jeudi 26 mai 2016

JE VIENS DE RELIRE "BRITANNICUS" DE JEAN RACINE






Etrangement, la pièce de Jean Racine se nomme Britannicus, alors que c’est Agrippine qui en est le cœur. A la suite de Suétone et Tacite, les historiens, jusqu’à récemment, l’avaient toujours peinte en monstre sanguinaire, digne mère du tyran Néron. Mais, parvenant à se maintenir au pouvoir, à travers ce fils qu’elle fit reconnaître comme son successeur par son époux mourant, Agrippine fut, semble-t-il, une plutôt bonne administratrice de son empire. Employer l’intrigue, les menaces, le bannissement, le fer ou le poison, était, en ce temps-là, le minimum syndical chez les Césars. Et, aujourd’hui encore, quitter le pouvoir quand on y a goûté, demeure impensable pour nos modernes empereurs qui n’ont plus besoin de les faire mourir pour tuer ceux qui les gênent. En 1669, comme en 2016, c’est bien de la passion du pouvoir, dissimulée sous le mot galvaudé de politique, que nous parle cette pièce, cruelle, sombre et dont les vers magnifiques hantent nos mémoires.


Cela m'a donné d'aller plus loin....-->

http://www.franceinter.fr/emission-lhumeur-vagabonde-stephane-braunschweig-met-en-scene-britannicus-a-la-comedie-francaise



Pour sa première mise en scène d’un classique, et sa première au Français, Stéphane Braunschweig, qui vient de prendre la direction du Théâtre de L’Odéon, a choisi pour son Agrippine une toute nouvelle pensionnaire, Dominique Blanc, dont ce sont les premiers pas, magistraux, sur la scène de la salle Richelieu. Dès le lever de rideau, on reconnaît le goût de Stéphane Braunschweig pour les scénographies épurées, presque austères, qui ont si bien accompagné les auteurs scandinaves qu’il a beaucoup montés. Il nous fait entrer dans un lieu de pouvoir, entreprise ou palais présidentiel, avec une longue table de conseil, entouré de hautes portes derrière lesquelles se trament les complots et se murmurent les trahisons. Les costumes sombres portés par tous les personnages sont ceux des actuels maîtres du monde. Tous sont magnifiques : Laurent Stocker, Stéphane Varupenne, Hervé Pierre, Giorgia Scalliet, Benjamin Lavernhe, Clotilde de Bayser. La salle est suspendue à leurs lèvres, comme si la fin n’était pas certaine. Britannicus de Jean Racine est à voir, absolument, à la Comédie Française, jusqu’au 23 juillet et Stéphane Braunschweig est, ce soir, l’invité de l’Humeur Vagabonde.
 
 
Le « Sur Racine » de Roland Barthes
....................INTRODUCTION

Qu'on l'admire ou qu'on ne l'admire pas, il est difficile d'écrire sur Roland Barthes. Si on l'admire, on ne sait pas trop que dire et, si on ne l'admire pas, on n'a que trop à dire. On ne peut, en effet, l'admirer qu'à la condition de ne jamais s'interroger, de ne jamais se demander ce qu'il a vraiment voulu dire, et encore bien moins s'il a eu raison de le dire. Le problème est alors de savoir comment écrire un livre, qui devrait être un livre de critique, mais dans lequel on doit absolument éviter tout ce qui pourrait ressembler à un début d'activité critique. Aussi n'y a-t-il guère d'autre solution que de se livrer, comme M. Stephen Heath  [1], ou M. Steffen Nordhal Lund  [2], à une espèce de paraphrase-pastiche, voire de faire un simple « digest », comme M. Guy de Mallac et Mme Margaret Eberbach  [3], ou M. J.B.Fages  [4]. Mme Susan Sontag pense que Roland Barthes est « un écrivain plus immense encore que ses plus fervents admirateurs ne le soutiennent  », mais, sur cet écrivain tellement immense, elle ne trouve presque rien à dire  [5].
