Étape 1
Le lundi 3 mai signera la fin des attestations pour les sorties en journée, et la levée des restrictions de déplacements interrégionaux. De même, les collégiens (4e et 3e) et les lycéens pourront regagner leurs établissements, dans des classes en demi-jauge. Le couvre-feu et le télétravail demeureront quant à eux maintenus, et les commerces qui ne sont pas « de première nécessité » resteront fermés. À noter, enfin, que la vaccination sera ouverte aux personnes majeures en situation d'obésité dès le 1er mai.
Étape 2
Le mercredi 19 mai doit marquer, selon le président, le retour de
« notre art de vivre à la française » : le couvre-feu sera donc repoussé à 21 heures, et les commerces, terrasses, musées, salles de cinéma et théâtres pourront ouvrir « avec des jauges limitées ». En pratique, les déjeuners et les dîners seront limités à six personnes par table en extérieur, et le secteur culturel devra se contenter d'accueillir 800 personnes en intérieur, contre 1 000 personnes en extérieur. Il sera également possible de reprendre des activités sportives dans les lieux couverts et de plein air, « avec des protocoles adaptés ». Les rassemblements de plus de 10 personnes demeureront cependant interdits, et le télétravail sera maintenu.
Ces étapes pourront toutefois être retardées dans les départements où le taux d'incidence est durablement supérieur à 400 cas pour 100 000 habitants. À l'heure actuelle, huit départements sont concernés : les Bouches-du-Rhône, l'Oise, Paris, la Seine-et-Marne, l'Essonne, la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne et le Val-d'Oise.
France
Déconfinement : calendrier, réouvertures, couvre-feu... Les annonces d'Emmanuel Macron
INFOGRAPHIE. Le chef de l'Etat a dévoilé le calendrier du déconfinement dans un entretien à la presse quotidienne régionale. Un plan en quatre étapes.
Malgré l'optimisme affiché par le gouvernement, et l'inflexion à la baisse du taux d'incidence du Covid, les faits sont là : la France compte désormais parmi les pays européens où le virus circule le plus fortement. Pourtant, comme un peu partout en Europe, l'heure est bel et bien à la levée des restrictions sanitaires en France, à partir du 3 mai comme vient de l'annoncer Emmanuel Macron. Une perspective qui inquiète plusieurs scientifiques. "Ce projet de déconfinement, c'est de la folie, alors que 400 personnes arrivent encore chaque jour en réanimation", s'emporte notamment l'épidémiologiste Catherine Hill.
"Ce projet de déconfinement, c'est de la folie"
Calendrier du déconfinement, fin du couvre-feu, vaccination : notre entretien avec Emmanuel Macron
Le président de la République dévoile les étapes de son plan de déconfinement dans une interview à la presse régionale. Commerces, lieux de culture et terrasses des bars et restaurants doivent rouvrir le 19 mai « mais nous pourrons actionner des « freins d’urgence » sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop », prévient Emmanuel Macron, qui entend lever le couvre-feu le 30 juin et partir de nouveau à la rencontre des Français.
Les journalistes de la presse régionale, dont Ouest-France, ont été reçus mercredi 28 avril à l’Élysée. Ils ont pu interroger Emmanuel Macron sur le plan de déconfinement en quatre étapes qui débutera dès ce lundi 3 mai avec la levée des restrictions de circulation.
Le président de la République dévoile les étapes de son plan de déconfinement dans une interview à la presse régionale. Commerces, lieux de culture et terrasses des bars et restaurants doivent rouvrir le 19 mai « mais nous pourrons actionner des « freins d’urgence » sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop », prévient Emmanuel Macron, qui entend lever le couvre-feu le 30 juin et partir de nouveau à la rencontre des Français.
Les journalistes de la presse régionale, dont Ouest-France, ont été reçus mercredi 28 avril à l’Élysée. Ils ont pu interroger Emmanuel Macron sur le plan de déconfinement en quatre étapes qui débutera dès ce lundi 3 mai avec la levée des restrictions de circulation.
Réouverture des commerces, des lieux de culture, des terrasses et des salles de sport, assouplissement du télétravail, fin du couvre-feu… Le président de la République dévoile un calendrier national qui pourra être revu, à l’échelon local, si l’épidémie de coronavirus, flambe de nouveau.
