jeudi 6 novembre 2014

AFRODITE AUX SAINTES









LES SAINTES









Les Saintes regroupent 7 îles et îlots dont trois habités. Terre de Haut compte 1500 habitants et 250 000 visiteurs par an. Terre de Bas compte 1500 habitants et une poignée de visiteurs qui grossit chaque année. Ilet Cabri compte un Robinson pacifique, qui ne demande rien à personne…


Une famille d'îles : Les Saintes
Les joies tapageuses de la génération scooter
Une ascension modeste, mais des panoramas éblouissants
Archipel lilliputien pour une douceur de vivre authentique…
Le musée conte les légendes de l’île…
Fils de pirates bretons…
Le salako et les dominos
Terre de Bas
Ilet Cabri














Une famille d’îles : Les Saintes

Le village principal de Terre de Haut, appelé le Bourg présente, pourrait-on dire, un cachet pittoresque. La rue principale, qui longe le littoral, est bordée des deux côtés par des petites maisons saintoises, en bois délavé repeint au fil des saisons. Les maisons sont construites au bord de la rue, et ne laissent guerre de place à un trottoir. Cette rue ressemble trait pour trait aux peintures naïves qui font rêver avant le départ.

Quelques Saintoises attendent à quelques encablures du rivage. Les Saintoises ? Non, ce ne sont pas les jolies habitantes de cet archipel. Ce sont les barques de bois utilisées depuis des siècles par les marins pêcheurs des Saintes. Ils ont la réputation d’être les meilleurs marins du monde, car à bord de leur frêle esquif, ils bravent tous les temps, toutes les houles. Ils sont les dignes héritiers des premiers colons de l’île. Des Bretons, et cette origine est encore visible sur les traits des habitants. La plupart des habitants sont blonds et à peine métissés. Cet archipel, il a fallu qu’ils y tiennent pour y rester, car ici aucune culture n’est possible. La terre est, en effet, grillée par le soleil, les pluies y sont à la fois trop rares et trop violentes. L’eau du ciel leur est inutile, car elle se mêle directement à l’eau de mer et ne pénètre jamais la terre en profondeur. La terre tremble souvent et a fait s’écrouler bons nombres d’édifices en 2005, dont l’école et le campanile de l’église. La baie principale est entourée de mornes escarpés. Au Sud du village s’élève le Morne du Chameau, au pied duquel s’étend le quartier appelé Fond-Curé. Il abrite un village de pêcheurs qui se cantonne à l’écart du centre ville. Au Nord du Bourg, se dresse le Morne Mire où est édifié le Fort Napoléon. Le quartier du mouillage a colonisé les pentes sud de sa colline. Il est habité par une population aisée. Au pied du morne, une proue blanche aux volets bleus est à jamais ancrée dans ce rivage. Une maison, en forme de bateau, construite à l’endroit exact où la mer rencontre la terre, quel symbole ! Construite en 1942, c’est la demeure d’un médecin depuis 1958. Un médecin poète et marin dans l’âme ? Quoi de plus normal lorsqu’on choisit de vivre entre terre et mer ?






Les joies tapageuses de la génération scooter

Le village n’est pas encore envahi par les touristes qui viennent de Guadeloupe. Ceux-ci sont acheminés dans les quelques rares hôtels de l’archipel par les ferries. Seuls les courageux, les aventuriers ou les inconscients viennent en avion, car l’atterrissage est réputé l’un des plus dangereux de l’arc antillais. Quinze minutes suffisent à l’avion pour parcourir la distance entre la Guadeloupe et les Saintes. Mais, l’avion se pose sur un aérodrome minuscule. Sa piste est construite entre deux collines escarpées et la mer. Sensations extrêmes assurées pour les passagers ! Nous ne sommes qu’à dix-huit milles de la pointe de Basse-Terre en Guadeloupe. Les visiteurs choisissant le bateau parcourront la distance entre Trois-Rivières et les Saintes en trois quarts d’heures. Souvent, les touristes venant pour la journée louent des scooters pour grimper au sommet des mornes et profiter d’un panorama exceptionnel. Les voitures sont rares et sans doute superflues vu la superficie de l’île. Elle est de 14 km².
La vie des Saintes est rythmée par l’arrivée des navettes. Dès le matin, les visiteurs débarquent sur Terre de Haut. Les agences de location de scooter sont légion. Il y a plus d’une dizaine d’année, les scooters gâchaient le paysage sonore : du crissement des pneus au coup d’avertisseur enroué en passant par le beuglement des petites cylindrées, rien n’était épargné aux oreilles sensibles. Aujourd’hui, les scooters perturbent toujours l’ambiance des Saintes, ceci dit c’est devenu moins intolérable, sans doute un peu plus réglementé. Les Saintes offrent néanmoins repos et tranquillité aux visiteurs, dès le départ de la dernière navette et avant l’arrivée de la première !
Nous empruntons la rue principale qui longe le bord de mer. A la fin de la ruelle, une petite plage désordonnée où reposent quelques barques de pêcheurs. Juste en face, l’école qui distillait une ambiance récréative au pied de la colline du fort Napoléon est en reconstruction. Les tremblements de terre de 2005 ont complètement détruit l’établissement.








Une ascension modeste, mais des panoramas éblouissants

Pour monter au Fort Napoléon, nous empruntons un joli chemin qui monte au milieu des villas fleuries du Quartier du Mouillage. La vue est magnifique tout au long de la balade. Les Saintes sont composées de plusieurs îles et îlots. Deux d’entre elles sont habitées : Terre de Bas et Terre de Haut sur laquelle nous sommes. Elles se partagent trois mille habitants, dont six cents pêcheurs. Terre de Haut est l’île principale de l’archipel. L’économie est essentiellement tournée vers la mer. Car l’archipel ne possède pas de richesse exploitable, il pratique la pêche en mer et aux touristes…















Archipel lilliputien pour une douceur de vivre authentique…

La promenade nous élève au-dessus du bourg, nous plongeons notre regard à l’Est dans la baie de Marigot dont l’eau vert bouteille contraste étonnamment avec la terre ocre et aride des Saintes. Plus nous montons, plus la vue sur l’anse du Bourg se dévoile.

