César 2021: triomphe d’Albert Dupontel au terme d'une cérémonie déprimante
La satire d’Albert Dupontel a remporté les trophées majeurs de la soirée dont meilleur film, meilleure réalisation et meilleur scénario. Seulement un prix pour le marivaudage d’Emmanuel Mouret aux 13 nominations et zéro pour François Ozon.
Elle se voulait l’édition du renouveau. Cette apathique 46e cérémonie des César, même physique et non virtuelle, aura surtout souligné le vide béant laissé par de longs mois de fermeture des salles et les scléroses du cinéma français. La soirée mortifère, qui se déroulait à l’Olympia, a aligné les hommages aux disparus de l'année et a vu le triomphe de la satire d’Albert Dupontel Adieu les cons , lauréat de sept des douze trophées qu’il pouvait espérer. Cette fable avec Virginie Efira aura asphyxié les autres favoris de la soirée. Malgré treize nominations, le marivaudage, Les Choses qu’ont dit, Les Choses qu’ont fait se contente d’un trophée de consolation, meilleur second rôle féminin. Souvent maudit des César, François Ozon n’a vu aucune des douze nominations de son idylle gay et estivale Eté 85 se concrétiser. Seul le documentaire Adolescentes , portrait de deux lycéennes sur cinq ans, rafle plusieurs prix. Une prouesse pour une oeuvre non fictionnelle
Malgré une entrée en matière plutôt en verve de Marina Foïs, ce cru 2021 est retombé bien plus vite qu'un soufflé. Peu de sketchs marquent les esprits. On retiendra bien entendu la sortie mémorable de Corine Masiero qui n’a pas hésité à se montrer dans son plus simple appareil. Nue et culottée. Impudique comme beaucoup le furent ce soir. Comme si la grande famille du cinéma n'avait pas réussi à se relever de la soirée mortifère de l'année dernière.
Plusieurs interventions font grincer des dents, de la crotte de chien inaugurale ramassée par Marina Foïs au discours de remettant de Vincent Dedienne qui atteint le point Goodwin en mentionnant Hitler. Martelées les interventions sur le manque de diversité n'avaient rien de drôles. On était gêné pour le pauvre Reda Kateb «pris par erreur» pour un comédien asiatique...
L’absence habituelle d’Albert Dupontel, dont le nom a souvent été appelé sur le podium, couplée au très (trop) nombreuses séquences d’hommage aux défunts du septième art ont amplifié cette impression crépusculaire et semblaient une métaphore involontaire de cette année. Les morts et les absents ont pris le pas sur le reste. Pourquoi avoir attendu le dernier moment pour passer ce merveilleux montage des films qui attendent de sortir en salle ? Est-ce un hasard si les rares moments de spontanéité sont venus des acteurs ? En primant Laure Calamy dont le bonheur faisait très vite battre son coeur, Sami Bouajila qui se souvenait de son père, l'imprévisible Jean-Pascal Zadi et la très jeune Fathia Youssouf, les César ont trouvé très brièvement l'émotion, dont ils auraient eu tant besoin pour nous rappeler à quel point nous avons besoin de cinéma et pourquoi des cérémonies de prix existent. Après le naufrage des Golden Globes et des Emmy awards outre-Atlantique, les César n'auront pas échappé à cette crise de sens.
Ci-dessous le palmarès de la soirée :
Adieu les cons, César du meilleur film
C’est le septième trophée pour cette satire qui a survolé la soirée. Virginie Efira mène des remerciements brefs.
Albert Dupontel, César du meilleur réalisateur
Sixième César de la soirée pour Adieu les cons qui fait l’unanimité. Sa productrice interpelle le gouvernement : « La France est une terre de cinéma mais est un des pays où nous avons le moins de perspective. Nous ne comprenons pas ».
Suit peut-être un des plus vibrants hommages de la soirée, celui aux films qui sortiront dès les salles rouvertes.
Laure Calamy, César de la meilleure actrice
La vedette de Dix pour Cent est primé pour la délicieuse comédie Antoinette dans les Cévennes. Laure Calamy a besoin de reprendre son souffle. Sa première pensée est pour sa réalisatrice Caroline Vignal pour son pathétique drôle. Elle n’oublie pas de remercier l’âne star du film, son partenaire animal « qui broute dans son pré et qui s’en fiche, ainsi que son partenaire Pole emploi qui l’a soutenue quand je ramenais assez d’heures ». Laure Calamy se souvient de ses premiers souvenirs de théâtre et de cinéma à Orléans. « Laissez-nous exulter devant les œuvres d’art, laissez-nous nous exiler dans nos imaginaires » dans un des plus beaux plaidoyers de la soirée pour les lieux de culture.
Sami Bouajila, César du meilleur acteur
L’acteur obtient la prestigieuse statuette pour sa prestation dans Un Fils, le premier long-métrage de Mehdi M. Barsaoui. « J’ai souvent l’impression que les rôles nous choisissent plus qu’on ne les choisit », a déclaré l’acteur en racontant comment le film avait fait résonner en lui l’écho de son histoire paternelle. « Le personnage s’est invité en moi, m’a inspiré son désarroi, son regard, son amour. Je l’ai habité, je lui ai donné mon souffle, mon énergie. Mehdi Barsaoui le metteur en scène et Najla Ben Abdallah ma partenaire ont fait le reste », a-t-il ajouté, .
Un César d'honneur décerné à Jean-Pierre Bacri
Habituellement le trophée est attribué à une star hollywoodienne. Cette année, le récipiendaire était jusqu’à ce soir inconnu. Marina Foïs vient de révéler que la compression au comédien et grand râleur du cinéma, emporté en début d’année par un cancer.
Drunk, César du meilleur film étranger
Le film danois de Thomas Vinterberg sur le bonheur et l’oubli de l’ivresse devrait comme Deux se retrouver aux Oscars.
Emilie Dequenne, César du meilleur second rôle féminin pour Les Choses qu'on dit, Les Choses qu'ont fait
C’est la première récompense à ce marivaudage qui menait les nominations, avec 13 citations qui ne repartira pas les mains vides. La comédienne belge n’a pas pu être présente.
César du meilleur montage pour Adolescentes
Il est rare que ce trophée récompense un documentaire comme le souligne sa récipiendaire Tina Baz.
Cinquième César pour Adieu les cons, César du meilleur second rôle
La statuette récompense un fidèle collaborateur et ami d’Albert Dupontel, Nicolas Marié qui remercie celles qu’il aime.
César de la meilleure musique pour La nuit venue
Le trophée récompense le travail du musicien électro Rone qui reçoit sa compression des mains d’Alain Souchon qui en profite pour lancer l’hommage au compositeur italien Ennio Morricone. Suis un montage dédié au défunt Claude Brasseur.