Quand on commence, en revanche, à lire Roland Barthes d'un œil critique, quand on entreprend de relever toutes les contradictions que l'on rencontre dans ses écrits, de réfuter toutes les contrevérités qu'on y trouve, d'en sonder toutes les sottises, très vite on ne sait plus où donner de la tête. Qui voudrait vraiment passer au crible toutes les fariboles que Roland Barthes a débitées, risquerait fort d'y consacrer une bonne partie de son existence. Si grand que fût mon désir de mettre à nu l'étonnante nullité intellectuelle de celui qui passe pour l'une des principales lumières de notre temps, je ne me suis pas senti le courage de me lancer dans une aussi longue et fastidieuse entreprise. Il me restait donc à choisir entre deux méthodes opposées : ou bien survoler rapidement l'ensemble des écrits de Roland Barthes, en faisant un sort aux sornettes les plus notables, et proposer ainsi aux lecteurs une espèce de florilège de la faribole barthésienne; ou bien, au contraire, s'en tenir à un seul ouvrage et le soumettre à un examen aussi serré, aussi minutieux et aussi exhaustif que possible. Chacune de ces deux méthodes a, bien sûr, ses avantages et ses inconvénients. La première méthode est, sans doute plus facile et, surtout, plus divertissante. Dans la mesure où elle donne une beaucoup plus grande possibilité de choix, elle permet de ne retenir que les sottises les plus ridicules, que les foutaises les plus grotesques, et il y a assurément de quoi constituer, avec tous les écrits de Roland Barthes, une anthologie de balivernes tout à fait désopilante. Mais, bien qu'on ait logiquement toutes les raisons de ne plus faire crédit à un auteur chez qui ont été relevées un nombre important d'âneries monumentales, cette méthode, qui est celle du pamphlet, ne convainc, d'ordinaire, que ceux qui sont déjà convaincus. Les autres, surtout s'ils sont des admirateurs de cet auteur, resteront le plus souvent persuadés qu'on a fait preuve à son égard d'une insigne mauvaise foi et qu'on n'a jamais cherché vraiment à comprendre sa démarche et à entrer dans sa pensée. Si l'on veut essayer de les convaincre, il vaut donc mieux adopter la seconde méthode et choisir de n'étudier qu'un seul livre, afin de pouvoir le faire de la manière la plus patiente et la plus attentive, en s'efforçant de suivre pas à pas la démarche de l'auteur. C'est pourquoi, malgré l'envie que j'ai eue parfois de suivre la première méthode, j'ai finalement décidé de m'en tenir à la seconde et de n'étudier, en essayant de le passer au crible, que le Sur Racine.
Si j'ai choisi le Sur Racine plutôt qu'un autre livre de Roland Barthes, c'est, outre des raisons d'ordre personnel et professionnel  [6], parce que, de tous les livres de Roland Barthes, il est celui qui, par ses ambitions, ressemble le plus à un livre de critique universitaire. De ce fait, il est aussi, sans doute, celui qui permet le mieux de mesurer à quel degré, tout à fait extraordinaire pour qui prend la peine d'y regarder de près, son auteur est dépourvu de toutes les qualités logiques les plus élémentaires. Faute de nous apprendre quoi que ce soit sur la tragédie racinienne, le Sur Racine nous apporte d'innombrables et d'inappréciables renseignements sur les très étranges démarches de la pensée barthésienne, c'est-à-dire d'une pensée dont le principal caractère est que tous les mécanismes de contrôle semblent totalement abolis et qui va continuellement de contradiction en contradiction et d'absurdité en absurdité, sans jamais s'en apercevoir.
Bien sûr, certains s'étonneront que je semble vouloir réveiller une « querelle » bientôt vieille de vingt ans et dont les deux protagonistes sont morts maintenant. Certains se demanderont s'il était vraiment utile de revenir à la charge contre un livre dont Raymond Picard, dès sa parution, a dit, et bien dit, l'ineptie. Mais je pense que Raymond Picard, lui, n'en aurait pas douté un seul instant. Car, s'il avait cru devoir prendre la plume et s'exprimer avec une vigueur à laquelle l'Université française ne nous avait guère habitués, c'était assurément afin d'être entendu. Or l'on est bien obligé de constater que, finalement cela n'a guère été le cas  [7]. Non seulement son offensive n'a pas réussi à empêcher le succès du Sur Racine, mais on peut penser qu'elle a, au contraire, grandement contribué au lancement du livre. Elle a permis, en effet, à Roland Barthes de se poser en victime de l'Université « traditionnelle » et, plus particulièrement, de la Sorbonne  [8], d'affecter d'avoir été choisi comme « bouc émissaire » par les organisateurs d'une opération foncièrement réactionnaire d'intimidation et de répression intellectuelles, et, ainsi, de mobiliser en sa faveur la quasi-totalité des intellectuels de gauche, qui, a priori, n'avaient aucune raison de prendre fait et cause pour un livre qui n'était ni de droite ni de gauche. Et, bien sûr, par-delà Roland Barthes, tous les diseurs de sornettes, tous les débiteurs de fariboles, se sont sentis visés en même temps que lui. Ils se sont donc tous rangés derrière lui et l'ont ainsi sacré chef de file de l'avant-garde intellectuelle. C'est la « Querelle » qui a fait de Roland Barthes le Pape de la « nouvelle critique », et du Sur Racine son Evangile.
