jeudi 22 novembre 2012

PLOUMANAC'H


Ploumanac’h et l'oratoire de Saint-Guirec

 

 


Ploumanac’h est le véritable berceau de Perros-Guirec. Ce nom a subi plusieurs modifications au cours des siècles et l'on pourrait croire, par sa première syllabe "plou" qu'elle fut auparavant une paroisse à part entière. Il n'en fut rien : Ploumanac’h n'obtint jamais le statut de paroisse. Il s'agit en réalité d'une déformation de Poul-Manac'h, signifiant le "marais du moine". La topographie des lieux le justifie aisément. Selon la légende, Guirec, un moine gallois, y débarqua au 5ème siècle dans une auge de granit afin d'y fonder une communauté.

Mais bien avant son arrivée, ce territoire fut déjà occupé par des hommes taillant et polissant la pierre puis travaillant le fer : ils y ont laissé quelques traces, haches en pierre et en bronze, fers de lance et monnaies d'or. Les Romains en foulèrent le sol, construisant sur les côtes des ouvrages fortifiés pour se protéger des incursions saxonnes. A son arrivée, Guirec ne trouva sans doute qu'une terre désertée par les hommes. Traou-Perros aurait été le lieu d'érection de son monastère, probablement détruit lors des invasions normandes, reconstruit au même endroit puis disparaissant définitivement au 15ème siècle. Jusqu'alors, Ploumanac’h était devenu une cité florissante dont le port de commerce avait assuré le développement. L'agriculture n'y était pas étrangère et si les marées amenaient une partie des besoins alimentaires, la culture des céréales permit d'affirmer une autosuffisance et même une ouverture aux marchés extérieurs : l'existence d'un moulin à marée à partir du 14ème siècle en témoigne.
Perros devint progressivement rivale de Ploumanac’h grâce à la construction de ses propres installations portuaires et sa désignation en tant que paroisse dès le 12ème siècle. La période troublée de la Ligue sonna la fin de la suprématie de l'ancienne cité de Poul-Manac'h : elle fut complètement ravagée à la fin du 16ème siècle sous les coups de soldats fidèles au maréchal d'Aumont.

.... Mais si vous êtes arrivé jusqu'ici, c'est sans doute pour en découvrir les charmes et les curiosités d'aujourd'hui ....
Poursuivez donc votre périple sur le sentier des douaniers que vous avez emprunté à Perros et qui vous a fait traverser les landes d'où surgissent les amas de granit rose. Non loin du phare de Ploumanac’h, vous arriverez à une petite plage, enserrée entre deux pointes et parsemée de quelques rochers.


L'un d'entre eux vous attirera par sa forme arrondie ... En vous approchant, vous remarquerez qu'il s'agit d'un petit monument : l'oratoire de Saint-Guirec. Ce curieux édifice, construit sur un amas de rochers submergé par les flots à marée haute, trouve son origine au 12ème siècle.


S'il était très fréquenté par les femmes des marins qui venaient y prier pour le retour de leurs époux, il l'était tout autant par les jeunes filles.
Une légende disait, en effet, que si elles arrivaient à planter une aiguille dans le nez du saint qui y trônait, elles seraient mariées dans l'année.

Cette croyance avait tellement abîmé la statue de Saint-Guirec, sculptée dans le bois, que la paroisse l'avait finalement sagement remplacée par une copie réalisée en granit.

Le martyr ne serait désormais plus martyrisé ...

L'original est à l'abri de la chapelle du même nom qui est située à quelques pas, en surplomb de la plage. L'édification de celle-ci remonte au 14ème siècle mais il ne subsiste que peu de pierres de cette époque. Elle subit en effet plusieurs restaurations au cours des ans et fut notamment agrandie.

Face à la plage, trônant au milieu d'un désordre granitique posé là, sans doute, par quelque géant, le château de Costaérès surprend plus d'un visiteur. Semblant sorti d'un conte des mille et une nuits par son aspect féérique, il surveille la côte depuis le 18ème siècle. Il a emprunté une déformation de l'ancien nom de l'île : Coz-Seherez signifiant "vieille sècherie". C'est là, en effet, que les marins faisaient sécher au soleil les poissons qu'ils sortaient de la mer.


Côté continent, les constructions bordant la plage n'offrent malheureusement pas la même apparente tranquillité : réalisées pour attirer les touristes, elles abritent à la belle saison une faune délirante d'estivants particulièrement bruyants ... Comme partout ailleurs, la Bretagne est belle et reposante pour qui peut la savourer à une autre époque que celle qui voit déferler la grande transhumance des vacanciers en quête de "repos" ...

Avant cette invasion, la petite bourgade coulait des jours paisibles et les maisons qui, par le passé, tournaient le dos à la mer pour mieux se protéger des bourrasques ont, petit à petit, disparu sous les coups de pelle des promoteurs construisant les résidences secondaires.

 


Le port de Ploumanac’h et les moulins de Trégastel


Même le "vieux Paf", tel qu'on surnommait le diable qui se réfugiait selon la légende au moulin de Logoden, a été chassé par l'arrivée des touristes alors qu'il hantait depuis bien longtemps la vallée des Traouiero. Faites-y donc une balade : peut-être l'y retrouverez-vous se cachant parmi les amas de roches et de végétation luxuriante qui caractérisent le site ...


... ou poursuivez le chemin des douaniers qui contourne Pen Ar Krech, la pointe qui abrite le port de Ploumanac’h. Celui-ci, blotti dans une anse où brillent les chromes des voiliers qui viennent y mouiller, vous mènera par ses quais vers les moulins à marée.


L'autorisation royale de construction d'un tel édifice fut accordée en 1375, par Charles V. Le petit moulin que vous verrez en vous dirigeant vers Trégastel, et qui trempe éternellement les pieds dans l'eau, ne fut toutefois construit qu'en 1764, faisant suite à un moulin plus rudimentaire dont toute trace a disparu.




Le second moulin voit son étang, le bassin de retenue où s'engouffre l'eau de mer à chaque marée montante, également alimenté par le Kerougant, minuscule rivière qui a creusé la vallée des Traouiéro.






A marée basse, l'étang se vide pour ne plus laisser apparaître qu'une petite plage de sable mêlée au limon.

A la belle saison, les pluies étant plus rares, la petite rivière se réduit alors bien souvent à un mince filet d'eau.