Chronique du douze du mois de juillet en l'an terrible de la Grande Dissolution.
Le Roy dans sa grande bonté avait écrit une longue missive aux Riens et aux Riennes puis s'était fait transporter dans les airs au moyen de son aéroplane, jusque de l'autre côté de l'océan, afin de porter secours à son grand ami Sir Joe du Bidon. Dans l'empire des Amériques, il se préparait aussi un Tournoi. Sir Joe devait affronter derechef Sir Donald de la Trompe. Les partisans du premier craignaient fort cependant que leur champion ne fût au meilleur de sa forme. Le brave homme semblait atteint de sénilité. La chose mettait en grande joie Sir Donald. Il avait d'ores et déjà mis en pièce son adversaire lors d'une première joute. Sir Joe s'était relevé et s'était époussseté. Il avait invoqué une faiblesse passagère, laquelle ne devait point inquiéter ses partisans. Las ! Plus il s'employait à faire montre de vivacité, plus il s'empêtrait, confondant ainsi lors d'un grand raout le roi de l'Ukranie, Volodymyr de Zele-En-Ski avec son pire ennemi, le terrible Tatar Poutinus. A celles et ceux qui ne laissaient de s'inquiéter, Sir Joe répondait invariablement qu'il lui fallait se ménager.
Notre Cynique Foutriquet le réassura doncques de son soutien indéfectible. Leurs destins étaient liés. Le Roy ne l' avait-il point reçu avec faste au Château avant que de prononcer la Grande Dissolution ? C'était aussi après ces mirifiques agapes que Sir Joe s'était piteusement écroulé aux pieds de Sir Donald.
Cependant que le Roy se distrayait de l'autre côté de l'océan, les Dévots se déchiraient pour savoir qui mènerait la Faction - s'il en restait encore une - à la Chambre Basse. Sa Grande Forfanterie avait refusé de reconnaitre la victoire de la Nouvelle Faction de la Plèbe et avait donné en pâture aux Riens et aux Riennes sa missive. Il y était question de "compromis". "Personne ne l'a emporté" avait déclaré en substance le Roy, sommant par là-même ses partisans de prendre langue avec ceux de la Sénestre qu'il jugeait conformes à le servir, ce qui excluait les maudits Insoumis et Insoumises, ainsi que quelques Jardiniers et Jardinières qui leur ressemblaient fort.
Le duc de la Béarnaise tenta de ramener Notre Infernal Magouilleur dans le droit chemin. "Usez de votre pouvoir, Sire, nommez un Premier Grand Chambellan à votre main" exhorta ce fidèle d'entre les fidèles. Le baron de l'Arche avait décliné l'offre du Roy de le servir. Il prisait fort sa charge très confortable de prince de la Chambre Haute. La chère y était bonne, les émoluments aussi. Le petit duc des Attelles entendait quant à lui régner sur les troupes des Dévots à la Chambre Basse, ce qui fâchait fort le duc du Dard-Malin. "Cela ne règlera pas la difficulté de la ligne de notre Faction" pérora-t-il devant un parterre de gazetiers éreintés. Chacun y tirait en effet à hue et à dia. Le Roy en était fort marri.
Du côté de la Faction de la Plèbe, on était, disait-on, en grands pourparlers, pour désigner celui ou celle qu'on présenterait à Sa Neigeuse Menterie comme Premier Grand Chambellan ou Première Grande Chambellane. Dans les chaumières où l'on prisait pour la Plèbe, on murmurait des neuvaines "ne nous décevez point !". Les Guildes des laborieux et laborieuses exhortaient aussi le Roy à ne se point soustraire aux résultats des urnes. Le toujours fringant baron de la Ville-Peinte, qui avait servi sous le règne du roy Jacquot, y alla aussi de son petit couplet afin de sermonner vertement Notre Dévoyé Monarc.
Julie d'Aiglemont
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