Rade de Saint-Pierre et Mont-Pelée. | "A peine débarqué, on
était sur la place Bertin, véritable promenade plantée d'arbres
longeant la mer. Aussitôt on avait la sensation de se trouver au milieu d'une
cité commerciale à la vie intense, qui paraissait se ressentir du
voisinage de la fièvreuse amérique". (Notes d'un voyageur. Le Pélerin 20 mai 1902). |
Le "Petit-Paris" des Antilles : une
ville européenne sous les tropiques. Première cité édifiée par les français en 1635, Saint-Pierre acquiert dès ses premières années, une importance considérable dans la vie de la colonie. Repère de flibustiers, puis haut lieu du trafic d'esclaves alimentant les plantations, la ville se développe rapidement autour du commerce des denrées exotiques (indigo, café, sucre...) qui fait la fortune de l'île au XVIIIème siècle. Ses négociants enrichis par le monopole commercial dont ils bénéficient à l'import comme à l'export contrôlent l'essentiel de l'économie martiniquaise et étendent bientôt leur domination au reste des Antilles. En quelques années, ils font de Saint-Pierre, le port français le plus important de la région. Sous leur influence, la ville se transforme et s'européanise. Déracinés sous les tropiques, ils tentent, avec succès, de reproduire un mode de vie proche de celui qu'ils connaissaient en métropole. Les cases en bois assemblées par les premiers colons laissent ainsi progressivement la place à de solides maisons de ville en pierre de taille, tandis que les rues sont pavées, et que les nombreux cours d'eau qui jaillissent du Mont - Pelé et des mornes environnants sont exploités pour créer un vaste réseau de caniveaux et de fontaines qui atténuent l'atmosphère pesante des rues inondées de soleil. A la fin du XIXème siècle, la ville se dote d'un éclairage public fonctionnant à l'électricité et découvre l'utilité du téléphone. Un tramway la traverse du nord au sud et relie la place du Mouillage à l'usine Guérin, sise à l'embouchure de la rivière Blanche. Une ville de labeur mais aussi de plaisirs Les plaisirs ne sont pas oubliés. La bonne société pierrotine se retrouve au théâtre édifié en 1786 pour servir de scène aux troupes que l'on fait venir de métropole. Le petit peuple qui gravite autour du port, ainsi que les marins et soldats de passage se donnent rendez-vous dans les nombreuses tavernes et maisons de passe installées dans les petites ruelles des hauteurs de la ville. Chaque année, c'est le même rituel, une folie collective s'empare de Saint-Pierre à l'approche du carnaval. Le travail cesse, la population entière danse et chante dans les rues au rythme des tambours et des bouteilles de rhum qu'on débouche, avant de se rendre en bandes joyeuses terminer les agapes au lac des palmistes, en haut du Mont-Pelé. Le centre de la vie intellectuelle de la Martinique La ville concentre la plupart des élites de l'île. Aux nombreuses familles békées qui y ont établie résidence s'ajoutent les professeurs des écoles publiques et religieuses, les magistrats, le corps médical, les hauts fonctionnaires et les cadres des industries privées. Tous contribuent plus ou moins au rayonnement culturel de la ville. Un rayonnement bien modeste vu d'Europe, mais important pour les Antilles de l'époque. Saint-Pierre ne compte par exemple que quatre petites librairies, et il faut attendre des mois avant de recevoir les nouvelles du monde extérieur. Des journaux sont bien publiés sur l'île, mais ressemblent plus à des tracts électoraux qu'à une presse digne de ce nom... |