3/5, American Psycho, de Bret Easton Ellis
De quoi ça parle: d’une contrefaçon. Une contrefaçon «d’un être humain». Patrick Bateman. Riche, bien sapé, le jeune homme, écrasé par l’ennui des conversations autour du dernier petit restau qui a ouvert au coin de la rue, n’a «plus d’espoir en un monde meilleur» et veut que sa douleur «rejaillisse sur les autres».
Les raisons du scandale: pour expurger sa nervosité, Patrick se promène la nuit dans les rues. Là, il rencontre des gens. Puis, il les massacre, les viole, les mange. Une prostituée, une amie, un collègue, un clochard... En se regardant dans la glace parce qu’il se trouve beau. Pour certaines critiques, ce n’était pas le plus grave. Elles soulignaient surtout la redondance pénible des noms de marques qui envahissent les pages du roman.
Contexte de la publication: la liberté d’expression aux États-Unis n’est pas sans limites. Et, en 1991, la pudibonderie se déchaîna contre Bret Easton Ellis. L’écrivain, qui avait reçu une avance de 300.000 dollars pour l’écrire, garde une dent acérée contre «la gauche, les féministes, le New York Times et les médias en général» qui tentèrent d’empêcher la publication de son roman. Lui n’aime pas la «provocation» mais défend un art qui «dérange et endommage».
Pourquoi ne fut-il pas repoussé par tout le monde: s’indigner qu’un auteur ait écrit des choses épouvantables est une chose, prendre du plaisir en les lisant en est une autre. Le 24 avril 1992, cette critique parut dans Le Monde: «Il suffit de comparer avec les journaux d’autres serial killers publiés ces temps-ci. Vrais ou réinventés, leurs Mémoires sont sans doute horribles et cinglés, mais ils sont faibles, parce que tout le monde n’est pas écrivain. Et que beaucoup n’ont pas le moindre soupir du talent terrible d’Ellis. C’est bien toute la morale de l’affaire.»
Dialogue extrait du livre American Psycho:
«- Tu sais, fais-je remarquer, Tim avait l’intention de rompre, de toute façon. C’était terminé entre eux.
- Mais pourquoi, grands dieux? fait Evelyn, surprise, la curiosité en éveil. Avec cet endroit fabuleux qu’ils avaient, aux Hamptons.
- Je me souviens qu’il m’a dit un jour qu’il n’en pouvait plus de la voir passer ses week-ends à ne rien faire, à part ses ongles.
- Mon Dieu, fait Evelyn, puis, réellement déconcertée: Tu veux dire que... attends, elle n’avait personne pour les lui faire?»
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