Pourquoi l'invasion du Capitole a remis en avant le concept de "white privilege" |
Et si, en lieu et place de supporters pro-Trump, c’est Ă des militants de Black Lives Matter que les forces de l’ordre avaient dĂ» faire face? Aux Ătats-Unis, la question est sur toutes les lĂšvres alors que le Capitole a Ă©tĂ© envahi par des manifestants partisans de Donald Trump mercredi 6 janvier. |
La situation a vite dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© lorsque ces partisans ont rĂ©ussi Ă pĂ©nĂ©trer dans l’enceinte du cĂ©lĂšbre bĂątiment de la capitale fĂ©dĂ©rale. Certains ont pu poser poing levĂ© dans l’hĂ©micycle quand un autre s’est fait photographier les pieds sur le bureau de Nancy Pelosi, prĂ©sidente de la Chambre. L’un des partisans a mĂȘme Ă©tĂ© aperçu le sourire aux lĂšvres en emportant un pupitre officiel.
Des images ahurissantes rendues possibles par un service d’ordre dĂ©passĂ© et qui ont souffert d’une cruelle comparaison avec de prĂ©cĂ©dentes manifestations, comme celles de Black Lives Matter, oĂč les forces de l’ordre avaient Ă©tĂ© autrement plus mobilisĂ©es, comme nous l’expliquons dans la vidĂ©o ci-dessous.
“Quintessence du privilĂšge blanc...”
Pourquoi l'invasion au Capitole a remis en avant le concept de "white privilege"
CAPITOLE - Et si, en lieu et place de supporters pro-Trump, c’est Ă des militants de Black Lives Matter que les forces de l’ordre avaient dĂ» faire face? Aux Ătats-Unis, la question est sur toutes les lĂšvres alors que le Capitole a Ă©tĂ© envahi par des manifestants partisans de Donald Trump mercredi 6 janvier.
La situation a vite dĂ©gĂ©nĂ©rĂ© lorsque ces partisans ont rĂ©ussi Ă pĂ©nĂ©trer dans l’enceinte du cĂ©lĂšbre bĂątiment de la capitale fĂ©dĂ©rale. Certains ont pu poser poing levĂ© dans l’hĂ©micycle quand un autre s’est fait photographier les pieds sur le bureau de Nancy Pelosi, prĂ©sidente de la Chambre. L’un des partisans a mĂȘme Ă©tĂ© aperçu le sourire aux lĂšvres en emportant un pupitre officiel.
Des images ahurissantes rendues possibles par un service d’ordre dĂ©passĂ© et qui ont souffert d’une cruelle comparaison avec de prĂ©cĂ©dentes manifestations, comme celles de Black Lives Matter, oĂč les forces de l’ordre avaient Ă©tĂ© autrement plus mobilisĂ©es, comme nous l’expliquons dans la vidĂ©o ci-dessous.
“Quintessence du privilĂšge blanc...”
TrĂšs vite, deux mots ont ainsi pris le pas des discussions outre-Atlantique: “white privilege” ou, en français, “privilĂšge blanc”. “La quintessence du privilĂšge blanc! Comme c’est perturbant. J’en suis malade”, a par exemple tweetĂ© Khloe Kardashian.
Joe Biden, lors d’une allocution ce jeudi 7 janvier, a Ă©galement abordĂ© ce sujet, soulignant que si les manifestants avaient Ă©tĂ© antiracistes, des militants Black Lives Matter, ils auraient Ă©tĂ© traitĂ©s “trĂšs diffĂ©remment” par la police, “et c’est inacceptable”.
“Si ça avait Ă©tĂ© une manifestation du mouvement Black Lives Matter (Les vies noires comptent), ils auraient Ă©tĂ© traitĂ©s trĂšs diffĂ©remment de la foule hargneuse qui a attaquĂ© le Capitole, nous savons tous que c’est vrai et c’est inacceptable”, a-t-il dĂ©clarĂ© depuis son fief de Wilmington.
“Imaginez le carnage s’ils n’avait pas Ă©tĂ© blancs”, a Ă©crit de son cĂŽtĂ© l’acteur Chris Evans.