En face de nous, le Morne du Chameau, que nous avons gravi, ramenant de superbes photos. C’est le point culminant de l’île, à 309 mètres. La balade est plus longue que celle d’aujourd’hui. Il faut compter environ deux heures pour atteindre le sommet. Une fois là haut quel spectacle ! L’île entière se révèle avec ses monts en pentes abruptes couverts d’arbustes étriqués et de cactées qui résistent vaillamment à la sécheresse. Dans les vallées gorgées de soleil, seuls les iguanes et les lézards résistent aux conditions désertiques. La mer sculpte des baies merveilleuses dans les flancs de l’île. Les plages imprégnées de soleil tracent un trait d’union entre la mer et la terre. La dernière écume y meurt en jetant un dernier éclat diamantin. Puis, au-delà du sable brûlant naît une frange de cocotiers aux palmes luisantes, là débute le royaume de la terre.
L’île repose sur les eaux d’un bleu profond de la rade des Saintes. Elle a la réputation d’être l’une des plus belles baies au monde. Classée troisième au palmarès, les guides touristiques reproduisent un cliché courant : la baie des saintes est la petite jumelle de la rade de Rio. Je n’ai jamais croisé dans les eaux brésiliennes, je ne peux donc dire si cette comparaison est juste. Mais comment peut-on classer la beauté d’un site ? La météo, l’humeur du visiteur, sa vision individuelle du monde, son expérience, tant d’ingrédients rentrent dans la composition d’un jugement, que je me garderais bien de comparer deux paysages. Un endroit peut paraître idyllique ou odieux, selon que l’on soit amoureux ou que le cœur soit douloureux. Le plaisir cueilli dans la découverte d’un paysage est trop lié aux circonstances qui gouvernent l’esprit.


Les Saintes sont belles pour leurs différences, pour leur fraîcheur. Elles sont originales, car elles allient les contraintes d’une cité balnéaire recherchée et le charme d’un petit coin ancré dans ses coutumes séculaires. Pendant le jour, le ras-de marée des touristes s’engouffre dans la rue principale. La vague envahit les mornes et les plages. Pendant ce temps, à l’ombre des arbres, les îliens jouent aux dominos, les vieux loups de mer réparent leurs filets, indifférents au tumulte. Ils vivent leur vie, en parallèle de l’acharnement touristique. Le soir, les hôtes se retirent. Les scooters se taisent. Le soleil décline et l’authenticité réapparaît au sein de l’île. Il souffle ici comme un vent de renouveau éternel. Seul un cœur aveugle reste insensible à la douceur de vivre des Saintes. Sur la place du village, en face des marches de l’église, des bancs fondus dans les hibiscus invitent à la flânerie, et cette image rassemble toutes les qualités de l’île. Comment condamner les insulaires, s’ils comparent leur baie à celle de Rio, c’est tout simplement parce qu’ils sont «amoureux éperdus de leur paradis lilliputien » (Anne Cécile Connier, Guadeloupe N°4)











Le musée conte les légendes de l’île…

Nous cheminons sur la route en lacets, et nous traversons le quartier de Maison-Blanche. Une très belle bâtisse autrefois la résidence des officiers de garnison est en restauration prolongée. Le Fort Napoléon fut édifié au début du dix-neuvième siècle en position dominante sur Terre de Haut selon les préceptes de Vauban. Il fait la fierté des Saintois, car depuis qu’il a été restauré, il est classé monument historique. Nous atteignons les fortifications. Les canons, qui ornent l’entrée du musée, ne tirent plus sur les navires anglais. Ils composent les éléments décoratifs du jardin botanique magnifiquement aménagé au sein des fortifications. La balade du chemin de ronde conduit notre promenade autour de la bâtisse. Toutes les espèces botaniques des îles sèches des Antilles y sont représentées : agaves, aloès, cactus-cierges, cactus-tête à l’anglais (que j'appelle moi "coussin de belle-mère"), etc.…
À l’intérieur, le musée nous raconte les sempiternelles péripéties des armées françaises et anglaises au temps de la colonisation. Des maquettes de bateaux, des vêtements de l’époque, tout nous est exposé dans les grandes salles qui autrefois étaient le quartier général de l’armée chargée de défendre l’accès aux Saintes et à la Guadeloupe. Une salle entière est consacrée à la bataille navale de 1782. Celle-ci rendit les Saintes célèbres, même si ce fut un désastre pour la flotte française. Mais les vaincus ne furent pas déshonorés. Le Comte de Grasse qui défendait les intérêts français, le fit avec une telle bravoure et un tel panache qu’il fut accueilli avec tous les honneurs par l’amiral anglais Rodney, vainqueur de ce conflit.
Il y a aussi cette salle entièrement dédiée à l’amour. Les Saintes ont servi de décor à une romance belle et tragique. C’est l’histoire de la « Princesse Caroline » et de son bien aimé chevalier de Fréminville. L’officier s’éprit de Caroline, une roturière métissée. Il fut envoyé à la guerre, elle l’attendit. Mais elle mourut d’impatience. Il se laissa mourir de chagrin lorsqu’il l’apprit. Les histoires d’amour ne sont-elles belles que lorsqu’elles sont tristes ?











Fils de pirates bretons…



Le musée nous raconte encore d’autres histoires, comme celle de cette plage préférée des Saintois qui était un repaire de pirates. La baie de Pompierre cernée par des collines hérissées de cactus, est masquée au large par une péninsule appelée la roche percée. On imagine les corsaires se faufiler dans cette baie et y enterrer des coffres de joyaux. Comment alors ne pas épier les habitants des Saintes?
Ils sont là sur la plage. Comment ne pas trouver dans leurs yeux bleus, le teint clair à peine métissé, les longs cheveux blonds et crépus de celui-ci, la peau cuivrée de celui-là, des traits de ressemblance avec leurs ancêtres écumeurs de mer. Les Saintois ont toujours refusé le métissage. Les habitants actuels se disent les descendants directs des Bretons venus s’installer sur ces cailloux arides il y a plusieurs siècles ! S’appelaient-ils Rackam le rouge, Capitaine Moëde ou Jean Laffite ? C’est pourtant vrai, les habitants des Saintes ne ressemblent pas du tout aux habitants des îles voisines.




