Tous les modèles de projections climatiques annonçaient jusqu’alors une phase de ralentissement des grands courants marins. Un effet interdépendant du changement climatique, sans que l’on puisse très bien en déterminer la cause exacte.
Seulement voilà, une étude inédite, publiée le 5 février dans la revue Science Advances, tend à démontrer le contraire. Ses auteurs constatent en effet une « accélération profonde de la circulation océanique moyenne mondiale au cours des deux dernières décennies ».
Le phénomène, particulièrement important dans les océans tropicaux, serait notamment dû à la vitesse accrue des vents de surface depuis le début des années 1990. Chaque décennie, la vitesse des vents a en effet augmenté de 2 % au-dessus des océans, ont mesuré les chercheurs. Cela contribuerait à une accélération des courants marins, tant à la surface que jusqu’à 2 000 mètres de profondeur.
« Probablement dû au changement climatique mondial »
Mais pour que le phénomène d’accélération des courants soit aussi notable, les vents ne peuvent pas être les seuls responsables. La hausse des températures jouerait aussi un rôle et contribuerait à cette circulation plus rapide des courants marins.
Un effet inverse de celui qu’anticipaient les modèles de projections climatiques, donc, selon les auteurs de l’étude : « Ce résultat inattendu est probablement dû au changement climatique mondial », ont déclaré les chercheurs dans un communiqué.
Quelles seront les conséquences de l’accélération des courants océaniques ? Pour l’instant, il est impossible de le déterminer : d’autres études seront nécessaires, assurent les auteurs de celle-ci.
« Le climat est un système trop complexe pour que nous puissions prédire l’impact de cette accélération, si elle venait à être confirmée », estime Pascale Lherminier, chercheuse en océanographie physique de l’Ifremer au Laboratoire d’océanographie physique et spatiale (Lops).
Le potentiel des flotteurs Argo
Ce qui est certain, c’est que climat et courants océaniques sont étroitement liés. « Les températures terrestres génèrent des mouvements dans l’océan afin de se réhomogénéiser », résume Pascale Lherminier.
Une telle augmentation de la vitesse des vents aura certes des conséquences sur les mers, mais aussi sur les terres. Et l’accélération des courants marins pourrait également avoir un impact sur les températures terrestres...
Pour la chercheuse de l’Ifremer, plus que ses résultats en tant que tels, sur lesquels on manque encore trop de recul, cette étude montre le potentiel des flotteurs Argo, avec lesquels ont été réalisées ces mesures, et qui sont en pleine expansion.
« En allant jusqu’à 4 000 m de profondeur, ils vont permettre d’accéder à des zones sur lesquelles nous n’avons encore aucune connaissance. Ce n’est que le début des découvertes qu’ils vont rendre possible », constate-t-elle.