Toutes ces iles valent
vraiment le coup d'œil et le site est magnifique, la mer est d'un bleu
translucide, c'est aussi le refuge des pélicans, installés sur le dôme d'une pépite rocailleuse et scrutant
l'horizon.
Dans la journée l'archipel
est écrasé par un soleil de plomb, mais la nuit, les alizés rafraîchissent
l'atmosphère et tiennent les moustiques à distance, enfin ça dépend des soirs…
La plupart des " cayos
" affleurent la surface de l'océan.
Leur sable d'un blanc très pur se détache sur les eaux turquoise ou émeraude…Quelques-uns
émergent en pointes rocheuses. Des bouquets de mangroves, de cactus et de
plantes sauvages ajoutent une note de vert à ces îlots arides où les iguanes et
les lézards ont élu domicile. Parfois des tortues de mer avancent à pas lourds
sur le rivage afin d'y déposer leurs œufs.
Frégates, fous ("
red-foot bobbies "), ibis rouges et hérons y abondent...
J'ai enfin trouvé LA bonne manœuvre
pour envoyer et recevoir mes mails : j ai trouvé LA bonne station émettrice-réceptrice
(Trinidad), LA bonne fréquence et surtout LE bon créneau horaire, càd à partir
de 18h30 heure locale et pendant une trentaine de minutes --> il s'agit donc
de ne pas rater cet horaire ! Aujourd’hui encore bonne pêche = 6 moins une qui
s'est barrée...Les queues en tranches à l'américaine avec du riz, les têtes au
court-bouillon = Miam
VENDREDI 22 AOUT
Ici c'est comme un
sanctuaire naturel.
Dans la journée l'archipel
est écrasé par un soleil de plomb, mais la nuit, les alizés rafraîchissent
l'atmosphère et tiennent les moustiques à distance, enfin ça dépend des
soirs…Jeudi soir on a été bouffés pas possible, j'ai du mettre un pantalon
long, des chaussettes et une chemise à manches longues et me mettre sur le
trampoline à l'avant avec un coussin pour passer une partie de la nuit !...Evidemment impossible de mettre la main sur les
moustiquaires, les bommes de OFF et autres " repellent "… tout est
rangé quelque part mais où ? Et on ne va pas allumer la lumière pour aller les
chercher avec tous ces mosquitos autour et partout…sales bestioles !
Donc aujourd'hui départ
pour Cayo del Oeste, l'ile à l'ouest, superbe par très beau temps calme comme
en ce moment. Du coup belle traversée d'une heure sous génnacker bien gonflé.
Il y avant quand même une tente sur la plage, les gens du très beau voilier
mouillé au large que des larbins viennent ravitailler vers midi avec des
glacières…les avons-nous déranger : vers 16 heures branle bas de combat ! Deux
grosses annexes viennent tout démonter et le soir il n'y a plus personne…
La pêche s'est résumée à du
snorkeling pur et simple ! Pas de prise, ou plutôt rien qui vaille la peine,
que des perroquets et des anges, rien de mangeable …
La plupart des " cayos
" affleurent la surface de l'océan.
Leur sable d'un blanc très pur se détache sur les eaux turquoise ou
émeraude…Quelques-uns émergent en pointes rocheuses. Des bouquets de mangroves,
de cactus et de plantes sauvages ajoutent une note de vert à ces îlots arides
où les iguanes et les lézards ont élu domicile. Parfois des tortues de mer
avancent à pas lourds sur le rivage afin d'y déposer leurs œufs. Mais il
faudrait attendre 90 jours pour attendre l’éclosion !
SAMEDI
23 AOUT
Cette nuit il a plu dru !
Je n'avais même pas mis en place mes récupérateurs d'eau, c'est tellement
inhabituel ! du coup il a fallu enlever les moustiquaires que nous avions
placées sur les capots restés ouverts au dessus de notre lit pour avoir de
l'air vu le calme plat et l'absence de vent, il y a bien des petits
ventilateurs à chaque tête de lit mais cela fait quand même un bruit de
fond…L'averse est vite passée et nous nous sommes vite rendormis -
Ce matin j'ai mis en route
les " Weather fax " sur SailMail
pour voir s'il n'y avait pas de formation inquiétante à redouter sur
l'Atlantique, d'autant qu'hier soir lors de mon fameux créneau horaire de
d'habitude, ça ne donnait pas bien et je n'ai pas pu recevoir mes messages,
dont le fichier Grib pour la zone d'ici auquel je me suis abonnée sur SailMail
: les cartes sont bonnes, et en qualité graphique et en prévision donc TVB, et
surtout pour ces fax je ne suis pas limitée à 10 minutes par jour comme pour
les mails - j'ai même eu la photo satellite du jour : il semble qu'il y ai une
formation cyclonique actuellement au nord de Cuba, c'est sans doute cela dont
nous avons eu la traîne ces deux derniers jours
Frégates, fous ("
red-foot bobbies "), ibis rouges et hérons
abondent ici : La plus grande population ailée réside dans l'ouest de
l'archipel et une multitude de goélands nichent quant à eux au nord.
Les bancs de poissons
perroquets couleur arc-en-ciel, les anges de mer bleu roi, les hérissons de mer
à l'apparence bouffie et les sveltes poissons trompette font la joie des
amateurs de plongée. Sans compter les nombreux mollusques, éponges, oursins et
toutes sortes de coraux, dont la gorgone. A l'occasion on peut apercevoir un
barracuda ou une murène…
Ces paysages silencieux
sont des oasis de paix. Parfois, on
peut voir quelques voiliers passer au large, lentement, suivant le rythme des
vents doux de ces derniers jours. Un
après-midi nous décidons de faire une promenade sur la plage. Nous sommes attirés par le sable blond près
de la rive sur lequel se prélassent des étoiles de mer. Elles sont nombreuses car le milieu est
propice à leur présence avec ces herbages
au fond de la mer à quelques dizaines de mètres du rivage et ce sable
qui les attirent en promenade. C'est
toujours avec grand plaisir que nous prenons le temps de les admirer…
Mon plaisir est décuplé
avec la découverte de " Sand dollars " sur le bord de la plage et
dont j'aime faire cueillette abondamment pour ma collection. Ces
fragiles " Sand dollars ", véritable beauté de la nature, sont sans vie lors de la découverte et feront
de jolis ornements de décoration selon ma fantaisie...
Je n'ai pu résister à
l'envie d'y ajouter ma découverte sur la
plage de trois " crown conchs " ces coquillages si élégants…
La plupart du temps, nous
sommes tout seuls à admirer tant de splendeurs. Seuls ? Non, bien sûr, ici nous
sommes dans le domaine réservé des dauphins. Ils sont des centaines, et de
temps en temps, ils vous font les honneurs de votre étrave…Souvent ils nous
accompagnent. Ils nagent sous la coque, d'autres restent à côté. Ils sautent
par-dessus le sommet des vagues, puis replongent dans le creux de la vague
suivante. Quand ils sortent la tête de l'eau, ils me regardent avec l'air de
dire : " salut ma poule ! Ça fait longtemps qu'on n'a vu personne par ici
! ". Depuis l'arrière du bateau je vois leurs corps métalliques briller
dans la lumière blanche du soleil…
Samedi
23 Aout
Le temps passe vite à
passer nos journées en compagnie de la faune des Aves. En me baladant sur la grande plage de Caya del
Oeste j'ai découvert quatre traces de tortues venues pondre pendant la nuit. Mais
il faudrait rester 90 jours de plus afin de voir les bébés tortues sortir du
sable…l'année prochaine peut-être ?
dimanche 24
Ce soir le coucher de
soleil est une fois de plus époustouflant…orange vif, masqué par un horizon
très nuageux, les nuages prenant presque la forme de silhouettes…
P.S. on a vu qu'une tempête
tropicale FOUR (4) était au dessus du
Cuba et Haïti : nous en avons eu la
"queue" par les grands calmes du milieu de semaine et maintenant du
vent car nous sommes sur sa même longitude...TVB
Aux Avès, archipel couvert
d'oiseaux comme son nom l'indique, les pêches journalières sont belles = déjà
16 bêtes à cornes ! Heureusement j'ai un bon frigo, et quand le congèl sera
plein on fera des bocaux…Toutes ces iles valent vraiment le coup d'œil et le
site est magnifique, la mer est d'un bleu translucide, c'est aussi le refuge
des pélicans, installés sur le dôme
d'une pépite rocailleuse et scrutant l'horizon. Chaque jour nous nous rendons
dans la mangrove en annexe à la rame. Ils sont tolérants et nous laissent les observer
tranquillement. Nous découvrons que les bébés naissent gris terne et presque
nus. Puis très vite ils deviennent blancs, leurs plumes duveteuses les font
ressembler à une peluche adorable. Pendant leur adolescence et jusqu'à l'âge de
trois ans, ils sont bruns au bec noir et leurs pattes sont couleur crème. Les
adultes ont deux robes totalement différentes selon la phase de mue dans
laquelle ils se trouvent. Les jeunes adultes ont le dos brun, le coup est
couleur café au lait, le dessous de queue est blanc, le bec bleu avec des
fossettes roses et les pieds rouges. Les adultes accomplis sont tout blanc, ils
ont le bout des ailes noir, le bec et les pattes sont identiques aux jeunes
adultes précités, le dessus de la tête a une teinte légèrement crème (ils ont
des airs de ressemblance avec les fous du Cap.
Sur, l'île toute proche
d'Isla Oeste, les pélicans, sans doute encouragés par la frénésie reproductive
de leurs cousins fous se sont mis à nicher eux aussi. Leurs bébés naissent
également tout blanc. Ces enfants là, n'ont rien de la peluche toute ronde et
douillette des fous. Ils sont tout dégingandés, comme gênés de leur long bec
qui dépasse du nid. Et puis, si les parents pélicans sont d'une grande
discrétion et n'émettent jamais aucun son, c'est que dans leur prime jeunesse
ils se sont exprimés pour tout le restant de leur vie! Bon Dieu que c'est
bruyant que ces bébés-là ! Ils piaillent sans arrêt. Nuit et jour... Mais les
parents, stoïques, veillent leur chère progéniture. Dès qu'elle s'envole du
nid, elle redevient sage. Et là, ils nous donnent l'occasion d'assister à une
leçon de pêche. Non loin de nous, à quelques mètres, ils sont trois, un jeune
et deux adultes. Ils se lancent dans un ballet étrange et répétitif. Ils
s'envolent ensemble et montent à 6 ou 10 mètres. Puis, ils s'abattent sur l'eau
au même moment. Les deux adultes ceinturent le jeune. Ils décollent à nouveau
et refondent sur l'eau...Ces figures de style maintes fois répétées assurent
une synchronie parfaite. Un spectacle inouï sans entracte ! Papa et Maman
Pélican apprennent à leur cher enfant à se débrouiller seul. Des parents
extraordinaires ! Tout se fait par mimétisme ! Pas un bruit, pas un éclat de
voix, un apprentissage en douceur, une leçon de la vie répétée chaque jour et
jusqu'à ce que le juvénile se brouille seul.
MARDI 26
Les infos météo m'ont
montré ce matin que la tempête tropicale n°4 s'était renforcée pour devenir le
cyclone "Cristobal" au-dessus de Cuba et à l'est de la Floride, donc loin--> donc c'est le
"frère" de notre grosse "Bertha" de début Aout = on a bien
fait de descendre ici...les effets se sont fait sentir par des vents de 20 à 25
nœuds qui nous ont conduit à changer de mouillage pour aller dans le lagon d'un
autre atoll mieux abrité. Donc TVB - j'apprécie d'avoir ce nouvel outil
SailMail qui outre les fichiers Grib me donnent aussi les Weather fax = génial
-
Ce matin le ciel ressemble
à une carte postale - des nuages de teinte pastel foncé sur un fond de ciel qui
éclaircit dans les bleus - le ciel était dégagé comme jamais, tendu d'un dais
délicat d'étoiles scintillantes…Ce matin au lever du soleil le ciel a viré au rose à l'ouest, et, vers
l'est, une lueur orange saisissante donnait l'impression d'un million de
trésors surgissant de nuages épars…ces nuages étaient eux-mêmes en suspens,
comme disposés dans le ciel tout exprès…ils s'étageaient en plusieurs couches
et je n'ai pas pu m'empêcher d'imaginer des villes et des villages dissimulés
dedans…c'est vraiment tellement beau… j'ai contemplé ça, émerveillée…j'avais
les larmes aux yeux devant le spectacle de cette beauté si intense et qui me
laissait interdite, un spectacle qui à cette seconde n'avait pour seuls
spectateurs que le soleil qui se levait et moi… Ce magnifique paysage marin orange du
lever du soleil rien que pour moi, et avec la texture des vagues, la surface de
l'eau était si délicatement ciselée…complètement époustouflant… Pourtant hier
soir deux heures après le début du coucher du soleil les nuages se sont
amoncelés et subitement nous avons été entourés par un groupe de ces nuages à
l'air particulièrement hideux : plus ces nuages se rapprochaient et plus le
vent forcissait !d'un nuage à l'autre il tournait de 90° ! Chaque nuage avait
son vent propre ! Qu’est-ce que ça annonce ?
MERCREDI 27
Aujourd'hui est un jour
pluvieux. Les grains se succèdent et c'est tant mieux : on en avait bien besoin. ! Ces couleurs (ou plutôt ce
manque de couleur, devrais je dire) font que j'ai l'impression d'être sur une
autre planète… Nous passons la journée tranquilles : sieste, baignades,
lecture, films… ... Et pour couronner le tout, le ciel est complètement voilé
par des nuages gris. Le soleil a eu beaucoup de mal à faire son apparition. Du
coup journée cuisine : un gros pain aux raisins, une quiche et un gâteau de
semoule au caramel! Que d'eau que d'eau = au passage d'une onde tropicale très
active à notre verticale de violents orages ont éclaté ! Éclairs, bourrasques,
vents tourbillonnants, la totale ! Ensuite de la pluie toute la journée, ce qui
a rempli mes réservoirs de récupération - d'après les fichiers météo de
nouvelles ondes approchent à raison d'une tous les trois jours = nous restons
dans notre joli lagon, bien protégés de tout = " all around shelter "
disant les Anglais.
Les Aves sont très sauvages
et désertiques, beaucoup plus que les Roques : les seuls habitants de
l’archipel sont ici des milliers d’oiseaux et parfois quelques pêcheurs locaux
qui viennent chercher refuge dans une
crique entre deux campagnes de pêche au large. Ils nous approchent avec
sourires et signes de mains amicaux et
n’ont qu’un mot à la bouche : « cigarillo, cigarillo », ils
nous demandent des cigarettes. Hélas hélas nous ne fumons pas, mais nous
parvenons à leur échanger des piles ou de vieilles palmes contre crevettes et crustacés.
La navigation au long cours
nous ramène vers une vie plus primitive où le troc garde une place importante.
Les dollars et les euros peuvent marcher sans doute dans bien des occasions mais ils ne sont pas toujours
nécessaires ou adéquats ! ici il n’y a pas une boutique où les
dépenser ! Alors quelques bouteilles d’alcool (bon marché en plus) quelques
paquets de cigarettes peuvent être une
précieuse monnaie d’échange. Les causes de tous les vices sont les meilleures
monnaies d’ échange !...mais attention : il ne faut pas que cela
tourne à une relation « tiers-mondiste »…du style « le pauvre noir
qui mendie et le riche blanc qui donne »…Non Non. On peut aussi donner du
lait, du riz ou des vêtements par exemple.
Jeudi 28 août 2014
Le soleil s'est à nouveau
montré et l'eau bleue miroite, dans un contraste saisissant avec la crête des
vagues qui se brisent dans un bouillonnement blanc là-bas sur la barrière
corallienne…Au programme : pêche sous-marine et photos des oiseaux.
Jean va bientôt tout avoir piqué toutes les bêtes cornes présentes sur
le site d'ici peu...
L’archipel des Avès ressemble un peu aux Roques mais plus sauvage,
un peu plus de végétation et d'oiseaux, pélicans, sternes et fous de Bassan.
Ile au vent (Barlovento) peu accueillante avec de nombreuses épaves et un
rivage de débris de corail mort jonché de détritus plastique.
Vendredi 29 Aout
Le soleil s'est montré
aujourd'hui et l'eau bleue miroite sur notre lagon perso, dans un contraste
saisissant avec la crête des vagues qui se brisent dans un bouillonnement blanc
là-bas sur la barrière corallienne…Au programme : pêche sous-marine et photos
des oiseaux. Nous sommes dans un mouillage très populeux… Imaginez l'enfer !
Dès l'aurore, les pélicans
bruns plongent si près de nous que nous craignons parfois qu'ils se heurtent à
la coque. Ils se servent dans le garde-manger que constitue l'environnement
proche du bateau. Sous Afrodite des centaines de petits poissons viennent
trouver abri. Les cormorans passent sous le bateau en apnée et se servent au
passage. Certains matins, ce petit peuple est accompagné de dauphins qui
poussent les bancs de poissons devant eux, ils n'hésitent pas à tourner, eux
aussi, autour de notre Afrodite. Très haut, au-dessus du mât, des balbuzards
pêcheurs et des samuros rodent en quête de leur nourriture. Sur le pont,
plusieurs variétés d'hirondelles s'habituent à notre présence et au bout de
quelques jours auscultent le gréement à la recherche de l'endroit propice pour
y établir leur nid… Que vous dire ? Cette petite faune a peut-être confondu
notre Afrodite avec l'arche de Noé ? Bonne pêche : 6 (ce qui fait un total de
38 à ce jour…)
L'archipel est bordé d'une
mangrove épaisse. Nous sommes hypnotisés par des paysages immenses, où la main
de l'homme n'a rien dégradé. Tout est intact, comme au premier jour. Ces atolls
constituent d'admirables abris naturels contre les éléments. Lorsque nous
pénétrons dans la mangrove, nous ne nous trouvons plus tout à fait dans le
domaine maritime et pas encore dans celui de la terre ferme.
MOUILLAGE BARLOVENTO
LAT.11°56.751N LONG. 067°26.277W.
Beau temps et eaux
transparentes.