La fille au bracelet, César de la meilleure adaptation
Le lauréat Sébastien Demoustier est le frère de la comédienne Anaïs Demoustier, sacrée meilleure actrice l’an passé pour Alice et le maire. « Je suis surpris et heureux. Je remercie mon producteur qui est venu me chercher. Sans toi, ma sœur, Anaïs je n’aurais pas osé y aller. J’ai fait mon premier court-métrage à 32 ans, j’ai bénéficié d’un système de financement vertueux qui permet une merveilleuse diversité typiquement française. En France, il faut soutenir ce système. Mme Bachelot sans volonté politique, on ne pourra pas le préserver », enjoint-il. Facétieuse, Marina Fois a annoncé comme remettant Xavier Dupont de Ligonnès en espérant voir l’homme le plus recherché de France sortir du bois…
Quatrième César pour Adieu les cons, prix du meilleur scénario
La productrice de cette satire remonte sur scène. « Ce César couronne l’étape la plus compliquée d’un film : son écriture. C’est l’histoire qui attire les spectateurs. Adieu les cons a vu son exploitation interrompu au bout de neuf jours. Ce César est un signe de bonne chance, à la réouverture des salles », espère Catherine Bozorgan.
Hommages à Jean-Claude Carrière et Jean-Loup Dabadie
C’est Louis Garrel qui mène l’eulogie du scénariste de Belle de jour, Cyrano, Valmont et tant d’autres classiques. Peu de temps avant, le traditionnel montage des disparus avait défilé à l’écran sur la reprise par Benjamin Biolay de Que reste-t-il de nos amours de Charles Trenet. L’hommage à Jean -Claude Carrière est suivi d’une séquence dédiée à l’autre grand scénariste qui nous a quittés : Jean-Loup Dabadie.
La bonne épouse, meilleurs costumes
Plus la lauréate Madeline Fontaine absente, c’est la remettante Corinne Masiero qui fait sensation dans un costume de Peau d’Âne. « Qui aujourd’hui oserait produire un film sur un père qui veut coucher avec sa fille si ce n’est le CNC ? ». Dans une allusion à l’enquête pour agressions sexuelles qui vise son président Dominique Boutonnat. Puis l’héroïne de Capitaine Marleau enlève le manteau d’âne pour révéler une nuisette ensanglantée, hommage à Carie, avant de se dénuder entièrement en soutien aux intermittents, notamment ceux qui occupent les théâtres.
Deuxième César pour Adolescentes, meilleur son
Trois des quatre lauréats - hollande Decarsin, Jeanne Delplancq, Fanny Martin, Olivier Goinard- sont présents sur scène. Le remettant Reda Kateb a inspiré à Marina Fois une sortie sur la diversité.
Troisième César pour Adieu les cons, meilleur photographie
Alexis Kavyrchine remercie son équipe et sa famille : « Albert [Dupontel], merci mille fois ».
Adolescentes, César du meilleur documentaire
Le portrait de deux jeunes filles partait favori et est également en lice, fait rare, pour le trophée roi du meilleur film. « Je pense à la générosité d’Emma et Anais qui ont accepté pendant cinq ans une caméra auprès d’elle. Elle incarne cette jeunesse qui trinque. Je voudrais leur dédier ce César. J’espère que les beaux jours arriveront très vite », déclare le lauréat Sébastien Lifshitz.
La troupe du Splendid monte sur scène
La comédie à l’honneur dans cette 46e Cérémonie des César. L’Académie a tenu à remettre un prix honorifique à la troupe du Splendid pour l’ensemble de leur carrière. « On est très heureux d’être là, ça nous a fait une très belle surprise de vous voir debout », a déclaré Marie-Anne Chazelle, en compagnie de ses acolytes de toujours, Josiane Balasko, Christian Clavier, Michel Blanc, Bruno Moynot et Thierry Lhermitte. « On riait ensemble, c’est ça la clé de ce qui s’est passé après », a ajouté l’actrice, entre deux boutades de ses camarades. « C’est un honneur, même si c’est l’année où il n’y a personne », a plaisanté Christian Clavier. Gérard Jugnot s’est lui fendu d’un « il y a toujours un écart entre les clowns qui remettent les prix et les artistes sérieux qui les reçoivent. Ce soir jette une passerelle sur ce gouffre que nous empruntons joyeusement ». Et d’ajouter un émouvant : « je m’aperçois que nous sommes cas contact depuis 50 ans ».
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Une cérémonie entrecoupée d'hommages aux disparus de l'année
Après un montage autour des films de Michel Piccoli, Jean-Pierre Bacri est l’objet d’une très belle séquence d’animation.
Josep, César du meilleur film d'animation
Le dessinateur Aurel et le producteur Serge Lalou appellent, dans une pensée à Samuel Paty, les professeurs à transmettre l’importance et la force du dessin de presse.
L'heure de l'ours, César du meilleur court-métrage d'animation
La réalisatrice Agnès Patron, dédie son prix à son fils, dont les colères d’enfant ont inspiré son oeuvre et à son mari qui s’est occupé du foyer pendant le tournage du film.
Les lauréats cèdent la place aux intermittents de la CGT qui représentent les théâtres occupés. Et réclament l’annulation de la réforme de l’assurance chômage et une année blanche pour tous.
Adieu les cons, César des lycéens
Les deux jeunes remettants déclarent leur flamme au septième art et espère revenir aux César dans quelques années parmi les nommés. « Retenez notre nom ». C’est la deuxième statuette pour Albert Dupontel qui est absent, comme toujours. Il ne se rend pas aux cérémonies mais sa productrice Catherine Bozorgan l’assure : « Il adorerait faire la tournée des écoles et c’est important que les jeunes générations voient les films ». C’est la première fois que ce prix est remis en direct et non une semaine après la grand-messe des César
Adieu les cons, meilleurs décors
Concis, Carlos Conti remercie son réalisateur Albert Dupontel. Adieu les cons est en lice pour 12 statuettes.
Qu'importe si les bêtes meurent, César du meilleur court-métrage
La réalisatrice Sofia Alaoui accompagnée de la productrice du film est venue récupérer sa première statuette sur scène. « Dans ce contexte si particulier, ce César nous donne un élan si fort pour se battre pour nos films », a-t-elle déclaré, évoquant un « cinéma indépendant ambitieux ».
Deux de Filippo Meneghetti, César du premier film
Récit d’une idylle lesbienne entre deux femmes âgées sous forme de thriller, le film représente la France aux Oscars. « Si on m’avait dit, il y a dix ans quand je suis arrivé en France que je serai ici, je ne l’aurais pas cru », a lâché le réalisateur Filippo Meneghetti un peu triste d’être seul sur scène mais ravi d’entendre, grâce à l’orchestre de Benjamin Biolay, d’écouter de la musique en concert.