Dans cet entretien, le chef de l’État évoque également la campagne de vaccination contre le Covid-19, bientôt ouverte à tous les adultes obèses, le pass sanitaire, les examens, le plan de relance et même son avenir personnel, à un an de la présidentielle.
VIDÉO. Covid-19 : « Peut-être aurons-nous à nous refaire vacciner chaque année » indique Emmanuel Macron
Le 31 mars, vous avez annoncé un retour progressif à la normale à partir de mi-mai. Quel est votre calendrier ?
L’étape zéro, c’était la réouverture des écoles le 26 avril. Nous avons assumé cette priorité éducative et cette stratégie de vivre avec le virus, y compris face à un haut niveau d’incidence, supérieur à celui de nos voisins.
Nous ouvrirons ensuite en quatre étapes. Le 3 mai, fin des attestations et des restrictions de déplacement. Le 19 mai, couvre-feu repoussé à 21 h et réouverture des commerces, des terrasses et des musées, salles de cinémas et théâtres avec des jauges limitées.
Dès le 19 mai, il nous faut retrouver notre art de vivre à la française, en restant prudents et responsables : notre convivialité, notre culture, le sport…
Le 9 juin, couvre-feu à 23 h et ouverture des cafés, restaurants et salles de sport.
Enfin le 30 juin, fin du couvre-feu.
L’idée de déconfiner par territoire est donc abandonnée ?
J’ai bon espoir que la France entière pourra passer à l’étape du 19 mai. Les mesures seront nationales, mais nous pourrons actionner des « freins d’urgence » sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop. À l’heure actuelle, il y a huit départements dans cette lesquels l’incidence dépasse 400 cas pour 100 000 habitants.
Lire aussi : Quels départements dépassent le seuil de 400 cas pour 100 000 habitants ?
Selon quels critères ces freins seront-ils déclenchés ?
Ils s’appliqueront dans une métropole ou un département en fonction de trois critères : le taux d’incidence qui dépasserait à nouveau 400 infections pour 100 000 habitants, une augmentation très brutale de ce taux et une menace de saturation des services de réanimation. Si cela se produit, le gouvernement, en concertation avec les préfets et les collectivités locales, bloquera les réouvertures.
Le télétravail sera assoupli à partir du 9 juin
En octobre, vous aviez fixé le seuil de déconfinement à 5 000 cas par jour, il est aujourd’hui à plus de 30 000. Les conditions sont-elles vraiment réunies pour gagner ce nouveau pari ?
Je n’ai jamais fait de pari sur la santé et la sécurité de nos concitoyens. J’assume d’avoir fait des choix, mais ce ne sont pas des paris. Cela sous-entendrait que ce serait aventureux. Non. Nous avons été éclairés par la science et nous avons fait le choix de mettre l’humain avant tout. Dans l’humain, il n’y a pas que la gestion sanitaire mais aussi tout ce qui fait la vie des femmes et des hommes. La vie de la Nation ne se réduit pas à l’évolution des courbes.
Je suis obligé de regarder la conséquence de la fermeture d’une école, quand un enfant n’aura pas un repas par jour ; ou encore la conséquence quand on demande à un commerce de fermer plusieurs semaines. Je sais leur détresse aujourd’hui. Nous devons prendre tout cela en compte.
Qu’est-ce qui a changé ?
La grande différence avec le mois d’octobre, c’est qu’aujourd’hui, nous avons un vaccin qui donne une perspective de sortie durable de la crise. Nous avons vu l’efficacité du couvre-feu, croisée avec l’arrivée du vaccin en janvier. C’est un vrai changement dans la gestion de l’épidémie.
Assouplirez-vous le télétravail ?
Le télétravail sera assoupli à partir du 9 juin, en lien avec les partenaires sociaux au niveau des entreprises. De manière plus large, ce que je vous ai présenté aujourd’hui est un projet qui fera l’objet, à partir de lundi [3 mai], d’une grande phase de concertation à trois niveaux : avec les parlementaires, avec l’ensemble des partenaires sociaux et des professionnels des secteurs, et avec les élus des territoires. À l’issue, le plan sera présenté en détail par le Premier ministre au cours de la semaine du 10 mai.
Le pass sanitaire ne différenciera pas les Français
Comment le pass sanitaire fonctionnera-t-il ? N’y a-t-il pas de risque d’une société sanitaire à deux vitesses avec les vaccinés et les autres ?