SAMEDI 30 AOUT
Jour de fête…Aujourd'hui
est jour de fête à bord de l'Afrodite ! C’est l'anniversaire du Cap' ! Pains de
poisson, langoustes, deux gâteaux…Il fait un temps superbe, avec un grand ciel
bleu, quelques nuages typiques des Antilles, une brise légère. Parfait... tout
est parfait… Nous avons choisi un beau carré de sable pour planter l'ancre, et
nous voici, dans une belle piscine aux eaux claires! NOTRE piscine…nous avons
jeté l’ancre sous l’œil indifférent d’un
vieux pélican placide…
Des cormorans, les ailes
déployées au soleil pour les faire sécher, nous regardaient avec une stupidité
déconcertante…
Entente à bord = cette
séquence a été inspirée par la patronne de l'Internet Café de Bequia qui nous
posait la question suivante : " After one year on the boat, you still talk
to each other ? " Hé oui, on se cause toujours… Et vu le débit de la
skippette face au thésard taiseux, nous avons encore de beaux jours devant nous
! Aïe, Aïe, Aïe !!! Plus sérieusement : un couple à bord d'un bateau devient un
équipage, c'est-à-dire qu'une interdépendance se crée : une vie en commun
autour d'une passion commune…
DIMANCHE 31
Nous sommes là où le temps
qu'il fait et le temps qui passe s'égalisent. Il n'y a que le doux mouvement de
l'air pour faire miroiter la surface de l'eau. C'est dans l'île tropicale que
l'eau chaude prend sa valeur miraculeuse. Depuis notre couchette, j'entends la
mer clapoter de l'autre côté de la coque. Je sais qu'elle est là et son chant,
seul, parvient à me faire quitter le livre ou le sommeil où je tentais de
m'absorber. Magie des eaux chaudes qui invitent à nager libre, ondoyant comme
une algue, elles permettent un instant de croire le corps soluble. C'est là que
je préfère mouiller pour découvrir, paupières mi- closes, main en visière au
dessus des yeux, la frange de cocotiers qui se balancent dans le lointain….
Sommes partis à la pêche
sur le reef ce matin mais c'était décevant (seulement une blanche !...) puis
allés prendre le café sur SALACIA, un Lévrier des Mers de 15 mètres avec
Olivier (de Concarneau) et Viviana (du Panama), ils sont arrivés vendredi matin
au moment du gros grain et nous avons fait connaissance rapidement.
Aujourd’hui encore bonne
pêche = +5 = 43 depuis trois semaines - Beaucoup de vent, des ondes tous les trois jours avec pluies et grains, sinon
TVB et on se régale- je surveille bien
la météo grâce à SailMail
LUNDI 1er SEPTEMBRE
Déjà Septembre…Aux Antilles
où le marin flirte avec les îles comme le papillon virevolte de fleur en fleur.
Chaque escale remplit l'âme de souvenirs en 3D. Des kilomètres d'images se
déroulent dans la mémoire comme un gigantesque diaporama. Rien que pour cela,
le voyage vaut la peine d'être vécu…
L'alizé est un vent gentil
et plus ou moins régulier, de dominance Est, agrémenté de nord soutenu ou de
sud farouche. Il dépasse rarement 35 nœuds sous grain. Exceptionnellement des
vents autour de 40 nœuds, mais ce sont des passades, très vite réprimées par la
régularité légendaire des alizés. En moyenne, on trouve plutôt des forces
Beaufort comprises entre 3 et 5 (6 pour les rafales).
Mardi 2 septembre
La plupart de nos plongées
sont vraiment féériques, tant par la densité de la faune rencontrée que par
l'atmosphère de cette mer inondée par les rayons du soleil au zénith…
Fondus, intégrés dans ce
monde, acceptés par les poissons - qui n'ont jamais vu un fusil de chasse
sous-marine de leur vie - et qui se laissent approcher à une distance de bras,
nous craignons presque de troubler la quiétude et l'harmonie qui se
dégagent ici…entourés de
poisson-chirurgiens (attention à leur fameux scalpel dorsal) et d'un nuage de
bébés chromis, trois raies mantas et des barracudas nagent au-dessus des coraux
en forme de cerveaux ou de cornes d'élan…
Des mérous et des
perroquets déambulent aussi tranquillement, tandis que des petits poissons
" papillon ", plats et merveilleusement colorés, créent une note
d'enjouement et de gaieté.
Tout au fond, bien dissimulés
sous des rochers, des langoustes - des bêtes à cornes - alignées comme à la
parade, ne savant pas encore qu'elles vont finir à la casserole !...
Mercredi 3
Jamais archipel ne portera
mieux son nom. Nous sommes au cœur de l'asile des fous à pattes rouges, les
fameux « red-foot bobbies ». Une famille de plus d'un millier
d'individus règne sur la mangrove. Si les fous à pattes rouges sont
innombrables, on trouve aux Aves d'autres espèces d'oiseaux. Outre les
hirondelles et les pélicans on peut observer de nombreuses espèces de sternes
ainsi qu'une panoplie presque illimitée d'échassiers de rivages de toutes
tailles : hérons Goliath, hérons verts et grands hérons ainsi que des
bécasseaux dont les chevaliers gambettes, les chevaliers criards et autres pluviers...
Dans cette nature simple et généreuse, loin du monde des hommes, nous avons la
chance d'être admis au jardin des dauphins. Ils nous acceptent parmi eux pour
une baignade inoubliable. Vous l'avez compris, nous passons un séjour au cœur
d'îles et d'îlots inhabités protégés de barrières de corail où il fait bon
vivre, où personne ne vient jamais, sauf quelques navigateurs amoureux de
grands espaces et de nature à l'état sauvage.
Comment vous dire? Les
scientifiques se sont penchés récemment sur la localisation du paradis
terrestre. Ont-ils cherché du côté des Aves?
Mouillage à l'Ile à l'Ouest
Cette île-ci est toute
plate, moins colonisée par les oiseaux, et donc plus calme…
Elle est recouverte
d'herbes rases.
De vagues monticules
forment de petits tertres et on ne sait si ce sont des tombes ou des oratoires,
en tout cas ils sont surmontés d'une croix…ou bien s’agit-il d’amers pour les
pêcheurs ?
L'île d'à-côté se perd dans
l'immensité vert jade qui la prolonge…
C'est désert, oublié, âpre, presque nu,
C'est très beau
La barrière corallienne, à
cet endroit, est faite de grandes pierres tabulaires entrecoupées de trous et
de tranchées, véritables canyons, dans lesquels on se glisse avec nos palmes et
nos masques, absorbés par l e fluide turquoise, à la découverte de failles et
de niches dont les occupants ouvrent de grands yeux ronds - surtout les diodons
au regard si doux - en nous voyant défiler à leur porte au gré du courant… ils
n'ont pas à se méfier de nous eux, par contre, si nous voyons dépasser des
antennes, leur propriétaire a du souci à se faire !...
Mon premier pain de
Septembre
Je vais maintenant pétrir
mon pain. Le pain! Ah! Le Pain... Ce noble aliment que beaucoup décrient et qui
est pourtant, depuis que l'homme est homme, la nourriture de base par
excellence. Tant de symboles y sont rattachés que nous parlons de gagner notre
pain, d'avoir du pain sur la planche, de manger notre pain blanc... ou notre
pain noir, d'acquérir ceci ou cela pour une bouchée de pain, d'être triste
comme un jour sans pain, mais que nous oublions le Pain. Nous perdons la
mémoire du vrai Pain, de sa valeur et de toute sa saveur.
Au bulletin de ce matin "there is no cyclone activity in the
atlantic basin"! ouf...
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VENDREDI 5 SEPTEMBRE
Je
n’arrête pas de vous parler de cocotiers, d’îles paradisiaques et de couleurs
d’eau de lagon, bercée par mes nombreuses lectures, je ne suis pas déçue…
Nous sommes entre deux mondes, au royaume des pélicans, des perroquets et des « brrrrr-plouf » -
Le « brrrrr-plouf » est un animal
qui possède certains talents dramatiques… En effet, l’on raconte beaucoup de
choses au sujet du Venezuela. Entre autre, un guide mentionne un danger bien
précis, celui causé par les morsures de chauve-souris vampires… enragées ! Ne
riez pas ! C’est véridique ! Ce n’est pas un sketch de Jean-Marie
Bigard !! Notre guide de navigation
décrit même les attaques de plaisanciers par ces adorables bestioles qui
opèrent de nuit, en se faufilant par les hublots. Leur salive contient un
anesthésiant, elle est peu coagulante, les victimes de ces agressions nocturnes
se retrouvent, ainsi, pleine de sang au petit matin, avec, en prime, la peur
d’avoir contracté la rage ! La tête farcie d’histoires hallucinantes, je me
retrouve, une nuit, moi, pauvre chose apeurée au milieu de l’eau sombre par
lune noire à entendre des bruits tout autour du bateau. Les bruits sourds et
inquiétants d’animaux qui volent au ras de l’eau et qui s’y cassent la figure.
Cela fait brrrrr-plouf ! Le capitaine, effaré par mes bêtises, lève les yeux au
ciel, puis il tente de me raisonner… Rien n’y fait, tout est comme écrit dans
le guide ! Finalement de guerre lasse, il s’arme d’une lampe et éclaire de
pauvres poissons ailés qui tentent de fuir leurs prédateurs par les airs. Au
bout de quelques mètres la pauvre bête retombe, exténuée, dans l’eau… Peu
fière, j’observe quelques spécimens, en me promettant de ne plus me fier aux
rumeurs !...
SAMEDI 6 septembre
OK, tout n’est pas rose au pays de Neptune, et lorsque je
vois le Cap partir à fond de cale et revenir muni de sa caisse à outils, c’est
qu’il se prépare quelques « merditas » (pardonnez cette expression quelque peu
triviale, mais à l’approche du continent Sud Américain, il nous faut nous
mettre au diapason)… Hé oui, la caisse à outils est la digne et fidèle amie des
capitaines qui filent au vent. Quel que soit le bateau, neuf ou d’un âge
certain, l’air salin, les conditions générales qu’engendrent la mer
occasionnent une multitude de petites pannes. Elles ne sont pas dramatiques en
elles-mêmes, mais parviennent à user les nerfs les moins aguerris… Il y a des
saisons de pannes… Toutes sont différentes selon les bateaux… Ce sont, en
quelque sorte, des séries qui se déclarent à bord de chaque bateau en leur
temps. Puis, qui petit à petit trouvent solution. Pour laisser l’équipage
satisfait et libre de trouver du temps à ne rien faire, avant… la prochaine
panne…
Toujours côté technique, nous avons choisi l’énergie
solaire. Non polluante, absolument insonore (en comparaison avec les
générateurs ou les éoliennes), cette énergie est idéale. Il ne faut pas hésiter
à abuser des panneaux solaires. Ils trouvent toujours leur place sur un bateau
: sur le pont, sur le toit
du cockpit, sur le portique arrière. Toujours dans le catalogue des options,
nous sommes très contents de notre désalinisateur, même si aux Antilles il est toujours possible de faire le
plein grâce au ciel particulièrement généreux en ce qui concerne l’approvisionnement
en eau potable.
DIMANCHE 7
Et si parfois je m’interroge sur le bien-fondé d’un tel
voyage ou mode de vie, en voyant le réel bonheur du Capitaine, toute son
attitude si rassurante, sont une confirmation ce c’est le bon choix…Tous les deux, sur notre bateau-maison, tous les deux sur notre voilier, notre foyer pour
longtemps et où nous vivons dans une solitude et une intimité jamais égalées.
J'aime
la mer...et
dans ma tête, il y a toujours eu le bruit des vagues, le
grondement des tempêtes ou la chanson du
vent. Et la magie du rêve, vers des
horizons lointains, des îles désertes, des rivages inconnus où l’écume brillante joue sur le sable.
Rêve...
rêve... rêve...
Et le
rêve est devenu réalité?
Ah! Je voudrais vous dire comme il est extraordinaire de
pouvoir jeter un regard circulaire
autour de soi et de ne voir que... l'horizon. On se croirait au centre d'un
immense plateau, au centre d'un rond parfait. Rien n'accroche l'œil, rien ne heurte, on a l'impression d'être dans
un autre monde, proche, très proche de la
perfection.
Cet
apaisement indéfinissable que procure le
grand large.
Le bateau : c'est le cocon retrouvé, une forme de vie très
casanière en fait, bien que l'on coure
les océans : un petit univers clos où les préoccupations sont différentes, où, surtout, la notion de « temps »
prend toute sa valeur. Ici, pas d'impératif
d'horaire. Peut-être est-ce cela, la liberté?
LUNDI
8 SEPTEMBRE
METEO DE CE LUNDI :
BEAUCOUP DE VENT = 30 NŒUDS !
En préparation : cyclone
« EDOUARD » au Cap Vert = à surveiller d’ici les prochaines 72 heures
mais nous ne sommes pas inquiets
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MARDI 9
Aux
Avès de Barlovento c’est tous les jours une leçon d’ornithologie et de sciences
naturelles !
Il
faut aller dans les sinuosités de la mangrove en annexe, mais à la rame, en
silence, pour découvrir le royaume des oiseaux…Des volatiles partout sur les
branches ! Arrivés à la hauteur des premiers arbres on découvre, avec
délectation, que la mangrove est sillonnée de bras et de recoins que l’on peut
parcourir, moteur coupé, en silence, religieusement…L’annexe glisse entre les
troncs morts pour parvenir dans une sorte de petit étang cerné d’arbres. On y
voit des oiseaux de la même famille à différents stades d’évolution ; Ce
sont des fous à pieds rouges, les « red-foot bobbies », qui nichent
là, contrairement à leurs cousins les fous bruns qui eux nichent au sol ;
Adultes, ils sont soit blancs avec le bord des ailes noir (bec bleu et dessous
des ailes bleu clair), soit marron avec le ventre clair. Beaucoup de nids,
faits d’un ramassis de branchages et d’algues, dans lesquels sont couvés des
petits recouverts d’un duvet blanc, petites boules de peluche…c’est joli comme
tout…A trois mois ils seront en âge de voler mais ce sont de gros paresseux qui
restent longtemps au nid, leur plumage devenant
progressivement brun.
Nous
amarrons le canot à une grosse branche et restons observer sans mot dire…
Tous
ces volatiles, de la même famille, peuvent être de toutes les couleurs !
Mais, attention : ils n’apprécient pas notre intrusion, mais alors pas du
tout du tout ! Et ils ont tendance à faire des vols planés au-dessus de
nous, piquant sur nos cranes en piaulant comme des déments ! A l’aide de
la rame il faut tenir à distance les plus vindicatifs, outrés du sans-gêne des
nouveaux arrivants !
Mais
que de belles photos ! Hallucinant !
C‘est
ici que Alfred aurait dû tourner son film !
MERCREDI 10
SEPTEMBRE
Le
vent souffle à plus de 30 nœuds depuis
deux jours, ce qui est tout à fait
inhabituel à cette saison ici, c’est tout juste si l’on peut se baigner !
et pas question d’aller à la pêche ! ni
d’aller louvoyer entre les pâtés de corail. A vrai dire ils sont espacés et
bien visibles, car presque tous affleurent mais il y a vraiment trop de
vent !
Je
reste très attentive à la météo : Weather Fax et fichiers Grib.
J’ai
nommée notre baie « Baie des mangroves » car calme, avec son petit
bassin de lagon, bien protégé par un petit îlot soudé à la terre. Nous sommes
seuls, l’endroit semble rêvé... Devant nous, un rocher aux apparences
bien ordinaires qui cache précieusement une bordure de corail habitée par de
jolis poissons tropicaux
JEUDI
11 SEPTEMBRE 2014 = HEUREUX ANNIVERSAIRE BARBARA, LA SEXY SEXA !
MOUILLAGE
BARLOVENTO LAT.11°56.751N LONG. 067°26.277W.
Nous allons faire un tour à
l'intérieur de l'île, presque impénétrable à cause des buissons et de petites
bêtes piquantes, et nous marchons jusqu'à la pointe sud (environ 300 m) en
admirant les couleurs du lagon, les lézards noirs et quelques crabes des sables
couleur sable.
Mouillage des monuments de bateaux ou
« mausolée »
Position GPS approximative : 11° 56. N 67°25.6W
Position GPS approximative : 11° 56. N 67°25.6W
En venant du mouillage sous le phare, il faut se
faufiler dans un couloir bordé de 2 récifs. À tribord on a le récif qui fait la
pointe de la mangrove du premier mouillage, à bâbord, le récif d'entrée du
second mouillage. Nous logeons dans une vaste zone comprise entre des récifs à
bâbord et de grands palétuviers sur tribord. Attention au centre du mouillage
il y a une remontée de fond de sable. Par temps clair et aux bonnes heures, il
est facile de s'y retrouver.
Il n'y a pas de plage où se balader. Par contre, à
l'extrême Sud-est du mouillage, lorsqu'on longe la mangrove en annexe, on
découvre un minuscule tunnel sous les palétuviers. Il se repère au courant
d'eau qui s'inverse à cet endroit là. Au fond du tunnel, une plage
microscopique accueille notre annexe. En mettant pied à terre et en se dirigeant
plein Sud on trouve ce que nous appelons "le monument des noms de
bateaux" ou « mausolée » à chaque équipage de passage
dans les Aves peut laisser un bout de bois gravé, une pierre peinte... avec le
nom de son bateau et les initiales de l'équipage. Libre cours à l'imagination
de chacun, pour laisser une trace de son passage...Je retrouve ma
« marque » d’Eolis (celle qui date de 2008, pas les autres, effacées
sans doute) et place la nouvelle, gravée sur un morceau de bois flotté et
portant le nom d’AFRODITE 2014. Cela me rappelle les fresques peintes sur les
quais du port de Horta aux Açores ?
Le coucher de soleil ce soir est encore somptueux: le ciel est
rouge et noir, la mer mauve …Le soleil couchant se noie dans les flots, jetant
des ombres vermeilles dans le lagon qui en scintille de bonheur, et nous avec…
La sexy sexa va faire de beaux rêves….
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Les pélicans (qui ne sont
pas des poètes) plongent quant à eux sans relâche dans la mer, pendant qu'à
l'inverse beaucoup de poissons essaient de voler ! En faisant des
« brrrrr-plouf » ! Ils s'élèvent au dessus de l'eau et plongent de très haut,
aussitôt assaillis par les mouettes qui essaient de leur arracher le poisson du
bec !
VENDREDI 12
SEPTEMBRE
Le
temps passe vite à passer nos journées en compagnie de la faune des Aves. En me
baladant sur la grande plage de Caya del Oeste j’ai découvert quatre traces de
tortues venues pondre pendant la nuit. Mis il faudrait rester 90 jours de
plus afin de voir les bébés tortues sortir du sable…l’année prochaine
peut-être ? Ce soir à l’ouest l’azur du ciel a évolué peu à peu vers une
palette de délicates couleurs pastel…l’eau était lisse comme du verre…
Et ce matin,
dans le magnifique lever de soleil, de petits nuages faisaient des dessins sur le ciel orangé et la mer était
d’huile…l’un avait même une forme qui n’aurait pas déplu à Walt Disney !