Jean-Pascal Zadi, Meilleur espoir masculin pour Tout simplement noir
« La vache », a débuté le comédien toujours très nature, « il faut voir le temps long, je veux remercier ceux qui m’ont ouvert la voie : Ladj Ly, Omar Sy, Zita Hanrot, Fathia Youssef », en citant des précédents lauréats issus de la diversité. « Tout simplement noir parle d’humanité et on peut se demander pourquoi l’humanité de certaines personnes est tant remise en cause, comme celle d’Adama Traoré ou Michel Zecler, quand certaines statues de ceux qui ont glorifié l’esclavage sont encore debout. Je remercie les César de m’avoir montré que ma mission pour l’égalité n’est pas vaine », a lancé Jean-Pascal Zadi dans un discours bourré de références à l’actualité et aux victimes de violences policières.
Comme anticipé, la diversité a été à l’honneur de ces catégories « révélation », celles où les artistes issus des minorités étaient les plus nombreux et les mieux mis en valeur.
Fathia Youssouf, Meilleur espoir féminin pour Mignonnes
Les prétendantes ont vu leur nom prononcé à distance par Jean-Louis Trintignant avant qu’Isabelle Huppert ne poursuive les introductions. La jeune comédienne de 14 ans brille dans Mignonnes de Maïmouna Doucouré, sa première expérience d’un tournage. « Je voudrais dire à toutes les personnes de mon âge de suivre leurs rêves », a confié concise la lauréate qui ne faisait pas partie des présélectionnées de sa catégorie, liste établie par les directeurs de casting et a été repêchée par le votants des César.
Marina Foïs :«Présenter les César c'est une comorbidité professionnelle»
Épaulée à l’écriture par Blanche Gardin et Laurent Lafitte aux plumes pleines d’ironie, Marina Foïs a tenu sa promesse de « ne rien s’interdire ». Dans son discours d’ouverture, la maîtresse de cérémonie a tenu sa parole : « Je suis très heureuse de présenter les César 2021 qui célèbre l’année 2020 où un virus a débarqué. Quand on a vu que ça durerait et que ce serait chiant, on a féminisé le terme. Comme c’est un virus qui tuait les vieux, on a enfermé les jeunes et fermé les salles de spectacles pour ensuite rouvrir les églises car nous sommes un pays laïc et mieux organiser les flux dans les grands magasins pour faire nos courses de Noël pour des cadeaux qu’on revendra sur Ebay ».
Et d’attaquer sur la problématique du soir « Fallait-il faire les César : acharnement ou résistance ? C’est compliqué et on est heureux d’être là ». Marina Fois a commis le premier tacle contre la ministre de la Culture : « Que faire quand on n’a plus confiance envers son ministre de tutelle qui a le temps de sortir un livre avec une recette au gorgonzola ? C’est maso de présenter les César quand on n’en a jamais gagné, comme avoir une pharmacienne à la culture ». « Il faut bien se célébrer, sinon qui le fera pour nous et puis on se retrouvera. Regarder un film avec des inconnus me manque, même vos pop-corn », lance la comédienne qui termine sur une boutade. « Je me suis fait vacciner car présenter les César c’est une comorbidité professionnelle »
Roschdy Zem a ouvert cette édition aux allures de crash-test pour l’Académie. « Ça me fait plaisir de vous reparler. On s’est quitté un peu fâché l’an passé. À la contagion des émotions dans la salle obscure s’est succédé la peur de la contagion du virus. Le cinéma a continué d’exister mais sans sa vocation collective. Je voulais saisir cette occasion de célébrer notre art et ne plus oublier notre chance folle d’exercer ce métier. Nous ne pourrons plus faire du cinéma sans entendre la vulnérabilité des acteurs, des techniciens, des scénaristes. Les règles du jeu changent mais peut-être est-ce le début d’une nouvelle aventure. »
Rangs clairsemés avec deux test PCR
Crise sanitaire oblige, les rangs de l’Olympia seront clairsemés : 153 invités nommés et honorés privés d’accompagnateur, 30 remettants sans compter les techniciens. Déposés en tenue de gala au coin de la rue Scribe et du boulevard des Capucines, ceux qui prendront place dans la salle de l’Olympia entreront par petit groupe à des horaires précis et auront été testés deux fois, dont ce matin.
Premier arrivé sur le tapis rouge, le président de cette cérémonie Roschdy Zem. Le comédien a salué du coude son ami et remettant Reda Kateb. Bien organisé, Lambert Wilson a montré le contenu volumineux de ses poches : invitation, résultats de test PCR et attestation dérogatoire au couvre-feu.
À LIRE AUSSI :Les César ont-ils toujours le sens de la fête ?
Roselyne Bachelot comprend «l'exaspération de la profession»
Pas de traitement de faveur pour la ministre de la Culture. Roselyne Bachelot ne sera pas dans la salle mais en coulisses, avec les nouveaux coprésidents de l’Académie, Véronique Cayla et Eric Toledano. Elle pourra prendre en direct le pouls et les foudres d’une profession excédée, sans perspective de réouverture des cinémas et des théâtres dont les occupations se multiplient. Sur le tapis rouge, la locataire de la rue de Valois a assuré « être aux côtés de la profession et comprendre l’exaspération née de ces nouveaux quatre mois de fermeture. 2020 n’a pas été une année blanche pour la culture notamment grâce au cinéma ». Et de conclure : « Je veux transmettre un message d’espoir, nous bâtissons avec la filière les conditions de la réouverture des salles. Je vous le promets on va revoir des films ».
À voir aussi - La cérémonie des César montre que le cinéma a la volonté de «continuer à exister» malgré la pandémie, souligne Roschdy Zem
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Malgré une entrée en matière plutôt en verve de Marina Foïs, ce cru 2021 est retombé bien plus vite qu'un soufflé. Peu de sketchs marquent les esprits. On retiendra bien entendu la sortie mémorable de Corine Masiero qui n’a pas hésité à se montrer dans son plus simple appareil. Nue et culottée. Impudique comme beaucoup le furent ce soir. Comme si la grande famille du cinéma n'avait pas réussi à se relever de la soirée mortifère de l'année dernière.
Plusieurs interventions font grincer des dents, de la crotte de chien inaugurale ramassée par Marina Foïs au discours de remettant de Vincent Dedienne qui atteint le point Goodwin en mentionnant Hitler. Martelées les interventions sur le manque de diversité n'avaient rien de drôles. On était gêné pour le pauvre Reda Kateb «pris par erreur» pour un comédien asiatique...