“Si ces gens Ă©taient noirs, ils auraient tous Ă©tĂ© abattus”, a aussi soulignĂ© l’acteur Kevin Hart sur Instagram. “Pourquoi ne pouvons-nous pas envisager de gĂ©rer cette situation de la mĂȘme maniĂšre que les nĂŽtres ont Ă©tĂ© traitĂ©s Ă plusieurs reprises?”, s’interroge-t-il. “Quand les policiers armĂ©s sont censĂ©s utiliser la force, ils ne le font pas. Merde, c’est triste.”
Comme le rapportent nos confrĂšres du HuffPost QuĂ©bec, nombreux sont ceux qui, au-delĂ des cĂ©lĂ©britĂ©s, ont comparĂ© les Ă©vĂ©nements de la journĂ©e aux manifestations de Black Lives Matter, soulignant le fait que les autoritĂ©s semblaient peu prĂ©parĂ©es, contrairement Ă ce qui aurait pu ĂȘtre mis en place face Ă une foule de manifestants noirs.
Le privilĂšge blanc, c’est prendre violemment d’assaut et piller le Capitole, dĂ©truire le drapeau des Ătats-Unis et le remplacer par un drapeau de Trump, puis ĂȘtre simplement renvoyĂ© Ă la maison tout en ayant une Ă©quipe SWAT qui vous tient la main pendant que vous descendez lentement les escaliers.
Le privilĂšge blanc en une photo.
Aux Ătats-Unis, la notion de “white privilege” - le “privilĂšge blanc”- est beaucoup plus rĂ©pandue qu’en France. Comme l’expliquait dĂ©jĂ Slate en 2016, outre-Atlantique, ces privilĂšges sont largement dĂ©battus dans les mĂ©dias et font l’objet de tribunes grand public.
Une notion qui s’est imposĂ©e aux Ătats-Unis
L’une des premiĂšres apparitions de ce terme vient des annĂ©es 30 mais le concept de “white privilege” a surtout commencĂ© Ă gagner en notoriĂ©tĂ© Ă la fin des annĂ©es 80 aux Ătats-Unis. Peggy McIntosh, une chercheuse spĂ©cialisĂ©e dans les Ă©tudes autour du genre, publie en 1988 un article intitulĂ© “Le privilĂšge blanc et le privilĂšge masculin: un point de vue personnel sur le fait de voir des correspondances dans les Ă©tudes sur les femmes”. Elle y donnait alors 46 exemples de “white privilege”, raconte le New Yorker qui a retracĂ© l’histoire de ce concept. Un article qui a fait date et beaucoup rĂ©agir, car c’Ă©tait l’une des premiĂšres fois que les diffĂ©rences de traitement entre les personnes noires et blanches Ă©taient dĂ©crites aussi directement par une femme blanche.
Si le terme s’est imposĂ© outre-Atlantique, le mot “privilĂšge” demande parfois Ă ĂȘtre explicitĂ© pour ĂȘtre mieux compris. Ainsi, la philosophe Naomi Zack, interrogĂ©e dans le New York Times, prĂ©cise en 2014: “Le terme ‘white privilege’ est trompeur. Un privilĂšge est un traitement spĂ©cial qui va au-delĂ d’un droit. Ce n’est pas tant qu’ĂȘtre blanc confĂšre un privilĂšge mais que ne pas ĂȘtre blanc signifie ĂȘtre privĂ© de ses droits dans de nombreuses situations. Ne pas avoir peur que la police tue votre enfant sans raison n’est pas un privilĂšge. C’est un droit. Mais je pense que c’est ce que le ‘white privilege’ est amenĂ© Ă illustrer, que les Blancs n’Ă©prouvent pas bien des inquiĂ©tudes que les non-Blancs, en particulier les Noirs, ont.”
Black Lives Matter
Sur le compte Instagram officiel du mouvement Black Lives Matter, on va encore plus loin que le concept de “white privilege” pour parler de “white supremacy”. “Ce que nous avons vu aujourd’hui est le rĂ©sultat d’annĂ©es de fabrication. De siĂšcles, mĂȘme. La prĂ©sence et l’action dĂ©cevantes des forces de l’ordre aujourd’hui Ă©taient une reprĂ©sentation de la suprĂ©matie blanche qui ne permettra jamais Ă nos communautĂ©s noires d’ĂȘtre libres. N’Ă©chappons pas Ă la rĂ©alitĂ© Ă laquelle nous aurions dĂ» faire face, nous le savons tous, s’il s’agissait de Noirs.”