Le soleil illumine encore le ciel bleu pâle…La vie renferme beaucoup de
trésors, ne l’oublions pas…Prenons le temps de regarder, le temps de
s’imprégner de tout, le temps de graver chaque scène dans sa mémoire, parce
qu’aucune caméra ne rendra justice à toutes ces visions…
SAMEDI 13
Il
existe un petit passage bien caché dans un creux de la mangrove qui permet de
débarquer en annexe sur l’Isla Sur, et, par un petit chemin, on parvient à un
drôle de tas de cailloux et de galets, arrangés avec soin par les plaisanciers
de passage, qui pour la plupart y ont inscrit le nom de leur bateau et la date
de leur escale afin de laisser une trace de leur visite ici - comme à Horta aux
Açores, c’est une tradition…
D’autres
figures « artistiques » se dressent à côté, moins
significatives : ce sont des enfants qui ont récolté des tas de tongs
échouées sur la grève ou de sandales qui traînaient par là, mis des galets
dedans et inventer des œuvres d’art tout à fait « primitives »…
C’est
sympa comme tout et très rigolo ! cela fait penser à une sorte de
sanctuaire…comme des ex-voto… les « artistes » de passage ont laissé
libre cours à leur imagination pour créer des sculptures en utilisant la forme
des galets trouvés sur place et, de loin, cela ressemble vraiment à un village
entier en miniature avec des personnages tout droit sortis de contes de fée…
Puis, examiné un par un, on peut imaginer ce à quoi la personne pensait lors de
sa création… chacune d’entre elles raconte une histoire…Ici des sorciers par
exemple, avec un chapeau de Merlin sur la tête ! Assis sur un rocher plat face à la mer…Là, une table dressée,
avec des assiettes, et même un poisson desséché au milieu en guise de plat
principal…Plus loin on dirait une mère et son bébé…
Il
faut le voir pour le croire !
La
balade vaut le coup et on est bien sûr
tenté d’en faire autant, de rajouter « sa » pierre à cet édifice…de
marquer son passage ! Aussi n’avons-nous pas manqué d’y laisser
« notre caillou », un symbole pour se souvenir que nous aussi, un
jour, en ce lieu, nous avons été envoûtés par cette île enchantée…
Dimanche 14
SEPTEMBRE
ISLA
SUR A BARLOVENTO 11°56. N 67° 27 W
L’échafaudage métallique
rouge et blanc du phare (F.8.5 S. 12 milles) bien distinct, se dresse au début
d’une lagune de terre qui se présente comme une longue jetée naturelle
prolongeant l’île. Des mangroves géantes sont groupées, bouquets énormes qui
montent à 20 mètres et dont les branches forment des pentes évasées jusqu’à
l’eau.
Des îles de verdure qui
semblent flotter en enfermant comme un lac intérieur. …
Une plage de sable sur notre
droite dont émergent des grands troncs aux branches mortes.
L’ensemble forme une baie bien abritée avec une
profondeur largement suffisante pour être proche du bord. Nous mouillons
par 6 mètres de fond, nous mouillons long, non pour la sécurité mais pour
qu’elle se nettoie en raguant sur le fond de sable !
Le matin au lever du soleil,
les arbres sont plein de vie. Des milliers de fous qui nichent dans leur
feuillage s’envolent, virent et rasent l’eau, jacassant bruyamment, et
commencent à pêcher : n’oublions pas que « los Aves » signifie « les Oiseaux »
!
Ce
qui frappe en arrivant sur l’Isla Sur
de Barlovento (« au vent »), mis à part le derrick cassé de l’ancien
phare qui gît au pied du nouveau phare, c’est la mangrove, une gigantesque
mangrove, vraiment énorme, qui enserre dans son écrin le mouillage le plus
fréquenté du petit archipel, le premier lorsqu’on arrive. Ce mouillage est
entouré de grands arbres enchevêtrés les uns dans les autres, et l’on peut parcourir
cette mangrove en annexe, le moteur arrêté pour ne pas faire peur aux oiseaux
nichés dans les branches…Les arbres sont immenses, hauts d’une vingtaine de
mètres parfois, avec des troncs de 30cm de diamètre ! Sans doute l’une des
plus grandes mangroves de la Caraïbe.
Il
n’y a pas d’habitation ici, ni d’habitants donc, à part les oiseaux…
Seulement
les ruines de quelques bâtiments très rudimentaires du côté du phare ainsi
qu’une chapelle miniature comme on en trouve sur les îles de la mer Egée, avec
des images pieuses et des bougies.
La
pointe ouest est un véritable sanctuaire à oiseaux : des hérons, des fous
blancs à pattes palmées rouges, bec bleu, dessous des ailes bleu clair aussi,
des pélicans, des frégates…tout ce petit monde est joyeux comme tout, bâtit ses
nids dans les grosses branches de la mangrove en récupérant tout ce qui flotte
– algues, brindilles, lichens - et donne
un concert perpétuel !
La
mangrove s’étale de tous les côtés, totalement infranchissable…
La
mangrove, c’est l’enfer liquide des îles, ni mer, ni terre, jungle envasée
faite de boue limoneuse, d’eau épaisse et de racines inextricablement
enchevêtrées…
Un
monde de moisissure lourde, glauque, coupé du ciel par des palétuviers géants.
Côté mer, l’accès est irrémédiablement barré par un bouleversement déchiqueté
de coraux à fleur d’eau, les fameuses « patates » de corail. Quelques
mares ça et là, entièrement encerclées par l’écrin d’arbres serrés et de
buissons impénétrables… Agrippés aux
troncs des arbres, des guirlandes de fleurs à l’infini éclatent en milliers de
couleurs…
La barrière de corail
À
l’Est de Barlovento des îlots émergent et l’on peut y jeter l’ancre par beau
temps : c’est vraiment magnifique, une vraie Robinsonnade ! Des
piscines naturelles entourées de murs de corail et chaudes comme des jacuzzis !
Les plongées sur les cayes sont très belles, on y
voit de magnifiques coraux et des poissons de toutes les couleurs au milieu des
patates de corail : des « cerveaux » et « cervelets »,
des cornes de cerf et d’élan, des éponges en trompes d’éléphant, de belles
gorgones aussi…
Bilan : beaucoup de bonheur!
Naviguer au quotidien c’est rêver sa vie en reliefs et en couleurs…cela empêche la lassitude et l’habitude…deux mots qui n’existent plus pour le marin.
Nous sommes dans un autre monde…les couleurs avaient
banni le noir et le gris…seules demeuraient les teintes éclatantes, chaque jour
était un festival qui illuminait l’existence…
La mer n’est pas qu’une tache
bleue uniforme, elle use de sa palette avec virtuosité, c’est une œuvre
magistrale, éphémère, et sans cesse régénérée, qui s’offre sans compter à qui
sait l’observer et la respecter. C’est une aventure qui chaque jour se
finit en apothéose crépusculaire…les couchers de soleil sous les tropiques sont
vraiment absolument magnifiques…
« N’est-ce pas la vraie vie? »
Vous allez dire : « bof, on finit par s’en lasser! » « Non, jamais! »
Chaque coucher de soleil apporte sa magie, sa différence, c’est un moment privilégié à bord. De plus, imaginez-vous la vue, à 360°! Les pieds dans l’eau
Les sens grisés d’éclats d’écume, nous avons largué les amarres, ça valait vraiment le coup !
C’est consentir à vivre en parfaite harmonie avec son compagnon de voyage : tant que le plaisir est au bout de l’étrave, tant que la magie est au rendez-vous, on avance ! car les détails de la vie sur l’eau, le quotidien parfois fastidieux, les doutes, s’effacent devant les états de grâce…
AFRODITE est devenue notre « chez nous », entouré de la plus belle piscine du monde… même si ce temple des pénates ressemble parfois plus à un loft à bascule qu’à une villa les pieds dans l’eau, nous réalisons un voyage avec le plus extraordinaire véhicule de liberté. De mouillages rouleurs en coups de vent, de pannes en obstacles divers, l’échelle des valeurs s’ajuste…
« N’est-ce pas la vraie vie? »
Vous allez dire : « bof, on finit par s’en lasser! » « Non, jamais! »
Chaque coucher de soleil apporte sa magie, sa différence, c’est un moment privilégié à bord. De plus, imaginez-vous la vue, à 360°! Les pieds dans l’eau
Les sens grisés d’éclats d’écume, nous avons largué les amarres, ça valait vraiment le coup !
C’est consentir à vivre en parfaite harmonie avec son compagnon de voyage : tant que le plaisir est au bout de l’étrave, tant que la magie est au rendez-vous, on avance ! car les détails de la vie sur l’eau, le quotidien parfois fastidieux, les doutes, s’effacent devant les états de grâce…
AFRODITE est devenue notre « chez nous », entouré de la plus belle piscine du monde… même si ce temple des pénates ressemble parfois plus à un loft à bascule qu’à une villa les pieds dans l’eau, nous réalisons un voyage avec le plus extraordinaire véhicule de liberté. De mouillages rouleurs en coups de vent, de pannes en obstacles divers, l’échelle des valeurs s’ajuste…
13,
14, 15, 16 SEPTEMBRE
Isla Oeste
Il
y a un bon mouillage à la pointe est de
cette île en passant au sud puis à l’ouest de tous les îlots qui la débordent ;
une très jolie plage ourle la pointe est de l’île ; il n’y a pas beaucoup
de place, seulement pour deux ou trois bateaux, il vaut donc mieux y arriver le
premier ! C’est bien protégé, sauf du sud.
La
pêche y est excellente et on peut laisser les boîtes de corned-beef à fond de
cale !...
Le
nord de l’île offre également un beau mouillage avec une magnifique plage de
sable blanc tout du long, c’est vraiment superbe ! Toutefois la houle y
pénètre et peut rendre le mouillage inconfortable, surtout qu’il y a pas mal de
patates de corail. Mais l’endroit est vraiment superbe, avec de beaux
« snorkeling » et une pêche excellente
Le
temps se réduit comme peau de chagrin et il ne nous reste que quelques heures
avant de laisser derrière nous les Aves. J'avoue que mon cœur se serre et que
le retour à "la civilisation" se fait un peu à reculons. Depuis notre départ, nous avons jeté l'ancre dans
beaucoup d'endroits que l'on qualifie de paradisiaques. Je ne renie pas mon
attachement à nos premières découvertes, ni aux îles des Antilles que j'aime
profondément. Mais je dois avouer qu’avec les Roques et surtout les Aves, nous
avons découvert la tranquillité vraie, une vie simple, sans rien de plus que la
nature et les éléments...
On ne peut rester toujours
dans de tels endroits, nous avons déjà eu beaucoup de chance de pouvoir cumuler
tant de jours entre Roques et Aves.
Ainsi,
le compte à rebours a enclenché son implacable comptage, et il va bientôt
falloir partir. Pour profiter de ces derniers moments, où seul le bruissement de l'écume
sur la plage d'à côté vient souligner la paix environnante, Jean part à une
dernière pêche, il me promet du poisson pour midi…
Nous
avons bien profité de tous les mouillages de l’archipel, en voici un
résumé :
Les mouillages des Aves
Mouillages
des Aves de Barlovento
Navigation
jusqu'au mouillage sous le phare :
Position GPS : 11°56.757 N 67°26.320W
Position GPS : 11°56.757 N 67°26.320W
Pour
arriver sur Barlovento, mieux vaut choisir une journée sans grain et arriver
aux heures où le soleil est au zénith. Ceux qui viennent des Roques, partent en
général de Cayo de Agua. Il faut prendre garde a bien avoir repéré le tracé de
sortie du mouillage de Cayo de Agua. Il est délicat. Prendre garde également à
ne hisser les voiles qu'une fois sorti de la passe. Un ami s'est laissé piégé
en hissant sa grand-voile au mouillage il a été très rapidement déporté sur le
récif qui ceinture ce mouillage.
La
navigation d'une trentaine de milles se fait rapidement, poussée par les vents
et les courants. Bien souvent seul le génois ou le spi est nécessaire sur ce
parcours.
A
l'arrivée sur Barlovento, il faut prendre garde à bien arrondir la pointe du
phare, celle-ci est débordée de hauts-fonds de sable. Pour les dériveurs
intégraux il est possible de coupé au travers des hauts fonds qui parsèment le
parcours entre la pointe et le mouillage. Nous préférons jouer la sécurité.
Lorsque
la pointe du phare est débordée, nous visons l'ilot de sable qui est cerné de
récifs. Il est remarquable par une cabane de pêcheurs abandonnée dans la partie
Est de l'îlot. Nous cheminons dans les parties bleu sombre. Lorsque nous
atteignons la hauteur de l'îlot en prenant garde de laisser les récifs à
bâbord, nous piquons vers le sud, droit vers la mangrove.
Le
mouillage disposé en arc de cercle s'appuie sur la mangrove. On peut mouiller
l'ancre dans 3 à 4 mètres en approchant de la bande d'eau vert clair. Attention
cependant, les fonds remontent rapidement afin d'éviter tout problème, il faut
laisser une large bande d'eau entre la mangrove et le mouillage. On peut mouiller
tout au long de l'arc de cercle. Le meilleur abri se trouve en face de la
petite plage ceinturée d'arbres et sous le phare. Mouiller à bonne distance de
la plage (pâtés de coraux visibles) dans 3 à 4 mètres d'eau sur fond de sable.
À cet endroit-là, lorsque le vent souffle fort dehors vous serez bien abrité
des rafales et de la houle. Par contre vous ne serez pas à l'abri de l'odeur
forte de guano laissée par la colonie de fous.
Visite
de la mangrove : Entrée par la passe est qui laisse assez de fond pour les
dinghys. Nombreux méandres. Pour des informations précises sur la colonie de
fous à pattes rouges référez-vous à l'article qui leur est consacré dans le
site.
Balade
possible : Dans la partie sud-ouest de la petite plage, un chemin traverse les arbres,
il conduit à la rive au vent de Isla Sur. Possibilité de marcher sur tapis de
pourpier maritime jusqu'au phare, puis jusqu'à la pointe ouest. Par temps
calme, snorkeling sur la côte au vent.
Mouillage des monuments de bateaux ou dit
« mausolée »
Position GPS approximative : 11° 56. N 67°25.6W
Position GPS approximative : 11° 56. N 67°25.6W
En
venant du mouillage sous le phare, il faut se faufiler dans un couloir bordé de
2 récifs. À tribord vous aurez le récif qui fait la pointe de la mangrove du
premier mouillage, à bâbord, le récif d'entrée du second mouillage. Vous
logerez dans une vaste zone comprise entre des récifs à bâbord et de grands
palétuviers sur tribord. Attention au centre du mouillage il y a une remontée
de fond de sable. Par temps clair et aux bonnes heures, il est facile de s'y
retrouver.
Il
n'y a pas de plage où se balader. Par contre, à l'extrême Sud-est du mouillage,
lorsqu'on longe la mangrove en annexe, on découvre un minuscule tunnel sous les
palétuviers. Vous le repèrerez au courant d'eau qui s'inverse à cet endroit là.
Au fond du tunnel, une plage microscopique accueille votre annexe. En mettant
pied à terre et en vous dirigeant plein Sud vous trouverez ce que nous appelons
"le monument des noms de bateaux". Chaque équipage de passage dans
les Aves peut laisser un bout de bois gravé, une pierre peinte... avec le nom
de son bateau et les initiales de l'équipage. Libre cours à l'imagination de
chacun, pour laisser une trace de son passage...
Mouillage Intermédiaire entre la barrière et le
deuxième mouillage
Position GPS du mouillage : 11°56.80 N 67°25.40W
Position GPS du mouillage : 11°56.80 N 67°25.40W
Pour
pénétrer dans ce troisième mouillage, il vous faudra ressortir par où vous êtes
entrés. Ou par une passe dans le Nord Est du mouillage. Le mieux est d'aller
repérer en annexe avant.
Le
plus simple est de passer au nord de l'ilot où se trouve la cabane de pêcheurs.
Mis à part deux récifs à l'Est de la cabane, qu'il faut laisser sur tribord, la
voie est libre. Se diriger dans l'Est-Sud-est vers la barrière de corail. (Cap
115 à 125). Le point d'entrée du couloir qui mène au troisième mouillage est au
point GPS 11° 57 229 N 67°25.293W. A ce point, il faut quasiment virer à angle
droit, et prendre un cap 240. Vous aurez à bâbord et à tribord du récif, il
suffit de rester dans l'eau bleu sombre. A la sortie du chenal vous serez au
point 11°56.989N 67°25.426W.
A
partir de ce point vous pouvez vous diriger vers le Sud et trouver votre aire
de mouillage face à la barrière de corail et le long de la mangrove. Ce
mouillage est abrité de la houle, mais n'est pas à l'abri d'un fort clapot
lorsque les alizés sont soutenus. Mouillage de bonne tenue.
Mouillage au bord de la barrière principale.
Position GPS du mouillage : 11°56.866N 67°25.039W
Position GPS du mouillage : 11°56.866N 67°25.039W
Pour
accéder à ce mouillage où l'eau est couleur piscine et si difficile d'accès que
vous vous y retrouverez seuls le plus souvent, il faut suivre les points GPS
que je vous donne. Un tour de reconnaissance en annexe vous évitera de tomber
dans l'écueil.
L'entrée
du premier chenal est au 11°56.950N 67°25.394W. Le chenal n'est pas épais et on
a la sensation d'être dans un labyrinthe, mais il y a assez d'eau (de 4 à 5
mètres) à tous les points GPS que je vous communique.
Il suffit de les suivre en
négociant un premier coude sur tribord, au point :
11° 56.975N 67°25.250W.
11° 56.975N 67°25.250W.
En piquant plein Sud vous vous trouverez un chenal d'une vingtaine de mètres dans lequel vous trouverez 5 mètres d'eau.
Au bout du chenal, au point GPS 11°56.923N 67°25.039W vous êtes arrivés dans la piscine, il ne vous reste plus qu'à choisir votre place... Mouillage de bonne tenue.
Autre
mouillage au Nord de la barrière de corail
position GPS : 11°57.019N 67°25.077W
position GPS : 11°57.019N 67°25.077W
Mouillages
des Aves de Sotavento
Des
AVES BARLOVENTO vers les AVES SOTAVENTO : 15 milles
MOUILLAGE
AVES SOTAVENTO : LAT. 11° 58. 794 N LONG. 067° 39.457 W.
Nous avalons notre chaîne et levons l'ancre, nous partons vers les
AVES de SOTAVENTO (= »sous le vent ») à 15 milles à courir toujours vers
l’Ouest donc toujours vent dans le dos. Les alizés n’étant pas encore établis,
nous avons, tout de même, un petit vent mais très régulier. Le moteur est
sollicité : un peu au départ, un peu plus à l’arrivée.
4 heures de navigation facile par mer belle et temps superbe. Nous
longeons la partie ouest au Sud des AVES. Partie extrême Ouest du
territoire maritime vénézuélien. Sans doute pour cette raison un poste de
coastguards est installé là sur une langue désertique de sable et de coraux
compactés.
Nous doublons cette pointe après laquelle commence une vaste plage
en croissant qui se prolonge par des terres occupées par de la mangrove basse
qui n’a rien à voir avec celle vu hier.
D’ailleurs presque plus d’oiseaux, apparemment peu de vie ou
d’animation dans ces feuillages rabougris. Par contre une ceinture longue de
corail qui forme un grand cercle, s’avançant loin sous nos yeux.
