"SECOUONS LE COCOTIER"... et surtout les caricatures et poncifs antillais des années 60. humour et franchise de Jean Raspail
Jean Raspail a refait la une de l'actualité avec la réédition de son livre "Le Camp des Saints" (voir post du 4 février dernier ici).
En
rangeant les livres de mon père je tombe sur les 2 tomes de chroniques
de Jean Raspail sur les Antilles (de la Barbade aux Grenadines). Et là
aussi c'est à la fois un voyage dans le temps et une chronique
douce-amère d'un auteur qui n'a pas la langue dans sa poche pour donner
son avis sur le parler créole ou sur les habitudes des fonctionnaires
locaux et des touristes sans gênes...
On
y découvre 2 portraits savoureux de personnages locaux et historiques :
Maurice Besgneux, anarchiste de coeur et archéologue de marine de
profession mais surtout "homme libre" installé à la Désirade (aucunes
lignes sur ce superbe personnage sur le net!!!) et de Rémy De Haenen,
maire de Saint Barthélémy (décédé en 2008) aventurier, aviateur et
maire, personnages incontournables et attachants des Antilles d'hier.
La
Seconde chronique "Punch Planteur" prolongera la parcours de Raspail
vers les îles d'Anguilla, d'Haïti, des Bahamas et encore de saint
Barth... (à suivre dans un prochain post).
15
jours après ma semaine martiniquaise, voilà un savoureux voyage à la
rencontre des Antilles d'hier et encore un peu d'aujourd'hui !
EXTRAITS
(Premières pages) |
|||||||||||||||||||||||||||||
Sous
un tropique de banlieue
De l'autre côté de la fenêtre sans vitre, façon coloniale bon marché,
devant la table où j'écris, le petit jardin vaguement tropical
ressemble à un carré de haricots dont les honnêtes légumes auraient
été emportés par la démesure. Ce jardin fait partie d'un groupe de
mille « pavillons-jardins » neufs et décrépis, au Raizet, à la sortie
de Pointe-à-Pitre, où le génie français de la banlieue s'est donné du
bon temps, comme à Antony, Stains ou Pavillons-Sous-Bois. Dieu
pardonne aux architectes, bousilleurs du xxe siècle
français ! Mais dans ce jardin, un grand lézard vert va et vient sur
une branche : mon ami le lézard, fidèle au rendez-vous du soir. Aussi
désespérément ponctuel que le crépuscule de 18 h 12 qui l'accompagne,
et que le verre de whisky rafraîchissant que je viens de me servir, et
qui aide à penser sous le tropique. Je me méfie du punch antillais,
s'il laisse le foie en paix, il sonne le cerveau...
Il y a punch et punch,
rhum et rhum
Trois mois plus tard, à la
vérité, je ne m'en méfiais plus du tout. Le punch m'avait eu. Je
suppose qu'en marchant, je laissais dans mon sillage flotter une forte
odeur de rhum blanc, et qu'en parlant, ou en soufflant sur les pentes
ou dans les escaliers, j'exhalais le remugle de cale des vieilles
goélettes à rhum. Le punch, je vais vous dire, c'est sacrement bon !
L'infect baba-grog-rhum, ou « bon rhum des Antilles » — fabriqué dans
nos grands ports par des marchands d'alcool criminels, car ces
rhums-là sont un crime contre le rhum — qu'on balance aux gogos
français dans nos bistrots nationaux, est au vrai rhum de canne ce que
la merde est à la rosé. Le punch n'est pas une boisson bête, ni une
boisson d'irresponsable. Ce n'est pas un truc que l'ouvrier s'envoie
en un coup de coude et un clappement de langue, à 5 heures du matin,
dans la brume, parce que ça racle et que ça réveille, et que ça fait
avaler la bête journée qui vient. On ne se saoule pas au punch comme
au genièvre ou à la fine, avec une pelleteuse à godets, il y faut de
la volonté, et la conscience rare du bonheur qu'on éprouve à le boire.
Et à le préparer, tout est là. Sirop de canne, rhum blanc ou vieux et
pas n'importe lequel, citron vert, un cube de glace, une cuillère à
long manche pour remuer le tout, un soin précis dans le dosage tout à
fait personnel et qui peut varier selon l'heure, la circonstance et
l'humeur... Il faut apprendre soi-même, et personne ne saurait vous y
aider. Le verre de punch que l'on va boire, rien qu'à le regarder,
parfaitement parfait, la joie vient. Toutes les Antilles tiennent dans
ce verre, et l'on pourrait tirer un trait...
|
|||||||||||||||||||||||||||||
Pour commander l'ouvrage,
cliquez ci-dessous |