Le salako et les dominos

Sur le trottoir en face de la plage aux « pirates », les anciens du village portent le salako. C’est le chapeau typique des Saintes, généralement recouvert de tissus madras. Il a des allures tonkinoises.
Assis à l’ombre d’un arbre, les anciens jouent aux dominos. Ils tiennent tous les dominos dans une main, la main libre frappe la table avec le domino qu’ils jouent. Tous les dominos déjà joués sursautent. Tout cela se fait en parler créole, avec des rires graves et moqueurs qui fusent.
Dans la rue principale, de nombreuses boutiques ouvrent leurs portes. Vêtements, souvenirs, cartes postales, autant de pièges pour les visiteurs en mal de souvenirs à emporter chez soi. Une jeune fille nous propose des tourments d’amour. Joli nom qui désigne une petite pâtisserie à base de noix de coco, vendue par les grand-mères du village.















Terre de Bas

Terre de Bas est la sœur oubliée de la famille des Saintes. Elle a la réputation de ne pas être assez échancrée pour accueillir de belles plages. Faux, il existe au moins Grande Anse ! C’est une plage de carte postale, facile d’accès depuis le débarcadère de l’Anse Mûrier. Mais une île n’existe pas que par ces bandes de sables dorées. Terre de Bas est une colline de 240 mètres de hauteur entourée d’eau. Elle offre plusieurs possibilités de randonnée.
Deux villages se partagent 1500 habitants. L’île a subi d’énormes dégâts pendant les tremblements de terre à répétition de 2004 et de 2005. Beaucoup de maisons ont été refaites, de sorte que le village de Grande Anse présente un cachet propret inhabituel dans les Antilles. Toutes les maisons peintes de neuf sont entourées d’un jardin qui se partage entre l’agrément et l’utile. Des arbres fruitiers fournissent diversité alimentaire et ombre aux cabris, aux poules, canards et dindons. Tandis que les fleurs des alamandas, des hibiscus, des bougainvilliers rivalisent de luminosité. Chaque maison imprégnée de créolité soigne son allure. La rue principale plombée sous le soleil est gravie sans peine tant le plaisir des yeux efface l’effort à fournir pour atteindre le point de départ des randonnées.
Les traces partent à travers bois à l’assaut des mornes de Terre de Bas. A vrai dire cette île semble n’avoir qu’un seul promontoire. Cependant c’est une succession de collines qui descendent en cascades vers la mer. Les promenades débutent d’abord dans la chaleur, sous un soleil de plomb qui darde la tête des malheureux marcheurs. La progression est rendue difficile par d’énormes blocs de pierres qui encombrent le chemin. Celui-ci ressemble plus à une ravine asséchée qu’à un véritable chemin. Peu à peu les arbres colonisent le chemin, l’ombre apparaît de plus en plus généreuse, avec elle une brise vient rafraîchir les pneumatiques, nous pouvons continuer notre ascension jusqu’au sommet. L’avantage de la végétation c’est qu’elle permet de ne pas cuire. La contre partie de sa présence est le manque de panorama. Par de petites ouvertures, nous profitons néanmoins d’une vue magistrale sur tout l’archipel des Saintes. Tout en haut, des tapis de nénuphars et de joncs témoignent de la présence d’eau. Autrefois, les cimes des mornes servaient de citernes. Aujourd’hui, elles réunissent la petite faune des Saintes : cabris, perdrix, lézards, colombes et une variété de rapace de petite taille.
A la fin de la balade, la récompense se trouve à Grande Anse. Deux restaurants locaux offrent le réconfort bien mérité.
Sachez aussi que l’île abrite les ruines d’une poterie. L’endroit a semble-t-il été achevé par les tremblements de terre. Bien qu’il semble y avoir une volonté de restauration. C’est un endroit isolé, plein d’enseignement. Cette poterie était très active. Car elle fournissait les récipients nécessaires à faire les pains de sucre, et à conserver le sirop de batterie. Chaque sucrerie possédait au temps de la splendeur de la canne, deux à trois milles récipients.

consulter aussi mon autre blog
http://barbarajo.blog2be.net

Ilet Cabri

Nous levons l’ancre, et nous traversons toute la rade des Saintes. Nous hésitons entre le mouillage du Pain de Sucre, celui, en face d’Îlet Cabri. Le problème du premier est qu’il est très fréquenté, et en plus en nous approchant nous voyons les mâts se balancer de manière très suspecte. Le problème d’Îlet Cabri, c’est qu’il est petit, donc il offre peu de place pour se loger. Nous avons la chance en arrivant de voir s’en aller un voilier de taille plus grande que le nôtre. Il ne nous reste donc qu’à nous glisser à sa place. Ce mouillage est calme et agréable. Nous sommes à l’abri de la houle poussée par les alizés.
Les mornes escarpés d’Îlet Cabri plongent dans une eau turquoise. Derrière eux se cache le joli bourg de Terre de Haut que nous venons de quitter. Bien que nous soyons toujours dans le même archipel, nous avons l’impression d’avoir encore changé de pays. En effet, le décor est complètement différent de celui que nous avions autour de nous avant de lever l’ancre. En face de nous, au sud-est de notre mouillage, le Pain de Sucre, curiosité géologique des Saintes. C’est une presqu’île lilliputienne, elle se finit par un dôme sculpté d’orgues basaltiques en forme de pain de sucre. La bande de terre située entre le pain de sucre et l’île est bordée de chaque côté par une plage de sable doré. Les deux plages sont séparées par une frange de cocotiers. C’est dans ce paysage incomparable qu’un vieux loup de mer a établi son petit hôtel. La réalité a trouvé ici une jolie représentation du paradis mainte fois répétée sur les cartes postales.






