lundi 19 septembre 2022

ADIEU MAJESTÉ

 


et ses animaux...






Après une cérémonie religieuse à Westminster de 12h à 13h (heure de Paris), le cercueil sera inhumé l'après-midi au château de Windsor, en présence des membres de la famille royale.


 
Le cercueil d'Elizabeth II sur lequel on a posé couronne, sceptre et orbe, symboles royaux. POOL / REUTERS


Il y a 70 ans, les Britanniques faisaient leurs adieux au roi George VI. Des funérailles semblables à celles d'Elizabeth II à quelques détails près.

Il aura fallu plus de 70 ans pour que les Britanniques enterrent à nouveau leur souverain. Lundi 19 septembre, la dépouille de la reine Elizabeth II rejoindra sa dernière demeure après une semaine ponctuée de plusieurs cérémonies et cortèges en Écosse et à Londres. Le protocole des funérailles royales semble immuable ou presque. Pour la première fois depuis 1760, les obsèques ont lieu à Westminster Abbey alors que les prédécesseurs d'Elizabeth II, dont son père, avaient préféré la chapelle Saint-Georges à Windsor.

Le 15 février 1952, l'organisation des funérailles du roi George VI, mort neuf jours plus tôt, était consignée sur un document de trente-neuf pages. Il n'en fallait pas moins pour régler au détail près la procession qui devait mener le cercueil du roi depuis Westminster Hall jusqu'à Windsor. Les obsèques d'Elizabeth II sont, elles, préparées depuis des décennies dans le cadre de l'opération London Bridge. Depuis 1952, seul Winston Churchill a eu droit à des funérailles nationales.

Une émotion partagée

L'émotion est vive au Royaume-Uni depuis l'annonce jeudi 8 septembre de la mort de la reine Elizabeth. Des milliers de personnes se sont rassemblées pour lui rendre un dernier hommage lors des processions qui ont déjà eu lieu la semaine dernière à Edimbourg en Écosse et à Londres. Plus de 750.000 Britanniques ont patienté de longues heures, parfois jusqu'à 24 heures, pour pénétrer dans Westminster Hall, où son cercueil est exposé depuis mercredi. C'est une même ferveur qui a entouré les funérailles du roi George VI, le «gentil roi», monté sur le trône après l'abdication de d'Édouard VIII en décembre 1936. «L'Angleterre est vraiment consternée qu'un des meilleurs Anglais soit mort», note à l'époque Le Figaro.

Et pourtant, en ce matin d'hiver 1952, un brouillard de neige fondue enveloppe la capitale anglaise. Des centaines de Londoniennes, remarque Le Figaro ce jour-là ont patienté durant dix heures dans la nuit glaciale. De manière générale la patience des Londoniens est exemplaire. Depuis l'arrivée quatre jours plus tôt de la dépouille du roi, mort dans sa demeure de Sandringham, dans le Norfolk, plus de 300.000 Britanniques ont fait la queue, certains durant onze heures, pour s'incliner devant la bière au rythme de 6000 personnes à l'heure. La file d'attente, qui traverse deux fois la Tamise comme on peut le voir sur des photos publiées par le Dailymail, s'étale sur 5 km, un peu moins que les quelque 8 km comptabilisés ce week-end pour la reine Elizabeth.

La double page du Figaro consacrée aux obsèques de George VI le 16 février 1952. Le Figaro.

Une foule immense est attendue pour les funérailles. En prévision, les fenêtres des entresols et des rez-de-chaussée ont été fermées de planches et de palissades pour éviter la casse sous la pression. Les balcons ont été renforcés pour accueillir les curieux. Des chanceux, résidant sur le parcours à Londres ou à Windsor, en ont profité pour louer des places aux fenêtres entre une et cinq livres. Même le prêtre de Windsor loue des places dans la cour de l'église pour une livre, rapporte Le Figaro.

