"84 % des Français jugent que le gouvernement ne passera pas l'année. Il m'arrive même de me demander où les 16% restants trouvent la source de leur optimisme." Non sans un peu d'humour, François Bayrou a détaillé ses priorités, mardi 14 janvier, face à une Assemblée nationale bruyante, lors de sa déclaration de politique générale. Désendettement, réforme des retraites, mode de scrutin aux législatives… Un mois après sa nomination, le Premier ministre a dessiné les grands chantiers à venir pendant environ une heure et demie.
Le Premier ministre, François Bayrou, à la tribune de l'Assemblée nationale, à Paris, le 14 janvier 2025
Réforme des retraites, budget 2025, immigration... Ce qu'il faut retenir de la déclaration de politique générale de François Bayrou
François Bayrou a aussi abordé la question de "la démocratie" durant son discours, avec pour objectif "la reconnaissance du pluralisme". "Je souhaite proposer que les partis politiques, comme les syndicats, puissent être reconnus comme des mouvements d'utilité publique. Je souhaite aussi la création de la banque de la démocratie", a-t-il lancé, "pour que le financement des partis politiques et des campagnes ne dépende plus de choix de banque privées". Il avait défendu cette idée en 2017, lors de la campagne présidentielle d'Emmanuel Macron et lors de son bref passage au ministère de la Justice.
Le Premier ministre veut "reprendre l'étude" des cahiers de doléances des "gilets jaunes"
"Nous devrons reprendre l'étude des cahiers de doléances qui ont été présentés par les 'gilets jaunes'", a affirmé le chef du gouvernement, dans une défense des "oubliés" et de "ceux qui ne comptent pas". Ces cahiers avaient été présentés dans chaque territoire lors du grand débat national, pensé par Emmanuel Macron pour répondre à cette crise majeure survenue fin 2018.
L'immigration, une "question de proportions"
"J'ai la conviction profonde que l'immigration est une question de proportions", a déclaré François Bayrou, en prenant l'exemple de Mayotte. "Il est donc de notre devoir de conduire une politique de contrôle, de régulation et de renvoi dans leur pays de ceux dont la présence met en péril, par leur nombre, la cohésion de la nation." Le Premier ministre a dénoncé le fait que "93 % des obligations de quitter le territoire français [OQTF] ne sont pas exécutées" sur les 140 000 prononcées chaque année, imputant cet état de fait au "refus des pays d'origine d'accueillir leurs ressortissants lorsqu'ils sont obligés de quitter notre territoire".
François Bayrou a par ailleurs affirmé que le comité interministériel de contrôle de l'immigration sera réactivé. Ce dispositif avait été installé par un décret de 2005, durant le second mandat de Jacques Chirac, avec pour objectif de fixer "les orientations de la politique gouvernementale en matière de contrôle des flux migratoires". En 2018, un comité interministériel sur l'immigration et l'intégration avait également été mis en place par l'ex-Premier ministre Edouard Philippe. A ce stade, ni Beauvau ni Matignon n'étaient en mesure de fournir des détails.
En matière de transition écologique, l'énergie nucléaire est "essentielle"
"L'écologie, au contraire de ce que certains pensent, ce n'est pas le problème, c'est la solution", a défendu François Bayrou après une heure de discours. Le Premier ministre n'a pas manqué de mettre en avant l'énergie nucléaire, "essentielle", pour produire "de façon décarbonée", "accessible à tous". "La question de l'eau, nous devons la saisir à bras-le-corps à travers une grande conférence nationale déclinée dans les régions", a-t-il ajouté, tout en déclarant vouloir poursuivre le plan vélo lancé par Elisabeth Borne "avec les moyens qui lui sont nécessaires".
"Parcoursup est une question"
"Comment accepter que l'école française, qui était la première du monde, se voit classée au rang qui est le sien aujourd'hui, en mathématiques comme en lecture ?", s'est interrogé François Bayrou. "Les enfants ne sont pas comme les poireaux, ils ne poussent pas à la même vitesse", a-t-il avancé, afin de dénoncer leur orientation précoce dans le système scolaire. "Parcoursup est une question", a-t-il complété, invectivé par un député dans l'hémicycle. Il a par ailleurs évoqué l'idée d'une "année d'articulation entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur", sans en préciser les contours.
Les négociations sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie doivent aboutir "à la fin du trimestre"
François Bayrou et son gouvernement reprennent en main le dossier néo-calédonien, après des mois de tergiversations en raison d'une situation politique chamboulée. "Je souhaite que le processus politique reprenne avec des négociations qui devront aboutir à la fin du trimestre. J'inviterai fin janvier les forces politiques à venir à Paris pour ouvrir ces négociations", a avancé le Premier ministre. C'était le souhait de Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, en visite dans ce territoire en novembre. Manuel Valls, ministre des Outre-mer, sera "particulièrement" chargé de cette question institutionnelle.
Le logement doit faire l'objet d'une politique "repensée et de grande ampleur"
"Nous avons besoin d'une politique de logement repensée et de grande ampleur", a insisté François Bayrou, alors qu'une crise du logement et de l'immobilier est régulièrement évoquée. "Nous pouvons aller plus loin en réduisant encore les délais, alléger les demandes d'autorisation, favoriser la densification, faciliter les changements d'usage… Cela suppose aussi de relancer l'investissement locatif et l'accession à la propriété, et de soutenir les maires bâtisseurs par un système d'encouragement à l'investissement, y compris à l'investissement privé", a-t-il précisé, sans détailler les mesures particulières qui seraient mises en œuvre par la ministre du Logement, Valérie Létard.
Pas de déremboursement des médicaments
François Bayrou a réclamé que les hôpitaux passent d'une "logique budgétaire annuelle à une logique de financement pluriannuel". Il a confirmé que la santé mentale sera la "grande cause nationale" cette année, comme l'avait décidé son prédécesseur Michel Barnier.
Le Premier ministre a également promis que "la mesure de déremboursement de certains médicaments et des consultations ne sera pas reprise" et réitéré l'engagement de remboursement intégral des fauteuils roulants en 2025. Enfin, François Bayrou a confirmé la création du haut-commissariat à l'Enfance, annoncé par Emmanuel Macron fin décembre.
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