Comment parler de la Martinique sans parler du
Marin? Pour un plaisancier c'est impossible. Le Marin est devenu, depuis la
création de sa base nautique en 1998, la capitale du nautisme francophone aux
Antilles ; la plaque tournante de tout ce qui flotte en Martinique. Elle attire
les marins de tous horizons. Le Marin, qui mérite bien son nom, est pour la
plupart des équipages qui ont traversé l'Atlantique, la première escale des
Antilles. Au bout d'une vingtaine de jours de traversée océanique les marins se
faufilent entre les bouées de balisages qui dessinent un chenal tarabiscoté
entre les récifs qui parsèment l'entrée de cette gorge profonde tapissée de
mangroves. Côté pile, ils y trouvent, à l'abri de la houle, le sommeil mérité
après vingt nuits de veille. Côté face, ils découvrent une baie immense où
séjournent en permanence un millier de bateaux.
Entre rêve de tranquillité et
affluence il faut choisir. Le Marin ne répond pas franchement au stéréotype du
mouillage de rêve sous les Tropiques. Beaucoup de monde, une ville aux odeurs
d'embouteillages sont les apanages du Marin. Cependant, si le Marin n'est pas
l'endroit idéal où passer ses vacances, il répond à bon nombre des besoins des
plaisanciers, d'où sont succès. Au marin tout est possible :
avitaillement, réparations mécaniques, électroniques, structurelles... Les
plaisanciers y chercheront les compétences nécessaires pour résoudre les
problèmes et les lacunes du bord. Certains n'hésitent pas à y passer des mois
entiers. Quelques-uns y trouveront du travail.
Autre facilité, on peut laisser le bateau en marina, sur
corps-mort ou sur ancre (attention mettre deux ancres : fonds de vase) et louer
une voiture dans l'une des nombreuses sociétés de location de la ville. De là,
il est possible de partir à la découverte de l'intérieur de l'île. Attention : se munir de patience. La Martinique étant l'une des îles les plus densément
peuplées de la Caraïbe, les bouchons sur les routes y sont légion! À certaines
heures, il est presque impossible de circuler autour de Fort-de-France !
En escale au Marin vous verrez à coup sûr les yoles, ces bateaux construits d'un seul
tenant dans un tronc d'arbre servent de monture aux équilibristes de la mer. Le
spectacle d'une dizaine parfois même d'une vingtaine d'hommes suspendus en
rappel au-dessus des flots pour assurer l'équilibre de leur esquif est unique au
monde.
Yole ou gommier?
Un sport unique au monde
Un sport unique au monde
Ces deux termes désignent une barque en bois qui servait à la pêche en mer des Caraïbes. Les pêcheurs utilisaient principalement la voile pour revenir de leur lieu de travail. L'esprit de compétition animait toujours les retours au village. Ils se lançaient des défis : le dernier arrivé perdait le produit de sa pêche. Esprit du jeu bon enfant, le dimanche, des petits concours s'organisaient. Les pêcheurs de différents villages se retrouvaient sur le plan d'eau et briguaient la première place au jeu des alizés.
Aujourd'hui, on ne trouve plus guère de gommiers. Cette barque solide était taillée d'un seul tenant dans l'arbre qui se nommait "gommier". Malheureusement le gommier avait quasiment disparu de la forêt martiniquaise tandis que le nombre de pêcheurs augmentait. Les constructeurs de gommiers s'adressèrent alors aux îles voisines (Sainte Lucie et Dominique) pour s'équiper. Cette solution n'arrangeait pas tout le monde et certains cherchèrent une autre manière de poursuivre leur activité.