Je tiens beaucoup à l’unité de la Nation. Sur le plan sanitaire, chaque innovation a été accessible à tous. Les tests sont gratuits en France. Très peu de pays sont dans ce cas. Nous n’avons laissé personne au bord de la route. La République et l’État Providence ont été au rendez-vous. Le « quoiqu’il en coûte », c’est aussi ça.
Le pass sanitaire ne sera jamais un droit d’accès qui différencie les Français. Il ne saurait être obligatoire pour accéder aux lieux de la vie de tous les jours comme les restaurants, théâtres et cinémas, ou pour aller chez des amis. Par contre, dans des lieux où se brassent les foules, comme les stades, festivals, foires ou expositions, il serait absurde de ne pas l’utiliser.
Comme il en va de nos libertés publiques, le Parlement se saisira de la question. Le débat doit être ouvert. Ce pass, qui sera papier ou numérique, via l’application TousAntiCovid, permettra de montrer qu’on est vacciné ou testé négatif dans les deux jours qui précèdent. C’est juste et ça ne fracturera pas le pays. Ce sera un outil supplémentaire pour assurer la protection des Français.
Est-ce que la formule que vous nous présentez permettra de ne plus avoir recours à des confinements ?
C’est mon souhait le plus fort, et cela ne date pas d’aujourd’hui. Mais est-ce que je peux vous dire, les yeux dans les yeux, qu’on ne sera plus jamais débordé par ce virus ? C’est impossible. Il semble que les vaccins dont nous disposons soient efficaces face aux variants, mais vous voyez bien que nous en découvrons de nouvelles formes chaque semaine. Il faut donc rester vigilant.
Maintenant, notre combat, c’est de vacciner le plus vite possible pour augmenter notre immunité collective. Il faut le faire évidemment en Europe, mais également en aidant l’Afrique et les pays les plus pauvres. Ce n’est pas simplement de la solidarité, c’est aussi de l’efficacité.
C’est-à-dire ?
Le seul moyen d’éviter que de nouveaux variants émergent, c’est de permettre à tous les pays du monde d’aller vers une stratégie d’éradication du virus. C’est pour cela que nous sommes en train de devenir, nous, Européens, le continent leader de la production de vaccins. On est parti moins vite que nos amis américains, mais nous sommes en train de rattraper ce retard à marche forcée.
Nous allons produire 250 millions de doses sur notre sol cette année. Nous, Européens, nous en avons d’ores et déjà commandé 2,5 milliards pour cette année. Nous en produirons plus de 2 milliards sur 2022-2023 pour faire les éventuels rappels de vaccination dont on aura peut-être besoin, mais aussi aider tous nos partenaires à vacciner leurs populations et écraser le virus dans leur pays.
Voyez-vous la fin de la crise sanitaire en 2021 ?
Je ne sais pas. S’il n’y a pas de nouveaux variants non maîtrisés, oui. Là où je suis plus optimiste, c’est que nos meilleurs scientifiques et industriels disent que nous serions en capacité, en 80 à 100 jours, de fournir un vaccin permettant d’y répondre. Mais peut-être aurons-nous à vivre avec le virus pendant des années et à nous refaire vacciner chaque année.
Pas d’examens au rabais
Envisagez-vous dès maintenant d’ouvrir la vaccination à tous ?
Pas tout de suite. On peut optimiser le fonctionnement de nos 1700 centres de vaccination. On va continuer à prioriser par âge parce que c’est le plus efficace. La vaccination des plus vulnérables fait baisser la pression sur les services hospitaliers.
Mais nous avons des doses en stock. Nous allons donc ouvrir à compter du 1er mai la vaccination à tous les plus de 18 ans qui ont une surcharge pondérale sérieuse (indice de masse corporelle supérieur à 30). J’invite les 2,3 millions de Français concernés à se rendre dans les centres de vaccination dès ce week-end.
Lire aussi : Covid-19. La vaccination ouverte aux personnes obèses de plus de 18 ans dès samedi
Y aura-t-il un bac normal cette année ?
En aucun cas, nous n’aurons des examens et des diplômes au rabais. Qu’il s’agisse du baccalauréat, des bac pro, des BTS ou des examens dans nos universités. Mais nous devons nous adapter. Pour le baccalauréat, certaines épreuves qui devaient se tenir en mars sont passées en contrôle continu du fait de l’épidémie. En revanche, les deux épreuves qui ont des examens terminaux, la philosophie et le grand oral, seront maintenues.