Chaque île est une étoile de plus dans un collier digne du firmament
Notre île d’accueil émerge à quatre-vingt-cinq mètres de la mer. C’est une colline sortant de l’eau et abritant le Fort Joséphine, construit sur les fondations de l’ancien fort de la Reine. Il fait face au fort Napoléon et est séparé de lui par un chenal appelé la passe de la baleine. Du bateau, nous ne pouvons voir le fort, tant la végétation est drue et hirsute. Monter au fort est une aventure. Seules les chèvres empruntent encore les chemins aménagés autrefois par l’homme. Aujourd’hui, ils sont déformés par les pluies torrentielles qui ravinent les pentes et les chemins. En saisons cycloniques, les tempêtes achèvent de tout détruire.
Une seule personne habite l’île, un Robinson noir qui a investi un bâtiment sur la plage. Celui-ci ressemble plus à un blockhaus qu’à une maison édifiée et conçue pour y être habitée. Après avoir demandé au seul habitant de l’île comment nous rendre au fort, nous empruntons le chemin désaffecté qui grimpe à l’assaut de l’île. C’est une large route en bitume faite pour accueillir des voitures tout terrain. Je me pose la question de l’utilité d’une route carrossable en pareille petite île. La réponse nous est offerte à mi-hauteur. Un lotissement désaffecté a été bâti à flanc de colline du côté de la passe de la baleine. Les maisons où tout le confort était prévu sont éventrées. Les terrasses offrent une vue magnifique sur la rade des Saintes, le fort et le bourg de Terre de Haut. Quel gâchis ! La terrasse, les murs de la salle de bain sont carrelés. Les vents, les pluies érodent patiemment le travail de l’homme. Le chantier a été arrêté et oublié là, laissant une plaie sur la colline d’Îlet Cabri.
Nous poursuivons notre ascension vers le fort. Au fur et à mesure de notre progression, des lézards affolés s’enfuient dans un crépitement de feuilles séchées. Les chèvres, merveilleuses rochassières fuient parmi les lantanas. Quelques fleurs timides naissent d’abord blanches, puis virent au rose pâle et terminent leur vie en rouge foncé. Le chemin devient de moins en moins praticable. Le bitume a tout à fait disparu. La végétation mange lentement et patiemment toutes les traces laissées par l’homme.
Au sommet de la colline, le fort, partiellement détruit, présente encore quelques murs d’enceintes plus ou moins en état, une petite maison est encore debout, toits et murs en bon état. Devant l’entrée du fortin, une construction actuelle : une terrasse bétonnée jonchée de détritus, un réfrigérateur rouillé. Vestiges du passé et négligences du présent se côtoient souvent sur les sites anciens des Antilles. La végétation gagne. Elle a envahi tout l’intérieur du fortin qui n’est plus que le royaume d’une faune invisible. A l’approche de nos pas, nous entendons fuir, dans un grincement de tôle ondulée qui jonche le sol, les lézards apeurés. Nous suivons leur dérobade à l’ouïe, ils se frayent un chemin entre les feuilles mortes et les épineux. Toute cette faune grouille autour de nous sans que nous puissions la voir.
Nous grimpons sur le mur d’enceinte, et là, quelle vue étourdissante sur la rade des Saintes ! Nous avons pris de la hauteur, seuls sur ce caillou de bout du monde nous observons de loin l’œuvre et la vie des hommes. Nous redescendons de notre perchoir parmi les lantanas, les épineux, les chèvres et les lézards. La balade est agréable, nous sommes seuls et cheminons à notre guise. En passant sur la plage à proximité de « la demeure » du Robinson noir, je pense à son bonheur. Il vit là, loin de tout, sur son caillou. Sans doute un choix. Il ne possède même pas de bateau pour s’en aller un peu, voir ailleurs. Son île lui suffit. Ce matin, des pêcheurs sont venus vider leur filet sur la plage. Ils lui ont laissé du poisson. Le soir une lueur sur la plage : il se fait un feu. Il vit là, et coule des jours simples, en retrait de la civilisation, au creux d’une des rades les plus touristiques des Antilles.

Une famille d’îles : Les Saintes
Les Saintes regroupent 7 îles et îlots dont trois habités. Terre de Haut compte 1500 habitants et 250 000 visiteurs par an. Terre de Bas compte 1500 habitants et une poignée de visiteurs qui grossit chaque année. Ilet Cabri compte un Robinson pacifique, qui ne demande rien à personne…
Le village principal de Terre de Haut, appelé le Bourg présente, pourrait-on dire, un cachet pittoresque. La rue principale, qui longe le littoral, est bordée des deux côtés par des petites maisons saintoises, en bois délavé repeint au fil des saisons. Les maisons sont construites au bord de la rue, et ne laissent guerre de place à un trottoir. Cette rue ressemble trait pour trait aux peintures naïves qui font rêver avant le départ.

Quelques Saintoises attendent à quelques encablures du rivage. Les Saintoises ? Non, ce ne sont pas les jolies habitantes de cet archipel. Ce sont les barques de bois utilisées depuis des siècles par les marins pêcheurs des Saintes.
Ils ont la réputation d’être les meilleurs marins du monde, car à bord de leur frêle esquif, ils bravent tous les temps, toutes les houles. Ils sont les dignes héritiers des premiers colons de l’île. Des Bretons, et cette origine est encore visible sur les traits des habitants. La plupart des habitants sont blonds et à peine métissés. Cet archipel, il a fallu qu’ils y tiennent pour y rester, car ici aucune culture n’est possible. La terre est, en effet, grillée par le soleil, les pluies y sont à la fois trop rares et trop violentes. L’eau du ciel leur est inutile, car elle se mêle directement à l’eau de mer et ne pénètre jamais la terre en profondeur. La terre tremble souvent et a fait s’écrouler bons nombres d’édifices en 2005, dont l’école et le campanile de l’église.




les Saintes, los Santos, découvertes par...Christophe Colomb le jour de la Toussaint 1493.
En 1782 les Anglais provoquent la fameuse bataille qui allait terrasser la flotte de l'amiral de Grasse et leur permettre de s'emparer de l'île. Terrible Trafalgar avant l'heure, mettant aux prises près de 70 bateaux armés et plus de 5000 canons, faisant 7000 morts !... la bataille des Saintes, dans le canal qui les sépare de la Dominique, vit, en ce 12 avril 1782, la défaite dramatique du comte de Grasse face aux 50 vaisseaux de l'amiral anglais Rodney... Ce n'est qu'en 1816 que le calme revint, lorsque les Français reconquirent les Saintes de manière définitive, juste au moment où les Anglais reconnaissaient l'indépendance des Etats-Unis d'Amérique...
Petit à petit la population augmente : des Bretons et des Poitevins, car, la canne ne poussant pas sur ce sol aride, on n'eut pas recours aux esclaves et la population est pour ainsi dire blanche (à quelques nuances près !). pendant longtemps les Saintois arborèrent un couvre-chef typique, le " salako ", étrange chapeau de paille d'origine tonkinoise, importé par des ouvriers asiatiques embauchés dans une poterie de Grande-Baie et devenu depuis le symbole des saintois avec une réplique en madras pour les touristes !