Dans les années 40, un charpentier du François réussit à concevoir une embarcation s'inspirant à la fois du gommier et de la yole européenne. Le terme yole vient du norvégien «Jol» qui signifie canot. Le terme arrive en France dès 1713 et il désigne une embarcation étroite, effilée, légère et très rapide, de faible tirant d'eau, généralement mue par plusieurs rameurs et surtout utilisée dans les compétitions. En Martinique, la yole ronde devient une embarcation légère, sans quille, sans lest, sans dérive ni gouvernail, à faible tirant d'eau, pouvant naviguer à une ou à deux voiles. Elle s'est d'abord répandue sur la côte Est de la Martinique. Les pêcheurs trouvaient en la yole ll'héritière du gommier. De construction plus complexe que ce dernier, la yole ronde de la Martinique était comme le saintois en Guadeloupe, plus maniable et plus rapide.
La yole ne tarda pas à supplanter le gommier surtout sur la côte atlantique de Grand Rivière à Sainte Anne voire Marin. Avec l'arrivée des yoles, la pratique de compétition spontanée entre pêcheurs s'intensifia. Des manifestations sportives égayaient les fêtes patronales du François, du Robert ou du Vauclin. Petit à petit, les Martiniquais se sont approprié ce sport unique au monde et personne, sur l'île, ne veut manquer le Tour de la Martinique en yoles! En plus des manifestations fréquentes sur l'île, les yoles sont très demandées à l'extérieur : déplacements en Guadeloupe, aux Saintes, à Trinidad, à Arcachon. Peu à peu on a vu les yoles abandonner leurs noms pittoresques à la faveur de leurs sponsor. Les noms haut en couleur comme "ki ma fouti é sa", "vini woué sa", "l'oiseau léger", "L'Avenir à Dieu", "Etoile filante"... sont devenus "Brasserie lorraine", "caresses antilles"... et autres noms commerciaux.
Ceci s'explique par le coût d'une yole. Son prix d'achat est de minimum 18000 €. Sans mécène, ce sport n'existerait pas!
Ce coût élevé de fabrication comprend des techniques élaborées de fabrication.
Voici ce comment l'excellent site de « la Société des Yoles Rondes de la Martinique » nous décrit les étapes de la construction d'une yole.
Le principe de la construction de la coque :
La construction de la yole donne priorité avant tout sa «coque» qui doit être étudiée pour la régate. Sur une «quille» liée solidement à une «étrave» et à un «étambot» qui se différencient nettement, sont fixées des «membrures» de formes arrondies sur lesquelles sont cloués les «bordés» extérieurs, faits de planches de bois. Ces dernières seront calfeutrées puis mastiquées pour assurer l'étanchéité de l'embarcation. L'embarcation peut accueillir deux voiles pouvant totaliser cent mètres carrés de surface, sans «lest» et sans «quille» plombée.
Pour la fabrication de la yole de compétition, la hache demeure le principal instrument constituant la boîte à outils du charpentier de marine local. En l'absence de véritables plans, l'expérience constitue le premier atout de la réussite.
La Yole Ronde de compétition, évoluant à l'occasion des régates, est créée sans apport de matériaux modernes. D'une longueur de plus de 10 m, la coque, les membrures, les mâts, les «bois dressés», les «va et vient» d'écoute, sont tous tirés de la forêt martiniquaise. Le bois le plus utilisé est le poirier local. La vergue, elle, sort des champs de bambou du pays Certains bois proviennent de Guyane Française, comme le teck, ou l'angélique, dont sont faits la quille et le bordé.
Les voiles
Les yoles peuvent comporter une ou deux voiles dont les mâts sont placés respectivement à l'avant et au tiers de l'embarcation. Une vergue en bambou est placée au travers des mâts et est destinée à
soutenir la voile, qui peut atteindre 35 ou 40 mètres carrés quand le vent est faible. Avec un vent de 25 noeuds, la surface moyenne des voiles est réduite respectivement de 15 et de 22 m².
soutenir la voile, qui peut atteindre 35 ou 40 mètres carrés quand le vent est faible. Avec un vent de 25 noeuds, la surface moyenne des voiles est réduite respectivement de 15 et de 22 m².