Et les autres examens ?
Pour le bac pro, les épreuves terminales prévues pour juin seront maintenues. Idem pour les BTS, en juin, avec la part de stage et de contrôle continu prévue, mais nous mettrons en place une session exceptionnelle de rattrapage en juillet. Pour tout le reste du supérieur, les examens prévus se tiendront mais à chaque fois qu’il y aura des élèves malades, nous leur permettrons d’avoir des sessions de rattrapage.
J’irai dans les territoires dès le début du mois de juin
Comment sortir des aides et du « quoiqu’il en coûte », sans faire trop de dégâts sur des secteurs très fragilisés ?
J’assume totalement le « quoi qu’il en coûte ». Nous avons eu raison de le faire. Durant la crise 2008-2010, la France a eu une récession deux fois moins forte qu’en Allemagne, mais a détruit sept fois plus d’emplois. Là nous n’en détruisons pas plus, car on a protégé les emplois existants. Le chômage n’a pas explosé, ni les faillites.
Les semaines à venir, il faut être très vigilant pour accompagner le redémarrage sans créer de fragilités économiques. Le dispositif d’activité partielle sera maintenu à l’identique en mai et en juin. En mai, pour ceux qui commencent à rouvrir, il y aura les mêmes aides économiques qu’en avril. À partir du 1er juin, l’accompagnement se fera au prorata de la reprise d’activité.
On aura une réponse adaptée par secteur. Ce sera du cousu main. Là encore, nous le ferons dans un cadre concerté avec les partenaires sociaux.
Les 750 milliards d’euros promis par l’Europe n’arriveront pas avant septembre. La France va exercer la présidence de la Commission européenne l’an prochain. Allez-vous prendre des initiatives pour fluidifier le système de décision européen ?
Nos procédures sont trop lentes et trop bureaucratiques. Il y aura au cœur de la présidence française la volonté de réformer nos institutions pour les rendre plus efficaces et plus rapides. Mon travail dans les prochains mois, c’est aussi de tout faire pour simplifier les procédures en France.
Comment ?
Dès le début du mois de juin grâce au retour à une vie aussi normale que possible, je veux reprendre mon bâton de pèlerin et aller dans les territoires pour prendre le pouls du pays.
Vous allez refaire un grand débat national ?
Je veux, en lien avec les maires et forces vives de la Nation, inventer un deuxième temps de la relance. Il devra passer par une simplification drastique et une accélération des investissements.
Tant que je serai là, il n’y aura pas de hausses d’impôts
La crise sanitaire a révélé un certain déclassement industriel…
Nous avons tenu pendant des décennies un discours patriotique, sans les moyens. S’il n’y a pas de recherche, s’il n’y a pas d’investissement pour créer des usines, il n’y a plus d’industrie.
Depuis quatre ans, nous avons baissé le coût du capital et la fiscalité sur l’investissement productif. Heureusement que nous avons réduit les impôts, y compris en supprimant la part anti-production de l’ISF. Notre pays dissuadait l’investissement. Il dissuadait aussi le travail et c’est pour cela que j’ai baissé l’impôt sur le revenu, augmenté la prime d’activité.
Ah, j’en ai entendu sur ces sujets de la part des patriotes aux petits pieds ! Ceux qui vous disent :’il faut faire des usines en France’, mais vous expliquent que les gens qui réussissent doivent être taxés, alors que la France est déjà l’un des pays d’Europe où la fiscalité est la plus élevée.
On a eu raison de stopper cette aberration qui conduisait nos entrepreneurs à s’installer à l’étranger ; on aurait dû faire 10 ou 15 ans plus tôt. Nous avons malheureusement vécu à plein l’absurdité d’un modèle économique qui n’existait plus. On va mettre une décennie pour rebâtir le tissu industriel.
Les États-Unis préparent un plan à 1 000 milliards de dollars. Ils injectent plus d’argent que nous ?
Il faut aussi, quand on se compare avec le plan Biden, prendre en compte tout notre modèle social, à commencer par les minimas sociaux et l’activité partielle. Quand on y ajoute le plan de relance, la France consacre 20 % du PIB à la crise. Les mêmes proportions qu’aux États-Unis, qui n’ont pas notre système de solidarité.