La situation n'est donc plus du tout maintenant ce qu'elle était lorsque Raymond Picard a publié Nouvelle Critique ou nouvelle imposture. Il croyait, très logiquement d'ailleurs, qu'il n'avait besoin que de lancer un cri d'alarme pour éviter que certains ne prissent au sérieux un livre qui ne l'étaient aucunement. Il pensait n'avoir qu'un abcès à crever. Nous sommes aujourd'hui devant une septicémie. L'audience du Sur Racine a, en effet, dépassé de très loin tout ce qu'on pouvait craindre quand la « Querelle », a éclaté. Il est, sans doute, actuellement le livre de critique littéraire française le plus lu et le plus souvent cité.
Certes, les coups de semonce lancés par Raymond Picard auraient dû largement suffire à enrayer la progression du Sur Racine. Mais puisqu'il en a été tout autrement, il est devenu, hélas! tout à fait nécessaire de mettre en œuvre des moyens beaucoup plus lourds. Raymond Picard avait cru n'avoir besoin, pour démontrer l'ineptie du Sur Racine, que de le feuilleter rapidement  [9] et d'y relever, çà et là, un certain nombre d'affirmations particulièrement gratuites ou extravagantes. Maintenant que, contre toute logique, le livre est devenu, par sa diffusion, un grand classique, voire le plus grand classique de la critique littéraire française, on ne peut plus se contenter d'y donner des coups de sonde et de ramener à la surface quelques âneries, fussent-elles de grande taille. Il est absolument nécessaire de se livrer à un démontage vraiment systématique de ce grotesque échafaudage de fariboles.
Mais la nature même du Sur Racine fait qu'il est particulièrement difficile de l'examiner d'une manière méthodique. Dans Critique et vérité, Roland Barthes reproche à Raymond Picard d'avoir donné « une singulière leçon de lecture, en contestant les détails de son livre sans avoir cherché à en apercevoir "le projet d'ensemble", c'est-à-dire tout simplement : le sens »  [10]. C'est faire preuve d'un singulier culot. Comment Raymond Picard aurait-il jamais pu apercevoir, dans le Sur Racine, ce que son auteur n'a jamais songé à y mettre? Plus on s'interroge sur ce livre, et plus on se convainc qu'il est strictement impossible de le « comprendre », au sens premier du mot, c'est-à-dire d'y découvrir une cohérence. Toutes les affirmations qu'on y trouve, sont, en effet, aussi éphémères que leur ton est définitif, dans la mesure où elles ne cessent de se détruire les unes les autres, de sorte qu'on arrive à la fin du livre sans rien pouvoir en retenir  [11]. Rien n'est plus éprouvant que d'entreprendre de réfuter Roland Barthes, car c'est véritablement lutter avec Protée.
Outre leur constante incohérence, l'extraordinaire gratuité des propos de Roland Barthes décourage continuellement la critique. A chaque page qu'on lit, on sent qu'il faudrait en écrire au moins vingt ou trente, et parfois même cinquante, pour bien faire le tour de toutes les sottises qu'on y trouve  [12]. Qui voudrait vraiment analyser toutes les âneries et réfuter toutes les foutaises que contient le Sur Racine, se verrait obligé d'écrire un énorme livre de deux à trois mille pages. Malgré mon goût pour la polémique, je ne me suis pas senti le courage d'aller jusque-là, et je n'aurais pas manqué, d'ailleurs, de lasser les lecteurs  [13]. Ne pouvant tout examiner à fond et ne voulant rien examiner qu'à fond  [14], il m'a fallu faire des choix.