Le mât de la grand-voile est soutenu par deux cordes mobiles que manient deux équipiers en effectuant des manoeuvres de rappel, afin d'assurer la stabilité de l'embarcation. Autrefois, avant et pendant la course, les voiles en coton étaient aspergées d'eau afin de les tendre au maximum. Maintenant la plupart des embarcations possèdent des voiles en nylon. Avec ce type de matériau, les voiles sont faciles à mâter, sont moins lourdes quand elles sont mouillées et possèdent une meilleure prise au vent.
L'équipage : des acrobates de la mer
Un équipage comprend 11 hommes en moyenne, prenant part à la course à deux voiles et huit pour la course à une voile ou misaine. Pour cette dernière, l'équipage peut être réduit à 6 hommes en cas de vent faible. Cet équipage se décompose en quatre parties: la barre, les manoeuvres d'écoute, les manoeuvres de rappel avec les bois dressés et les cordes
Les manoeuvres d'écoute
à bord de la yole, la polyvalence est de règle. Bien qu'il y ait un homme désigné pour les manoeuvres d'écoute, il arrive que le patron ou son adjoint se charge de cette tâche. Cette opération consiste, par le biais d'un cordage, à orienter la voile, lui donner du mou, ou la tendre au maximum en fonction du vent. Cette manoeuvre est très délicate, quand elle est effectuée au passage d'une «vigie» (bouée ou, drapeau tricolore délimitant le circuit). A ce moment précis promptitude et force physique sont réclamées. Un bateau peut perdre son avance initiale sur ses concurrents, et peut même se faire dépasser si les manoeuvres d'écoute sont effectuées trop lentement. Nous avons vu des yoles prendre l'eau à l'occasion de ces manoeuvres. En effet, la yole est une embarcation particulièrement instable. Un membre de l'équipage écope en permanence à coups de sceaux. Dans le cas de manoeuvres ratées, l'embarcation chavire. L'équipe qui les suit dans un bateau à moteur doit alors agir vite pour sauver la yole et la remettre à flot.
La naissance du Tour de la Martinique en yoles rondes
En mai 1966, quatre yoles appelées « Etoile », « Frisson », « Mouette » et « Odyssée » tentent d'effectuer le tour de la Martinique. Avec l'aide de marins pêcheurs, les membres d'équipages atteignent leur objectif en cinq étapes. L'année suivante, l'opération est reconduite et le tour est bouclé en quatre étapes. Cependant, les difficultés de navigation sont telles que les protagonistes décident de mettre un terme à l'aventure. Elle s'achève en 1968.
Depuis 1985 Georges Brival organise l'épreuve annuelle du Tour de la Martinique en yoles rondes. Depuis. Les concurrents dorment dans les villes-étapes et repartent le lendemain. C'est un rendez-vous attendu par tous les Martiniquais. Les plans d'eau sont, à l'occasion de cette compétition, envahis de bateaux de tous types qui supportent leur équipe fétiche à grands coups de klaxons et de cornes de brume. Toute la Martinique se retrouve donc à chaque été au bord de l'eau.
C'est une fête inimitable qui enflamme toutes les passions.
La Martinique resplendit !
Son surnom est l'île aux fleurs. Ne cherchez pas,
vous les trouverez partout ! Dans les jardins d'agrément, sur les
places des villages, au bord des routes, dans les bocages et jusque dans la
forêt tropicale où anthuriums et balisiers tels des pixels de couleurs égayent
le vert profond du monde végétal. La première fois que nous sommes venus en
Martinique, les fleurs ont été ma première source d'émerveillement. Je restais
admirative devant les haies qui ceinturaient les pâturages. Celles-ci étaient
faites de piquets en bois et de fils barbelés. Jusque-là, rien d'étonnant me
direz-vous. Oui, mais en Martinique chaque bout de bois planté redonne un
arbuste ! Les haies
ainsi repartent de plus belle pour une floraison tropicale qui cache le barbelé.
