Napoléon s'expose sous toutes les coutures à La Villette
De la charge de cavalerie à Eylau à la berline de son mariage, tout est conçu de manière à expliquer didactiquement les multiples visages de l'empereur, glorieux et moins glorieux: l'exposition évènement "Napoléon" ouvre vendredi à la Grande Halle de la Villette.
"C'est la porte d'entrée de toutes les expositions napoléoniennes de l'année", juge Hélène Cavalié, directrice adjointe des collections du Mobilier National, après celles qui ont eu lieu du Musée de l'armée à Fontainebleau.
Dans la vaste halle de la Porte de Pantin, qui avait accueilli Toutankhamon en 2019, c'est un autre héros mythique qui est présenté pour le 200e anniversaire de sa mort. Avec, dès le lancement du projet, le parti pris des commissaires de ne laisser dans l'ombre aucun aspect. Ainsi le "rêve américain" de Napoléon et le rétablissement de l'esclavage, notamment en Guadeloupe, font-ils l'objet d'une section spéciale.
-Ecrans de médiation-
Partout, à côté des objets et documents d'époque, des écrans apportent les médiations indispensables de chercheurs en français et en anglais: ici sur le rétablissement par Napoléon de l'esclavage aboli par la Révolution, là sur le code civil et ses relents machistes, là encore sur le traitement des blessés et la mortalité dans et après les batailles.
L'exposition commence par une utile mise en contexte, avec une reconstitution des années révolutionnaires précédant la carrière fulgurante du jeune officier qui, selon sa formule célèbre, n'était "ni talon rouge, ni bonnet rouge, mais national".
Sa jeunesse est illustrée par une séquence du "Napoléon" d'Abel Gance, où l'on voit le jeune "Napoleone di Buonaparte" participer, au collège militaire de Brienne, à une bataille de boules de neige. A côté est affiché le brevet de lieutenant signé par Louis XVI en 1785.
"Ce n'est ni une exposition d'histoire, ni une exposition d'art. Elle montre quelqu'un qui a construit son époque" jusque dans le mobilier influencé par l'égyptomanie ambiante, souligne Jean-Baptiste Clais, conservateur au département des objets d'art du Louvre.
Cette exposition, insiste-t-il auprès de l'AFP, vise à "apporter de la clarté sur le destin du personnage et à insuffler une dimension personnelle, émotionnelle" qui touche les spectateurs, dont beaucoup d'enfants.
Deux reconstitutions sur grand écran, toutes deux sonores, dominent l'exposition: l'une reproduit en très grand format le Sacre de Jacques-Louis David, les groupes de personnages s'allumant les uns après les autres, pour être commentés.
-Apogée et chute-
L'autre est un court extrait du film "Le Colonel Chabert" d'Yves Angelo, où l'on voit la cavalerie impériale charger dans la brume et être décimée par l'artillerie ennemie à la sanglante bataille d'Eylau (1807). Le bruit de la charge emplit les oreilles à intervalles réguliers.
"Nous ne voulions pas faire une hagiographie", explique Jean-Baptiste Clais qui souligne que "la guerre doit être montrée dans sa réalité et pas seulement en exposant des uniformes".
Quant au rétablissement de l'esclavage, l'écrivain et éditeur Arthur Chevallier la remet dans son contexte économique: "c'est une régression. Il a cédé à la pression des industries notamment sucrières", analyse-t-il.
La berline richement décorée du mariage de Napoléon et Marie-Louise, surnommé "la Victoire", le berceau du roi de Rome, le trône de l'Empereur, sa tente de campagne, la reconstitution de la serre-chaude de la Malmaison: tout cela décrit l'apogée de l'Empire et des jours fastes.
Mais, dans les dernières sections, les tableaux dépeignant les campagnes d'Espagne et de Russie, alternant scènes de répression et d'agonies des soldats, disent la tragédie de la fin de règne.
Une statue de marbre blanc de Vincenzo Vela (1867) clôt l'itinéraire, montrant l'empereur assis seul à Saint-Hélène sur fond d'océan marin, face à la mort qui vient, lui donnant une touche nostalgique rappelant que le pouvoir est vanité.
-jusqu'au 29 décembre.
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