L'acteur et chanteur Guy Marchand, célèbre pour son rôle du détective Nestor Burma à la télévision, est mort vendredi à l'âge de 86 ans, ont annoncé ses enfants à l'AFP.
Guy Marchand, qui avait incarné dans une série de 1991 à 2003 ce personnage de détective parisien créé par le romancier Léo Malet, "s'est éteint paisiblement ce vendredi (...) à l'hôpital de Cavaillon" (Vaucluse), ont indiqué ses enfants Jules et Ludivine dans un communiqué.
"Guy Marchand a croqué la vie impatiemment, éperdument, passionnément. Musique, chanson, télévision, cinéma: le 'guignol des Buttes-Chaumont', devenu l’inoubliable Nestor Burma, a accompagné tant de chapitres de nos vies. Sa voix de crooner et son panache vont nous manquer", a salué de son côté la ministre de la Culture Rima Abdul Malak.
Le comédien avait tout pour réussir dans ce rôle d'enquêteur privé au contact des gens modestes de Paris: natif de la capitale, il avait grandi dans le quartier populaire de Belleville. Né à Belleville est d'ailleurs le titre de son dernier album, en 2020.
Jazz et tango
Sa voix grave avait d'abord porté ce fils d'un garagiste-ferailleur et d'une "gitane" vers la chanson. Il avait grandi avec "les manouches" et les musiciens - Django Reinhardt, Stéphane Grappelli - qui venaient répéter dans le garage familial. Son père, régisseur à Bobino la nuit, lui avait fait découvrir la clarinette.
Avec ses airs de séducteur latino et sa voix de baryton, il avait écrit La Passionata en cinq minutes, en rentrant de la guerre d'Algérie. Cette "plaisanterie" était devenue l'un des tubes de l'été 65. Fin connaisseur de jazz et de musiques latines, il avait signé en tout une quinzaine d'albums (Nostalgitan, A Guy in blue, Emilio) au succès confidentiel mais avec des musiciens de renom. "Je suis une vedette populaire, pas une star", aimait-il répéter.
Cet ancien militaire, qui fut aussi légionnaire et officier parachutiste, avait décroché un succès avec Tango, Tango en 1975 avec le bandonéoniste argentin Astor Piazzola. Et surtout avec la chanson Destinée, créée pour Les Sous-doués en vacances (1982) et utilisée la même année dans Le Père Noël est une ordure.
Une chanson qu'il détestait: "C'est la preuve qu’on peut chanter une chanson que l’on n’aime pas (...) Je dois vivre avec cela, moi qui ne jure que par le jazz et le tango!", avait-il déclaré au Figaro en 2020. "C'était une blague, une connerie pour l'été, et on en a vendu 250.000 exemplaires! J'étais vexé!", avait-il lancé dans une autre interview.
Inoubliable Nestor Burma
C'est surtout au cinéma que Guy Marchand avait percé en jouant des rôles secondaires sous l'œil de grands réalisateurs. On avait pu le voir chez François Truffaut (Une belle fille comme moi, 1972), Maurice Pialat (Loulou, 1980), Bertrand Tavernier (Coup de torchon, 1981) ou encore Christophe Honoré (Dans Paris, 2006).
À son palmarès, Guy Marchand comptait plusieurs nominations au César du meilleur second rôle. Il avait obtenu cette récompense une fois, en 1982, pour Garde à vue de Claude Miller. "Ça m'a donné un peu d'autorité dans le métier car on ne me prenait pas au sérieux comme chanteur de variété!", avait-il expliqué.
Pour les téléspectateurs, Guy Marchand était surtout indissociable de son rôle de Nestor Burma, enquêteur au chapeau sombre et à la cravate dénouée. "Nestor Burma, c'est moi, le courage en plus. Je suis beaucoup plus timoré que lui dans la vie", expliquait-il en 2000.
Léo Malet lui-même, qui à la fin de sa vie avait vu la série s'éloigner de plus en plus de l'intrigue de ses romans, restait très attaché à l'acteur et lui avait confié: "Toi, tu es mon Nestor Burma".
"Je suis dans le rouge"
Politiquement, Guy Marchand avait toujours brouillé les pistes. "Je n'ai jamais voté de ma vie", avait-il indiqué aussi au Figaro. "Il n'y a pas de quoi être fier, je sais. La droite me dégoûte avec son égoïsme, ce sont des beaufs, pour moi. Et la gauche m’ennuie. Entre le dégoût et l'ennui, je ne sais que choisir."
Guy Marchand avait déclaré en 2019 qu'il finissait sa vie ruiné, dans cette ville de Cavaillon où il passait ses vieux jours. "Je suis dans le rouge", expliquait-il alors au magazine Voici. Et il était conscient de sa place dans l'histoire du cinéma: "Je ne suis qu'un chanteur", disait-il en 2015 sur France 5. "Quand je vais mourir, il ne restera pas grand-chose, peut-être un fond sonore, comme de la musique d'ascenseur".
Encore très actif ces dernières années malgré son grand âge, Guy Marchand continuait de jouer au cinéma. Il était apparu l'année dernière dans La Plus Belle pour aller danser de Victoria Bedos. Il ne souhaitait pas s'arrêter pour enrayer sa vieillesse: "Je n'ai pas peur de mourir, hein, je peux mourir quand vous voulez! Mais j'ai peur de vieillir..."
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