Souvent, ce sont les casses qui servent de haies. En janvier, ceux-ci sont en
fleur. Il faut y être attentif, la floraison est extrêmement courte. Ces arbres
portent le joli nom d' « averses d'or » lorsque leurs fleurs sont jaunes. Terme
imagé, mais lorsque les fleurs sont roses, l'effet de pluie est analogue. Il
faut imaginer des fleurs cotonneuses d'un rose délicat, elles envahissent
l'arbre alors que les feuilles sont toutes tombées. Toutes les haies des
pâturages, tous les bords de route sont roses. Au gré de l'alizé, une neige de
pétales envahit les routes. Des flocons volatiles, éclatants de rose sur fond
d'azur céleste s'étiolent en myriades de corolles. Ne vous en faites pas, si
vous manquez le mois de janvier en Martinique, leurs cousines jaunes fleurissent
en mai. Les lauriers roses sont en fleurs tout au long de l'année ainsi que les
bougainvillées. En mai et juin, les flamboyants magnifient le paysage... Vous
l'aurez compris, il n'est pas un mois qui ne soit accompagné de fleurs...
Vous me direz... et les ouragans ? Ils passent
bien sûr de temps en temps, au gré des caprices du temps et ils balayent entre
autres la végétation. Mais ce climat tropical est étonnant. En quelques mois tout
repousse et mis à part la taille des jeunes cocotiers que l'on a dû replanter
après le passage du vilain gros cyclone, plus rien n'y paraît en très peu de
temps...
Alors, profitons de la balade, partons sur les
routes du Sud, et commençons notre visite par un lieu-dit à quelques kilomètres
du Marin.
Crève-coeur
Le site abrite les ruines d'une
ancienne sucrerie, aujourd'hui mangée par la végétation. Il reste néanmoins de
grands pans de murs construits en de robustes pierres de taille. Il reste
l'embrasure des fenêtres. L'herbe folle n'a pas totalement envahi les engrenages
qui servaient autrefois à entraîner les mécanismes du moulin qui broyait la
canne. Vu l'étendue des bâtiments et ce qu'il en reste, l'habitation de Crève
Coeur était une habitation importante. Il règne sur ces lieux de vestiges une
âme nostalgique, il y a toujours un je ne sais quoi de persistant sur ces
anciennes habitations. Sans doute un sentiment d'abandon, quelque chose de
palpable, une grandeur et sa décadence. Mais aussi un malaise. Chaque fois que
l'on se trouve en ces lieux de labeurs, on en peut que penser aux êtres qui y
donnaient leur vie jusqu'à la dernière goutte de sueur. Peu de choses nous
aident à comprendre les ruines de Crève Coeur. Un simple panneau à l'entrée.
Puis, c'est l'imagination qui fait le reste. Peut-être vaut-il mieux ne pas trop
penser au passé, une belle randonnée nous attend.
Au-delà des restes de la prospérité d'autrefois,
un sentier s'engage sous une épaisse forêt et nous mène par des pentes un peu
raides vers le sommet. Les gambettes nous rappellent que sur nos bateaux, nous
n'avons pas souvent l'occasion de les faire marcher! Aïe, aïe, aïe!!!
Là-haut, un ciel de grains nous
attend. À nos pieds, la campagne, la Martinique profonde et paisible s'étale
jusqu'à l'océan. Sur elle, les nuages qui défilent dans le ciel prodiguent un
spectacle d'ombres et de lumières. Les bocages interrompus par quelques mares
d'eau accueillent parfois quelques maisons traditionnelles. L'aboiement d'un
chien monte jusqu'à nous. Le vent emporte le chant de dizaines d'oiseaux. J'aime
ce genre d'atmosphère mêlée. Au fond du tableau la mer toujours présente sur les
panoramas des îles, à nos pieds la vie rurale tournée vers la terre.