Il
faut être très attentif aux roches, aux bancs de sable, et approcher les îles
le soleil dans le dos.
La
couleur de l'eau est toujours aussi belle. Quelques bateaux et cabanes de
pêcheurs. Iles sous le vent (Sotavento) à 10 milles, mouillage derrière l'îlot
de Curricai ornée d'un unique cocotier, quelques pancartes de bois, et de 2
cabanes de pêcheurs, plage et eau claire, comme toujours ...
Le lendemain au lever du soleil, les arbres sont plein de vie. Des
milliers de fous qui nichent dans leur feuillage s’envolent, virent et rasent
l’eau, jacassant bruyamment, et commencent à pêcher : n’oublions pas que « los
Aves » signifie « les Oiseaux » ! Dans le
ciel ce sont des dizaines et des dizaines qui virevoltent en un carrousel géant
et dans un indescriptible tintamarre…Une odeur âcre et forte de fientes
réchauffées flotte dans l’air…
Hallucinant !
C‘est
ici que Alfred aurait dû tourner son film !
Il
n’y a pas d’aube ici, seulement un passage rapide et prolongé de l’obscurité à
des teintes de gris…puis la sortie majestueuse du gros orbe solaire…
Les
mouillages de cet archipel sont plutôt rouleurs et ne présentent aucun abri
contre le mauvais temps. Assurez votre ancrage en cas d'alizés soutenus ou de
survenue d'orages.
Mouillage sous le phare au Nord de l'archipel
Position GPS : 12°03.573 N 67°41.288W
Position GPS : 12°03.573 N 67°41.288W
Les
récifs qui bordent les deux îlots qui n'offrent qu'une protection précaire
contre la houle par vent soutenu, empêchent de s'approcher de la plage. Il faut
donc mouiller à bonne distance des îlots. Deux îlots de sable, belle plage en
croissant de lune, monter au phare pour faire la photo de votre bateau sur
tapis couleur lagon, pélicans, et cocotiers.
Mouillage sous Long Island
Position GPS : 12°02.538N 67°40.702W
Position GPS : 12°02.538N 67°40.702W
Immense
plage de sable fin, sous le seul cocotier de l'île un catamaran s'est échoué
lors du passage de Dean plus au Nord. Cabanes de pêcheurs. Lorsqu'ils sont là,
ils échangent le produit de leur pêche contre des produits de leur nécessité.
Mouillage Isla rond
Position GPS : 12°01.446N 67°40.765W
Position GPS : 12°01.446N 67°40.765W
Mouillage entre un îlot à l'Est qui abrite une cabane
de pêcheurs et des montagnes de coquilles de lambis et un îlot à l'ouest avec
une touffe de cocotiers. S'avancer le plus possible dans l'enclave, mais
prendre garde des récifs à bâbord et à tribord. Il est impossible de poursuivre
la route entre les deux îlots, ils sont reliés par une barrière de corail.
Carte d'identité
- Distance : 29 milles entre Cayo de Agua aux Roques et le phare de Barlovento, 33 milles d’Ave de Sotavento de Bonaire, 100 milles de Puerto Cabello, 15 milles entre Barlovento et Sotavento
- Dépendance : du Venezuela
- Superficie : Sotavento et Barlovento totalisent 100 km carrés d'eau encerclée de récifs et ponctuée de petits îlots coralliens couverts de mangrove pour certains et de sable avec quelques cocotiers pour d'autres.
- Point culminant : la flore est composée de certaines espèces de palétuviers de grande taille. Une vingtaine de mètres pour certains
- Faune : Principalement des oiseaux. Une colonie de plus d'un millier de fous, des hirondelles une famille de pélicans, ainsi qu'une panoplie presque illimitée d'échassiers de rivages de toutes tailles : hérons goliath, hérons verts et grands hérons ainsi que des bécasseaux dont les chevaliers gambettes, les chevaliers criards et autres pluviers...
- Population :
Barlovento : aucune présence humaine permanente. Des pêcheurs ont établi des campements sur un îlot de sable non loin du phare ainsi que sur Isla Oeste. Ils viennent régulièrement en lancha.
Sotavento : présence d'un détachement de la guardia Costa. Onze militaires se relayent tous les 50 à 70 jours. - Langues : Espagnol
- Monnaie : Troc avec les pêcheurs, piles, cigarettes, bières, alcool... sont échangés contre langoustes, cigales et poissons frais
- En juin 2014 1 $ = 65 Bs
- En aout 2014 1€ = 82 Bs
- Approvisionnement : Totalement impossible. Il n'y a aucun commerce, pas le moindre témoignage de civilisation. Pêche possible au fusil harpon, à la ligne, à la palangrotte ou à la traîne. Ramassage des coquillages permis. Cela dit, comme tout est permis, il reste peu ou pas de lambis, quasiment plus de langouste, quant-aux poissons ils sont encore là, mais il est de la responsabilité de chacun de veiller à la taille de ce que l'on pêche...
- Formalités :
Barlovento : aucune autorité ne vient jamais sur cet archipel. C'est peut-être l'endroit rêvé pour un exil volontaire - Un seul conseil, lorsque vous accueillez les autorités à bord, adaptez-vous à l'humeur du moment avec sourire et bienveillance. Ils en feront autant à votre égard. Même si votre espagnol est aussi pauvre que le nôtre vous parviendrez toujours à vous faire comprendre Ensuite armez vous d’un balai éponge et d’une lavette car ils ont des godillots qui laissent de très grosses traces…
- Saison :
L'hiver les alizés sont souvent costauds dans la région. Ceux-ci ne facilitent pas les navigations de retour vers l'Est pour ceux qui ne poursuivraient pas sur les ABC.
L'été, il faut garder un œil sur les cartes météo. Les phénomènes cycloniques qui passent très au sud dans la mer des Caraïbes peuvent affecter le bien-être des navigateurs qui séjournent dans l'archipel. Le cas s'est présenté avec Charley et Earl en 2004, il s'est renouvelé en 2007 avec Félix. Des amis ont subi les affres de Félix dans le deuxième mouillage d’lsla Sur, ils n'ont pas eu à se plaindre du passage de l'ouragan au nord de leur position. Restez vigilants et si vous vous laissez prendre, assurez du mieux votre bateau en attendant que ça passe.
Particularité : Toutes les cartes papier ou
électronique sont faussées. Prenez garde à ne naviguer que par temps clair.
"La longue histoire de l'humanité a été de
réduire le globe terrestre à une pépite cernée par la connaissance."
Olivier de Kersauson
Voilà, tout est là
Et nous allons partir cap
à l’est !
Mais à moins de s’appeler
Jean Luc Van Den Heede la navigation contre le vent est donc systématiquement évitée par les
navigateurs de plaisance !...deux techniques ont à la disposition du marin
« bout au vent ».
La première méthode consiste à tirer des bords en alliant l’utile
à l’agréable, c'est-à-dire au lieu de
partir bille en tête pour tracer des zigzags sur l’eau, le navigateur établit
un parcours sur le principe d’un grand louvoyage de plusieurs jours = chaque journée de navigation est un
grand bord au près (ou au bon plein si on a de la chance…). Cela revient par
exemple que nous pourrions viser le continent sud-américain (et oui) en prenant un cap vers es sud-est ! le
bord suivant nous ramènerait (peut-être ?...) vers les iles suivantes c'est-à-dire les Roques… avec
un cap nord-est, puis de nouveau vers le continent et ainsi de suite …La
méthode de ces grands sauts de puce impose que le site s’y prête dans sa
disposition géographique, d’avoir du temps et de ne pas craindre de
« bouffer des milles » ( le près c’est deux fois la distance et trois
fois le temps)…
La seconde méthode est dite « la fenêtre
météo » : dans les zones tropicales, les vents dominants sont
orientés à l’est, mais leur arrivent de changer complètement de
direction ! Il suffit donc d’attendre les conditions climatiques qui
donneront une brise dans la direction attendue. Mais faut pas rêver non
plus !
Ces conditions
climatiques durent en général quelques jours et constituent la « fenêtre
météo » bien connue des marins. L’inconvénient de la méthode est que la
dite fenêtre météo peut se faire attendre longtemps, en particulier en période
d’alizés bien établis…
En ce nous concerne nous
allons opter pour la méthode des grands bords.
Nous quittons donc
l’archipel des Avès dont les descriptions enchanteresses ne nous ont jamais
déçus et en avaient fait même une destination de rêve, un peu comme
« l’Amérique » de Joe Dassin….
Bien sûr nous savions
aussi que ces archipels des Roques et
des Aves sont très à l’ouest des Antilles : le vent dominant soufflant
d’Est dans la région, chaque mille à l’ouest est un mille de plus qui peut être
difficile pour le retour…mais nous nous
sommes laissé guider par nos envies de grand sud et de l’abri des cyclones.
Nous vivons aujourd’hui
notre dernière journée aus Aves : nous avons trouvé notre
« Amérique « … , « l’Amérique, je veux l’avoir
et je l’aurai…»… Du haut du paradis des chanteurs Joe Dassin doit nous lancer ce regard bienveillant dont il avait
le secret.
LOS ROQUES
Parc
national, l'archipel de Los Roques est situé à 85 miles au nord de Caracas et
180 miles à l'ouest de l'île de Margarita. Ce parc a plus de 50 îles formées de
récifs d'origine corallienne. Le sable blanc, des eaux aux milles reflets. Los
Roques est un lieu de navigation privilégié, avec une brise régulière soufflant
toute l'année, et les sites pour s'ancrer sont innombrables... L'eau est
toujours chaude avec une vie sous-marine riche et diversifiée.
Cet
archipel constitué par une barrière de récifs forme en son centre une lagune où
les eaux sont toujours calmes quelque soit le vent. L'île principale, le Gran
Roque avec sa piste d'atterrissage est l'unique village de l'archipel: petits
hôtels appelés "posadas"
et maisons de pêcheurs. L'archipel de Los Roques a été déclaré parc national en
1972 pour protéger la faune et la flore dans ses zones terrestres et maritimes:
ses nombreuses espèces d'oiseaux tel le pélican, la frégate, l'aigrette et
autres, les poissons comme le pagre, le mérou, les coquillages tel le botuto;
la pêche de langouste a aussi été réglementée. Le sud de Gran Roque est appelé
Rasqui, le nord-est Franciskey, ces deux îlots se rejoignent par une bande de
sable; plus au sud Crasqui.
La
partie orientale de la barrière de corail s'appelle Buchiyaco, c'est une
grande zone où abondent palétuviers, arbre typique des récifs coralliens, ses
racines progressant sur les fonds sous-marins des eaux calmes de l'intérieur de
l'archipel.
D'autres
sites intéressant, au sud-ouest, l'île de Dos Mosquises où une base
scientifique contrôlée par les autorités de Los Roques élève des tortues,
principalement les espèces en voie de disparition.
Une
autre île, Isla Carenero a probablement l'ancrage le plus beau de toute les Caraïbes.
On ne peut rester toujours
dans de tels endroits, nous avons déjà eu beaucoup de chance de pouvoir cumuler
tant de jours entre Roques et Aves.
Anecdote
historique :
Certains prétendent que sur la côte au
vent des Avès de Barlovento gît une grande partie de la flotte du comte
d’Estrées qui captura le navire hollandais Binkes au large de l’île de Tobago
puis fit voile vers la France pour réparer ses bateaux à Brest. Il revint aux
Indes Occidentales (les « West Indies ») le 7 octobre 1796 pour une
nouvelle tentative de mettre la main sur les îles ; il semblerait que
d’Estrées fit route sur Curaçao, mais, dans la nuit du 4 mai 1697, son navire
porte-drapeau mit la voile vers une des Avès : avant que quoi que ce soit
fut entrepris, les navires le suivant s’entassèrent derrière lui ! Au
lever du jour, sept bateaux du convoi, trois transporteurs et trois frégates
étaient en morceaux sur le récif corallien et perdus corps et biens… le
septième navire, le « Jamaïca »,
fut sauvé in extremis « grâce » à une erreur de navigation !
Le seul problème à ce jour est que
personne ne peut affirmer sur laquelle des Avès se trouvent les épaves de la
flotte de d’Estrées… Daniel Camejo soutient que c’est aux Avès de Barlovento
que la flotte a coulé…il prétend aussi que les navires faisaient route de
Tobago vers Curaçao qu’ils comptaient investir…
Dudly Pope, de son côté, dit que
l’endroit exact est l’île d’Avès, au milieu de la mer Caraïbe, au large de la
Martinique !
La solution à ce mystère réside dans la
réponse aux questions suivantes :
- quel était le dernier mouillage de la
flotte de d’Estrées ?
-où cette flotte a-t-elle été vue pour
la dernière fois ?
Autrement dit : où était la flotte
entre le 7 octobre 1796 et le 4 mai 1797 ?
Toujours est-il que quelque part
pourrait se trouver un fabuleux trésor de canons, de joyaux, objets divers et
variés de cette époque ainsi que des restes archéologiques !
Mais, avant d’entreprendre une plongée,
il faudrait pouvoir répondre aux questions ci-dessus !
LE RETOUR…
Los
Roques, paradis terrestre, a plus d'une merveille à dévoiler… Une rencontre inoubliable avec une
nature magique et généreuse!!!
Des
eaux cristallines, un sable blanc soyeux, « le paradis sur terre »,
c’est ainsi que Christophe Colomb aurait décrit l’Archipelago de los Roques, situé au nord du Venezuela.
Lorsque
les petites caravelles jetèrent l’ancre pour la première fois près du delta
del’Orénoque, l’amiral déclara que « les eaux de ce puissant fleuve ne
pouvaient avoir leur source qu’au paradis ». Le navigateur était
émerveillé par la beauté et la luxuriance de cette contrée et par la
gentillesse de ses habitants. Les Indiens montèrent dans des pirogues pour
souhaiter la bienvenue aux arrivants et l’amiral remarqua qu’ils portaient des
bijoux faits d’or et de perles …
Les
conquistadors qui débarquèrent ensuite sur ce territoire après Colomb
comprirent très vite qu’ils n’avaient nullement affaire aux Indes mais bien à
un nouveau continent. En 1499, Alonso de Hojeda, compagnon de Colomb,
accompagné d’Amerigo Vespucci et de Juan de la Cosa, aborda la lagune de
Maracaïbo où se mirait une petite cité lacustre : les voyageurs lui
donnèrent le nom de Venezuela, littéralement « petite Venise ».
La
quarantaine d’îles, de cayos (îlots
rocheux) – et des quelque 300 autres – constitue un site exceptionnel. Le flot
régulier des visiteurs a quelque peu bousculé les habitudes de quelques
pêcheurs mais la vie sur ces îles reste simple et paisible. Elle le doit en
particulier à un accès peu aisé – petit avion, yachts ou voiliers – mais aussi
à la volonté du gouvernement qui l’a classé Parque Nacional en 1972.C’est l’une des plus importantes réserves
marines des Caraïbes : au total 225.000 hectares d’atolls !...
Seule
une quarantaine d’îles portent u n nom et au cours du temps, certaines ont vu
le leur, retranscrit phonétiquement par les pêcheurs, se modifier : North
East Cay est ainsi devenu Nordisqui,
Sailors Cay a donné Selesqui, et
Domus Cay s’est curieusement transformé en Dos
Mosquises, pour finalement devenir Cayo
Estacion Sur.
Il
semble que l’archipel de Los Roques soit connu depuis des siècles…Mais, faute
d’eau potable, les hommes ne s’y sont installés de façon permanente que très
récemment.
Pourtant
les archéologues ont découvert des céramiques préhispaniques ayant
vraisemblablement été employées au cours de cérémonies magiques ou religieuses.
De petites figurines représentant des personnages trapus, notamment un homme
aux yeux en forme d’anneau et des femmes dotées de petites bras et de grandes
têtes rectangulaires, piquées ou incisées.
Dans
les années 1980, à la suite de la brutale dévaluation du bolivar et à
l’instauration d’un contrôle des importations, certaines îles servirent de
repaire aux contrabandistas
(contrebandiers) qui fournissaient les restaurateurs de Caracas en alcool et
vaisselle de qualité.
Plus
récemment, débarquant pour la journée de leur jet privé ou pour un weekend
prolongé sur leur yacht, la jet-set vénézuélienne a transformé Los Roques en un
lieu de retraite privilégié.
L’archipel de Los Roques forme un vaste
plateau corallien rectangulaire de 10 par 20 milles.
Tout le coté est bordé par
une barrière de corail qui ne présente que deux passes, celle que nous avons
prise et celle devant laquelle nous sommes mouillés ce soir.
Les îles
des Roques détiennent la 4ème barrière de corail du monde. Seule
habitée, Gran Roque et ses maisons colorées, posadas chaleureuses, ses rues de
sable et ses bateaux de pêcheurs qui se tiennent chaud sur la plage.
LOS ROQUES sont un ensemble
d’îlots ceinturés à l’est et au nord est par une barrière extérieure,
l’intérieur est semé de passes, de
hauts fonds cernés suivant les endroits de bleu cobalt ou de vert tendre
tirant sur le jaune bouton d’or sur les fonds de sable. Les îlots pour la
plupart sont couverts de mangroves
impénétrables.
15 et 16 SEPTEMBRE
Des Avès de Barlovento à Béquévé – Cayo de Agua
30 milles en ligne
directe mais au près = deux fois la route et trois fois le temps dit le dicton à
quant à nous avec AFRODITE pour la première fois cette allure là, nous aurons mis 12 heures et
tiré sept bords !...avis aux amateurs…
MOUILLAGE CAYO DE AGUA
LAT. 11°49.41N LONG.66°56. 205W.
Plus
vers l’Est nous naviguons sur des fonds clairs et d’autres plus sombres.
Nous
jetons l’ancre après avoir vogué sur une barrière de corail dans 3 mètres
d’eau. Deux îles en croissant. Nous sommes devant celle au sud dont nous
ferons le tour l’après midi par la bande étroite de sable qui la cerne.
Totalement
déserte. Une partie couverte de mangroves, quelques dunes peu élevées, un oasis
de dix cocotiers à l’extrême ouest.
Au
sud face au large, un mur de gros morceaux de coraux à perte de vue,
attend d’être transformé en sable…
Une
colonie d’oiseaux grands comme des cormorans, l’un couve un œuf de la taille de
celui d’une poule ; nid à peine aménagé dans le cimetière de coraux, un
rien de sable, à même le sol, ni protection, ni couverture, rien de douillet.
Je
vois la mer tout autour de moi et l’immense barrière de corail qui nous protège
un peu plus loin devant nous…AFODITE se dandine dans cet éblouissant lagon…Il
me semble entendre des sirènes aux voix mélodieuses chanter les louanges des
tropiques…
Jeudi 17 Septembre
MOUILLAGE DE CARENERO
LAT. 11° 53 265 N. LONG.066°50 630 W.