L’absence habituelle d’Albert Dupontel, dont le nom a souvent été appelé sur le podium, couplée au très (trop) nombreuses séquences d’hommage aux défunts du septième art ont amplifié cette impression crépusculaire et semblaient une métaphore involontaire de cette année. Les morts et les absents ont pris le pas sur le reste. Pourquoi avoir attendu le dernier moment pour passer ce merveilleux montage des films qui attendent de sortir en salle ? Est-ce un hasard si les rares moments de spontanéité sont venus des acteurs ? En primant Laure Calamy dont le bonheur faisait très vite battre son coeur, Sami Bouajila qui se souvenait de son père, l'imprévisible Jean-Pascal Zadi et la très jeune Fathia Youssouf, les César ont trouvé très brièvement l'émotion, dont ils auraient eu tant besoin pour nous rappeler à quel point nous avons besoin de cinéma et pourquoi des cérémonies de prix existent. Après le naufrage des Golden Globes et des Emmy awards outre-Atlantique, les César n'auront pas échappé à cette crise de sens.
Ci-dessous le palmarès de la soirée :
Adieu les cons, César du meilleur film
C’est le septième trophée pour cette satire qui a survolé la soirée. Virginie Efira mène des remerciements brefs.
Albert Dupontel, César du meilleur réalisateur
Sixième César de la soirée pour Adieu les cons qui fait l’unanimité. Sa productrice interpelle le gouvernement : « La France est une terre de cinéma mais est un des pays où nous avons le moins de perspective. Nous ne comprenons pas ».
Suit peut-être un des plus vibrants hommages de la soirée, celui aux films qui sortiront dès les salles rouvertes.
Laure Calamy, César de la meilleure actrice
La vedette de Dix pour Cent est primé pour la délicieuse comédie Antoinette dans les Cévennes. Laure Calamy a besoin de reprendre son souffle. Sa première pensée est pour sa réalisatrice Caroline Vignal pour son pathétique drôle. Elle n’oublie pas de remercier l’âne star du film, son partenaire animal « qui broute dans son pré et qui s’en fiche, ainsi que son partenaire Pole emploi qui l’a soutenue quand je ramenais assez d’heures ». Laure Calamy se souvient de ses premiers souvenirs de théâtre et de cinéma à Orléans. « Laissez-nous exulter devant les œuvres d’art, laissez-nous nous exiler dans nos imaginaires » dans un des plus beaux plaidoyers de la soirée pour les lieux de culture.
Sami Bouajila, César du meilleur acteur
L’acteur obtient la prestigieuse statuette pour sa prestation dans Un Fils, le premier long-métrage de Mehdi M. Barsaoui. « J’ai souvent l’impression que les rôles nous choisissent plus qu’on ne les choisit », a déclaré l’acteur en racontant comment le film avait fait résonner en lui l’écho de son histoire paternelle. « Le personnage s’est invité en moi, m’a inspiré son désarroi, son regard, son amour. Je l’ai habité, je lui ai donné mon souffle, mon énergie. Mehdi Barsaoui le metteur en scène et Najla Ben Abdallah ma partenaire ont fait le reste », a-t-il ajouté, .
Un César d'honneur décerné à Jean-Pierre Bacri
Habituellement le trophée est attribué à une star hollywoodienne. Cette année, le récipiendaire était jusqu’à ce soir inconnu. Marina Foïs vient de révéler que la compression au comédien et grand râleur du cinéma, emporté en début d’année par un cancer.
Drunk, César du meilleur film étranger
Le film danois de Thomas Vinterberg sur le bonheur et l’oubli de l’ivresse devrait comme Deux se retrouver aux Oscars.
Emilie Dequenne, César du meilleur second rôle féminin pour Les Choses qu'on dit, Les Choses qu'ont fait
C’est la première récompense à ce marivaudage qui menait les nominations, avec 13 citations qui ne repartira pas les mains vides. La comédienne belge n’a pas pu être présente.
César du meilleur montage pour Adolescentes
Il est rare que ce trophée récompense un documentaire comme le souligne sa récipiendaire Tina Baz.
Cinquième César pour Adieu les cons, César du meilleur second rôle
La statuette récompense un fidèle collaborateur et ami d’Albert Dupontel, Nicolas Marié qui remercie celles qu’il aime.
César de la meilleure musique pour La nuit venue
Le trophée récompense le travail du musicien électro Rone qui reçoit sa compression des mains d’Alain Souchon qui en profite pour lancer l’hommage au compositeur italien Ennio Morricone. Suis un montage dédié au défunt Claude Brasseur.
La fille au bracelet, César de la meilleure adaptation
Le lauréat Sébastien Demoustier est le frère de la comédienne Anaïs Demoustier, sacrée meilleure actrice l’an passé pour Alice et le maire. « Je suis surpris et heureux. Je remercie mon producteur qui est venu me chercher. Sans toi, ma sœur, Anaïs je n’aurais pas osé y aller. J’ai fait mon premier court-métrage à 32 ans, j’ai bénéficié d’un système de financement vertueux qui permet une merveilleuse diversité typiquement française. En France, il faut soutenir ce système. Mme Bachelot sans volonté politique, on ne pourra pas le préserver », enjoint-il. Facétieuse, Marina Fois a annoncé comme remettant Xavier Dupont de Ligonnès en espérant voir l’homme le plus recherché de France sortir du bois…
Quatrième César pour Adieu les cons, prix du meilleur scénario
La productrice de cette satire remonte sur scène. « Ce César couronne l’étape la plus compliquée d’un film : son écriture. C’est l’histoire qui attire les spectateurs. Adieu les cons a vu son exploitation interrompu au bout de neuf jours. Ce César est un signe de bonne chance, à la réouverture des salles », espère Catherine Bozorgan.
Hommages à Jean-Claude Carrière et Jean-Loup Dabadie
C’est Louis Garrel qui mène l’eulogie du scénariste de Belle de jour, Cyrano, Valmont et tant d’autres classiques. Peu de temps avant, le traditionnel montage des disparus avait défilé à l’écran sur la reprise par Benjamin Biolay de Que reste-t-il de nos amours de Charles Trenet. L’hommage à Jean -Claude Carrière est suivi d’une séquence dédiée à l’autre grand scénariste qui nous a quittés : Jean-Loup Dabadie.
La bonne épouse, meilleurs costumes
Plus la lauréate Madeline Fontaine absente, c’est la remettante Corinne Masiero qui fait sensation dans un costume de Peau d’Âne. « Qui aujourd’hui oserait produire un film sur un père qui veut coucher avec sa fille si ce n’est le CNC ? ». Dans une allusion à l’enquête pour agressions sexuelles qui vise son président Dominique Boutonnat. Puis l’héroïne de Capitaine Marleau enlève le manteau d’âne pour révéler une nuisette ensanglantée, hommage à Carie, avant de se dénuder entièrement en soutien aux intermittents, notamment ceux qui occupent les théâtres.
Deuxième César pour Adolescentes, meilleur son
Trois des quatre lauréats - hollande Decarsin, Jeanne Delplancq, Fanny Martin, Olivier Goinard- sont présents sur scène. Le remettant Reda Kateb a inspiré à Marina Fois une sortie sur la diversité.