Le ciel s'assombrit et dans le canal
qui sépare Sainte Lucie de la Martinique une coulée de lumière vive s'abat sur
l'océan. L'imagination va bon train ! On dirait que les 4400 reviennent ! (série
de science-fiction) Le grain nous évite et nous laisse descendre le dénivelé de
Crève Coeur au sec. Heureusement, car en cas de pluie forte, le chemin se
transforme en vrai torrent de boue. Au bout de la balade, la « Maison de
Maître ». Ou du moins un reste de chambranle de fenêtre qui offre un panorama
inimitable sur le morne que nous venons de gravir.
Les Salines
Plus au Sud, la route nous mène à la plus célèbre plage de la Martinique : les Salines. C'est sans doute la carte postale la plus vendue de l'île. Et pour cause... Un croissant doré de sable fin, frangé d'une des plus belles cocoteraies de l'île où vient mourir une écume scintillante s'étire sur six kilomètres au bord de la mer des caraïbes. Connaissez-vous plus stéréotypé ? Difficile ! Les Martiniquais aiment s'y retrouver. En fin de semaine, tout le monde se mêle sans distinction de couleur, de taille, d'avis ou de parti pris à l'ombre des palmes frissonnantes des cocotiers. Les locaux s'installent : hamac, toile de tente, tables, chaises, barbecue. Une organisation qui sent bon la joie de vivre. Elle s'inspire directement des alizés et du jus de canne à sucre. Elle se régale aussi de poulet boucané, d'accras, de boudin de lambis et de sorbet coco. Ici, le rire sonore d'un joueur de dominos, là, le souffle léger de la sieste, plus loin les câlins discrets d'un couple lové au creux de l'écume de la houle. À l'ombre des cocotiers, le commerce s'installe. Des lolos (restaurants improvisés) proposent les spécialités locales. Les tables bancales sont prises d'assaut par une horde de touristes affamés par la baignade. Les « ti blancs », casquettes sur la tête, joues rouges, tee-shirt scandant les beautés de la Martinique, appareils photos en bandoulière offrent à leurs papilles novices la palette des saveurs créoles. Planteur pour Madame. Ti punch pour Monsieur. Dès la première goulée, les joues s'empourprent et le rire prend de l'assurance. Dans leur assiette : boudins créoles et crabes farcis tentent de leur remettre les idées en place. Une brochette de crevettes pour la majorité, langouste pour les plus audacieux et un flan coco pour achever la bête ! Après ces agapes et à peine recalés sur l'horaire local, ils viendront grossir les rangs des « hamaqueurs » des Salines ! En fin de compte, ils sont prêts à expérimenter la vraie ambiance locale !
La Table du Diable
Au-delà des Salines, il existe un
trésor. L'extrême Sud de la Martinique est sauvage. Le littoral s'arcboute et
lutte contre les assauts permanents de l'océan. Celui-ci dessine au gré des
vents un rivage découpé, si déchiré qu'il paraît tourmenté. Les lieux dits
annoncent le programme : la Savane Des Pétrifications, la Table Du Diable, la
Pointe D'Enfer! Ici, plus aucune voiture, pas de complexe hôtelier, pas de
restaurant ni de snacks ou de bars. Un sentier de randonnée parcourt le littoral
où la nature règne seule.
Bien que mal chaussés, nous décidons
de le suivre. Allez comprendre... Une Marine à terre, ça joue les pin-up :
sandales et paréo... C'est d'un pratique pour la randonnée ! Au diable la
coquetterie ! Nous sommes happés par le paysage entre savane et océan quelle
magie! Aujourd'hui, le ciel est sombre et menaçant. Il s'harmonise parfaitement
à l'atmosphère que dégage le paysage. Il ajoute une autre dimension, quelque
chose d'authentique. Nous ne sommes plus dans la carte postale de rêve : eaux
émeraude, horizon scintillant, plage étincelante. Tout dégage une force, un
caractère sincère et spontané. Un panorama sans fioriture.