Joe Biden va taxer l’argent qui dort chez les plus riches. C’est une solution ?
Cette dette Covid, il faudra la rembourser et nous devrons aussi assumer des investissements d’avenir et équilibrer le fonctionnement courant du pays. Mais tant que je serai là, il n’y aura pas de hausses d’impôts en sortie de crise. Nous sommes déjà l’un des pays les plus taxés au monde. Il ne peut y avoir de souveraineté industrielle sans une baisse des impôts de production.
Depuis quatre ans, nous avons baissé la contribution des classes populaires et moyennes (100 € de gain de pouvoir d’achat pour un salarié au Smic). La Nation doit reprendre le cours des réformes de modernisation. Ce processus ne peut pas s’arrêter.
Des réformes jusqu’au dernier quart d’heure
Vous allez donc réformer jusqu’au bout ?
Jusqu’au dernier quart d’heure. Ces vingt dernières années, nous avons pris trop de retard. Réformer, transformer, investir, ce sont les conditions pour défendre notre modèle social, ce que nous sommes nous, Français.
En décembre, vous avez laissé planer le doute sur votre candidature à un second mandat. Cette crise a-t-elle conforté ce doute ou l’a-t-elle fait reculer ?
Je me couche avec mes doutes et je me réveille avec des convictions reforgées. Je serai bien intempestif à vous parler de mes ambitions personnelles. Dans la gestion d’un pays, il ne faut pas commettre de faute de temps. Nous avons une nouvelle décennie française à bâtir, qui sera la décennie de notre jeunesse.
Si j’ai une ambition, c’est ça. C’est qu’on puisse ensemble, par cette grande concertation que je veux faire à l’été, tourner la page de ce moment de la vie de la Nation. Mon destin individuel n’existe pas si nous n’y arrivons pas, aucun destin individuel ne vaut en dehors d’un projet collectif.
Réouverture des commerces, des lieux de culture, des terrasses et des salles de sport, assouplissement du télétravail, fin du couvre-feu… Le président de la République dévoile un calendrier national qui pourra être revu, à l’échelon local, si l’épidémie de coronavirus, flambe de nouveau.
Dans cet entretien, le chef de l’État évoque également la campagne de vaccination contre le Covid-19, bientôt ouverte à tous les adultes obèses, le pass sanitaire, les examens, le plan de relance et même son avenir personnel, à un an de la présidentielle.
VIDÉO. Covid-19 : « Peut-être aurons-nous à nous refaire vacciner chaque année » indique Emmanuel Macron
Le 31 mars, vous avez annoncé un retour progressif à la normale à partir de mi-mai. Quel est votre calendrier ?
L’étape zéro, c’était la réouverture des écoles le 26 avril. Nous avons assumé cette priorité éducative et cette stratégie de vivre avec le virus, y compris face à un haut niveau d’incidence, supérieur à celui de nos voisins.
Nous ouvrirons ensuite en quatre étapes. Le 3 mai, fin des attestations et des restrictions de déplacement. Le 19 mai, couvre-feu repoussé à 21 h et réouverture des commerces, des terrasses et des musées, salles de cinémas et théâtres avec des jauges limitées.
Dès le 19 mai, il nous faut retrouver notre art de vivre à la française, en restant prudents et responsables : notre convivialité, notre culture, le sport…
Le 9 juin, couvre-feu à 23 h et ouverture des cafés, restaurants et salles de sport.
Enfin le 30 juin, fin du couvre-feu.
L’idée de déconfiner par territoire est donc abandonnée ?
J’ai bon espoir que la France entière pourra passer à l’étape du 19 mai. Les mesures seront nationales, mais nous pourrons actionner des « freins d’urgence » sanitaires dans les territoires où le virus circulerait trop. À l’heure actuelle, il y a huit départements dans cette lesquels l’incidence dépasse 400 cas pour 100 000 habitants.
Lire aussi : Quels départements dépassent le seuil de 400 cas pour 100 000 habitants ?
Selon quels critères ces freins seront-ils déclenchés ?
Ils s’appliqueront dans une métropole ou un département en fonction de trois critères : le taux d’incidence qui dépasserait à nouveau 400 infections pour 100 000 habitants, une augmentation très brutale de ce taux et une menace de saturation des services de réanimation. Si cela se produit, le gouvernement, en concertation avec les préfets et les collectivités locales, bloquera les réouvertures.