Un départ facile à la voile vers l’est,
toujours sous génois, navigation de rêve le long des îles, nos 2 lignes
traîneront derrière sans succès.
Un premier mouillage retenu et manqué à cause de
l’imprécision des cartes. Nous aurions pu faire l’effort de revenir un
peu en arrière et de pousser juste plus avant mais le couloir où nous
sommes engagés est si beau, que l’on ne fait qu’admirer, en glissant
tranquillement entre des bleus, des verts pâles et des fonds de sable sublimes.
Une mince bande
plate défile, de la mangrove coupée de plages blanches, des bandes d’oiseaux
tournoient devant nous, virent en rasant les eaux.
Finalement nous
virons vers tribord pour dépasser une langue de sable et venir terminer dans
une baie en U parfaitement protégée des vents dominants.
Un véritable
abri entouré de mangroves où les oiseaux foisonnent, les eaux sont claires. Un
banc de poissons chassés par des carangues fait un bouillonnement intense
tandis que les oiseaux s’affairent en piqués rapides et incessants.
Une impression
de calme, de protection, d’être loin de tout dans un décor exceptionnel. Une
nuit sans houle, sans vent.
Vendredi 18
Septembre
Aujourd’hui je
pense très fort à ma maman dont c’est l’anniversaire : c’est pour cela que
nous avons quitté les Avès où il n’y avait pas de réseau pour téléphoner. Ici
nous retrouvons un peu de civilisation et donc j’ai pu lui souhaiter de vive
voix tous mes vœux affectueux.
Ce matin un
cabin-cruiser s’est mis devant nous à touche- touche avec la côte, amarré à un
tronc de mangrove devant une petite plage de sable blanc.
Les occupants se
sont installés sur le sable avec transats et parasols, à dix mètres d’un tas
impressionnant de sacs poubelles pleins de détritus des différents bateaux
passés, qui attendent un ramassage incertain, laissant indifférents les
candidats au bronzage.
Nous partons en
exploration avec masque et tuba au-dessus des coraux dont le spectacle est
toujours aussi fascinant.
Poussant un peu plus loin, prenons pied sur un îlot séparé de nous par un bras
de mer. Eau transparente, sable blanc, désertique à l’exception de trois
cocotiers si penchés qu’ils donnent l’impression qu’il y a un vent fou à
l’instant.
19 20 21 SEPTEMBRE
Parc
national, l'archipel de Los Roques est situé à 85 miles au nord de Caracas et
180 miles à l'ouest de l'île de Margarita. Ce parc a plus de 50 îles formées de
récifs d'origine corallienne. Le sable blanc, des eaux aux milles
reflets : Los Roques est un lieu de navigation privilégié, avec une brise
régulière soufflant toute l'année, et les sites pour s'ancrer sont
innombrables... L'eau est toujours chaude avec une vie sous-marine riche et
diversifiée.
L’archipel
des Roques est constitué par une barrière de récifs qui forme en son centre une
lagune où les eaux sont toujours calmes quelque soit le vent.
L'île
principale, le Gran Roque avec sa piste d'atterrissage est l'unique village de
l'archipel : petits hôtels appelés "posadas" et
maisons de pêcheurs. L'archipel de Los Roques a été déclaré parc national en
1972 pour protéger la faune et la flore dans ses zones terrestres et maritimes :
ses nombreuses espèces d'oiseaux tel le pélican, la frégate, l'aigrette et
autres, les poissons comme le pagre, le mérou, les coquillages tel le botuto. La
pêche de langouste a aussi été réglementée (hélas !). Le sud de Gran Roque
est appelé Rasqui, le nord-est Franciskey, ces deux îlots se rejoignent par une
bande de sable; plus au sud Crasqui.
SARQUI, Espengui et Cayo Sal,
avec ses lagunes bleues et son sable blanc, sont des sites idéals pour nager,
pêcher, plonger ou juste admirer le paysage à l'ombre.
Isla
Sarqui a une des lagunes les plus belles avec une barrière de récifs parfaite
pour la chasse sous-marine.
Comme toujours sous les tropiques la nuit est tombée
brusquement, amplifiant le bruit sourd de la mer qui brise au loin sur la
barrière de corail…
Nous nous reposons des joies
ineffables de nos nombreuses plongées au milieu des récifs toujours
aussi paradisiaques.
Nous sommes ici au pays des couleurs étincelantes, dans la
patrie des pélicans, des frégates et des fous bruns. Ici, on peut pendant des heures regarder la couleur de
l’eau. Elle est d’une générosité pure, et les amateurs de nuances pourront
débattre à l’envi sur la tonalité de cette émeraude qui se marie avec le
turquoise et se fond dans l’écume étincelante qui pourlèche la plage immaculée…
Si, en outre, ce nuancier se trouve en présence d’un daltonien (suivez mon
regard…), il passera ainsi de nombreuses
heures à enseigner les « couleurs lagons ». Car comment mieux définir la
couleur de l’eau qui est ici un réel ravissement ?
Lundi 22 Septembre
L’ancre levée
nous quittons SARQUI et filons 5 à 6 nœuds sur GRAN ROQUE, c’est à dire la capitale,
longeant le reef de très près, surveillant les différences de teintes et
zigzagant entre elles pour éviter de toucher.
Mouillage
à GRAN ROQUE
LAT.11°56 783
N LONG.066°40 673W
Nuit et jour les
alizés réguliers et forts mais sous la protection de la ceinture de
corail, la houle est inexistante, juste le bruit de la mer qui brise sur la
barrière.
A la différence
des autres îles, elle est plus grande et a une partie élevée qui donne l’impression de
collines, le reste est plat.
Une longue plage bordée par des maisons
aux façades colorées et aux toits
peints de couleurs vives.
Un petit bourg avec des rues tracées dans
le sable, éclairage public, restaurants, bars, petites pensions de famille
(posadas).
Les pélicans plongent sur une
bande de poissons. Les mouettes les attendent au sortie de l'eau, leur grimpent
sur le corps et leur piétinent la tête pour essayer de voler leur prise.
Nous sommes
stupéfaits de voir le nombre considérable d’avions à hélices qui atterrissent et décollent
sans arrêt sous nos yeux, perpendiculaire à la plage. Les appareils
arrivent en final sous la hauteur des mâts des bateaux au mouillage, passent à
toucher au-dessus de la plage, et se posent juste au début de la piste. L’activité
est incessante, elle commence à 7 h le matin, jusqu’à 19 h passées le
soir. Vedettes et cabines cruisers sont autour à attendre leur client ou
propriétaires pour les emmener aussitôt sur les îlots.
Mardi 23
Septembre
Comme je ne
voudrais pas être taxée d’impartialité par une description trop élogieuse de
ces archipels, je vous transcris une traduction sans prétention d’un extrait du
guide Doyle « Cruising Guide to Venezuela »
« Les Roques font partie des quelques sites où
j’ai eu le plus de plaisir à naviguer. Une
bonne brise, une mer belle aux couleurs toujours changeantes, font qu’il est un
pur bonheur de croiser aux Roques. L’eau y est si claire que même sous voile,
on peut toujours négocier les passages difficiles entre les récifs pour trouver
un mouillage idyllique. Los Roques sont un lagon s’étire sur environ 25 milles
de long et 14 de large. Les récifs coralliens à fleur d’eau reflètent la
lumière avec une telle force que les nuages prennent parfois une teinte vert
d’eau. Los Roques restent encore assez peu visitées. Il est ainsi fréquent de
trouver un mouillage désert qui vous donnera le sentiment d’être un explorateur
du bout du monde ».
En tout le site
est aussi un lieu idéal pour faire grossir l’album photo d’AFRODITE : les
photos sont en effet un élément incontournable de la mémoire du voyage. Plus
encore que dans d’autres domaines l’appareil photo numérique est devenu incontournable,
également les jetables qui vont sous l’eau. Pour immortaliser mon énième
coucher de soleil il me suffit d’appuyer sur le bouton aussi souvent que j’en
ai envie. Avec le numérique je peux prendre trente clichés de dauphins virevoltant
autour des étraves d’AFRODITE et n’en conserver que deux ou trois. Surtout que
ce n’est pas facile de faire une bonne photo de dauphins! Lorsque la carte
mémoire est pleine et bien il suffit de passer les bonnes, les moyennes et
« acceptables » pour les stocker sur le disque dur de l’ordinateur.
Du coup je peux alors me lancer dans des
retouches éventuelles avec un logiciel ad hoc ! Et fini la contrainte des
volumineux albums photo. C’est ce que j’appelle le daguerréotype nouvelle
génération ! Le maniement est simplifié
et mes photos vont directement du producteur au consommateur sans passer par les couteux services d’un
laboratoire de développement. Les clichés de la pêche « miraculeuse »
et héroïque du capitaine peuvent ainsi faire l’objet d’un diaporama alors que
la bête n’est pas encore consommée ! Et pour épater les mais de métropole
rien de plus facile que de leur envoyer un mail (sadique) avec une photo
panoramique du lagon dans lequel on est mouillé…si l’on fait route avec un
« batocopain » on peut alors avoir enfin une photo du bateau surfant
sur les vagues prise depuis leur bord et réciproquement.
Ca soir le ciel
avait la couleur et la profondeur de l’infini…des pélicans se muaient en
projectiles en plongeant à la recherche
de leur pitance dans les eaux claires du lagon…
Mercredi 24 Septembre
Ça y est ! Nous avons vos formalités de sortie
du territoire venezuelien. Fastoche ! Quand on pense à toutes les
tracasseries endurées à Margarita avec Juan et à Porto La Cruz avec José….no
comment !... Pour obtenir la fameuse « zarpe », véritable sésame
de sortie, la clearance de sortie quoi, il faut aller chez les Costa Guardia,
mais au bureau dans le bâtiment situé de l’autre côté du village, côté
nord-ouest après le supermercado : là un jeune en uniforme suant à grosses
gouttes, aimable comme tout, et s’évertuant à prononcer les quelques mots de
français qu’il connaissait, nous a
rempli le formulaire ad hoc, est allé le faire signer par le « commandante » et nous l’a
remis. Nous avons ensuite repris l’annexe
pour aller aux bureaux de l’immigration, côté aéroport cette fois-ci, comme à
l’aller le 13 aout dernier, où nos passeports ont été tamponnés pour la
« salida ». Voilà, c’est tout. On n’a rien payé, même pas le Parque
Nacional, puisque nous avons déclaré partir aussitôt…On aura donc en tout et
pour tout changé 100 € en bolivars, dépensé un peu moins pour les formalités
d’entrée, quelques courses et des cartes téléphonique...
DERNIER MOUILLAGE de LOS ROQUES :
de GRAN ROQUE à la bouche SEBASTOPOL : 12 milles
MOUILLAGE SEBASTOPOL :
LAT.11°47 429 N
.LONG.066°34 416 W.
Avec
notre annexe nous longeons le petit îlot couvert de mangroves dont les racines
forment une barrière impénétrable à l’homme.
Nous nous sommes arrêtés sous l'îlot Buchiyaco, petit ilot de mangrove en
bordure de la barrière. Non loin l’épave d’un cargo sur la barrière signale
qu’il ne faut pas s’aventurer par là...Nous
avons laissé notre ancre cascader joyeusement dans l’écubier. Il y a ici onze
mètres de fond.
Vers 18h30 le soleil déclinant a magnifié
la baie d’un glorieux embrasement
pourpre…
Des
oiseaux chantent, un pélican, d’une grosse branche, plonge sur une proie.
L’eau est claire, transparente. Equipés
de masques et de palmes nous passons de l’autre côté de la barrière. Un
véritable aquarium géant s’ouvre sous nos yeux, parmi les coraux de toutes
sortes : en boules, en feuilles dont certaines, en fleurs, sont urticants,
des espèces de choux laissant sur les doigts une impression gluante.
Les
poissons de toutes tailles et couleurs s’affairent au milieu de ce monde varié.
Chacun y trouve nourriture et protection. Les minuscules à moitié bleue
métallique et à moitié jaune bronze se vautrent parmi les urticants, d’autres
croquent les coraux avec facilité.
Des
poissons plats en bande, d’un bleu lapis-lazuli passent et repassent ; des
bleus très sombres dont les nageoires, de même couleur, sont partagées du corps
par une fine ligne blanche nacrée. Des corps bruns semés de points rouges,
d’autres argentés avec des nageoires jaunes et de yeux ronds cernés de noir.
Des lilliputiens avec des couleurs fascinantes. Des oursins noirs aux longues
épines se nichent ses ombres légères à
la surface de l’eau. Nous allons bien dormir dans le calme de ce havre
protecteur…
Cette
nuit est passée l’onde tropicale indiquée sur les fichiers météo : il a
plu et il y a eu un énorme orage, avec de fulgurants éclairs. Les écluses du
ciel se sont ouvertes en grand, noyant les feux du couchant sous un déluge
d’eau. J’avais prévu tout cela et mis en place mes bidons au bout de mes
récupérateurs d’eau de pluie et ce matin ils étaient pleins. Plus l’eau
récoltés dans l’annexe, ça fait de l’eau douce d’avance, car le désal’ ne
marche plus, la courroie est pétée, et
il faudra attendre Le Marin pour en trouver une de rechange.
Heureusement il nous reste normalement assez pour boire et cuisiner, j’espère
en tout cas !
Le tombant des récifs est du sable très
pentu avec quelques rares buissons de corail ; heureusement nous nous sommes
arrêtés en face d'un endroit où il y en avait une dizaine de blocs de corail.
Et là, il y a des bancs de poissons, des espèces habituelles et fréquentes mais
avec des spécimens de grande taille. Curieusement, pour une réserve, ils sont
assez craintifs.
Une petite ondée nous laisse en souvenir
un féerique arc-en-ciel envahissant le ciel et la mer…
La côte est bordée de récifs coralliens
qui délimitent un étroit lagon aux eaux turquoise : au vent de cette côte
pullulent des colonies de burgos, sortes de bigorneaux géants.
Sous le vent des récifs l’eau limpide
laisse entrevoir une multitude de petits poissons multicolores. Une grosse
murène hideuse, effrayée à mon approche, s’enfuit en ondulant pour regagner son
trou.
Un groupe de paille-en-queue, affublés
de leurs longues plumes effilées, nous survolent en silence, laissant admirer
leur vol particulier…
Mouillage
de BUCHIYACO
Le paysage semble se diviser en trois
bandes horizontales : l’eau, d’un vert sombre changeant, la bande blonde
de la plage, et celle du ciel bleu, plein de nuages d’altitude…
Cet après-midi j’ai plongé une dernière
fois dans l’eau tiède pour inspecter les récifs et les pâtés de coraux du banc
d’à côté, découvrant une ribambelle de langoustes bien abritées das les
anfractuosités sous l’œil intrigué d’un
mérou géant doté d’un toupet incroyable ! Se doutaient-ils qu’ils devaient
la vie sauve à l’existence de la zone classée « parc
national » ? Je savourai en tout cas le plaisir de descendre dans le
bleu de cette eau limpide au milieu de rougets goguenards et de
poissons-perroquets nonchalants. Le spectacle, une fois de plus, était partout
dans ce gigantesque aquarium naturel…Ma brusque et bruyante incursion dans ce
monde silencieux a fait s’envoler au loin une magnifique raie pastenague.
Puis les lueurs rouges du soir étirèrent leurs ombres vers l’ouest.
Le crépuscule naissant hésite entre le bronze et l’indigo…
La sortie de l’archipel
Au loin la barrière de corail trace sa
ligne d’écume. Derrière la barrière et devant des îles de mangrove il y a un
chenal profond d'une quinzaine de mètres, avec de temps à autre des pâtés de
sable et de corail qui remontent prés de la surface. Avec une bonne lumière et
le soleil du bon coté, il est facile de les repérer : ils sont de couleur vert
pale à blanc tacheté de marron, sur les verts pales il y a de l’eau, les autres
sont des affleurant. L'eau profonde est bleu foncé.
Une fois là dedans sans problème, la
passe est large et bien visible, surtout avec du soleil et du vent léger.
Le paysage autour de nous est beau, mais
un peu trop vaste. Les îles et les récifs ne forment qu'une mince ligne de
couleur entre le bleu de l'eau et le bleu (mais avec des nuages) du ciel.
Une quantité de récifs, d’îlots et
d’îles saphir à la végétation luxuriante émergent du scintillement mauve de
l’océan. Au loin, des baies splendides s’enfoncent dans la côte très découpée
et déchiquetée, nous apportant l’inévitable lot de rêves et une envie folle de
jouer les « explorateurs » !
Nous nous amusons à raser les cayes dans
une eau d’une clarté exceptionnelle sous un ciel aguiché de quelques nuages
blancs …
Ainsi,
le compte à rebours a enclenché son implacable comptage, et il va bientôt
falloir partir. Pour profiter de ces derniers moments, où seul le bruissement de l'écume sur la plage d'à
côté vient souligner la paix environnante, Jean part à une dernière pêche, il
me promet du poisson pour midi…quant à moi je vais chercher des crabes : le crabe de cocotier, véritable
forteresse ambulante, que manifestement ma présence contrarie, m’observant de ses petits yeux pédonculés et
très mobiles. Avec un bambou, d’une pichenette fort réussie, j’envoie
valdinguer ce saccageur doté de pinces redoutables, certains ayant une beaucoup
plus grosse que ‘autre, la droite, et on les appelle les « c’est ma
faute » car ils on l’air de se battre la couple comme à la messe les
pauvres pécheurs…
Nav’ de nuit vers LA
BLANQUILLA
Nous appareillons pour la
BLANQUILLA, une longue traversée de 116 milles mais au près !....Cap au 97
en ligne droite !!!
En partant en milieu de
journée, quand le soleil au zénith marque bien la passe et ses écueils, nos espérons arriver après-demain soir…de
toute façon on a la trace GPS et à l’aller nous étions également arrivé de
nuit au mouillage bien connu de El
YAQUE.
C’est l’avantage du
GPS : il suffit de presser la touche « track » et l’appareil
enregistre la route du bateau au fur et
à mesure qu’elle se déroule ! Donc on peut arriver de nuit là où la trace
a été enregistrée, « finger in the noze » ! Le principe est
d’enregistrer sa route lors de l’entrée de jour dans un lagon ou une crique,
ensuite on sait à coup sûr où on va.
Notre première nuit de
veille se passe sous une lumière fuyante qui s’enhardissait d’un halo
multicolore. Notre sillage, s’il ne laissait qu’une trace éphémère sur la mer,
en imprimait une profonde dans nos mémoires…
Dans notre sillage une
nuée de mouettes piaillardes virevoltent avec insolence en s’invectivant d’une
manière intraduisible !...
Un soleil bas, grosse
boule rouge cernée de nuages, éclabousse d’orange le cochant…Puis le ciel se
piqueta d’étoiles…
La nuit tombe et avec
elle la solitude du navigateur, seuls dans le noir… pas de lune cette nuit pour
nous éclairer a giorno tout au long du voyage…une nuit noire et profonde nous enveloppe.