Dans un autre post, ils expliquent: “quand nous, personnes noires manifestons pour nos vies, nous sommes trop souvent accueillies par des troupes de la garde nationale ou des policiers Ă©quipĂ©s de fusils d’assaut, de boucliers, de gaz lacrymogĂšnes et de casques de combat. Ne vous mĂ©prenez pas. Si ces manifestants avaient Ă©tĂ© noirs, nous aurions Ă©tĂ© gazĂ©s, battus, et peut-ĂȘtre tuĂ©s.”
Quatre personnes ont perdu la vie au cours de cette manifestation. L’une, Ashli Babbitt, a Ă©tĂ© griĂšvement blessĂ©e par balle dans des circonstances peu claires. Elle est dĂ©cĂ©dĂ©e de ses blessures peu aprĂšs. Trois autres sont dĂ©cĂ©dĂ©es dans le secteur de la colline du Capitole, sans que les forces de l’ordre aient fait le lien entre ces dĂ©cĂšs et les violences pour le moment. Pour la premiĂšre fois, Donald Trump a admis la fin de son mandat.
Ă voir Ă©galement sur Le HuffPost: Les images du chaos dans le Capitole Ă Washington
Qui aurait jamais imaginĂ© de telles scĂšnes aux Etats-Unis ? En prenant d’assaut le Capitole, les partisans de Donald Trump croyaient sans doute venir en aide Ă leur idole ; ils ont en rĂ©alitĂ© dĂ©gradĂ© encore son image. Cet Ă©vĂ©nement aux consĂ©quences incalculables constitue un vĂ©ritable dĂ©fi adressĂ© Ă la dĂ©mocratie amĂ©ricaine, au point que certains s’interrogent sur la possibilitĂ© de dĂ©mettre Trump de son mandat avant le 20 janvier, date officielle de la transmission du pouvoir Ă Joe Biden. D’ores et dĂ©jĂ , il dĂ©chire le Parti rĂ©publicain, dont nombre de responsables se repentent aujourd’hui d’avoir vendu leur Ăąme Ă un homme dĂ©cidĂ©ment incontrĂŽlable.
Ce coup de force des pro-Trump n’est pas si Ă©tonnant "quand on sait ce qu'est le populisme ", estime pourtant le politologue germano-amĂ©ricain Yascha Mounk. Tout en condamnant l’assaut, l’entrepreneur Denis Payre, lui, insiste sur la nĂ©cessitĂ© de comprendre la colĂšre d'une classe moyenne qui voit ses emplois et son mode de vie menacĂ©s. Aussi appelle-t-il Ă corriger les errances d’une "mondialisation malheureuse".
Le discours de Trump cet aprÚs-midi était juste surréaliste !
Ce qui se passe aux US, c'est les prĂ©mices du portage du conspirationnisme rĂ©actionnaire dĂ©bile des rĂ©seaux sociaux dans la rue. A force de croire n'importe quoi venant de n'importe qui, on finit par perdre tout contact avec la rĂ©alitĂ©. La chute sera extrĂȘmement dure .... pour tout le monde.
D'aprÚs plusieurs médias américains, des ministres envisagent d'écarter Trump du pouvoir
Des membres du gouvernement américain ont discuté de la possibilité d'écarter Donald Trump du pouvoir aprÚs le coup de force de ses partisans au CongrÚs, ont rapporté mercredi soir plusieurs médias.
Leurs échanges ont porté sur le 25Úme amendement de la Constitution américaine, qui autorise le vice-président et une majorité du cabinet à déclarer le président "inapte" à exercer ses fonctions, selon les chaßnes CNN, CBS et ABC, qui s'appuient sur des sources anonymes. Mais aucune proposition formelle n'a encore été présentée au vice-président Mike Pence, a précisé CBS.
"Nous ne cÚderons rien à la violence de quelques-uns qui veulent remettre en cause" la démocratie, a déclaré le président français Emmanuel Macron dans une vidéo publiée ce jeudi matin, aprÚs l'intrusion de manifestants pro-Trump dans le Capitole mercredi soir à Washington.
"Quand, dans une des plus vieilles démocraties du monde, des partisans d'un président sortant remettent en cause, par les armes, les résultats légitimes d'une élection, c'est une idée universelle - celle d'un homme, une voix - qui est battue en brÚche", a ajouté Emmanuel Macron, pour qui "ce qui est arrivé aujourd'hui à Washington n'est pas américain".
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