Mais ces choix ont finalement été assez faciles à opérer. Tout d'abord, des trois études rassemblées dans le Sur Racine, je n'ai retenu que la première, « l'Homme racinien », qui est, de loin, la plus longue et la plus importante  [15]. Sauf exceptions tout à fait rarissimes, quand on cite le Sur Racine, c'est toujours « l'Homme racinien » que l'on cite. L'étude sur « l'Homme racinien », est elle-même composée de deux parties d'égale longueur, mais d'inégale importance. La première, « la Structure  », est une étude générale de la tragédie racinienne, alors que la seconde, « les Œuvres », est, en fait, une succession de notices sur chacune des onze tragédies raciniennes  [16]. La première, nous dit Roland Barthes, « est d'ordre systématique (elle analyse des figures et des fonctions) », tandis que « l'autre est d'ordre syntagmatique (elle reprend en extension les éléments systématiques au niveau de chaque œuvre) »  [17]. Ainsi la seconde partie ne fait, en principe  [18], qu'illustrer, en les appliquant successivement à l'étude particulière de chaque tragédie, les théories et les schémas généraux dégagés dans la première partie. C'est donc celle-ci qui constitue la partie la plus ambitieuse du Sur Racine et c'est sur elle, par conséquent, que j'ai choisi de centrer toute mon étude.
Cette première partie de « l'Homme racinien » compte cinquante-quatre pages  [19]. En soi, ce n'est sans doute pas très long  [20], mais ces pages, qui constituent le cœur du Sur Racine, atteignent à une telle densité de sottises, à un tel degré d'incohérence et d'absurdité, qu'il m'a fallu, une fois de plus, renoncer à tout dire et faire encore des choix. J'ai donc laissé de côté les cinq premières pages  [21], (les trois premières ont, d'ailleurs, été magistralement critiquées par M. Jean Molino  [22]), ainsi que les dix dernières  [23], qui m'ont paru n'offrir que de moindres foutaises. Restait donc l'ensemble d'une quarantaine de pages qui va du chapitre « La horde » au chapitre « Le "dogmatisme" du héros racinien » compris. Dans cet ensemble, faute de pouvoir trouver une cohérence dans les idées, j'ai cherché s'il n'y avait pas du moins un peu d'ordre dans leur succession. A condition de n'être pas trop exigeant et de bien vouloir procéder mentalement à quelques aménagements, on peut arriver à en trouver.
Tout d'abord, si on laisse provisoirement de côté le chapitre « La horde », qui anticipe sur la théorie du père, développée une trentaine de pages plus loin, nous trouvons une suite de quatre chapitres, « Les deux éros », « Le trouble », « La "scène " érotique  », « Le tenebroso racinien », qui traitent tous de l'amour racinien que Roland Barthes (j'y reviendrai tout à l'heure) préfère appeler « l'éros racinien  ». Malgré leur consternante ineptie, les analyses que contiennent ces pages, sont devenues quasiment classiques et sont de plus en plus souvent présentées comme des acquisitions définitives de la critique racinienne. Je consacrerai donc toute la première partie de mon étude à examiner l'explication que Roland Barthes nous donne de « l'éros racinien » Cette explication comporte essentiellement trois grandes théories que j'ai étudiées successivement dans trois chapitres, dont les titres sont ceux des chapitres de Roland Barthes : « Les deux éros », « La "scène" érotique » et « Le tenebroso racinien ».
Si les quatre chapitres relatifs à « l'éros racinien  » formaient un ensemble facile à cerner et assez court pour en permettre un examen, sinon tout à fait exhaustif, du moins très attentif  [24], il était, en revanche, assez difficile d'organiser l'étude des chapitres suivants. Avec le chapitre intitulé « La relation fondamentale », les propos de Roland Barthes deviennent, en effet, encore plus ambitieux, et, de ce fait, ils atteignent à un tel degré d'arbitraire, d'incohérence et d'absurdité que j'ai d'abord été tenté de tout laisser tomber. Enfin, après avoir élagué un certain nombre de foutaises de moindre importance pour bien dégager les fariboles de haute futaie, j'ai cru avoir trouvé une sorte d'unité, sinon dans les conclusions qu'il nous propose, du moins dans sa démarche. Si ses réponses changent, la question qu'il pose, reste la même : quelle est « la relation fondamentale  » de la tragédie racinienne ? Avec le chapitre qui le porte effectivement, ce titre pourrait aussi coiffer ceux qui le suivent, jusqu'au chapitre sur « Le "dogmatisme" du héros racinien » inclus, c'est-à-dire tout l'ensemble que je me propose d'examiner. J'ai donc choisi de donner ce titre à la seconde partie de mon étude et je l'ai divisée en trois chapitres, correspondant aux trois réponses successives données par Roland Barthes, réponses, en apparence, complémentaires, mais, en réalité, contradictoires : « Le Bourreau et la Victime », « Le Père et le Fils », « Dieu et la Créature ».