Le télétravail sera assoupli à partir du 9 juin
En octobre, vous aviez fixé le seuil de déconfinement à 5 000 cas par jour, il est aujourd’hui à plus de 30 000. Les conditions sont-elles vraiment réunies pour gagner ce nouveau pari ?
Je n’ai jamais fait de pari sur la santé et la sécurité de nos concitoyens. J’assume d’avoir fait des choix, mais ce ne sont pas des paris. Cela sous-entendrait que ce serait aventureux. Non. Nous avons été éclairés par la science et nous avons fait le choix de mettre l’humain avant tout. Dans l’humain, il n’y a pas que la gestion sanitaire mais aussi tout ce qui fait la vie des femmes et des hommes. La vie de la Nation ne se réduit pas à l’évolution des courbes.
Je suis obligé de regarder la conséquence de la fermeture d’une école, quand un enfant n’aura pas un repas par jour ; ou encore la conséquence quand on demande à un commerce de fermer plusieurs semaines. Je sais leur détresse aujourd’hui. Nous devons prendre tout cela en compte.
Qu’est-ce qui a changé ?
La grande différence avec le mois d’octobre, c’est qu’aujourd’hui, nous avons un vaccin qui donne une perspective de sortie durable de la crise. Nous avons vu l’efficacité du couvre-feu, croisée avec l’arrivée du vaccin en janvier. C’est un vrai changement dans la gestion de l’épidémie.
Assouplirez-vous le télétravail ?
Le télétravail sera assoupli à partir du 9 juin, en lien avec les partenaires sociaux au niveau des entreprises. De manière plus large, ce que je vous ai présenté aujourd’hui est un projet qui fera l’objet, à partir de lundi [3 mai], d’une grande phase de concertation à trois niveaux : avec les parlementaires, avec l’ensemble des partenaires sociaux et des professionnels des secteurs, et avec les élus des territoires. À l’issue, le plan sera présenté en détail par le Premier ministre au cours de la semaine du 10 mai.
Le pass sanitaire ne différenciera pas les Français
Comment le pass sanitaire fonctionnera-t-il ? N’y a-t-il pas de risque d’une société sanitaire à deux vitesses avec les vaccinés et les autres ?
Je tiens beaucoup à l’unité de la Nation. Sur le plan sanitaire, chaque innovation a été accessible à tous. Les tests sont gratuits en France. Très peu de pays sont dans ce cas. Nous n’avons laissé personne au bord de la route. La République et l’État Providence ont été au rendez-vous. Le « quoiqu’il en coûte », c’est aussi ça.
Le pass sanitaire ne sera jamais un droit d’accès qui différencie les Français. Il ne saurait être obligatoire pour accéder aux lieux de la vie de tous les jours comme les restaurants, théâtres et cinémas, ou pour aller chez des amis. Par contre, dans des lieux où se brassent les foules, comme les stades, festivals, foires ou expositions, il serait absurde de ne pas l’utiliser.
Comme il en va de nos libertés publiques, le Parlement se saisira de la question. Le débat doit être ouvert. Ce pass, qui sera papier ou numérique, via l’application TousAntiCovid, permettra de montrer qu’on est vacciné ou testé négatif dans les deux jours qui précèdent. C’est juste et ça ne fracturera pas le pays. Ce sera un outil supplémentaire pour assurer la protection des Français.
Est-ce que la formule que vous nous présentez permettra de ne plus avoir recours à des confinements ?
C’est mon souhait le plus fort, et cela ne date pas d’aujourd’hui. Mais est-ce que je peux vous dire, les yeux dans les yeux, qu’on ne sera plus jamais débordé par ce virus ? C’est impossible. Il semble que les vaccins dont nous disposons soient efficaces face aux variants, mais vous voyez bien que nous en découvrons de nouvelles formes chaque semaine. Il faut donc rester vigilant.
Maintenant, notre combat, c’est de vacciner le plus vite possible pour augmenter notre immunité collective. Il faut le faire évidemment en Europe, mais également en aidant l’Afrique et les pays les plus pauvres. Ce n’est pas simplement de la solidarité, c’est aussi de l’efficacité.
C’est-à-dire ?