J'aime beaucoup les Saintes.
Sa grande baie, la 3ème plus belle au monde, disent les guides, après Rio et Along !? Un accueillant plan d'eau en arc de cercle, et même un " Pain de sucre " miniature, sentinelle avancée sillonnée d'orgues basaltiques. Dès l'arrivée on remarque tout de suite une construction bizarroïde, en forme de proue de paquebot, une sorte de maison-navire pittoresque (à gauche en arrivant), bleu et blanc, avec hublots, bastingage et chaîne d'ancre, qui n'est autre que la maison du médecin de l'île, le docteur Ballabriga !
Sinon le bourg s'étire tout en longueur avec, au centre, une mairie toute pimpante, d'inspiration coloniale, à côté d'un square ombragé. Au bout du quai la gendarmerie, en bleu et blanc, semble sortir d'un décor d'opérette ! L'église marque la limite entre le quartier résidentiel dit du " Mouillage " et celui du Fond-Curé où habitent les pêcheurs. Cette église se différencie des autres églises antillaises par sa forme et son clocher légèrement décalé ! Les petites maisons aux toits rouges (en tôle ondulée) autour de la rade affichent un certain goût pour l'exotisme...
Il ne faut pas rater la visite du Fort Napoléon (environ une heure à pied), forteresse massive d'où l'on a une magnifique vue sur l'archipel.

cartes_des_saintes

Les Saintes

plage des saintes

Connaissez-vous le jeu des 7 familles ?
Si oui, dans la famille " îles paradisiaques ", je demande : l'archipel des Saintes.

BONNE PIOCHE !!!!
découverte par toujours et encore notre très cher Christophe Colomb en 1493 le jour de la Toussaint, l'archipel fut baptisé " LOS SANTOS "
ilet_cabrit_les_saintes
Une société privée s'est maintenant réservé le droit d'installer des bouées sur chaque mouillage, bouées payantes bien sûr, sur lesquelles nous sommes quasiment dans l'obligation de nous amarrer...
Or, sur ce mouillage le manque de vent faisait virevolter les bateaux et l'évitage a été calculé au plus juste afin d'installer le maximum de bouées... A plusieures reprises nous nous sommes demandés si nous n'allions pas faire auto tamponneuse

De plus l'anneau de la bouée est relativement haut et sans cesse il vienit cogner contre les coques. Un bruit assourdissant et peu rassurant !
Le mouillage du "Pain de sucre" est resté   sauvage et idylique. 

 Malheureusement nous avons appris que dès la saison prochaine cette même société installera des bouées d'amarrage et les bateaux seront contraints de s'y amarrer...
Le scooter est le moyen de locomotion universel sur Terre-de-haut, une des 6 îles formant l'archipel des Saintes.
Il semblerait que la municipalité ait tenté d'en limiter le nombre croissant, en vain.
Rares sont les voitures mais nous avons pu constater que les voiturettes électriques commençaient à se développer.
biquette
En chemin, ce petit troupeau de biquettes et cette basse-cour n'ont pas paru  déstabilisés par notre présence.
Elles bénéficient d'un sacré point de vue du haut du pic du Chameau qui culmine à 309 mêtres !
EH ! les filles, il y a pire comme cadre de vie.
fort_napoleon_saintesfort_napoleon
Premier arrêt : le fort Napoléon.

Lors de la visite nous avons appris que le XIXéme siècle fut le siècle de l'emprise militaire. Afin de lutter contre nos ennemis les Anglais, il s'en est suivi une politique systématique de constructions de fortifications. L'ironie du sort voulut que ces fortifications édifiées à grands frais n'eurent jamais l'occasion de servir car l'ennemi ne se présenta plus...
vue du fort napoleon
Sur les fortifications tout autour de l'imposant Fort Napoléon,
un magnifique jardin de cactus a été élaboré.
C'est de ce jardin que nous avons pu profiter de points de vue
grandioses sur tout l'archipel.
fort_napoleon3
Le ciel était suffisamment dégagé pour entrapercevoir La Guadeloupe.
Et parce que ce fut époustouflant de beauté,
fort4
je vous en remets une petite dernière....
plage_bompierre_les_saintes
Le nord de l'île nous a dévoilé ses plus beaux attraits avec cette baie de Pompierre presque entièrement fermée par l'îlot des Roches Percées et parfaitement abritée mais qui reste interdite à la navigation et au mouillage.
plage_marigot_saintes
La baie de Marigot tout aussi superbe mais qui néanmoins n'est pas un mouillage à conseiller car elle est peu protégée du vent et de la houle.
bois_joli_hotel
Pour terminer, la pointe du Bois Joli .


Le bourg s'étire le long de plusieurs anses concentrant la majorité des habitations.
Non loin de l'amarrage de Eolis III nous pouvions admirer les " saintoises ", canots typiques de l'île utilisés par les pêcheurs dont leur forme, leurs couleurs vives et leur nom pittoresque caractérisent ces embarcations.
bateau_maison
Une des curiosités de cet endroit est la célèbre maison bateau
du docteur accrochée au morne.
Plus qu'originale n'est-ce-pas ?
pelican

   Les pêcheurs rentrent au port vendre le fruit de leur labeur (5€ le kilo), une aubaine pour la population qui s'empresse de venir faire leurs achats, au grand damne des pélicans qui étaient à l'affût du moindre abat rejeté à la mer.
regate
Le départ de la régate des saintoises traditionnelles était donné non loin de l'endroit où Eolis III  était amarré. Spectacle garanti.
regate1regate2regate

  
Nous avons passé une petite semaine sur cet archipel et que d'émotion face à ces paysages qui s'imposent par leur beauté. Nous nous sommes  promis d'y revenir  
depart_saintes
il est 6 heures du matin lorsque nous quittons Les Saintes.
Cap sur La Dominique où nous prévoyons de passer la nuit
avant de remettre les voiles direction La Martinique.
 
sortie_vers_madere
fleche

 