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Un parcours de 6,5 km en plus de trois heures

C'est son dernier voyage. Le cortège funéraire se met en branle à 9h34 alors que le premier des 56 coups d'un glas frappé de minute en minute sur la grosse cloche Big Ben vient de retentir. 56 coups comme autant d'années vécues par le roi. La procession longue de plus d'un kilomètre accompagne le défunt de Westminster Hall jusqu'à la gare de Paddington, un parcours de 6,5 km effectué en plus de trois heures au rythme de 65 pas par minute.

Le convoi funèbre, précédé de détachements militaires représentant toutes les armes de l'Angleterre et du Commonwealth, passe sous les fenêtres de Malborough House d'où la reine Mary, trop fragile pour prendre part à la cérémonie, effectue d'un geste de la main un dernier adieu à son fils. Derrière le cercueil posé sur un affût de canon vert (le même que pour les obsèques d'Elizabeth II) et tiré par 144 marins, suivent dans un carrosse la reine Elizabeth, la reine mère, la princesse Margaret et la princesse Mary, sœur du roi, puis à pied le duc d'Édimbourg, le duc de Gloucester, le jeune duc de Kent et même le duc de Windsor, pour l'une de ses dernières apparitions officielles en Grande-Bretagne.

Depuis la terrasse du Foreign officele journaliste du Figaro observe cette «nouvelle tapisserie de Bayeux» où les quelques habits noirs se noient dans les ors et les chamarrures. Les caméras de la BBC et de la British Paramount immortalisent le moment, images impressionnantes que l'on peut retrouver dans les archives du l'INA.

Saint James Park, Saint James Street, Piccadilly, Hyde Park et Adgware Road, la procession parvient enfin à la gare de Paddington. Le cercueil est embarqué dans un train à destination de Windsor dans la périphérie de Londres. Il est ensuite transporté en cortège jusqu'à la chapelle Saint-Georges où se tient la cérémonie religieuse présidée par l'archevêque de Canterbury. Le roi est inhumé dans le caveau royal de Windsor au côté de George V et Edouard VII. En 1969, la dépouille du roi sera déplacée dans le mémorial de la chapelle où le rejoindront en 2002 sa veuve, la reine mère Elizabeth et sa fille, la princesse Margaret. C'est ici que reposeront également la reine Elizabeth et son époux, le prince Philip, inhumé pour le moment dans le caveau royal.

Têtes couronnées, chefs d'État et un couac

Pour les obsèques de la reine Elizabeth, plus de 500 chefs d'État, monarques et dignitaires sont attendus, un nombre record et un casse-tête diplomatique. Lors des funérailles de George VI, moins nombreux, les puissants de ce monde répondent presque tous présents. Parmi les têtes couronnées, le roi Olav V de Norvège, le roi Gustave VI Adolphe de Suède, le roi Frédéric IX de Danemark, la reine Juliana des Pays-Bas ou encore le roi Paul Ier de Grèce. Un seul manque à l'appel : Baudouin, le roi des Belges. Ce dernier veut ainsi marquer sa fidélité à feu son père, le roi Léopold III, dont l'attitude pendant la Seconde Guerre mondiale avait été critiquée par le roi George VI. La couronne belge est toutefois représentée par le frère du souverain, Albert de Liège.

L'incident frise le scandale en Belgique où l'opposition socialiste marque son désaccord avec la décision du roi en boycottant le parlement jusqu'au lendemain des funérailles. Il faudra attendre les années 60 pour que les relations entre les deux familles royales se réchauffent, relate le quotidien belge Le Soir.

La France est représentée par le président Vincent Auriol qui figure au premier rang des chefs d'État dans le cortège funèbre. Accompagné d'Henri Queuille, ancien président du Conseil et de Robert Schuman, ministre des affaires étrangères, il est accueilli la veille à l'aérodrome d'Heathrow par le duc d'Edimbourg lui-même et reçu en audience privée par la reine après s'être incliné à Westminster Hall. Le président Truman, en revanche, fait faux bond et envoie son secrétaire d'État, Dean Acheson. Cette année, Joe Biden a, lui, été l'un des premiers à confirmer sa venue pour les obsèques d'Elizabeth II.

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