Si j'ai construit mon étude du Sur Racine sur l'examen des principales théories générales exposées dans la première partie de « L'Homme racinien », je n'en ai pas moins fait appel très largement, pour les discuter, aux analyses particulières des tragédies proposées dans la seconde partie. Ainsi donc, si je n'ai pu tout dire sur le Sur Racine, je crois, pourtant, en avoir fait une étude à la fois minutieuse et étendue. Tout en centrant mes efforts sur les pages les plus ambitieuses pour essayer de bien en sonder toute l'absurdité, j'ai néanmoins cherché, à partir d'elles, à ratisser aussi le plus grand nombre possible des innombrables sottises que « L'Homme racinien » nous offre à chaque page.
J'ajoute enfin que je ne me suis pas contenté, dans ce livre, de réfuter les foutaises de Roland Barthes. J'ai profité aussi des occasions que ses propos pouvaient m'offrir, pour rectifier assez souvent certains jugements, à mon sens erronés, d'autres critiques, le plus souvent modernes et même modernistes, mais parfois aussi beaucoup moins modernes, voire tout à fait anciens. Il a pu m'arriver même, mais très exceptionnellement, de m'opposer à l'opinion traditionnelle de la critique racinienne. Sans prétendre le moins du monde proposer une nouvelle « lecture » de Racine (une telle prétention est, à mes yeux, absurde et ridicule), j'ai pu apporter, sur tel ou tel point, des lueurs ou des précisions. Si ce livre est assurément celui d'un polémiste, j'ai voulu qu'il fût aussi, et même d'abord celui d'un racinien. Outre qu'en l'occurrence c'est sans doute d'un polémiste que les études raciniennes ont le plus besoin aujourd'hui où Racine est devenu un « alibi » pour les fariboles d'un Roland Barthes et de tant d'autres aliborons, j'ai voulu que ce livre sur le Sur Racine, fût aussi, contrairement au Sur Racine, un livre sur Racine.

 
 
NOTES :
[1] Vertige du déplacement.
[2] L'Aventure du signifiant.
[3] Barthes.
[4] Comprendre Roland Barthes. En dépit du titre de son livre, M. J.B. Fages s'est bien gardé de chercher, si peu que ce fût, à « comprendre » Roland Barthes. Il s'est contenté de résumer les uns à la suite des autres, en les citant abondamment, les différents livres de Roland Barthes. Les pages que M. Robert Emmet Jones a consacrées au Sur Racine dans son Panorama de la nouvelle critique en France (pp. 221-236), témoignent, elles aussi, d'une totale absence d'esprit critique et même de jugement.
[5] Le livre de Susan Sontag (L'écriture même : à propos de Barthes) ne compte que 55 pages de texte, dans un petit format (12-20) et avec une typographie aérée. Cela ne donnerait, dans une revue comme la R.H.L.F., qu'un article d'une vingtaine de pages.
[6] Je suis dix-septiémiste et racinien.
[7] Tel était bien, d'ailleurs, le sentiment de Raymond Picard lui-même. Il m'avait fait part, quelques mois avant sa mort, de son intention de revenir à la charge.
[8] Roland Barthes et ses amis ont exploité avec une malhonnêteté vraiment éhontée le fait que Raymond Picard était Professeur à la Sorbonne. Car, si Raymond Picard a cru devoir prendre la plume, ce n'est pas parce qu'il était Professeur à la Sorbonne, mais bien plutôt parce qu'il était le principal spécialiste de Racine et donc le mieux placé pour mesurer toute l'ineptie du Sur Racine. Si Roland Barthes avait publié son livre quelques années plus tôt, lorsque Raymond Picard était encore Professeur à l'Université de Lyon, celui-ci aurait certainement réagi de la même façon.
[9] Nouvelle Critique ou nouvelle imposture est un livre très court, et les pages qui y sont consacrées au Sur Racine, ne font que reprendre un article publié quelques mois plus tôt (« Racine et la nouvelle critique », Revue des Sciences Humaines, janvier-mars 1965, pp. 29-49).
[10] P. 42.
[11] On pourrait en dire autant de tous les écrits de Roland Barthes. Ses admirateurs les plus sincères ou les plus naïfs le reconnaissent, d'ailleurs, bien volontiers. L'un d'entre eux, M. Marcel Domerc, écrit, dans Le Nouvel Observateur (14 avril 1980, p. 33) : « J'ai lu, relu le Degré zéro de l'Ecriture, le Racine, le Michelet par lui-même, les Mythologies, les Essais critiques, et, avec gourmandise, le S/Z […] Aveu : il ne m'est rien resté de tout cela  : je veux dire sous forme de pensée expressément articulée, communiquée, assimilée ». M. Domerc voit une « singularité de [sa] position » dans « cette séduction littéraire d'un homme de littérature dont l'œuvre, cependant, [lui] est restée à peu près étrangère ». Ce qui aurait été vraiment singulier, c'est qu'il en fût autrement, c'est que les livres de Roland Barthes lui aient laissé des idées précises.
