La France pleure ses soldats
Le tragique accident d'hélicoptères survenu au Mali renvoie durement la France à l'ampleur de ses missions.
Le don de sa propre vie, prix ultime de l'engagement dans le métier des armes, est soudain venu rappeler une vérité cruelle : le sacrifice des soldats envoyés au Sahel et le deuil de leur famille est infiniment plus proche du sentiment d'appartenance nationale que les expéditions lointaines.
Le chef d'Etat-major des armées, le général Lecointre, affirme très dignement son volontarisme : "Si je pensais cette mission impossible, il y a longtemps que j'aurais changé de métier". Mais il exprime aussi son réalisme et son esprit de responsabilité : "Je crois que nous n'atteindrons jamais une victoire définitive. Contrairement aux grands conflits du XXe siècle, jamais les armées françaises ne défileront en vainqueur sous l'arc de Triomphe". Avec 38 militaires français tombés depuis 2013, le cas du Mali n'est pas un sujet de polémique ; il oblige à méditer sur la dichotomie entre la profonde justesse de la cause - le combat contre le djihadisme ravageur - et l'étendue imprédictible du risque.
Rț
Ils étaient des pères, des maris, des frères, des enfants, des camarades, des Français. Lundi soir, treize de nos soldats sont morts dans un accident survenu au cours d’un combat contre les djihadistes au Liptako malien. Ils sont morts parce qu’ils jugeaient honorable de combattre des organisations djihadistes «qui nous ont déclaré la guerre dès 1995 » (Michel Goya). Ils ont pris de grands risques pour une cause qui dépasse nos petits intérêts immédiats et qui peut donc être dure à comprendre…
Notre engagement au Sahel. ???
Six officiers, six sous-officiers, un brigadier-chef, les garnisons de Pau, Gap, Varces, Saint-Christol en deuil ; mais, au-delà des unités, c’est le pays entier qui pleure ses enfants.
Dans une actualité bruyante et molle, qui se nourrit parfois de fausses indignations et d’émotions feintes, la mort brutale de ces jeunes gens engagés sur un théâtre d’opérations lointain, au péril de leur vie, a quelque chose de saisissant.
Depuis quelque temps, les experts militaires et les états-majors s’interrogent sur «Barkhane» et sur son devenir: combien de temps la France devra-t-elle rester dans la région? À quand la montée en puissance des pays africains (le G5 Sahel) censés prendre le relais pour assurer la paix dans la région? Mais les faits sont là: treize militaires français, pilotes d’hélicoptère ou commandos de montagne, ont été tués dans la collision entre deux appareils engagés dans une mission de combat. Leurs noms viennent allonger la liste de nos soldats tombés au Sahel, 41 à ce jour.
L’accident a eu lieu pendant une intervention aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso. La présence de la France dans cette région s’explique par ses liens historiques avec ces pays. Elle est surtout justifiée par la situation que connaît le Sahel depuis des années: des groupes djihadistes polymorphes sillonnent la région, attaquent, harcèlent, se fondent dans la population, avec pour objectif d’installer le chaos. C’est pour rétablir la stabilité que la France est engagée depuis 2013. Par ricochet, elle veille à garantir sa propre sécurité intérieure. La paix dans notre pays se prépare aussi au Sahel. L’Adrar des Ifoghas (nord du Mali) est une manière de «ligne bleue des Vosges» qu’aucun stratège ne doit quitter des yeux.
Maintenant, l’heure est à l’émotion et au recueillement national ; et chacun de murmurer en pensant à ces hommes morts pour la France, c’est-à-dire pour nous: «Mère, voici tes fils qui se sont tant battus.»
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