MÉMOIRE. (journal
Le Trégor du 13 aout 2015
Marie-Thérèse
Jolivet, Résistante à 17 ans
Une
vingtaine de drapeaux d’associations patriotiques présents le jeudi
30 juillet à Ploumanac’h ont accompagné et rendu un dernier hommage à
Marie-Thérèse Jolivet, « Mythé » dans la Résistance.
Née le
18 septembre 1924, Marie-Thérèse Mudès vit à Bégard avec sa mère Maria et
ses deux frères alors âgés de 5 et 10 ans ainsi qu’avec sa grand-mère
maternelle, veuve de la guerre 14-18 dont le fils est mort à Verdun. Son père
le commandant Mudès est officier de Marine. Bientôt Maria reçoit cet
avis : « Par ordre de Vichy nous vous supprimons toute délégation de
solde pour le motif suivant : le navire que commande votre mari, le
commandant Mudès, bat pavillon à Croix de Lorraine et à ce titre est considéré
comme dissident. Il en est de même pour sa famille ». En effet, non
seulement le commandant Mudès est considéré comme dissident au régime de Vichy
mais avec son bateau et l’équipage, il quitte la Flotte de l’Etat Français en
juin 1940 pour rejoindre l’Angleterre, où il se met à la disposition du général
de Gaulle. Privée de la solde de son mari par le gouvernement de Vichy, Maria
doit se séparer de ses biens.
Clandestine
à 17 ans Marie-Thérèse suit des études de commerce. En juin 42 à Bégard,
elle est contactée par la Résistance. Désormais la jeune fille de 17 ans s’appellera
« Mythé » dans la clandestinité. Ses missions sont multiples. A
Kerguiniou en Ploubezre elle devient secrétaire pour le maquis, dactylographie
les tracts et le journal clandestin « le Patriote des
Côtes-du-Nord ». Agent de liaison et de renseignement, elle porte à
bicyclette les messages qui lui sont confiés ainsi que les tracts et le journal
et participe également au transport d’armes de poing et de leurs munitions,
d’un maquis à l’autre.
Dès son
entrée en Résistance, Marie-Thérèse passe un brevet de secouriste afin
d’obtenir un « ausweis » pour pouvoir circuler librement, y compris
dans la zone côtière interdite, grâce au petit fanion de la Croix-Rouge.
Cependant, disait-elle, « il n’aurait pas fallu que l’on regarde de trop près
le guidon et la pompe de ma bicyclette où je cachais les messages qui m’étaient
confiés ! »
Aplomb
Lorsqu’elle
évoquait son passé au service de la Résistance, MarieThérèse affirmait n’avoir
jamais eu peur y compris ce jour où elle fut arrêtée parce qu’elle portait des bottes :
« Je revenais de mission, mes bottes étaient vides, elles avaient déjà
livré leur secret. Les Allemands essayèrent bien de m’intimider en affirmant
que toutes les espionnes portaient des bottes, mais mon
jeune âge et
mon aplomb en la circonstance eurent raison de leur méfiance ». Un de ses
fabuleux souvenirs est le passage de l’aviation alliée sur Lézardrieux pour
mettre hors de combat l’escadre allemande faisant relâche dans le port, une
opération pour laquelle elle avait transmis le message par une des
ramifications de son réseau, le réseau « Turquoise-Blavet », dont
faisaient également partie ses cousins Simone et Yvon Jézéquel, tous deux
arrêtés en avril 1944.
« Elles
étaient toutes courageuses » De toute son existence, MarieThérèse n’a
cessé de rendre hommage au courage et au sacrifice des combattants de l’ombre
et de toutes les victimes de la barbarie nazie avec une pensée particulière
pour les membres de sa famille, gaullistes de la première heure, parmi lesquels
sa cousine Simone morte au camp de concentration de Ravensbrück, son cousin
Yvon mort au camp de concentration de Neuengamme, et pour un autre cousin
revenu de l’enfer du camp de la mort d’Auschwitz-Birkenau.
C’est avec
émotion que François Tassel, (Commandant Gilbert dans la Résistance),
responsable du Secteur Nord 1 des Côtes-duNord, parle de sa camarade
disparue : « Les femmes Résistantes étaient peu nombreuses. Elles
étaient toutes courageuses, conscientes du prix à payer si l’ennemi découvrait
leurs activités. Mythé faisait partie de ces personnes particulièrement
attachées à la France Libre et à la stricte application de l’appel du général
de Gaulle, multipliant les missions entre le réseau Blavet et le
maquis de Kerguiniou. Volontaire, discrète, prudente, elle connaissait parfaitement
l’organisation et les itinéraires du secteur Nord 1 et participait sur ma
demande, auprès de mes adjoints, aux réunions concernant nos activités ».
Titulaire de
la médaille des Combattants volontaires de la Résistance et de la Croix du
Combattant 39-45 avec agrafe « Libération », Marie-Thérèse Jolivet
venait d’être proposée pour le grade de Chevalier de l’Ordre de la Légion
d’Honneur.
Octobre
1942, Bégard. Marie-Thérèse (« Mythé » dans la clandestinité) est
agent de liaison. Titulaire de nombreuses décorations, elle est décédée le 25
Juillet dernier.