Troisième César pour Adieu les cons, meilleur photographie
Alexis Kavyrchine remercie son équipe et sa famille : « Albert [Dupontel], merci mille fois ».
Adolescentes, César du meilleur documentaire
Le portrait de deux jeunes filles partait favori et est également en lice, fait rare, pour le trophée roi du meilleur film. « Je pense à la générosité d’Emma et Anais qui ont accepté pendant cinq ans une caméra auprès d’elle. Elle incarne cette jeunesse qui trinque. Je voudrais leur dédier ce César. J’espère que les beaux jours arriveront très vite », déclare le lauréat Sébastien Lifshitz.
La troupe du Splendid monte sur scène
La comédie à l’honneur dans cette 46e Cérémonie des César. L’Académie a tenu à remettre un prix honorifique à la troupe du Splendid pour l’ensemble de leur carrière. « On est très heureux d’être là, ça nous a fait une très belle surprise de vous voir debout », a déclaré Marie-Anne Chazelle, en compagnie de ses acolytes de toujours, Josiane Balasko, Christian Clavier, Michel Blanc, Bruno Moynot et Thierry Lhermitte. « On riait ensemble, c’est ça la clé de ce qui s’est passé après », a ajouté l’actrice, entre deux boutades de ses camarades. « C’est un honneur, même si c’est l’année où il n’y a personne », a plaisanté Christian Clavier. Gérard Jugnot s’est lui fendu d’un « il y a toujours un écart entre les clowns qui remettent les prix et les artistes sérieux qui les reçoivent. Ce soir jette une passerelle sur ce gouffre que nous empruntons joyeusement ». Et d’ajouter un émouvant : « je m’aperçois que nous sommes cas contact depuis 50 ans ».
Une cérémonie entrecoupée d'hommages aux disparus de l'année
Après un montage autour des films de Michel Piccoli, Jean-Pierre Bacri est l’objet d’une très belle séquence d’animation.
Josep, César du meilleur film d'animation
Le dessinateur Aurel et le producteur Serge Lalou appellent, dans une pensée à Samuel Paty, les professeurs à transmettre l’importance et la force du dessin de presse.
L'heure de l'ours, César du meilleur court-métrage d'animation
La réalisatrice Agnès Patron, dédie son prix à son fils, dont les colères d’enfant ont inspiré son oeuvre et à son mari qui s’est occupé du foyer pendant le tournage du film.
Les lauréats cèdent la place aux intermittents de la CGT qui représentent les théâtres occupés. Et réclament l’annulation de la réforme de l’assurance chômage et une année blanche pour tous.
Adieu les cons, César des lycéens
Les deux jeunes remettants déclarent leur flamme au septième art et espère revenir aux César dans quelques années parmi les nommés. « Retenez notre nom ». C’est la deuxième statuette pour Albert Dupontel qui est absent, comme toujours. Il ne se rend pas aux cérémonies mais sa productrice Catherine Bozorgan l’assure : « Il adorerait faire la tournée des écoles et c’est important que les jeunes générations voient les films ». C’est la première fois que ce prix est remis en direct et non une semaine après la grand-messe des César
Adieu les cons, meilleurs décors
Concis, Carlos Conti remercie son réalisateur Albert Dupontel. Adieu les cons est en lice pour 12 statuettes.
Qu'importe si les bêtes meurent, César du meilleur court-métrage
La réalisatrice Sofia Alaoui accompagnée de la productrice du film est venue récupérer sa première statuette sur scène. « Dans ce contexte si particulier, ce César nous donne un élan si fort pour se battre pour nos films », a-t-elle déclaré, évoquant un « cinéma indépendant ambitieux ».
Deux de Filippo Meneghetti, César du premier film
Récit d’une idylle lesbienne entre deux femmes âgées sous forme de thriller, le film représente la France aux Oscars. « Si on m’avait dit, il y a dix ans quand je suis arrivé en France que je serai ici, je ne l’aurais pas cru », a lâché le réalisateur Filippo Meneghetti un peu triste d’être seul sur scène mais ravi d’entendre, grâce à l’orchestre de Benjamin Biolay, d’écouter de la musique en concert.
Jean-Pascal Zadi, Meilleur espoir masculin pour Tout simplement noir
« La vache », a débuté le comédien toujours très nature, « il faut voir le temps long, je veux remercier ceux qui m’ont ouvert la voie : Ladj Ly, Omar Sy, Zita Hanrot, Fathia Youssef », en citant des précédents lauréats issus de la diversité. « Tout simplement noir parle d’humanité et on peut se demander pourquoi l’humanité de certaines personnes est tant remise en cause, comme celle d’Adama Traoré ou Michel Zecler, quand certaines statues de ceux qui ont glorifié l’esclavage sont encore debout. Je remercie les César de m’avoir montré que ma mission pour l’égalité n’est pas vaine », a lancé Jean-Pascal Zadi dans un discours bourré de références à l’actualité et aux victimes de violences policières.
Comme anticipé, la diversité a été à l’honneur de ces catégories « révélation », celles où les artistes issus des minorités étaient les plus nombreux et les mieux mis en valeur.
Fathia Youssouf, Meilleur espoir féminin pour Mignonnes
Les prétendantes ont vu leur nom prononcé à distance par Jean-Louis Trintignant avant qu’Isabelle Huppert ne poursuive les introductions. La jeune comédienne de 14 ans brille dans Mignonnes de Maïmouna Doucouré, sa première expérience d’un tournage. « Je voudrais dire à toutes les personnes de mon âge de suivre leurs rêves », a confié concise la lauréate qui ne faisait pas partie des présélectionnées de sa catégorie, liste établie par les directeurs de casting et a été repêchée par le votants des César.
Marina Foïs :«Présenter les César c'est une comorbidité professionnelle»
Épaulée à l’écriture par Blanche Gardin et Laurent Lafitte aux plumes pleines d’ironie, Marina Foïs a tenu sa promesse de « ne rien s’interdire ». Dans son discours d’ouverture, la maîtresse de cérémonie a tenu sa parole : « Je suis très heureuse de présenter les César 2021 qui célèbre l’année 2020 où un virus a débarqué. Quand on a vu que ça durerait et que ce serait chiant, on a féminisé le terme. Comme c’est un virus qui tuait les vieux, on a enfermé les jeunes et fermé les salles de spectacles pour ensuite rouvrir les églises car nous sommes un pays laïc et mieux organiser les flux dans les grands magasins pour faire nos courses de Noël pour des cadeaux qu’on revendra sur Ebay ».