Nous avons l’impression de rouler à vive allure à sept nœuds sauf que c’est pas
le cap !!! Mais le vent se met à forcir et la mer se forme…nous
redécouvrons aussi que la nuit tout est amplifié, la peur du noir aussi,
peut-être… On s’habitue à tout, même au noir de la nuit.
Les voiles chuchotent sur
AFRODITE qui en palpite de plaisir…sous un ciel clouté d’étoile je prends le
premier quart. Phénomène de turbo luminescence, des milliards de protozoaires
s’allument en brusques flambées dans notre sillage tandis que de petits
poissons lumineux zèbrent la nuit sous-marine de leurs corps fuselés…
Puis le soleil se lève et
une nouvelle journée de navigation s’étire. Les premières lueurs de l’aube
palpitèrent à peine au-dessus de l’horizon…La masse ouateuse des nuages
engloutissait le soleil levant…En fin d’après-midi l’ile de La Blanquilla se
dessine à l’horizon. Nous sommes pressés d’arriver.au fur et à mesure que nous
approchons de notre point de destination l’impatience monte chez la
skippette ! Elle s’agite !
Nous arrivons juste
à la tombée du jour, quand une lune orange, fichée dans la nuit noire comme une
lampe sembla nous sourire…
Au matin, après que le soleil levant ait blondi
la côte, nous allons faire nos salutations à la faune aquatique. En pratiquant,
ce que de ce côté de l’Atlantique on nomme le « snorkeling »,
c’est-à-dire la plongée PMT, càd avec Palmes-Masque-Tuba !
A la surface de ces eaux turquoise
s’étalent toutes les teintes de bleus, du bleu foncé des grandes profondeurs
jusqu’au pastel, voire au vert soutenu en bordure de l’immense plage de sable
doré.
A la surface de ces eaux turquoise
s’étalent toutes les teintes de bleus, du bleu foncé des grandes profondeurs
jusqu’au pastel, voire au vert soutenu en bordure.
Sous mes pieds
s’étale un tapis minéral de forteresses er de palais coralliens… c’est le
domaine incontesté des mollusques, des étoiles de mer et des crustacés…A la
faune aquatique revient l’entière responsabilité du spectacle ! C’est un
monde plein de grâce et de couleurs chatoyantes, sillonné par une multitude de
poissons tropicaux. Ce ballet sans cesse renouvelé est un ravissement pour les
yeux…Mais, à force plonger en apnée et de me pâmer devant ces somptueux
paysages de madrépores, je ressors de
l’onde complètement moulue de fatigue ! Après une courte pause,
laissant à la brise tiède et au soleil le temps de me sécher, et me voilà qui
reprends mon excursion sous-marine en chantant…
Nous nous
retrouvons alors nez à nez avec un poisson fort sympathique, de ses gros yeux
il nous observe dans les moindres détails car il est curieux, ses lèvres
pulpeuses semblent nous envoyer des bisous sexy… Il est adorable ce diodon ! En
apnée nous rencontrons aussi de
charmantes brésiliennes ne rêvez pas, messieurs, ce ne sont que des (petites)
langoustes tachetées ! Un poisson ange rêvasse au bord d’une grosse tête de
corail… Nous pouvons passer des heures à barboter en présence des poissons sous
le regard dubitatif des fous et de pélicans qui du haut de leurs rochers semble
nous regarder comme si nous étions de réels extraterrestres. Ils doivent penser
que nous nous y prenons bien mal… et puis que viennent faire ces bipèdes mal
adaptés dans notre garde-manger ? Après tout, ils sont chez eux !
Attention = Il faut aborder l’archipel dans une attitude de
totale autonomie.
Vous me direz, mais que faire, il n’y a rien ici ?
D’abord il y a la pêche ! Nous avons pêché le plus gros poisson jamais capturé sur AFRODITE
à ce jour : il a mordu pendant notre navigation entre les Roques et la Blanquilla. La skippette
a crié « poisson » lorsque la canne a ployé à 90° de son axe ! Le
fil s’est dévidé de son moulinet à une vitesse supersonique. On a d’abord cru nous être accrochés à une
nasse ou au fond…nous avons commencé par
ralentir le bateau. La tension du fil était telle que jean a failli le
couper ! Pour éviter le phénomène de « la canne javelot
olympique »… Vu la profondeur il est peu probable que nous soyons
accrochés à un obstacle quelconque Jean rembobine la ligne qui soudainement
n’offre plus de résistance ? J’imagine que nous avons perdu notre proie
quand, quelques dizaines de mètres
derrière nous apparaît notre festin du jour : un barracuda d’un
mètre ! Il doit peser 15 kilos ? La remontée de la proie provoque un
dilemme : je suis encore victime de ma sensiblerie lorsque je vois ces beaux bestiaux marins se débattre
contre la mort. Jean est plutôt poussé par un instinct de tueur primitif
réanimé l’adrénaline et la fierté de la prise !
Ce trophée donne enfin à l’équipage le statut de pêcheurs
confirmés ! L’accès à ce statut, s’il n’a pas été sans déconvenue, a été
l’occasion d’écarter pas mal d’idées préconçues sur la pêche à la traîne. Dans
tous les cas, ramener du poisson à bord demande patience, humilité et
opiniâtreté. En tout cas c’est bien mieux que dans les Antilles françaises…
L’autre débat concerne la pêche à la langouste : au
fusil-harpon ou au lasso ? Le dit lasso est constitué d’un manche en bois
sur lequel est fixé un gros fil de
pêche. Une fois la langouste repérée, la technique consiste à passer la
boucle du fil autour de la bête et à tirer. Le maniement du lasso peut paraître
simple ainsi exposé mais demande un véritable coup de main !
Notre AFRODITE se balance nonchalamment, ancré dans trois mètres
d’eau turquoise parfaitement translucide. Aujourd’hui l’alizé souffle
mollement, toujours de nord-est, apportant par intermittence l’odeur
pharmaceutique et entêtante de la flore et des niaoulis de l’île. A une
vingtaine de mètre un petit îlot désert en forme de croissant avec une maigre végétation.
Quelques crabes aussi. La plage est d’un blanc insoutenable, quel éclat !
Des mouettes marchaient avec insolence sur les bancs de sable que la marée
n’avait pas encore recouverts, laissant derrière elles des marques en forme
d’étoiles…
Le soir tombe à pas feutrés, la nuit s’annonce belle, un
somptueux coucher de soleil embrase l’horizon, striant de rose tout le
couchant…Un grand vol de frégates s’élève, noires, bruyantes, tourbillonnantes,
impatientes de voler aux sternes le produit de leur pêche. Les rutilances du
couchant allument des flammes sur les flots. Alors tout se nacre, s’irise,
avant de tourner petit à petit au violet dans les vapeurs d’un bistre de
plombagine, striées de longues veinures orangées et rouge sombre…Je fixe ce
spectacle féerique comme on fixe un tableau de maître…Les premières étoiles
palpitent déjà dans un ciel dégagé.
A la surface de ces eaux turquoise
s’étalent toutes les teintes de bleus, du bleu foncé des grandes profondeurs
jusqu’au pastel, voire au vert soutenu en bordure de la plage.
Dans cet environnement paradisiaque, sorte de minuscule n jardin
d’Eden des temps originels miraculeusement préservé des souillures de
l’humanité, il n’y a pas d’autres bateaux ni âmes qui vivent d’ailleurs…
Dans des eaux turquoise et chaudes, d’une limpidité extraordinaire,
nous allons plonger en apnée : nous ne sommes pas déçus ! En
barbotant dans cette eau translucide,
nous découvrons une fois de plus avec fascination la beauté surprenante
des fonds marins. Personne ne peut échapper à son attrait et à sa magie… Une
sensation incomparable s’empare de nos sens devant le spectacle toujours
renouvelé et féérique d’une multitude de bancs de poissons aux couleurs
chatoyantes. Émerveillée et subjuguée par ce spectacle époustouflant je
plongeai dans le grand Bleu !
Le soir le soleil couchant commença à dorer les eaux de ses
rayons obliques…Il lava le ciel…Les étoiles se mirent à grouiller dans le
firmament, rendant plus profond le velours bleu de la nuit au-dessus de la
mer...
Le phare de la pointe scintillait régulièrement de ses
éclats : Sebastopol Lighthouse FL.6 secondes, portée 11 milles.
CAP
AU NORD EST !
Les cartes météo que je reçois
grâce à la BLU ne sont pas encourageantes : elles indiquent un vent
orienté au nord-est pour les prochains jours…Juste le vent qu’il ne faut
pas !
Au départ de la Blanquilla, que le cap soit sur Grenade, Sainte-Lucie
ou la Martinique, toutes les routes sont nord-est ! Le jeu de patience de la fenêtre météo commence…
Le mieux serait d’attendre du sud-est pour aller en Martinique. Sinon on peut
arriver plus au nord : Guadeloupe,
Antigua voire Saint-Martin…
Une véritable expédition !
Plusieurs jours sont donc à prévoir, d’une croisière hautement
hauturière, et il est de plus en plus
probable que nous remonterons par une grande traversée dès que le vent tournera
au moins à l’est. Notre radar fonctionne bien et nous donnera des yeux qui
voient la nuit ! Tel un Big Brother bienveillant, le radar voit
tout ! Certains possesseurs de cet engin ont même tendance à dire qu’il en
voit trop ! Les crêtes des vagues, par exemple, lorsque la mer est agitée.
Mais pour contrer ce phénomène il suffit de réduire la sensibilité du dit
radar : auquel cas il ne détectera que les embarcations de petites et
moyennes tailles. En plus de cela nous faisons des « quarts » :
jeter un œil à l’horizon toutes les quinze à vingt minutes pour repérer
d’éventuels bateaux en « route de collision ». Par pleine lune, la
nuit claire est rassurante, par contre par nuit noire, comme cela va être le
cas, l’obscurité me fait peur et je rêve d’un sixième sens !
Pour vaincre mon appréhension je me remets en mémoire mon gros
livre du cours de navigation des Glénans, épais avec ses 782 pages, véritable
« bible » des voileux : il est aujourd’hui tout écorné mais
combien il m’a été utile ! Je m’y suis plongée, il y a maintenant
longtemps, avec une grande soif d’apprendre, dans sa lecture technique. J’y ai
appris une multitude de choses astucieuses et indispensables Malgré sa
volumineuse documentation c’était un livre bien conçu et parfaitement
accessible. Des explications d’une grande simplicité, dépouillées au maximum et
agrémentées de croquis clairs, pratiques, montraient la variété des essais
auxquels se livrer pour découvrir son bateau. Avec cette lecture enrichissante
tout devenait rapidement facile, évident, lumineux ! Avec tact et
subtilité cet ouvrage plaisant prépare
doucement, sans brusquerie, aux diverses manœuvres d’un voilier, sans en
masquer toutefois toutes les complexités ou les dangers. J’avais une sacrée
bonne affaire avec ce bouquin !
J’aime quand la nuit venue une grosse lune joufflue nous
éclabousse d’une luminosité diffuse, se fendant d’un large sourire, la
mutine !
L’air frais et léger était parfumé d’une grande variété de
senteurs marines. La brise, presque insignifiante, murmurait doucement en
effleurant les haubans d’AFODITE…
Un firmament étoilé et un horizon dégagé nous tiennent compagnie
cette nuit…Ce soir le ciel avait la couleur et la profondeur de l’infini…Au
loin des pélicans se muent en projectiles en plongeant à le recherche de leur pitance dans les eaux
claires du lagon de El Yaque.
Le jour suivant, Neptune, dieu des mers et des océans, fit
copain avec Eole pour nous offrir une belle journée.
L’avantage de vivre sous les tropiques est que d’une façon
immuable, la journée commence par un
soleil éclatant dans un ciel bleu azur. Aussi
la bonne humeur ne peut être que de mise…Et chaque soir nous assistons à
la féerie d’un coucher de soleil qui nous enchante.
Cette immensité liquide semble pénétrer intensément toutes les
cellules de mon corps…je suis en parfaite harmonie avec le moindre de ses
mouvements, je la sens respirer, chuchoter, gazouiller de contentement lorsque,
au lieu de lutter, je compose avec elle….Je suis à l’écoute du moindre
craquement, de la plus petite vibration ou gémissement, comme si autrefois,
dans une autre vie ( ?) – ou un autre univers- j’avais été marin. Il est
vrai que j’ai des ancêtres cap-horniers et pêcheurs d’Islande, il y a
peut-être un certain atavisme du côté de
la branche paimpolaise…
La mer bruissait doucement, presque endormie…AFRODITE glissait
sans bruit dans une mer calme qui brillait de mille reflets, éclaboussée
par les rayons ternes d’une lune blafarde.
Dans cette obscurité énigmatique les distances semblent floues et
incertaines…Il faut s’habituer et s’adapter.
Ce matin les eaux et le ciel sont d’une tranquillité profonde,
un peu trop à mon gout, car AFRODITE se traine en musardant sue des vaguelettes
dérisoires….Nous naviguons paisiblement.
Les derniers rayons du soleil couchant, délire de rouge et de
rose, nous annonce-t-il du beau temps pour les jours à venir ? Tout va
pour le mieux…Le disque solaire déclinant a coloré l’horizon, faisant étinceler
la mer…
La mer est parfaitement belle.
Des nuages blancs, aux formes bizarres, passent rapidement
devant le croissant d’une lune qui nous éclabousse de ses rayons diffus. Je
contemplai à l’envi la scintillation vive des étoiles dans la voûte profonde de
la nuit.
Un vent chaud et sec nous caresse, faisant autour de nous mille
remous voluptueux. En fait il s’agissait de deux petites baleines peu
farouches, à moins de dix mètres de notre AFRODITE : l’eau était claire et
nous pûmes parfaitement suivre les évolutions gracieuses de ces deux cétacés.
Nous remontions un alizé assez incisif ! Carabiné
même ! Nous emportant avec célérité…
Notre voilier caracole sur des vagues bouillonnâtes d’écume qui, en nous rattrapant,
se brisaient sur notre arrière en grondant…Des mouettes avides tournaient
autour de nous. Nous filions bon train malgré un ris et deux tours de génois.
Puis devant notre étrave le tourmenté territoire de la houle finit par
s’assoupir doucement. Une vie normale put reprendre ses droits à bord
d’AFRODITE.
Je mis une ligne à la traîne et remontais vite fait une belle
bonite : les soubresauts d’agonie de ce poisson encore plein de vigueur et
de frétillements spasmodiques m’éclaboussèrent de son sang et j’en fus écœurée…Jean,
prestement, découpa de fabuleuses portions dans les filets, de quoi nous
rassasier et nous apporter des protéines !
Je préfère les dorades coryphènes, surtout quand elles sont de
taille impressionnante, parées de leurs chatoyantes paillettes vertes, bleues
et or, qui malheureusement fanent très vite lorsqu’elles passent de vie à
trépas, mais procurent des poêlées délectables.
Pour nous détendre et nous amuser il y nos amis les dauphins qui
nous accompagnent en traçant des traits d’argent dans l’eau. Certains, plus
curieux que d’autres, sautent au ras de notre coque pour pouvoir nous observer
on dirait ! Plusieurs fois j’ai tenté l’expérience qui consiste à me dérober à leurs regards indiscrets.
Intrigués, ces surprenantes bêtes – pas
si bêtes - sautaient alors de plus
en plus haut en poussant des cris
bizarres et stridents, comme pour m’appeler ! Quand je réapparus, elles
cessèrent aussitôt cet étrange manège…Ces braves animaux sont vraiment les plus
petits effectuent toujours d’invraisemblables pitre. C’est pour moi un régal et une réjouissance permanente qui
m’enchante…
Mes autres compagnes habituelles sont : circonspection et
pondération !...
La nuit se prête à toutes les rêveries : notre cockpit se
transforme alors pour moi en observatoire idéal, offrant des échappées sur
l’infini de la mer, créant une ambiance magique. L’air et la luminosité de la
voute stellaire respirent comme une éternité inusable…Cela engendre un certain désœuvrement
pendant mes quarts, ce qui permet à mon âme d’avoir le temps d’être effrayée
d’entrevoir dans tous les clignotements de ces astres lointains des milliards
d’années…Mon imagination décuple à force de contempler dans toute cette
mécanique céleste l’étoile du soir, compagne de nos longues nuits de veille.
Dans un ciel où les nuages
s’effilochent, une grosse lune entourée d’un arc fantomatique projette des
ombres extravagantes sur ce désert liquide qui m’entoure, preuve irréfutable
que Dieu a sérieusement pleuré sur son ouvrage…le firmament reflété sur les
vagues a l’air de se reposer dans la mer…J’ai une façon très personnelle
d’interpréter, de voir, de sentir le monde, ajoutant une nouvelle et remarquable dimension à mes
fantasmes…Parfois je vais si loin en pensées que je n’ai plus aucune notion du
temps… Ce n’est que quand la teinte livide du ciel annonce le lever du jour que
je retraverse à regret les chicanes qui ralentissent le temps pour revenir à la
réalité…C’est pour ces petits moments éphémères et chimériques que je voyage
aussi et je remercie de tout mon cœur cette croisière de me le permettre…
Au soir, loin devant nous, une monstrueuse barre nuageuse
masquait tout l’horizon : des cumulo-nimbus bourgeonnaient d’une manière
inquiétante, formant et déformant leurs excroissances volumineuses…Un terrible
orage se préparait nous obligeant à le traverser ! Peu réjoui par cette
perspective désagréable, « l’équipage » prépara activement le voilier
à cette situation belliqueuse : la nuit tombée nous longeâmes ce front
monumental. Des éclairs zébraient en permanence un ciel noir et mauve, nous
éclairant comme en plein jour. Quelques oiseaux retardataires fuyaient à
tire-d’aile à l’approche de cette méchante tourmente. Parfois des gouttes
énormes tombaient en explosant sur la surface du pont. Ce tambourinement
impérieux ne couvrait pas les roulements du tonnerre qui s’en donnait à cœur
joie pour nous terroriser. A notre grand étonnement nous longeâmes une grande
partie de la nuit ce spectacle prodigieux, étourdissant et intimidant. Ce ne
fut que quelques heures avant l’aube que le déluge s’abattit sur nous. Il était
précédé de rafales de vent surprenantes, heureusement plus impressionnâtes que
dangereuses pour notre AFRODITE bien vaillant. Cette zone frontale une fois
passée, un rideau de pluie dense, genre cataracte des chutes du Niagara, nous
lessiva, nous trempa jusqu’aux os,
liquéfiant notre moral et nos cerveaux…Plusieurs fois la foudre tomba à
proximité, élevant dans les airs des nuages de vapeur et d’ozone dans un
chuintement qui me glaçait d’effroi… L’électricité statique ambiante était
telle qu’elle hérissait pêle-mêle
cheveux et poils…à intervalles réguliers, des flammes légères et
fugitives couraient le long de nos haubans, entretenant appréhension et
angoisse, nous nous attendions à être foudroyés à tout moment et nous aurions
payé cher pour être ailleurs ! Au petit matin nous vîmes enfin avec soulagement
l’aube blêmissant…sans que rien ne le laisse présager, rapidement, une grande
merveille vint éclater et tout éclipser : le ciel s’éclaircit
graduellement et un magnifique flamboiement apparut à nos yeux éblouis …Le
soleil se mit à briller entre les nuages dont il activa la déroute…Un solide
petit-déjeuner reconstituant redonna un peu de gaieté à nos visages fatigués…
Puis ce fut la pétole, la grande « calmasse », le
désespoir des voileux….Dans cette eau transformée en miroir, se formèrent
d’immenses ronds phosphorescents que nous traversâmes avec des craintes
diffuses…cette chose inconnue et inexplicable, au bord de l’irréalité, me
laissa méfiante et soupçonneuse…Par moments, à
l’approche de notre voilier, s’envolaient en rafales nombreuses des poissons
volants qui planaient sur de belles distances avant de replonger dans
l’océan ! Quelques uns, maladroits, ou plus affolés que les autres,
retombaient en frétillant jusqu’au
cockpit et au petit matin nous trouvâmes plusieurs cadavres sur le pont un peu
partout !