LE TOURMENT D'AMOUR : HISTOIRE



Éclairage sur l’origine du Tourment d’Amour ou la fin d’un mythe tenace


« Il était une fois un petit gâteau saintois fourré à la confiture de coco appelé Tourment d’Amour…»

Quand la commune de Terre-de-Haut fait protéger officiellement l’appelation, la recette et l’origine d’une pâtisserie traditionnelle saintoise
Comme n’importe quelle production industrielle originale, le Tourment d’Amour de Terre-de-Haut est devenu depuis mai de cette année 2013, une marque déposée à l’Institut National de la Protection Industrielle (INPI), à Paris, en attendant d’être définitivement reconnu comme étant « le seul, l’unique, le véritable » à l’INAO, l’Institut National de l’Origine et de la qualité.
Que l’on protège de toute contrefaçon cette pâtisserie locale devenue à la longue traditionnelle et qui a acquis de notoriété publique sa renommée aux Saintes, était certainement une excellente initiative et une nécessité. Nul ne le contestera. Mais de là à affirmer avec la plus parfaite certitude que le Tourment d’Amour est une création gastronomique spécifiquement saintoise, c’est aller, semble-t-il, un peu vite en besogne.
Quand un Saintois expatrié épouse une pâtissière originaire de Baie- Mahault
Dôme du magasin le Bon Marché à Pointe-à-Pitre
Dôme du magasin le Bon Marché à Pointe-à-Pitre
Sans vouloir donner un (petit) coup de pied dans la fourmilière du chauvinisme saintois, il faut remonter au milieu des années 1920 pour connaître l’origine exacte, l’évolution et la vulgarisation de la recette de cette pâtisserie qui fait tourner la tête aux touristes et dont bon nombre de cuisinières-pâtissières saintoises revendiquent aujourd’hui la maternité, avec un peu trop de fierté feinte, selon nous, pour être sincère.
Donc, aux alentours de 1925, un Saintois entreprenant, originaire de Terre-de-Haut, M. Louis Thomas, est directeur de la plus importante mercerie générale de Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, le Bon Marché. Il a épousé Melle Eugénie Célany, belle et grande « capresse » de Baie-Mahault, pâtissière et cuisinière occasionnelle de son état.
Eugénie Célany  dite Man NINI en 1951 Photo aimablement communiquée par Kelly Cassin
Eugénie Célany
dite MAN NINI en 1951
Mme Thomas est sollicitée régulièrement par les grandes familles riches de la Grande-Terre pour organiser banquets et réceptions, et livrer à domicile gâteaux et pâtisseries dans la réalisation desquels elle a forgé sa renommée. Parmi ses nombreuses spécialités, elle réalise depuis fort longtemps à partir d’un moule-plateau artisanal fabriqué localement, un grand gâteau rond ou rectangulaire, à base de génoise posée sur un fond de pâte brisée, fourré à la confiture de noix de coco, qui fait le délice de ses clients et dont elle est sans doute la seule à détenir la recette et peut-être la première à l’avoir expérimen-tée.
Quand la génoise au coco franchit le Canal des Saintes
À cette époque lointaine, cette pâtisserie originale, qui ne s’appelle pas encore tourment d’amour, est inconnue aux Saintes, alors même que l’archipel regorge de ses propres spécialités comme la doucelette, le pâté-coco, la boboyotte, le « bonbon mou », le sucre d’orge, le berlingot, le suc-à-coco avec ou sans tête rose, le gâteau patate et j’en passe…
Portion de tourment d'amour
Portion de tourment d’amour
En 1928, année du terrible cyclone qui ravagea la Guadeloupe et ses dépendances, M. Louis Thomas tombe gravement malade et regagne Terre-de-Haut avec son épouse pour y mourir. Devenue veuve, Eugénie Célany qui habite la maison de feu son mari, face au Café de la Marine, épouse en secondes noces Jean-Marie Joyeux, lui-même veuf depuis quelques années. Le couple élit domicile dans cette grande demeure du quartier du Mouillage qui se prolonge par une arrière-cour fermée disposant d’un puits, d’une citerne et d’un four à pain.
pièce montéeC’est dans cette maison – qui abritait encore récemment le restaurant Le Mouillage – qu’Eugénie Célany, désormais Mme Jean-Marie Joyeux, appelée familièrement Man NINI, va ouvrir une boulangerie, un restaurant et une » fabrique » de pâtisseries diverses : » bonbons mous », « pyramides décorées » et autres sucreries pour anniversaires, baptêmes, communions et mariages… Et toujours dans un grand moule, vendue entière et sur commande, la génoise (gâteau fouetté au beurre) fourrée à la confiture de noix de coco qui n’est pas encore connue sous l’appellation Tourment d’Amour.
Estelle Célany, nièce de  Man NINI Ph : Kelly Cassin
Estelle Célany,nièce de Man NINI
Fréquentent alors la maison de Man NINI, sa nièce Estelle Célany, qui deviendra la Grand-mère de notre ami Patrick Rodgers et qui reprendra le restaurant et la pâtisserie à la mort de sa tante, Rachel Foy, une des filles de Jean-Marie Joyeux dont le mari est lui-même boulanger, et Irène Joyeux, la maman du célèbre chanteur-troubadour Cocotier. Sous la férule de Man NINI, ces trois jeunes femmes apprennent la pâtisserie, aident la patronne à réaliser ses plats et gâteaux commandés à l’occasion de diverses cérémonies, et reçoivent en héritage la recette de la génoise fourrée.
Quand les petits moules ronds et les premiers fours au gaz arrivent enfin à Terre-de-Haut
Les petits moules ronds étant introuvables aux Saintes à cette époque et, en l’absence de four individuel, la génoise au coco, qui n’a encore ni le nom, ni la forme, ni la renommée qu’on lui connaît aujourd’hui, est cuite au four à pain dans un grand moule et se vend en portions directement au fournil, sans pour autant bénéficier d’un réel engouement.
sdc15582C’est seulement au milieu des années 1960, que les petits moules crénelés circulaires faisant leur appa-rition, deux anciennes aides-pâtissières de Man NINI, Rachel Foy et Irène Joyeux, équipées toutes deux à demeure, l’une du four en dur de son mari, l’autre d’une gazière individuelle, eurent l’idée de les utiliser pour réaliser ces petits gâteaux fourrés qu’elles vendent à l’unité sur le pas de leur porte : le véritable et actuel tourment d’amour était né sous sa forme la plus courante, résultant de la combinaison d’une recette venue de Baie-Mahault, de l’introduction aux Saintes de fours individuels et de l’idée d’utiliser de petits moules.
Quand la recette et la vente publique du gâteau au coco se popularisent
Dès lors, avec l’explosion des moyens de transports et une fréquentation de plus en plus accrue de touristes et visiteurs à Terre-de-Haut, beaucoup de ménagères saintoises, douées autant pour la préparation du poisson sous toutes ses formes que pour la pâtisserie, ont tôt fait de s’apercevoir que la vente libre sur la voie publique du tourment d’amour allait mettre un peu (beaucoup) de beurre dans leur court-bouillon.
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Les vendeuses de rue se multiplient alors à l’arrivée et au départ des bateaux, et rares sont les visiteurs qui reprennent la navette du retour sans leur(s) petit(s) paquet(s) de « tourments », pour le plus grand plaisir de leurs amis, enfants ou parents restés sur « le continent » ! Car si la recette s’est répandue dans toute la Guadeloupe, et que les tourments d’amour se vendent désormais dans les supermarchés de Pointe-à-Pitre ou de Basse-Terre, seuls ceux des Saintes prétendent avoir conservé leur saveur originelle et se prévalent du label « traditionnel », avec tout ce que cela implique de fantasmagorique dans l’imaginaire et le palais des dégustateurs !
Quand la légende, même non avérée, contribue au charme de la chose et de son appellation
Si nous savons maintenant comment a été introduit, a évolué et s’est popularisé le « Tourment d’amour » à Terre-de-Haut, il n’en va pas de même de l’origine de l’appellation. Bien inspiré en effet celui ou celle qui saurait dire qui le premier a utilisé cette appellation et en quelle circonstance. Une première légende prétend qu’elle serait venue spontanément à l’esprit et aux lèvres d’une épouse se languissant de son mari parti en mer, et réalisant ce gâteau en l’absence de ce dernier, aurait compensé sa frustration d’amoureuse par le moelleux de la génoise et la douceur du coco. Une autre dit que ce serait au contraire pour satisfaire son mari à son retour de la pêche, lequel ayant enduré mille tourments loin de sa bien-aimée, aurait été récompensé de sa patience en dégustant à son retour la savoureuse pâtisserie à la confiture…
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Je vous laisse le soin de choisir celle qui vous convient, ne sachant vous dire laquelle est la vraie ou si elles sont toutes deux également fausses, bien qu’évoquant l’une et l’autre l’amour et ses tourments, au féminin comme au masculin !.. comme je ne saurais vous donner la recette du vrai Tourment d’Amour. Car si j’ai souvent trempé le doigt avec délectation dans la confiture de coco ou autre de ma mère et de mes tantes, je ne me suis jamais hasardé à mettre les mains dans la farine. Par contre ce que je peux vous affirmer à coup sûr c’est que cette histoire m’a été contée, (presque) mot pour mot par un petit-fils de Jean-Marie Joyeux, filleul de Man NINI, âgé aujourd’hui de 79 ans et qui a vécu son enfance et son adolescence dans la maison même où se réalisa le premier tourment d’amour de Terre-de-Haut et sur la façade de laquelle je suggère aux autorités d’apposer une belle plaque commémorative… en forme arrondie de Tourment d’Amour bien entendu… Raymond Joyeux
PS. Je remercie Kelly Cassin, la petite fille d’Estelle Célany, pour m’avoir aimablement communiqué les photographies de sa grand-mère et de Man NINI. Par ailleurs tous commentaires, remarques ou précisions concernant cet article seront les bienvenus.