Et d’attaquer sur la problématique du soir « Fallait-il faire les César : acharnement ou résistance ? C’est compliqué et on est heureux d’être là ». Marina Fois a commis le premier tacle contre la ministre de la Culture : « Que faire quand on n’a plus confiance envers son ministre de tutelle qui a le temps de sortir un livre avec une recette au gorgonzola ? C’est maso de présenter les César quand on n’en a jamais gagné, comme avoir une pharmacienne à la culture ». « Il faut bien se célébrer, sinon qui le fera pour nous et puis on se retrouvera. Regarder un film avec des inconnus me manque, même vos pop-corn », lance la comédienne qui termine sur une boutade. « Je me suis fait vacciner car présenter les César c’est une comorbidité professionnelle »
Roschdy Zem a ouvert cette édition aux allures de crash-test pour l’Académie. « Ça me fait plaisir de vous reparler. On s’est quitté un peu fâché l’an passé. À la contagion des émotions dans la salle obscure s’est succédé la peur de la contagion du virus. Le cinéma a continué d’exister mais sans sa vocation collective. Je voulais saisir cette occasion de célébrer notre art et ne plus oublier notre chance folle d’exercer ce métier. Nous ne pourrons plus faire du cinéma sans entendre la vulnérabilité des acteurs, des techniciens, des scénaristes. Les règles du jeu changent mais peut-être est-ce le début d’une nouvelle aventure. »
Rangs clairsemés avec deux test PCR
Crise sanitaire oblige, les rangs de l’Olympia seront clairsemés : 153 invités nommés et honorés privés d’accompagnateur, 30 remettants sans compter les techniciens. Déposés en tenue de gala au coin de la rue Scribe et du boulevard des Capucines, ceux qui prendront place dans la salle de l’Olympia entreront par petit groupe à des horaires précis et auront été testés deux fois, dont ce matin.
Premier arrivé sur le tapis rouge, le président de cette cérémonie Roschdy Zem. Le comédien a salué du coude son ami et remettant Reda Kateb. Bien organisé, Lambert Wilson a montré le contenu volumineux de ses poches : invitation, résultats de test PCR et attestation dérogatoire au couvre-feu.
À LIRE AUSSI :Les César ont-ils toujours le sens de la fête ?
Roselyne Bachelot comprend «l'exaspération de la profession»
Pas de traitement de faveur pour la ministre de la Culture. Roselyne Bachelot ne sera pas dans la salle mais en coulisses, avec les nouveaux coprésidents de l’Académie, Véronique Cayla et Eric Toledano. Elle pourra prendre en direct le pouls et les foudres d’une profession excédée, sans perspective de réouverture des cinémas et des théâtres dont les occupations se multiplient. Sur le tapis rouge, la locataire de la rue de Valois a assuré « être aux côtés de la profession et comprendre l’exaspération née de ces nouveaux quatre mois de fermeture. 2020 n’a pas été une année blanche pour la culture notamment grâce au cinéma ». Et de conclure : « Je veux transmettre un message d’espoir, nous bâtissons avec la filière les conditions de la réouverture des salles. Je vous le promets on va revoir des films ».
À voir aussi - La cérémonie des César montre que le cinéma a la volonté de «continuer à exister» malgré la pandémie, souligne Roschdy Zem
Démocrate et laïque
le 15/03/2021 à 20:36
Albert Dupontel est actuellement l'un des seuls et vraisemblablement le seul réalisateur français en activité dont les films me font rêver, réfléchir, pleurer ou rire. J'y retrouve cette sensation de liberté, de magnificence, de grande bouffée d'oxygène, d'ouverture sur un autre monde, d'impertinence à la fois acide et respectueuse que le cinéma peut si miraculeusement offrir parfois. Pour le reste de la production française, elle oscille entre le clip publicitaire pour aliment bas de gamme, le porno déguisé en œuvre d'art et la propagande bobogauchiste pour le multiculturalisme et la théorie du genre.
feuille d'erable
le 15/03/2021 à 09:59
tant que le cinéma et la culture de facon plus général seront subventonnés par l'Etat, nous ne ferons qu'entretenir la médiocrité et le copinage. Voilà de bonnes économie à faire, seul le privé doit etre la source de financement de la culture, avec un seul objectif aujourd'hui complètement oublié; le talent.
LauMal
le 14/03/2021 à 12:29
Au vu de son film, on aurait pu s’attendre à ce que Zady ne tombe pas dans le piège du gang Traoré.
La vedette de Dix pour Cent est primé pour la délicieuse comédie Antoinette dans les Cévennes. Laure Calamy a besoin de reprendre son souffle. Sa première pensée est pour sa réalisatrice Caroline Vignal pour son pathétique drôle. Elle n’oublie pas de remercier l’âne star du film, son partenaire animal « qui broute dans son pré et qui s’en fiche, ainsi que son partenaire Pole emploi qui l’a soutenue quand je ramenais assez d’heures ». Laure Calamy se souvient de ses premiers souvenirs de théâtre et de cinéma à Orléans. « Laissez-nous exulter devant les œuvres d’art, laissez-nous nous exiler dans nos imaginaires » dans un des plus beaux plaidoyers de la soirée pour les lieux de culture.
Sami Bouajila, César du meilleur acteur
L’acteur obtient la prestigieuse statuette pour sa prestation dans Un Fils, le premier long-métrage de Mehdi M. Barsaoui. « J’ai souvent l’impression que les rôles nous choisissent plus qu’on ne les choisit », a déclaré l’acteur en racontant comment le film avait fait résonner en lui l’écho de son histoire paternelle. « Le personnage s’est invité en moi, m’a inspiré son désarroi, son regard, son amour. Je l’ai habité, je lui ai donné mon souffle, mon énergie. Mehdi Barsaoui le metteur en scène et Najla Ben Abdallah ma partenaire ont fait le reste », a-t-il ajouté, .
Un César d'honneur décerné à Jean-Pierre Bacri
Habituellement le trophée est attribué à une star hollywoodienne. Cette année, le récipiendaire était jusqu’à ce soir inconnu. Marina Foïs vient de révéler que la compression au comédien et grand râleur du cinéma, emporté en début d’année par un cancer.
Drunk, César du meilleur film étranger
Le film danois de Thomas Vinterberg sur le bonheur et l’oubli de l’ivresse devrait comme Deux se retrouver aux Oscars.
Emilie Dequenne, César du meilleur second rôle féminin pour Les Choses qu'on dit, Les Choses qu'ont fait
C’est la première récompense à ce marivaudage qui menait les nominations, avec 13 citations qui ne repartira pas les mains vides. La comédienne belge n’a pas pu être présente.
César du meilleur montage pour Adolescentes
Il est rare que ce trophée récompense un documentaire comme le souligne sa récipiendaire Tina Baz.
Cinquième César pour Adieu les cons, César du meilleur second rôle
La statuette récompense un fidèle collaborateur et ami d’Albert Dupontel, Nicolas Marié qui remercie celles qu’il aime.
César de la meilleure musique pour La nuit venue
Le trophée récompense le travail du musicien électro Rone qui reçoit sa compression des mains d’Alain Souchon qui en profite pour lancer l’hommage au compositeur italien Ennio Morricone. Suis un montage dédié au défunt Claude Brasseur.