Le soir je ne me laisse envelopper par la lumière finissante du
jour et quelque chose au fond de moi me dit que l’on est bien…
Le vent et l’immensité liquide qui couvrent aujourd’hui les
trois quarts de la planète se livrent un combat incessant et s’affrontent
partout et toujours avec de grands extrêmes. Jour et nuit en navigation il faut
être prêt à anticiper ses fougues, ses lubies ou ses incartades ! D’avoir pour limite
l’infini de ciel et de la mer nous met en face de nos responsabilités. Pas de
voisins, pas de gens auxquels nous
référer, personne à imiter et encore moins pour nous critiquer…Et tout ce que
nous faisons correspond à une réalité profonde. Notre comportement n’est plus
conditionné par la société ! La vie est ramenée aux choses essentielles.
Sur un voilier de grande croisière il faut toujours faire la meilleure chose au
bon moment, il peut en aller de la destinée du bateau ou de la vie de
l’équipage ! Pas question de faux-fuyants, de dérobades et il faut
procéder de la même façon avec soi en mettant toutes les choses du bon côté
pour y parvenir…Car on peut passer de la liberté à la servitude en un rien de
temps, comme de la quiétude à l’inquiétude…
Je me souviens d’une tornade que nous avons vue de près lors de
notre deuxième transat. En fin de soirée le ciel avait pris des couleurs
inquiétantes en virant du noir au violet en passant par le mauve… ? Quelques
petits mouvements tourbillonnaires s’amorcèrent de-ci de-là, donnant à ce
phénomène orageux un drôle d’aspect inquiétant…Une calamité nouvelle allait
saccager la torpeur crépusculaire…le vent avait une intensité fluctuante voire
farfelue. Il soufflait à tour de rôle de
tous les points cardinaux, nous faisant tournicoter…ce sortilège persévéra
jusqu’à l’apparition soudain d’une colonne en rotation, sorte de trompe
d’éléphant qui pendait à la base d’un gros nuage menaçant…Cette colonne d’eau
zigzaguait comme un lièvre pris en chasse, aspirant tut ce qui flottait sur la
mer ! Sous nos yeux incrédules et horrifiés elle passait en grondant,
ingurgitant tout ce qui se trouvait sur son passage avec une facilité
déconcertante !...Puis soudain, cet étonnant caprice de la nature fonça
sur nus, semant la panique à bord et nous nous réfugiâmes à l’intérieur…
bouclés dans notre bateau, le souffle court, nous attendîmes en nous
cramponnant que ce désastre nous engloutisse, nous absorbe, nous gobe tout
entier….le cœur battant nous guettions attentivement, mais rien ne se
produisit…nos yeux effrayés se lançaient des interrogations muettes.au bout
d’un moment, n’en pouvant plus, je me risquai à jeter un œil à
l’extérieur : à mon grand soulagement ce monstre vorace avait au
dernier moment changé de cap ! Il était parti ravager d’autres
contrées…puis très vite, comme il était venu, il disparut sur l’horizon…Ensuite
pluie et vent nous harcelèrent pendant une heure, nous jouant une sérénade
connue ! Là, nous avions l’habitude ! Et une certaine expérience qui nous
permit d’y faire face calmement.
Puis la nuit revint, le
ciel resta clair, étincelant de deux parfois un peu voilés, semés inégalement
comme des diamants éternels dans l’immensité du firmament, tandis qu’une lune
d’argent baignait la mer de tous ses éclats…Quelle beauté ! J’aperçois
quelques étoiles dans les échappées du ciel clair entre les nuages.
Un petit croissant de lune, très bas sur l’horizon, ajoute une
note féerique, au loin, sur la mer. Sa
clarté diffuse et trompeuse joue même d’une manière inquiétante avec une légère
brume qui monte de l’eau et s’évanouit en tourbillonnant.
Au cours de la nuit le vent se mue en légère brise. Tous les
cierges de l’hémisphère s’allument dans le ciel, faisant ressortir l’éclat
particulier de certaines étoiles…De quart, je me complais à écouter les
craquements légers du voilier, le chuintement de l’eau sur les coques et les
inévitables frémissements des voiles chevauchées par la brise… Toutes les mille
et une petites rumeurs rassurantes, si flatteuses à l’oreille de tout
navigateur...
A l’aube du 4ème jour
un somptueux lever de soleil reflète ses couleurs sur un océan apaisé. Les bleus et les rouges
intenses se dégradent doucement pour se muer en teintes roses et vertes dont
les nuances incendient le ciel, promesse d’une belle journée ? Nous sommes dans les premières flammes roses
du levant…Sous un ciel outre-mer quelques cirrus angéliques s’éparpillent…
Dans l’après-midi, le ciel est pommelé, et je remarque des
dorades qui tissent des arabesques au ras de la surface. Elles patouillent
autour du bateau et leurs écailles jettent des éclats lorsqu’elles passent à
proximité d’AFRODITE.
La mer, éternel réceptacle de l’oubli, joue la belle au bois
dormant. Pas l’ombre de l’ourlet d’une minuscule vague. Rien ! Le silence
absolu sous l’immense fouillis des étoiles…
Dans un ciel lumineux, barbouillé de lambeaux de nuages
qui s’effilochent, le soleil couchant prodigue une lumière sourde qui fige le
décor. Je suis grisée par ce magnifique coucher de soleil ensanglantant à
l’ouest une mer considérablement calmée.
Je contemple un lever de soleil flamboyant qui nimbe de rose
notre élégant voilier.
La mer est belle. Notre AFRODITE force aisément sa route dans
des lames raisonnables. L’eau en glissant enveloppe la carène en glissant sur
elle comme pour la caresser. Au bon près nous filons rapidement. Parfois l’écume
vient lécher les hiloires. Des nuages
ouatés s’accumulent partout dans le ciel d’un bleu intense. Des oiseaux
tournoient sans cesse au-dessus de l’océan, annonçant des bancs de poissons. Dans
notre sillage rectiligne apparait même une mouette qui, après avoir effectué le
tour du bateau comme pour une brève inspection, s’élève en spirale, éclairant
alternativement ses ailes toutes blanches au soleil revenu…
Le ciel grisonne lentement et gomme peu à peu l’obscurité.
C’est une belle journée, parfaite même, une de celles qui font
oublier les mauvaises et pardonner à la mer tous les moments difficiles qu’elle
nous a fait endurer parfois…Touts voiles dehors notre AFRODITE trace un long
sillage parmi des vaguelettes argentées…
L’alizé fait vibrer la lune sur les eaux qui ondulent…
Un soleil tout neuf se lève, jouant dans nos voiles, projetant
des ombres gracieuses sur le pont. La mer clapote. Une force tranquille se
cache derrière.
Nos étraves bavardent, chantonnant la romance de la mer.
Les somptueuses couleurs que prend l’aube mangent les dernières
ombres de la nuit…
Sous les regards indifférents de quelques mouettes qui
chevauchent une houle légère …
Des amas de nuages flottent vers le sud, amoncelés comme de
vastes édifices déchirant la lumière du soleil.
Nos étraves blanches d’écume déchirent des flots pressés par ce
méchant vent qui redresse les lames à rebrousse-poil.
A la nuit tombante les épousailles d’un ciel noir avec une mer
sombre et lugubre engendrent une cavalcade éperdue de nuages jaunâtres qu’un
vent furieux chasse à travers le ciel à grande vitesse. Peu après, dans une
nuit d’encre, des éclairs hachent l’horizon, plongeant dans les recoins les
plus profonds. Les assourdissants coups de tonnerre roulent leurs échos sans
interruption. Le ciel, mitraillé d’éclairs, se met à déverser des trombes d’eau qui cascadent en
ruisselant. L’air est à tel point saturé d’électricité que le long des haubans
courent des feux de Saint-Elme !
formant des auréoles d’aigrettes crépitantes…
Seul un ciel sans nuage et scintillant d’étoiles nous clignote
son interminable message…Oui, mais quel
message ?...De nuit, sur un voilier, et par temps calme, c’est l’endroit
idéal pour remonter la plus loin possible dans ses souvenirs…Dans le silence et
l’immensité de l’océan, je pousse plus en avant la quête de mon passé, comblant
certaines lacunes de ma mémoire, allant jusqu’au plus profond de ma conscience.
Je suis bien et j’éprouve un sentiment de liberté quasiment sublime, proche de
l’extase…
A une nuit paisible succède un lever de soleil flamboyant. Il
fait un temps splendide et dans le ciel bleu glissent quelques cirrus en
filaments…
JUSQU’AU BOUT !
Bien sûr
nous savions aussi que tous ces sont
très à l’ouest des Antilles : le vent dominant soufflant d’Est dans la
région, chaque mille à l’ouest est un mille de plus qui peut être difficile
pour le retour…mais nous nous sommes
laissé guider par nos envies de grand sud et de l’abri des cyclones.
Avant de
quitter cet archipel, une anecdote historique :
Certains prétendent que sur la côte au vent des
Avès de Barlovento gît une grande partie de la flotte du comte d’Estrées qui
captura le navire hollandais Binkes au large de l’île de Tobago puis fit voile
vers la France pour réparer ses bateaux à Brest. Il revint aux Indes
Occidentales (les « West Indies ») le 7 octobre 1796 pour une
nouvelle tentative de mettre la main sur les îles ; il semblerait que
d’Estrées fit route sur Curaçao, mais, dans la nuit du 4 mai 1697, son navire
porte-drapeau mit la voile vers une des Avès : avant que quoi que ce soit
fut entrepris, les navires le suivant s’entassèrent derrière lui ! Au
lever du jour, sept bateaux du convoi, trois transporteurs et trois frégates
étaient en morceaux sur le récif corallien et perdus corps et biens… le
septième navire, le « Jamaïca »,
fut sauvé in extremis « grâce » à une erreur de navigation !
Le seul problème à ce jour est que personne ne
peut affirmer sur laquelle des Avès se trouvent les épaves de la flotte de
d’Estrées… Daniel Camejo soutient que c’est aux Avès de Barlovento que la
flotte a coulé…il prétend aussi que les navires faisaient route de Tobago vers
Curaçao qu’ils comptaient investir…
Dudly Pope, de son côté, dit que l’endroit
exact est l’île d’Avès, au milieu de la mer Caraïbe, au large de la
Martinique !
La solution à ce mystère réside dans la réponse
aux questions suivantes :
- quel était le dernier mouillage de la flotte
de d’Estrées ?
-où cette flotte a-t-elle été vue pour la
dernière fois ?
Autrement dit : où était la flotte entre
le 7 octobre 1796 et le 4 mai 1797 ?
Toujours est-il que quelque part pourrait se
trouver un fabuleux trésor de canons, de joyaux, objets divers et variés de
cette époque ainsi que des restes archéologiques !
Mais, avant d’entreprendre une plongée, il
faudrait pouvoir répondre aux questions ci-dessus !
LE RETOUR…
Comme je ne voudrais pas être taxée d’impartialité par une description trop
élogieuse de ces archipels, je vous transcris une traduction sans prétention
d’un extrait du guide Doyle « Cruising Guide to Venezuela »
« Les Roques font partie des
quelques sites où j’ai eu le plus de plaisir à naviguer. Une bonne brise, une mer belle aux couleurs toujours
changeantes, font qu’il est un pur bonheur de croiser aux Roques. L’eau y est
si claire que même sous voile, on peut toujours négocier les passages
difficiles entre les récifs pour trouver un mouillage idyllique. Los Roques
sont un lagon s’étire sur environ 25 milles de long et 14 de large. Les récifs
coralliens à fleur d’eau reflètent la lumière avec une telle force que les
nuages prennent parfois une teinte vert d’eau. Los Roques restent encore assez
peu visitées. Il est ainsi fréquent de trouver un mouillage désert qui vous
donnera le sentiment d’être un explorateur du bout du monde ».
En tout le site est aussi un lieu idéal pour faire grossir l’album photo
d’AFRODITE : les photos sont en effet un élément incontournable de la
mémoire du voyage. Plus encore que dans d’autres domaines l’appareil photo
numérique est devenu incontournable, également les jetables qui vont sous
l’eau. Pour immortaliser mon énième coucher de soleil il me suffit d’appuyer
sur le bouton aussi souvent que j’en ai envie. Avec le numérique je peux
prendre trente clichés de dauphins virevoltant autour des étraves d’AFRODITE et
n’en conserver que deux ou trois. Surtout que ce n’est pas facile de faire une
bonne photo de dauphins! Lorsque la carte mémoire est pleine et bien il suffit
de passer les bonnes, les moyennes et « acceptables » pour les
stocker sur le disque dur de l’ordinateur. Du coup je peux alors me lancer dans des retouches
éventuelles avec un logiciel ad hoc ! Et fini la contrainte des volumineux
albums photo. C’est ce que j’appelle le daguerréotype nouvelle
génération ! Le maniement est
simplifié et mes photos vont directement du producteur au consommateur
sans passer par les couteux services
d’un laboratoire de développement. Les clichés de la pêche « miraculeuse »
et héroïque du capitaine peuvent ainsi faire l’objet d’un diaporama alors que
la bête n’est pas encore consommée ! Et pour épater les mais de métropole
rien de plus facile que de leur envoyer un mail (sadique) avec une photo
panoramique du lagon dans lequel on est mouillé…si l’on fait route avec un
« batocopain » on peut alors avoir enfin une photo du bateau surfant
sur les vagues prise depuis leur bord et réciproquement.
Ca soir le ciel avait la couleur et la profondeur de l’infini…des pélicans
se muaient en projectiles en plongeant à
la recherche de leur pitance dans les eaux claires du lagon…
DERNIER
MOUILLAGE de LOS ROQUES :
de GRAN ROQUE à la bouche SEBASTOPOL : 12 milles
MOUILLAGE
SEBASTOPOL :
LAT.11°47 429
N .LONG.066°34 416 W.
CAP AU NORD
EST !
La Martinique au
cap 54 à 270 milles,
Mais, en ligne
directe…
Les cartes météo que je reçois grâce
à la BLU sont encourageantes ce matin : elles indiquent un vent orienté au
sud-est (légèrement) pour les prochains jours…Juste le vent qu’il nous
faut !
1er jour
Au départ de la Blanquilla, que le cap soit sur Grenade, Sainte-Lucie ou la
Martinique, toutes les routes sont nord-est ! Le jeu de patience de la fenêtre météo commence…
Le mieux serait d’attendre du sud-est pour aller en Martinique. Sinon on peut
arriver plus au nord : Guadeloupe,
Antigua voire Saint-Martin…
Une véritable expédition !
Plusieurs jours sont donc à prévoir, d’une croisière hautement hauturière,
et il est de plus en plus probable que
nous remonterons par une grande traversée dès que le vent tournera au moins à
l’est. Notre radar fonctionne bien et nous donnera des yeux qui voient la
nuit ! Tel un Big Brother bienveillant, le radar voit tout ! Certains
possesseurs de cet engin ont même tendance à dire qu’il en voit trop ! Les
crêtes des vagues, par exemple, lorsque la mer est agitée. Mais pour contrer ce
phénomène il suffit de réduire la sensibilité du dit radar : auquel cas il
ne détectera que les embarcations de petites et moyennes tailles. En plus de
cela nous faisons des « quarts » : jeter un œil à l’horizon
toutes les quinze à vingt minutes pour repérer d’éventuels bateaux en
« route de collision ». Par pleine lune, la nuit claire est
rassurante, par contre par nuit noire, comme cela va être le cas, l’obscurité
me fait peur et je rêve d’un sixième sens !
En théorie, en ligne droite directe, de la Blanquilla à la Martinique il y
270 milles au cap 54°, cap impossible à tenir puisque c’est juste dans notre
nez, c’est-à-dire boute au vent….c’est là que ça coince…
Cette immensité liquide semble pénétrer intensément toutes les cellules de
mon corps…je suis en parfaite harmonie avec le moindre de ses mouvements, je la
sens respirer, chuchoter, gazouiller de contentement lorsque, au lieu de
lutter, je compose avec elle….Je suis à l’écoute du moindre craquement, de la
plus petite vibration ou gémissement, comme si autrefois, dans une autre vie
( ?) – ou un autre univers- j’avais été marin. Il est vrai que j’ai des
ancêtres cap-horniers et pêcheurs d’Islande, il y a peut-être un certain atavisme du côté de la branche
paimpolaise…
1er virement de bord + 1 ris + un tour de rouleau
En six heures = 40 milles de faits
1ère nuit
Les derniers rayons du soleil couchant, délire de rouge et de rose, nous
annonce-t-il du beau temps pour les jours à venir ? Tout va pour le
mieux…Le disque solaire déclinant a coloré l’horizon, faisant étinceler la mer…
Pour vaincre mon appréhension je me remets en mémoire mon gros livre du
cours de navigation des Glénans, épais avec ses 782 pages, véritable
« bible » des voileux : il est aujourd’hui tout écorné mais
combien il m’a été utile ! Je m’y suis plongée, il y a maintenant
longtemps, avec une grande soif d’apprendre, dans sa lecture technique. J’y ai
appris une multitude de choses astucieuses et indispensables Malgré sa
volumineuse documentation c’était un livre bien conçu et parfaitement
accessible. Des explications d’une grande simplicité, dépouillées au maximum et
agrémentées de croquis clairs, pratiques, montraient la variété des essais
auxquels se livrer pour découvrir son bateau. Avec cette lecture enrichissante
tout devenait rapidement facile, évident, lumineux ! Avec tact et
subtilité cet ouvrage plaisant prépare
doucement, sans brusquerie, aux diverses manœuvres d’un voilier, sans en
masquer toutefois toutes les complexités ou les dangers. J’avais une sacrée
bonne affaire avec ce bouquin !
