jeudi 7 décembre 2017

Pierre Desproges avait ironisé : « quand Coluche est mort j'ai pleuré alors que quand Tino Rossi est mort j'ai repris deux fois des moules ». Nous n'aurons l'occasion que d'être triste à la suite du décès à quelques heures d'intervalle de Jean d'Ormesson et de Johnny Hallyday : deux voix se sont éteintes mais on les entendra encore longtemps car elle sont gravées dans notre mémoire. 
L'un était la gloire, incarnait les anciens, la connaissance, la littérature, la philosophie, le bonheur et l'art de vivre. L'autre était l'idole qui représentait les jeunes et leurs espoirs quelques soient leur âge, la musique, l'artiste, l'amour , ce qui fait la vie avec ses joies.

L'âge ne comptait plus et ils étaient tous deux très modernes chacun dans son domaine ayant passé les époques, les modes, les polémiques, l'histoire. On le lisait ou on l'écoutait en l'aimant ou non, mais ils faisaient rêver et on aurait voulu être comme eux. 

Jean d'Ormesson avait eu tous les honneurs de la République et de l'élite intellectuelle ou de celle qui se prétendait telle, et populaire car les livres ouvrent l'esprit de ceux qui n'ont pas eu la chance de naître au bon endroit ou qui veulent approcher le savoir qui libère. 

Johnny avait eu tous les honneurs du peuple qui aime ceux qui viennent de loin et se sont hissés au sommet, ce qui vaut toutes les médailles et l'académie. 

Ils auront tous deux à juste titre des funérailles nationales, le président de la république sera présent et pour l'un et pour l'autre.

J'ai beaucoup lu Jean d'Ormesson mais avec ses derniers livres surtout je ne l'ai pas entièrement compris.Il volait trop haut pour moi. J'ai aimé en revanche son sens de la conversation, son humour, ses citations, comme André Malraux qui m'avait fascinée quand j'étais adolescente pour son personnage et sa culture. Je n'ai pas apprécié certaines périodes et inspirations des chansons de Johnny tout en reconnaissant son immense talent sur scène, alors que j'avais été subjuguée aussi quand j'étais jeune par les textes de Georges Brassens.

Je ne sais de Jean d'Ormesson ou de Johnny celui qui m'a le plus formée et donné envie de m'investir en me créant un destin, petit certes, mais le mien.
Jean était un raconteur d'histoires, de grandeur , de sublime même parfois dans le trivial . Johnny donnait des leçons de vie pratique et d'espoirs, de désespoir qui se terminait bien. Comme Corneille écrivait des vers pour montrer ce qu'il faudrait faire dans la vie, tandis que Racine nous disait ce qu'il en est dans la réalité. Les hommes tels qu'ils devraient être face aux hommes tels qu'ils sont.

Il n'y a pas d'art mineur : il y a du talent ou non, et le public sait le reconnaitre.

Tous les deux étaient le symbole de l 'amour : courtois et parfois badin pour l'un, plus heurté pour celui qui chantait le rock-and-roll. Ils ont partagé les difficultés de la vie chacun à sa manière car la réussite n'exclut pas les épreuves, comme pour tous les hommes. Ils nous ont appris à vivre et c'est une leçon extraordinaire.

« Je dirai malgré tout que cette vie fut belle » a conclut Jean d'Ormesson. Johnny a cherché à « retenir la nuit ». Ils ont réussi leur pari : nous rendre heureux.

Au revoir et merci.

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