La fille au bracelet, César de la meilleure adaptation
Le lauréat Sébastien Demoustier est le frère de la comédienne Anaïs Demoustier, sacrée meilleure actrice l’an passé pour Alice et le maire. « Je suis surpris et heureux. Je remercie mon producteur qui est venu me chercher. Sans toi, ma sœur, Anaïs je n’aurais pas osé y aller. J’ai fait mon premier court-métrage à 32 ans, j’ai bénéficié d’un système de financement vertueux qui permet une merveilleuse diversité typiquement française. En France, il faut soutenir ce système. Mme Bachelot sans volonté politique, on ne pourra pas le préserver », enjoint-il. Facétieuse, Marina Fois a annoncé comme remettant Xavier Dupont de Ligonnès en espérant voir l’homme le plus recherché de France sortir du bois…
Quatrième César pour Adieu les cons, prix du meilleur scénario
La productrice de cette satire remonte sur scène. « Ce César couronne l’étape la plus compliquée d’un film : son écriture. C’est l’histoire qui attire les spectateurs. Adieu les cons a vu son exploitation interrompu au bout de neuf jours. Ce César est un signe de bonne chance, à la réouverture des salles », espère Catherine Bozorgan.
Hommages à Jean-Claude Carrière et Jean-Loup Dabadie
C’est Louis Garrel qui mène l’eulogie du scénariste de Belle de jour, Cyrano, Valmont et tant d’autres classiques. Peu de temps avant, le traditionnel montage des disparus avait défilé à l’écran sur la reprise par Benjamin Biolay de Que reste-t-il de nos amours de Charles Trenet. L’hommage à Jean -Claude Carrière est suivi d’une séquence dédiée à l’autre grand scénariste qui nous a quittés : Jean-Loup Dabadie.
La bonne épouse, meilleurs costumes
Plus la lauréate Madeline Fontaine absente, c’est la remettante Corinne Masiero qui fait sensation dans un costume de Peau d’Âne. « Qui aujourd’hui oserait produire un film sur un père qui veut coucher avec sa fille si ce n’est le CNC ? ». Dans une allusion à l’enquête pour agressions sexuelles qui vise son président Dominique Boutonnat. Puis l’héroïne de Capitaine Marleau enlève le manteau d’âne pour révéler une nuisette ensanglantée, hommage à Carie, avant de se dénuder entièrement en soutien aux intermittents, notamment ceux qui occupent les théâtres.
Deuxième César pour Adolescentes, meilleur son
Trois des quatre lauréats - hollande Decarsin, Jeanne Delplancq, Fanny Martin, Olivier Goinard- sont présents sur scène. Le remettant Reda Kateb a inspiré à Marina Fois une sortie sur la diversité.
Troisième César pour Adieu les cons, meilleur photographie
Alexis Kavyrchine remercie son équipe et sa famille : « Albert [Dupontel], merci mille fois ».
Adolescentes, César du meilleur documentaire
Le portrait de deux jeunes filles partait favori et est également en lice, fait rare, pour le trophée roi du meilleur film. « Je pense à la générosité d’Emma et Anais qui ont accepté pendant cinq ans une caméra auprès d’elle. Elle incarne cette jeunesse qui trinque. Je voudrais leur dédier ce César. J’espère que les beaux jours arriveront très vite », déclare le lauréat Sébastien Lifshitz.
La troupe du Splendid monte sur scène
La comédie à l’honneur dans cette 46e Cérémonie des César. L’Académie a tenu à remettre un prix honorifique à la troupe du Splendid pour l’ensemble de leur carrière. « On est très heureux d’être là, ça nous a fait une très belle surprise de vous voir debout », a déclaré Marie-Anne Chazelle, en compagnie de ses acolytes de toujours, Josiane Balasko, Christian Clavier, Michel Blanc, Bruno Moynot et Thierry Lhermitte. « On riait ensemble, c’est ça la clé de ce qui s’est passé après », a ajouté l’actrice, entre deux boutades de ses camarades. « C’est un honneur, même si c’est l’année où il n’y a personne », a plaisanté Christian Clavier. Gérard Jugnot s’est lui fendu d’un « il y a toujours un écart entre les clowns qui remettent les prix et les artistes sérieux qui les reçoivent. Ce soir jette une passerelle sur ce gouffre que nous empruntons joyeusement ». Et d’ajouter un émouvant : « je m’aperçois que nous sommes cas contact depuis 50 ans ».
Une cérémonie entrecoupée d'hommages aux disparus de l'année
Après un montage autour des films de Michel Piccoli, Jean-Pierre Bacri est l’objet d’une très belle séquence d’animation.
Josep, César du meilleur film d'animation
Le dessinateur Aurel et le producteur Serge Lalou appellent, dans une pensée à Samuel Paty, les professeurs à transmettre l’importance et la force du dessin de presse.
L'heure de l'ours, César du meilleur court-métrage d'animation
La réalisatrice Agnès Patron, dédie son prix à son fils, dont les colères d’enfant ont inspiré son oeuvre et à son mari qui s’est occupé du foyer pendant le tournage du film.
Les lauréats cèdent la place aux intermittents de la CGT qui représentent les théâtres occupés. Et réclament l’annulation de la réforme de l’assurance chômage et une année blanche pour tous.
Adieu les cons, César des lycéens
Les deux jeunes remettants déclarent leur flamme au septième art et espère revenir aux César dans quelques années parmi les nommés. « Retenez notre nom ». C’est la deuxième statuette pour Albert Dupontel qui est absent, comme toujours. Il ne se rend pas aux cérémonies mais sa productrice Catherine Bozorgan l’assure : « Il adorerait faire la tournée des écoles et c’est important que les jeunes générations voient les films ». C’est la première fois que ce prix est remis en direct et non une semaine après la grand-messe des César
Adieu les cons, meilleurs décors
Concis, Carlos Conti remercie son réalisateur Albert Dupontel. Adieu les cons est en lice pour 12 statuettes.
Qu'importe si les bêtes meurent, César du meilleur court-métrage
La réalisatrice Sofia Alaoui accompagnée de la productrice du film est venue récupérer sa première statuette sur scène. « Dans ce contexte si particulier, ce César nous donne un élan si fort pour se battre pour nos films », a-t-elle déclaré, évoquant un « cinéma indépendant ambitieux ».
Deux de Filippo Meneghetti, César du premier film
Récit d’une idylle lesbienne entre deux femmes âgées sous forme de thriller, le film représente la France aux Oscars. « Si on m’avait dit, il y a dix ans quand je suis arrivé en France que je serai ici, je ne l’aurais pas cru », a lâché le réalisateur Filippo Meneghetti un peu triste d’être seul sur scène mais ravi d’entendre, grâce à l’orchestre de Benjamin Biolay, d’écouter de la musique en concert.