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12 réponses à Éclairage sur l’origine du Tourment d’Amour ou la fin d’un mythe tenace

  1. Rogers dit :


    Salut Raymond, étonnant cette article, mais le plus impressionnant c’est que tu es entrain de m’apprendre que l’origine du « tourment d’amour », et sa mise en œuvre vient de mon arrière grand mère.et en passant, mon nom c ‘est ROGERS et non RODGERS, merci à bientôt……



  2. Désolé pour la faute dans ton nom, mille excuses et merci pour la précision, je m’en souviendrai. Je me disais bien que tu n’avais pas une « tête à l’anglais » !

  3. chrysos dit :


    Les choses se compliquent , les héritiers de man MiNi pourraient ester en justice comme dépositaires exclusifs de la marque. Raymond j,ai comme le sentiment que tu vas te faire brocarder par certains lecteurs.
    Vous imaginez 15 centimes de royalties par unité vendue pour les descendants de man MiNi . C,est une vraie rente.

  4. chrysos dit :


    Je propose que l,on change l,appellation sans changer la recette… Tourment chalus , cela me semble plus authentique ment vrai.Oui? Non?…



  5. En traitant ce sujet délicat, j’avais bien conscience de bousculer le chauvinisme de nos compatriotes et l’ai signalé au début de l’article. Mais je te rassure, Chrysos, à ma connaissance, Man NINI n’a pas eu d’enfants, donc pas d’héritiers directs. Par contre, comme elle était l’épouse en secondes noces de Jean-Marie JOYEUX, on peut supposer que du côté de son dernier mari, tous les JOYEUX des Saintes, dont toi et moi, mon cher Chrysos, pourraient prétendre à la succession… Mais malheureusement le « brevet » n’a pas été déposé en son temps et la Commune nous a devancés… Néanmoins, peut être que lors d’un prochain « discours » politique, on me le reprochera, comme on m’a reproché en 2001 mon texte » RHUM », dans lequel « certains » auraient perçu du mépris à l’égard de tous les rhumiers de TDH donc des Saintois en général. Ou peut-être qu’en débarquant de Miss Guadeloupe, un beau samedi matin, j’aurai droit aux huées de la ligue des marchandes de tourments (toutes d’ailleurs inventrices personnellement de la recette), faisant une haie de déshonneur pour me recevoir… Cette étrange coutume, toujours en vogue – surtout en période électorale – pourrait faire d’ailleurs le sujet d’un prochain article, qui sait ?