[12] Rendant compte du Sur Racine dans Le Monde (12 juin 1963), Pierre-Henri Simon estimait « qu'il faudrait souvent dix pages pour en commenter ou en discuter une ». Il était nettement en dessous de la réalité.
[13] Je n'ignore pas que certains lecteurs trouveront déjà que j'ai été beaucoup trop long. En polémique, comme en toutes choses, sans doute mais plus, peut-être, qu'en beaucoup d'autres, il est très difficile de satisfaire tout le monde. Si l'on se contente de prendre quelques exemples, fussent-ils particulièrement démonstratifs, beaucoup de lecteurs seront tentés de croire qu'on s'est livré, comme M. Jean-Jacques Brochier en a, très malhonnêtement, accusé Raymond Picard, à un « montage de citations » (« La vieille Critique est mal partie », op. cit., p. 1141) , et que tout ce qu'on n'a pas critiqué, était inattaquable. Si, au contraire, on prend beaucoup d'exemples, d'autres lecteurs, et parfois ceux-là même qui, autrement, ne se seraient jamais laissés convaincre, auront le sentiment qu'il aurait suffi de deux ou trois exemples. Rien n'est plus ingrat que la polémique  : mieux elle est menée et moins elle semblait nécessaire; plus elle est efficace, et plus elle donne l'impression d'être inutile. Quand on a réussi, non pas à « démolir  » un ouvrage ou une théorie, mais à montrer qu'ils ne tenaient pas debout, ceux qui, grâce à nous, en sont enfin convaincus, sont aussitôt persuadés qu'ils l'ont toujours été. Après la publication d'Assez décodé !, beaucoup de collègues et d'amis m'ont dit leur entière approbation. Quelques-uns m'ont laissé entendre en même temps que les écrits que j'avais dénoncés, étaient si évidemment ridicules que mon offensive était peut-être superflue. Ils oubliaient parfois une chose : ils avaient eux-mêmes attiré mon attention sur ces écrits en me disant les avoir trouvés « intéressants ».
[14] J'ai tenu, notamment, à faire ce que Raymond Picard n'avait pas pu faire dans le cadre très restreint qui était le sien, c'est-à-dire à citer, sinon tous (ils sont innombrables), du moins le plus souvent possible, les passages de Racine qui contredisent l'auteur du Sur Racine.
[15] Ces trois études sont « nées de circonstances diverses » et Roland Barthes nous dit n'avoir pas cherché à leur donner « une unité rétrospective » (Avant-propos, p. 9). La deuxième, « dire Racine », est le compte rendu d'une représentation de Phèdre au T.N.P. (paru dans Théâtre populaire, mars 1958). Le troisième, « Histoire ou Littérature ? », est un article, paru dans la revue Annales (mai-juin 1960) qui traite, à propos de Racine, un problème général de critique.
[16] « L'Homme racinien » est la reprise d'un texte destiné à présenter le Théâtre de Racine pour le Club Français du Livre (1960).
[17] Sur Racine, Avant-propos, p. 9, note 3.
[18] En fait, et j'aurai l'occasion de le montrer, il arrive assez souvent que Roland Barthes oublie complètement d'utiliser dans la seconde partie de « l'Homme racinien » les schémas explicatifs que la première partie nous présente pourtant comme des clés « indispensables ». Il arrive même que Roland Barthes contredise carrément, dans la seconde partie, ce qu'il a dit dans la première.
[19] PP. 15-68.
[20] D'autant moins que le format est moyen (14l20) et la typographie plutôt aérée.
[21] C'est-à-dire le premier paragraphe sur « les trois Méditerranées dans Racine » et les deux premiers chapitres, « La Chambre » et « Les trois espaces extérieurs  : mort, fuite, événement ».
[22] Voir « Sur la méthode de Roland Barthes », in La Linguistique, 1969, n° 2, pp. 141-154.
[23] C'est-à-dire les quatre chapitres intitulés « Esquisses de solutions », « Le Confident », « La peur des signes », « Logos et Praxis ».
[24] La première moitié du chapitre « Les deux éros  » et tout le chapitre « La "Scène" érotique  » font notamment l'objet d'une étude suivie.
 

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