Le seul moyen d’éviter que de nouveaux variants émergent, c’est de permettre à tous les pays du monde d’aller vers une stratégie d’éradication du virus. C’est pour cela que nous sommes en train de devenir, nous, Européens, le continent leader de la production de vaccins. On est parti moins vite que nos amis américains, mais nous sommes en train de rattraper ce retard à marche forcée.
Nous allons produire 250 millions de doses sur notre sol cette année. Nous, Européens, nous en avons d’ores et déjà commandé 2,5 milliards pour cette année. Nous en produirons plus de 2 milliards sur 2022-2023 pour faire les éventuels rappels de vaccination dont on aura peut-être besoin, mais aussi aider tous nos partenaires à vacciner leurs populations et écraser le virus dans leur pays.
Voyez-vous la fin de la crise sanitaire en 2021 ?
Je ne sais pas. S’il n’y a pas de nouveaux variants non maîtrisés, oui. Là où je suis plus optimiste, c’est que nos meilleurs scientifiques et industriels disent que nous serions en capacité, en 80 à 100 jours, de fournir un vaccin permettant d’y répondre. Mais peut-être aurons-nous à vivre avec le virus pendant des années et à nous refaire vacciner chaque année.
Pas d’examens au rabais
Envisagez-vous dès maintenant d’ouvrir la vaccination à tous ?
Pas tout de suite. On peut optimiser le fonctionnement de nos 1700 centres de vaccination. On va continuer à prioriser par âge parce que c’est le plus efficace. La vaccination des plus vulnérables fait baisser la pression sur les services hospitaliers.
Mais nous avons des doses en stock. Nous allons donc ouvrir à compter du 1er mai la vaccination à tous les plus de 18 ans qui ont une surcharge pondérale sérieuse (indice de masse corporelle supérieur à 30). J’invite les 2,3 millions de Français concernés à se rendre dans les centres de vaccination dès ce week-end.
Lire aussi : Covid-19. La vaccination ouverte aux personnes obèses de plus de 18 ans dès samedi
Y aura-t-il un bac normal cette année ?
En aucun cas, nous n’aurons des examens et des diplômes au rabais. Qu’il s’agisse du baccalauréat, des bac pro, des BTS ou des examens dans nos universités. Mais nous devons nous adapter. Pour le baccalauréat, certaines épreuves qui devaient se tenir en mars sont passées en contrôle continu du fait de l’épidémie. En revanche, les deux épreuves qui ont des examens terminaux, la philosophie et le grand oral, seront maintenues.
Et les autres examens ?
Pour le bac pro, les épreuves terminales prévues pour juin seront maintenues. Idem pour les BTS, en juin, avec la part de stage et de contrôle continu prévue, mais nous mettrons en place une session exceptionnelle de rattrapage en juillet. Pour tout le reste du supérieur, les examens prévus se tiendront mais à chaque fois qu’il y aura des élèves malades, nous leur permettrons d’avoir des sessions de rattrapage.
J’irai dans les territoires dès le début du mois de juin
Comment sortir des aides et du « quoiqu’il en coûte », sans faire trop de dégâts sur des secteurs très fragilisés ?
J’assume totalement le « quoi qu’il en coûte ». Nous avons eu raison de le faire. Durant la crise 2008-2010, la France a eu une récession deux fois moins forte qu’en Allemagne, mais a détruit sept fois plus d’emplois. Là nous n’en détruisons pas plus, car on a protégé les emplois existants. Le chômage n’a pas explosé, ni les faillites.
Les semaines à venir, il faut être très vigilant pour accompagner le redémarrage sans créer de fragilités économiques. Le dispositif d’activité partielle sera maintenu à l’identique en mai et en juin. En mai, pour ceux qui commencent à rouvrir, il y aura les mêmes aides économiques qu’en avril. À partir du 1er juin, l’accompagnement se fera au prorata de la reprise d’activité.
On aura une réponse adaptée par secteur. Ce sera du cousu main. Là encore, nous le ferons dans un cadre concerté avec les partenaires sociaux.
Les 750 milliards d’euros promis par l’Europe n’arriveront pas avant septembre. La France va exercer la présidence de la Commission européenne l’an prochain. Allez-vous prendre des initiatives pour fluidifier le système de décision européen ?
Nos procédures sont trop lentes et trop bureaucratiques. Il y aura au cœur de la présidence française la volonté de réformer nos institutions pour les rendre plus efficaces et plus rapides. Mon travail dans les prochains mois, c’est aussi de tout faire pour simplifier les procédures en France.