Jean-Pascal Zadi, Meilleur espoir masculin pour Tout simplement noir
« La vache », a débuté le comédien toujours très nature, « il faut voir le temps long, je veux remercier ceux qui m’ont ouvert la voie : Ladj Ly, Omar Sy, Zita Hanrot, Fathia Youssef », en citant des précédents lauréats issus de la diversité. « Tout simplement noir parle d’humanité et on peut se demander pourquoi l’humanité de certaines personnes est tant remise en cause, comme celle d’Adama Traoré ou Michel Zecler, quand certaines statues de ceux qui ont glorifié l’esclavage sont encore debout. Je remercie les César de m’avoir montré que ma mission pour l’égalité n’est pas vaine », a lancé Jean-Pascal Zadi dans un discours bourré de références à l’actualité et aux victimes de violences policières.
Comme anticipé, la diversité a été à l’honneur de ces catégories « révélation », celles où les artistes issus des minorités étaient les plus nombreux et les mieux mis en valeur.
Fathia Youssouf, Meilleur espoir féminin pour Mignonnes
Les prétendantes ont vu leur nom prononcé à distance par Jean-Louis Trintignant avant qu’Isabelle Huppert ne poursuive les introductions. La jeune comédienne de 14 ans brille dans Mignonnes de Maïmouna Doucouré, sa première expérience d’un tournage. « Je voudrais dire à toutes les personnes de mon âge de suivre leurs rêves », a confié concise la lauréate qui ne faisait pas partie des présélectionnées de sa catégorie, liste établie par les directeurs de casting et a été repêchée par le votants des César.
Marina Foïs :«Présenter les César c'est une comorbidité professionnelle»
Épaulée à l’écriture par Blanche Gardin et Laurent Lafitte aux plumes pleines d’ironie, Marina Foïs a tenu sa promesse de « ne rien s’interdire ». Dans son discours d’ouverture, la maîtresse de cérémonie a tenu sa parole : « Je suis très heureuse de présenter les César 2021 qui célèbre l’année 2020 où un virus a débarqué. Quand on a vu que ça durerait et que ce serait chiant, on a féminisé le terme. Comme c’est un virus qui tuait les vieux, on a enfermé les jeunes et fermé les salles de spectacles pour ensuite rouvrir les églises car nous sommes un pays laïc et mieux organiser les flux dans les grands magasins pour faire nos courses de Noël pour des cadeaux qu’on revendra sur Ebay ».
Et d’attaquer sur la problématique du soir « Fallait-il faire les César : acharnement ou résistance ? C’est compliqué et on est heureux d’être là ». Marina Fois a commis le premier tacle contre la ministre de la Culture : « Que faire quand on n’a plus confiance envers son ministre de tutelle qui a le temps de sortir un livre avec une recette au gorgonzola ? C’est maso de présenter les César quand on n’en a jamais gagné, comme avoir une pharmacienne à la culture ». « Il faut bien se célébrer, sinon qui le fera pour nous et puis on se retrouvera. Regarder un film avec des inconnus me manque, même vos pop-corn », lance la comédienne qui termine sur une boutade. « Je me suis fait vacciner car présenter les César c’est une comorbidité professionnelle »
Roschdy Zem a ouvert cette édition aux allures de crash-test pour l’Académie. « Ça me fait plaisir de vous reparler. On s’est quitté un peu fâché l’an passé. À la contagion des émotions dans la salle obscure s’est succédé la peur de la contagion du virus. Le cinéma a continué d’exister mais sans sa vocation collective. Je voulais saisir cette occasion de célébrer notre art et ne plus oublier notre chance folle d’exercer ce métier. Nous ne pourrons plus faire du cinéma sans entendre la vulnérabilité des acteurs, des techniciens, des scénaristes. Les règles du jeu changent mais peut-être est-ce le début d’une nouvelle aventure. »
Rangs clairsemés avec deux test PCR
Crise sanitaire oblige, les rangs de l’Olympia seront clairsemés : 153 invités nommés et honorés privés d’accompagnateur, 30 remettants sans compter les techniciens. Déposés en tenue de gala au coin de la rue Scribe et du boulevard des Capucines, ceux qui prendront place dans la salle de l’Olympia entreront par petit groupe à des horaires précis et auront été testés deux fois, dont ce matin.
Premier arrivé sur le tapis rouge, le président de cette cérémonie Roschdy Zem. Le comédien a salué du coude son ami et remettant Reda Kateb. Bien organisé, Lambert Wilson a montré le contenu volumineux de ses poches : invitation, résultats de test PCR et attestation dérogatoire au couvre-feu.
À LIRE AUSSI :Les César ont-ils toujours le sens de la fête ?
Roselyne Bachelot comprend «l'exaspération de la profession»
Pas de traitement de faveur pour la ministre de la Culture. Roselyne Bachelot ne sera pas dans la salle mais en coulisses, avec les nouveaux coprésidents de l’Académie, Véronique Cayla et Eric Toledano. Elle pourra prendre en direct le pouls et les foudres d’une profession excédée, sans perspective de réouverture des cinémas et des théâtres dont les occupations se multiplient. Sur le tapis rouge, la locataire de la rue de Valois a assuré « être aux côtés de la profession et comprendre l’exaspération née de ces nouveaux quatre mois de fermeture. 2020 n’a pas été une année blanche pour la culture notamment grâce au cinéma ». Et de conclure : « Je veux transmettre un message d’espoir, nous bâtissons avec la filière les conditions de la réouverture des salles. Je vous le promets on va revoir des films ».
À voir aussi - La cérémonie des César montre que le cinéma a la volonté de «continuer à exister» malgré la pandémie, souligne Roschdy Zem
Démocrate et laïque
le 15/03/2021 à 20:36
Albert Dupontel est actuellement l'un des seuls et vraisemblablement le seul réalisateur français en activité dont les films me font rêver, réfléchir, pleurer ou rire. J'y retrouve cette sensation de liberté, de magnificence, de grande bouffée d'oxygène, d'ouverture sur un autre monde, d'impertinence à la fois acide et respectueuse que le cinéma peut si miraculeusement offrir parfois. Pour le reste de la production française, elle oscille entre le clip publicitaire pour aliment bas de gamme, le porno déguisé en œuvre d'art et la propagande bobogauchiste pour le multiculturalisme et la théorie du genre.
feuille d'erable
le 15/03/2021 à 09:59
tant que le cinéma et la culture de facon plus général seront subventonnés par l'Etat, nous ne ferons qu'entretenir la médiocrité et le copinage. Voilà de bonnes économie à faire, seul le privé doit etre la source de financement de la culture, avec un seul objectif aujourd'hui complètement oublié; le talent.
LauMal
le 14/03/2021 à 12:29
Au vu de son film, on aurait pu s’attendre à ce que Zady ne tombe pas dans le piège du gang Traoré.