2ème jour
J’ai mis une ligne à la traîne et remontais vite fait une belle
bonite : les soubresauts d’agonie de ce poisson encore plein de vigueur et
de frétillements spasmodiques m’éclaboussèrent de son sang et j’en fus
écœurée…Jean, prestement, découpa de fabuleuses portions dans les filets, de
quoi nous rassasier et nous apporter des protéines !
Je préfère les dorades coryphènes, surtout quand elles sont de taille
impressionnante, parées de leurs chatoyantes paillettes vertes, bleues et or,
qui malheureusement fanent très vite lorsqu’elles passent de vie à trépas, mais
procurent des poêlées délectables.
La moyenne oscille entre 6 et demi et 8 nœuds, c’est pas mal, sauf que
c’est pas au cap….Donc 160 milles des parcourus depuis hier matin.
ON VIRE :
on a cap sur Saint Martin malgré que nous soyons par le travers de Deshaies en
Guadeloupe mais on va pas faire 45 milles au moteur….
2ème nuit
J’aime quand la nuit venue une grosse lune joufflue nous éclabousse d’une
luminosité diffuse, se fendant d’un large sourire, la mutine ! mais pour
l’instant je n’ai droit qu’à un petit croissant naissant…
L’air frais et léger était parfumé d’une grande variété de senteurs
marines. La brise, presque insignifiante, murmurait doucement en effleurant les
haubans d’AFODITE…
Un firmament étoilé et un horizon dégagé nous tiennent compagnie cette
nuit…Ce soir le ciel avait la couleur et la profondeur de l’infini…J’ai
commencé la lecture audio des audio livres donnés par Isabelle :
« Immortelle randonnée, de Jean-Christophe Ruffin » (qui évoque son « pèlerinage » sur
le chemin de Compostelle, superbe) et le « voyage de l’éléphant » de
Ferragano, prix Nobel de Littérature, sur une toute autre histoire mais tout
aussi captivante.
Neptune, roi des mers et des océans, a fait copain avec Eole pour nous
offrir une belle journée.
L’avantage de vivre sous les tropiques est que d’une façon immuable, la
journée commence par un soleil éclatant
dans un ciel bleu azur. Aussi la bonne
humeur ne peut être que de mise…Et chaque soir nous assistons à la féerie d’un
coucher de soleil qui nous enchante.
La mer bruissait doucement, presque endormie…AFRODITE glissait sans bruit
dans une mer calme qui brillait de mille reflets, éclaboussée par les rayons ternes d’une lune blafarde. Dans
cette obscurité énigmatique les distances semblent floues et incertaines…Il
faut s’habituer et s’adapter.
Des nuages blancs, aux formes bizarres, passent rapidement devant le
croissant d’une lune qui nous éclabousse de ses rayons diffus. Je contemplai à
l’envi la scintillation vive des étoiles dans la voûte profonde de la nuit.
3 ème jour
Ce matin les eaux et le ciel sont d’une tranquillité profonde, un peu trop
à mon gout, car AFRODITE se traine en musardant sue des vaguelettes
dérisoires….Nous naviguons paisiblement.
La mer est parfaitement belle.
Un vent chaud et sec nous caresse, faisant autour de nous mille remous
voluptueux. En fait il s’agissait de deux petites baleines peu farouches, à
moins de dix mètres de notre AFRODITE : l’eau était claire et nous pûmes
parfaitement suivre les évolutions gracieuses de ces deux cétacés.
Nous remontions un alizé assez incisif ! Carabiné même ! Nous
emportant avec célérité…
Notre voilier caracole sur des vagues
bouillonnâtes d’écume qui, en nous rattrapant, se brisaient sur notre
arrière en grondant…Des mouettes avides tournaient autour de nous. Nous filions
bon train malgré un ris et deux tours de génois. Puis devant notre étrave le
tourmenté territoire de la houle finit par s’assoupir doucement. Une vie
normale put reprendre ses droits à bord d’AFRODITE.
Pour nous détendre et nous amuser il y nos amis les dauphins qui nous
accompagnent en traçant des traits d’argent dans l’eau. Certains, plus curieux
que d’autres, sautent au ras de notre coque pour pouvoir nous observer on
dirait ! Plusieurs fois j’ai tenté l’expérience qui consiste à me dérober à leurs regards indiscrets.
Intrigués, ces surprenantes bêtes – pas
si bêtes - sautaient alors de plus
en plus haut en poussant des cris
bizarres et stridents, comme pour m’appeler ! Quand je réapparus, elles
cessèrent aussitôt cet étrange manège…Ces braves animaux sont vraiment les plus
petits effectuent toujours d’invraisemblables pitre. C’est pour moi un régal et une réjouissance permanente qui
m’enchante…
Le ris a été lâché depuis belle lurette et le bateau avance bien toutes
voiles dehors. Encore deux jours de mer ????Le cap WIND est 160 à 66° du
vent, donc c’est pas vraiment ce qu’on appelle du près !!! Le vent vient
du 94 (soit à peu près Est) hier il venait du 120 (donc sud-est)
40 milles en dix heures et on est quand même contents
Mes autres compagnes habituelles sont : circonspection et
pondération !...
3ème nuit
La nuit se prête à toutes les rêveries : notre cockpit se transforme
alors pour moi en observatoire idéal, offrant des échappées sur l’infini de la
mer, créant une ambiance magique. L’air et la luminosité de la voute stellaire
respirent comme une éternité inusable…Cela engendre un certain désœuvrement
pendant mes quarts, ce qui permet à mon âme d’avoir le temps d’être effrayée
d’entrevoir dans tous les clignotements de ces astres lointains des milliards
d’années…Mon imagination décuple à force de contempler dans toute cette
mécanique céleste l’étoile du soir, compagne de nos longues nuits de veille.
Dans un ciel où les nuages
s’effilochent, une grosse lune entourée d’un arc fantomatique projette des
ombres extravagantes sur ce désert liquide qui m’entoure, preuve irréfutable
que Dieu a sérieusement pleuré sur son ouvrage…le firmament reflété sur les
vagues a l’air de se reposer dans la mer…J’ai une façon très personnelle
d’interpréter, de voir, de sentir le monde, ajoutant une nouvelle et remarquable dimension à mes
fantasmes…Parfois je vais si loin en pensées que je n’ai plus aucune notion du
temps… Ce n’est que quand la teinte livide du ciel annonce le lever du jour que
je retraverse à regret les chicanes qui ralentissent le temps pour revenir à la
réalité…C’est pour ces petits moments éphémères et chimériques que je voyage
aussi et je remercie de tout mon cœur cette croisière de me le permettre…
4 ème jour
Au moment de mettre l’eau à chauffer dans la bouilloire : rien, nada =
plus de gaz ! en trois mois j’ai vidé ma bouteille de treize kilos ;
il est vrai qu’entre la cocotte-minute, les pains et pâtisseries, poissons au
four et 48 langoustes…e
A l’aube du 4ème jour un
somptueux lever de soleil reflète ses couleurs
sur un océan apaisé. Les bleus et les rouges intenses se dégradent
doucement pour se muer en teintes roses et vertes dont les nuances incendient
le ciel, promesse d’une belle journée ?
Nous sommes dans les premières flammes roses du levant…Sous un ciel
outre-mer quelques cirrus angéliques s’éparpillent…
Puis ce fut la pétole, la grande « calmasse », le désespoir des
voileux….Dans cette eau transformée en miroir,
se formèrent d’immenses ronds phosphorescents
que nous traversâmes avec des craintes diffuses…cette chose inconnue et
inexplicable, au bord de l’irréalité, me laissa méfiante et soupçonneuse…Par
moments, à l’approche de notre voilier,
s’envolaient en rafales nombreuses des poissons volants qui planaient sur de
belles distances avant de replonger dans l’océan ! Quelques uns,
maladroits, ou plus affolés que les autres, retombaient en frétillant jusqu’au cockpit et au petit matin nous
trouvâmes plusieurs cadavres sur le pont un peu partout !
Le soir je ne me laisse envelopper par la lumière finissante du jour et
quelque chose au fond de moi me dit que l’on est bien…
4 ème nuit
Au soir, loin devant nous, une monstrueuse barre nuageuse masquait tout
l’horizon : des cumulo-nimbus bourgeonnaient d’une manière inquiétante,
formant et déformant leurs excroissances volumineuses…Un terrible orage se
préparait nous obligeant à le traverser ! Peu réjoui par cette perspective
désagréable, « l’équipage » prépara activement le voilier à cette
situation belliqueuse : la nuit tombée nous longeâmes ce front monumental.
Des éclairs zébraient en permanence un ciel noir et mauve, nous éclairant comme
en plein jour. Quelques oiseaux retardataires fuyaient à tire-d’aile à
l’approche de cette méchante tourmente. Parfois des gouttes énormes tombaient
en explosant sur la surface du pont. Ce tambourinement impérieux ne couvrait
pas les roulements du tonnerre qui s’en donnait à cœur joie pour nous
terroriser. A notre grand étonnement nous longeâmes une grande partie de la
nuit ce spectacle prodigieux, étourdissant et intimidant. Ce ne fut que
quelques heures avant l’aube que le déluge s’abattit sur nous. Il était précédé
de rafales de vent surprenantes, heureusement plus impressionnâtes que
dangereuses pour notre AFRODITE bien vaillant. Cette zone frontale une fois
passée, un rideau de pluie dense, genre cataracte des chutes du Niagara, nous
lessiva, nous trempa jusqu’aux os,
liquéfiant notre moral et nos cerveaux…Plusieurs fois la foudre tomba à
proximité, élevant dans les airs des nuages de vapeur et d’ozone dans un
chuintement qui me glaçait d’effroi… L’électricité statique ambiante était
telle qu’elle hérissait pêle-mêle
cheveux et poils…à intervalles réguliers, des flammes légères et
fugitives couraient le long de nos haubans, entretenant appréhension et
angoisse, nous nous attendions à être foudroyés à tout moment et nous aurions
payé cher pour être ailleurs ! Au petit matin nous vîmes enfin avec
soulagement l’aube blêmissant…sans que rien ne le laisse présager, rapidement,
une grande merveille vint éclater et tout éclipser : le ciel s’éclaircit
graduellement et un magnifique flamboiement apparut à nos yeux éblouis …Le
soleil se mit à briller entre les nuages dont il activa la déroute…Un solide
petit-déjeuner reconstituant redonna un peu de gaieté à nos visages fatigués…
Le vent et l’immensité liquide qui couvrent aujourd’hui les trois quarts de
la planète se livrent un combat incessant et s’affrontent partout et toujours
avec de grands extrêmes. Jour et nuit en navigation il faut être prêt à
anticiper ses fougues, ses lubies ou ses
incartades ! D’avoir pour limite l’infini de ciel et de la mer nous
met en face de nos responsabilités. Pas de voisins, pas de gens auxquels nous référer, personne à imiter
et encore moins pour nous critiquer…Et tout ce que nous faisons correspond à
une réalité profonde. Notre comportement n’est plus conditionné par la
société ! La vie est ramenée aux choses essentielles. Sur un voilier de
grande croisière il faut toujours faire la meilleure chose au bon moment, il
peut en aller de la destinée du bateau ou de la vie de l’équipage ! Pas
question de faux-fuyants, de dérobades et il faut procéder de la même façon
avec soi en mettant toutes les choses du bon côté pour y parvenir…Car on peut
passer de la liberté à la servitude en un rien de temps, comme de la quiétude à
l’inquiétude…
5ème jour
Au cours de la nuit le vent se mue en légère brise. Tous les cierges de
l’hémisphère s’allument dans le ciel, faisant ressortir l’éclat particulier de
certaines étoiles…De quart, je me complais à écouter les craquements légers du
voilier, le chuintement de l’eau sur les coques et les inévitables
frémissements des voiles chevauchées par la brise… Toutes les mille et une
petites rumeurs rassurantes, si flatteuses à l’oreille de tout navigateur...
Des amas de nuages flottent vers le sud, amoncelés comme de vastes édifices
déchirant la lumière du soleil.
Nos étraves blanches d’écume déchirent des flots pressés par ce méchant
vent qui redresse les lames à rebrousse-poil.
A la nuit tombante les épousailles d’un ciel noir avec une mer sombre et
lugubre engendrent une cavalcade éperdue de nuages jaunâtres qu’un vent furieux
chasse à travers le ciel à grande vitesse. Peu après, dans une nuit d’encre, des
éclairs hachent l’horizon, plongeant dans les recoins les plus profonds. Les
assourdissants coups de tonnerre roulent leurs échos sans interruption. Le
ciel, mitraillé d’éclairs, se met à
déverser des trombes d’eau qui cascadent en ruisselant. L’air est à tel point
saturé d’électricité que le long des haubans courent des feux de Saint-Elme ! formant des
auréoles d’aigrettes crépitantes…
Seul un ciel sans nuage et scintillant d’étoiles nous clignote son interminable message…Oui, mais quel
message ?...De nuit, sur un voilier, et par temps calme, c’est l’endroit
idéal pour remonter la plus loin possible dans ses souvenirs…Dans le silence et
l’immensité de l’océan, je pousse plus en avant la quête de mon passé, comblant
certaines lacunes de ma mémoire, allant jusqu’au plus profond de ma conscience.
Je suis bien et j’éprouve un sentiment de liberté quasiment sublime, proche de
l’extase…
A une nuit paisible succède un lever de soleil flamboyant. Il fait un temps
splendide et dans le ciel bleu glissent quelques cirrus en filaments…
6 èmejour
Dans l’après-midi, le ciel est pommelé, et je remarque des dorades qui
tissent des arabesques au ras de la surface. Elles patouillent autour du bateau
et leurs écailles jettent des éclats lorsqu’elles passent à proximité
d’AFRODITE.
La mer, éternel réceptacle de l’oubli, joue la belle au bois dormant. Pas
l’ombre de l’ourlet d’une minuscule vague. Rien ! Le silence absolu sous
l’immense fouillis des étoiles…
Dans un ciel lumineux, barbouillé de lambeaux de nuages qui s’effilochent,
le soleil couchant prodigue une lumière sourde qui fige le décor. Je suis
grisée par ce magnifique coucher de soleil ensanglantant à l’ouest une mer
considérablement calmée.
Je contemple un lever de soleil flamboyant qui nimbe de rose notre élégant
voilier.
La mer est belle. Notre AFRODITE force aisément sa route dans des lames
raisonnables. L’eau en glissant enveloppe la carène en glissant sur elle comme
pour la caresser. Au bon près nous filons rapidement. Parfois l’écume vient
lécher les hiloires. Des nuages ouatés
s’accumulent partout dans le ciel d’un bleu intense. Des oiseaux tournoient
sans cesse au-dessus de l’océan, annonçant des bancs de poissons. Dans notre
sillage rectiligne apparait même une mouette qui, après avoir effectué le tour
du bateau comme pour une brève inspection, s’élève en spirale, éclairant
alternativement ses ailes toutes blanches au soleil revenu…
Le ciel grisonne lentement et gomme peu à peu l’obscurité.
C’est une belle journée, parfaite même, une de celles qui font oublier les
mauvaises et pardonner à la mer tous les moments difficiles qu’elle nous a fait
endurer parfois…Touts voiles dehors notre AFRODITE trace un long sillage parmi
des vaguelettes argentées…
L’alizé fait vibrer le croissant de une en son premier quartier sur les
eaux qui ondulent…
Un soleil tout neuf se lève, jouant dans nos voiles, projetant des ombres
gracieuses sur le pont. La mer clapote. Une force tranquille se cache derrière.
Nos étraves bavardent, chantonnant la romance de la mer.
Les somptueuses couleurs que prend l’aube mangent les dernières ombres de
la nuit…
Sous les regards indifférents de quelques mouettes qui chevauchent une
houle légère …
6ème nuit
Et voilà qu’une tornade arrive : fin de soirée le ciel avait pris des
couleurs inquiétantes en virant du noir au violet en passant par le
mauve… ? Quelques petits mouvements tourbillonnaires s’amorcèrent de-ci
de-là, donnant à ce phénomène orageux un drôle d’aspect inquiétant…Une calamité
nouvelle allait saccager la torpeur crépusculaire…le vent avait une intensité
fluctuante voire farfelue. Il soufflait à tour de rôle de tous les points cardinaux, nous faisant
tournicoter…ce sortilège persévéra jusqu’à l’apparition soudain d’une colonne
en rotation, sorte de trompe d’éléphant qui pendait à la base d’un gros nuage
menaçant…Cette colonne d’eau zigzaguait comme un lièvre pris en chasse,
aspirant tut ce qui flottait sur la mer ! Sous nos yeux incrédules et
horrifiés elle passait en grondant, ingurgitant tout ce qui se trouvait sur son
passage avec une facilité déconcertante !...Puis soudain, cet étonnant
caprice de la nature fonça sur nus, semant la panique à bord et nous nous
réfugiâmes à l’intérieur… bouclés dans notre bateau, le souffle court, nous
attendîmes en nous cramponnant que ce désastre nous engloutisse, nous absorbe,
nous gobe tout entier….le cœur battant nous guettions attentivement, mais rien
ne se produisit…nos yeux effrayés se lançaient des interrogations muettes.au
bout d’un moment, n’en pouvant
plus, je me risquai à jeter un
œil à l’extérieur : à mon grand soulagement ce monstre vorace avait
au dernier moment changé de cap ! Il était parti ravager d’autres
contrées…puis très vite, comme il était venu, il disparut sur l’horizon…Ensuite
pluie et vent nous harcelèrent pendant une heure, nous jouant une sérénade
connue ! Là, nous avions l’habitude ! Et une certaine expérience qui
nous permit d’y faire face calmement.
Puis la nuit revint, le ciel resta
clair, étincelant de deux parfois un peu voilés, semés inégalement comme des
diamants éternels dans l’immensité du firmament, tandis qu’une lune d’argent
baignait la mer de tous ses éclats…Quelle beauté ! J’aperçois quelques
étoiles dans les échappées du ciel clair entre les nuages.
Puis l’orage a éclaté, déchirant le génois en deux : là la drisse est
coince en haut et la garcette pour enrouler la toile a pété = la totale à Jean va prudemment sous le projecteur allumé et bien attaché pour tenter
l’affaler la voile et la faire arrêter de battre dans les barres de flèche – le
bruit est assourdissant, j’ai même craint un instant que le pare-brise
n’explose…
Un petit croissant de lune, très bas sur l’horizon, ajoute une note féerique,
au loin, sur la mer. Sa clarté diffuse
et trompeuse joue même d’une manière inquiétante avec une légère brume qui
monte de l’eau et s’évanouit en tourbillonnant.
Résultat des courses : les 45 milles qui nous séparent de la
Martinique vont être faits au moteur ! nous arrivons dans la nuit à l’anse
Chaudière, bien tranquille, prêts pour un somme bien mérité…