Côté terre, un étrange désert dégage
une atmosphère figée. La végétation rejetée vers les bordures du littoral cède
sa place à un univers minéral. Ici, une terre dépouillée est jonchée de blocs de
jaspe polychrome. Des teintes jaunes, rougeâtres, noires surgissent du gris et
de l'ocre ambiant. Parfois l'on décèle la présence de calcédoine. Je rêve de
trouver l'ombre de la trace d'une opale... Paraît-il que ce sol en recèle. Mais
il faut faire attention où l'on pose les pieds. Par endroits, les Coussins de
Belles Mères jonchent le sol. (Nom malicieux donné aux cactus raquettes !) En
face de la Savane, les souvenirs nous assaillent. Le sentier nous entraîne sur
les traces de la Table Du Diable. Là, nous remontons le temps. Ce rocher est la
première terre que nous avons contournée après 21 jours de traversée océanique.
Aujourd'hui, nous la contemplons tranquillement en Terrien d'occasion. Au large,
comme lors de notre arrivée en 2004, les grains s'acharnent et donnent à l'océan
la couleur grisâtre d'une mauvaise humeur caractérisée.
Cap Macré
De plages en falaises, les panoramas
subtils et surprenants nous envoûtent. Des Salines au Cap Macré en passant par
l'anse Trabaud, tout est à prendre, rien n'est à oublier ! La plupart du temps
nous sommes seuls. Plages, sentiers, falaises se succèdent. Parfois, au détour
d'un chemin, un moulin désaffecté évoque discrètement les fastes sucriers
d'antan. La voûte des nuages se déchire et laisse filtrer le soleil. Aussitôt,
les teintes émeraude rivalisent avec la turquoise. Le regard court sur l'horizon
comme sur un champ de paillettes dorées. L'océan bouillonne. Les palmes des
cocotiers luisent, comme lustrées par les pluies qui viennent de passer. L'alizé
souffle fort. Il escarmouche mes lunettes d'embruns. Quelle bouffée
d'énergie !
Au bout du voyage, une petite
chapelle sans prétention est érigée pour Notre Dame de la Rose des Vents. Elle
suscite en nous une émotion vive. Elle est ouverte. A l'intérieur l'alizé
diffuse un air frais salvateur. Devant l'hôtel de la Vierge des bougies allumées
l'honorent. Surprenant, nous n'avons rencontré personne et pourtant, la flamme
est entretenue. Nous sommes impressionnés et heureux de voir un endroit laissé
en libre accès à tout un chacun. C'est formidable. Nous aimerions voir plus
souvent ce genre d'endroit respecté de la sorte. Pas de barreaux, pas de porte
fermée. Tout est ouvert. Que du bonheur !
Ici se termine notre balade sur la
côte orientale de l'île. Mes sandales agonisent et nous sommes repus d'images
plus merveilleuses les unes que les autres. La rive battue par les flots, au
caractère marqué par sa résistance face aux éléments a imprimé pour toujours une
image forte dans notre boîte à souvenirs.
Sans aller très loin, on peut
découvrir depuis le Marin, le Grand-Sud .
Et puis, pour une vision inattendue de cette large gorge qui s'enfonce dans les
mangroves, montez en haut du Morne Gommier. Le morne ainsi nommé car il était
autrefois recouvert de forêts de gommiers. Cet arbre était utilisé pour la
construction de barques qui portaient le même nom que l'arbre.
On y trouve un point de vue
extraordinaire. Le regard court sur 360°.
- à l'est, une campagne verdoyante
recouvre des mornes dodus.
- au Nord, les communes de Sainte Luce et du Diamant
offrent leurs plages échancrées à la mer des Caraïbes.
- à l'ouest la vue vous transportera
au-delà de l'horizon, jusqu'aux Pitons de Sainte Lucie.
- au Sud, la baie du Marin
et les plages de Sainte Anne.
Joli panorama qui nécessite une sacrée grimpette
qui mène au Point de vue : lianes trompettes ( en créole
Lyann Twonpèt), aloès, glycérine, véritable jardin créole qui réunit
fleurs, plantes aromatiques et médicinales ainsi que la culture vivrière, arbres
à pain, bananiers et cocotiers.