  6. CASSIN cATHERINE dit :


    Toute vérité est elle bonne à dire et à écrire, tonton? En rétablissant celle des origines du tourment d’amour tu nous prives d’un slogan si souvent utilisé sur le « Continent » et que nous aurions pu reprendre pour défendre notre cause « Touman la sé tan nou, touman la sé pa ta yo… » Tant pis , il va falloir chercher autre chose. Je constate que le tourment est un gâteau polémique avant de devenir un tourment politique car sur le net, beaucoup se disputent la recette du « vrai tourment d’amour » avec ou sans crème patissière. Celui des Saintes, le « vrai » sans aucun doute n’est ce pas !! étant bien entendu , sans crème ajoutée. Peut être faudrait il le débaptiser ?
    Merci à Kelly pour la photo de Têtelle c’est toujours ainsi qu’elle est dans mon souvenir.

  7. chrysos dit :


    Question de savoir :- jean marie JOYEUX , estce lui que l’on surnommait » boule suif » et qui s’asseyait sur un muret faisant face à la maison d,auguste LORGE ,un beret sur la tête ? Il souffrait de la maladie de PARKINSON me semble t il , tellement il tremblait des bras.



    • Il y a eu en effet deux Jean-Marie Joyeux. Celui dont tu parles, dit Boule Suif, n’a rien à voir avec celui qui avait épousé Man NINI. D’ailleurs ce denier est décédé en 1947, et vu ton jeune âge tu ne l’as sûrement pas connu. C’était le père de Joubert, Aimée, Lydia, Reine et Deverne, donc par le fait même mon grand-père ! Il avait une maison à l’emplacement de l’actuel l’Ô bleu et également un four à pain à cet endroit. On était porté sur la boulangerie dans la famille ! À cette époque aux Saintes, il y avait une bonne dizaine de boulangeries au feu de bois ! Aujourd’hui, il n’en reste qu’ une seule véritable, celle d’Eugène Samson, reprise par son fils Jean-Claude.

  8. chrysos dit :


    Merci Raymond pour ton zoom arrière net et précis



  9. Une autre « légende » concernant l’origine supposée de l’appellation Tourment d’amour : ce dimanche 6 octobre aux Saintes, une marchande de cette pâtisserie, rencontrée devant sa boutique, m’apprend « de source sûre » que ce serait une dame qui allait vendre des Tourments aux marins de la Jeanne d’Arc, (l’ancien navire-école qui n’était pas encore le porte-hélicoptères) qui a trouvé ce nom. Il lui serait venu de la pénible situation de ces hommes, éloignés de leurs épouses ou fiancées, et qui enduraient les pires « tourments » de cette longue séparation. On en revient toujours à quelques variantes près à la même interprétation.

  10. Alain Joyeux dit :


    Raymond,
    Avec le dossier sur le lambi, cet article (et échange) sur le Tourment d’amour nous montre enfin un authentique journalisme « interactif » sur notre archipel.
    La rigueur des enquêtes ou portraits sur ce blog, la pratique de l’interview, la qualité de rédaction, la force des images et la maîtrise technique du support numérique en ligne sont sans doute les piliers de cette qualité journalistique.
    Si la plupart des thèmes et articles sont axés sur la vie saintoise, les valeurs partagées et les réflexions à travers les portraits ou sujets traités dépassent le cadre du pittoresque et du folklore local . D’ailleurs, la variété des publications de ce blog le démontre: littérature, arts, société, écologie… What else ?!
    Dernièrement, une lectrice de ce Blog te remerciait de tirer les lecteurs vers le « haut »,. Certes oui, et nous avons tous besoin d’élévation !
    Comme évoqué par Félix Foy dans l’article « aux sources de notre identité » : « Terre de Haut », nom qui pourrait être défini par : Terre Haute, île occupant une position élevée, avec des habitants portant tête haute « , le travail engagé à travers ce blog relève d’une quête (pleine d’espoir) de rencontre et de dialogue qui seuls peuvent nous grandir individuellement et collectivement , sans avoir besoin de rabaisser les autres. (ce qui n’empêche pas de dire, lorsqu’il le faut, des vérités pas toujours agréables!)

    Car bien sûr, chaque article publié est une prise de risque, un positionnement dans tes valeurs et ton engagement ( ce qui suppose le désaccord de certains – mais aussi la possibilité de l’exprimer). Toutefois, ton Blog, Raymond, est une contribution authentique pour tenter de nous relier et nous allier au lieu de nous diviser : cultiver le bon sens, la réflexion, l’échange … Quête salutaire dans ce monde et dans ces temps de crispation et de repli sur soi.
    Même si la technologie numérique interposée dans les échanges montre ses limites ( illusion souvent d’être « connecté » alors que l’on est juste seul devant son écran), sans doute permet-il au moins d’ouvrir des fenêtres d’expression et une possibilité de participation de chacun. En témoigne les commentaires publiés et la fréquentation conséquente du blog.
    Les paroles du Dalaï Lama qui suivent illustrent bien pour moi cette invitation implicite à cheminer dans l’interactivité fertile:
    « Sachons reconnaître et accompagner ceux qui ont trouvé des chemins ouverts. Ceux-ci n’ont rien à prouver, ceux –ci ne veulent rien imposer et marchent le cœur léger et l’esprit libre, par profonde gratitude et simple joie d’exister et de partager. Ceux-ci déploient naturellement dans leur sillage une fraternité contagieuse, source et but de notre condition »
    Merci pour tous ces partages qui contribuent aux rapprochements de nos humanités.



mercredi 5 novembre 2014

ESCALE A MARIE GALANTE





paysages de Marie-Galante



Si les dimensions de l'île sont modestes, 15 kilomètres de diamètre alors que le point culminant atteint 204 mètres, elles représentent les conditions optimales pour l'épanouissement d'un terroir à la culture tout à la fois homogène et diversifiée. Dès que vous quittez les trois bourgs installés dans la plaine littorale, vous constatez que l'île n'est pas aussi plate qu'elle n'y paraît et vous réserve une étonnante palette de milieux.
carte marie galante
1 - 4:
tour de l'île...
randonnée citée

1 - Cap à l'Est
2 - Les Falaises du Nord-Est
3 - Plages et mangroves
4 - L'île à sucre

5 - 10:
traversée et détours

5 - Le plateau du Robert
6 - Le moulin de Bézard
7 - La région de Dorot
8 - La région de Grélin
9 - Les Sources
10 - Le Coeur de l'île