Comment ?
Dès le début du mois de juin grâce au retour à une vie aussi normale que possible, je veux reprendre mon bâton de pèlerin et aller dans les territoires pour prendre le pouls du pays.
Vous allez refaire un grand débat national ?
Je veux, en lien avec les maires et forces vives de la Nation, inventer un deuxième temps de la relance. Il devra passer par une simplification drastique et une accélération des investissements.
Tant que je serai là, il n’y aura pas de hausses d’impôts
La crise sanitaire a révélé un certain déclassement industriel…
Nous avons tenu pendant des décennies un discours patriotique, sans les moyens. S’il n’y a pas de recherche, s’il n’y a pas d’investissement pour créer des usines, il n’y a plus d’industrie.
Depuis quatre ans, nous avons baissé le coût du capital et la fiscalité sur l’investissement productif. Heureusement que nous avons réduit les impôts, y compris en supprimant la part anti-production de l’ISF. Notre pays dissuadait l’investissement. Il dissuadait aussi le travail et c’est pour cela que j’ai baissé l’impôt sur le revenu, augmenté la prime d’activité.
Ah, j’en ai entendu sur ces sujets de la part des patriotes aux petits pieds ! Ceux qui vous disent :’il faut faire des usines en France’, mais vous expliquent que les gens qui réussissent doivent être taxés, alors que la France est déjà l’un des pays d’Europe où la fiscalité est la plus élevée.
On a eu raison de stopper cette aberration qui conduisait nos entrepreneurs à s’installer à l’étranger ; on aurait dû faire 10 ou 15 ans plus tôt. Nous avons malheureusement vécu à plein l’absurdité d’un modèle économique qui n’existait plus. On va mettre une décennie pour rebâtir le tissu industriel.
Les États-Unis préparent un plan à 1 000 milliards de dollars. Ils injectent plus d’argent que nous ?
Il faut aussi, quand on se compare avec le plan Biden, prendre en compte tout notre modèle social, à commencer par les minimas sociaux et l’activité partielle. Quand on y ajoute le plan de relance, la France consacre 20 % du PIB à la crise. Les mêmes proportions qu’aux États-Unis, qui n’ont pas notre système de solidarité.
Joe Biden va taxer l’argent qui dort chez les plus riches. C’est une solution ?
Cette dette Covid, il faudra la rembourser et nous devrons aussi assumer des investissements d’avenir et équilibrer le fonctionnement courant du pays. Mais tant que je serai là, il n’y aura pas de hausses d’impôts en sortie de crise. Nous sommes déjà l’un des pays les plus taxés au monde. Il ne peut y avoir de souveraineté industrielle sans une baisse des impôts de production.
Depuis quatre ans, nous avons baissé la contribution des classes populaires et moyennes (100 € de gain de pouvoir d’achat pour un salarié au Smic). La Nation doit reprendre le cours des réformes de modernisation. Ce processus ne peut pas s’arrêter.
Des réformes jusqu’au dernier quart d’heure
Vous allez donc réformer jusqu’au bout ?
Jusqu’au dernier quart d’heure. Ces vingt dernières années, nous avons pris trop de retard. Réformer, transformer, investir, ce sont les conditions pour défendre notre modèle social, ce que nous sommes nous, Français.
En décembre, vous avez laissé planer le doute sur votre candidature à un second mandat. Cette crise a-t-elle conforté ce doute ou l’a-t-elle fait reculer ?
Je me couche avec mes doutes et je me réveille avec des convictions reforgées. Je serai bien intempestif à vous parler de mes ambitions personnelles. Dans la gestion d’un pays, il ne faut pas commettre de faute de temps. Nous avons une nouvelle décennie française à bâtir, qui sera la décennie de notre jeunesse.
Si j’ai une ambition, c’est ça. C’est qu’on puisse ensemble, par cette grande concertation que je veux faire à l’été, tourner la page de ce moment de la vie de la Nation. Mon destin individuel n’existe pas si nous n’y arrivons pas, aucun destin individuel ne vaut en dehors d’un projet collectif.
"On ne m'a rien demandé": les grandes lacunes de la quarantaine à la française
Contrôles aléatoires, isolement peu respecté, mesures trop souples... De nombreux voyageurs et spécialistes remettent en cause le système de quarantaine Français.