dimanche 24 mai 2015

LES GRAFFITIS DU CHATEAU DUBUC






"Sous l’escalier, à l’abri de la pluie et des canonnades ennemies, les gardes nationaux de Trinité s’apprêtent à repousser les Britanniques, entre le 5 et le 6 février 1794. A l’aide d’une pointe, ils gravent dans l’enduit du mur le type des navires amarrés devant l’îlet Trésor et l'îlet Monsieur, tandis que le gros des troupes d’invasion débarque à la rivière du Galion. Pris à revers, les défenseurs se replient vers la Redoute de Beauséjour puis sur le Vert-Pré en laissant ce témoignage de leurs observations".
 
 
Carte de localisation du « Château Dubuc »

Les vestiges de l'habitation La Caravelle se dressent au fond de la baie du Trésor, anciennement Cul-de-sac de La Tartane, à l'extrémité de la presqu'île qui s'avance vers l'Est depuis la côte au vent de la Martinique. Balthazard Dubuc de Bellefond y établit une sucrerie en 1725 et commença à y bâtir une belle demeure en pierre vers 1740. En 1771, la dernière propriétaire résidant sur les lieux, veuve de Louisy Dubuc du Gallion, s'embarquait pour la Guadeloupe, laissant son logis à l'abandon.
Au moment du dégagement des ruines, en 1972, une cavité de 1,12 m de large, 2,40 m de profondeur et 1,80 m de hauteur et située dans un coin de mur, servait de parc à cochon : c'était le dessous d'un escalier tournant en pierre conduisant à un étage.

Sitôt dégagé, le réduit révèle, sur l'enduit en chaux et sable madréporiques de sa paroi nord, une série de graffitis représentant des embarcations de haute mer. La presse est saisie de la chose et l'on peut lire dans un article d'août 1972 du journal France Antilles :
"lors d'une première reconnaissance, au début juillet, M. Mattioni a découvert dans un cachot servant de porcherie, des graffitis datant de plus de deux siècles. Dans ce réduit de moins de 4 m2 attenant à la maison, un prisonnier, sans doute esclave de Dubuc, a matérialisé son rêve d'évasion en dessinant sur le crépi des murs des bateaux parmi lesquels deux galions et une tartane. L'authenticité de ces dessins ne fait aucun doute ; les détails apportés par l'auteur de ces dessins sont trop précis."
  • 1  La légende de cette photographie dit : "Un galion qui symbolisait la liberté dans l'esprit du pris (...)
  • 2  D'après Thierry Dorival, ingénieur de recherche à la DRAC, ces moulages n'ont jamais été faits.

Ces explications de 1972 accompagnaient dans le journal une photographie du graffiti central1 que M. Mattioni a également placée dans le micro-musée du site en 1976. Elle est d'autant plus précieuse que l'enduit dans lequel les trois navires sont gravés a connu depuis des dommages importants et que les moulages qu'il dit avoir fait prendre ont disparu2.
 
En 1976, M. Mattioni rédigeait un petit guide de l'habitation qui consacrait son surnom de "Château Dubuc", ainsi que la légende de l'esclave graveur :

"Hypothèses, bien sûr, et pourtant certains faits mis à jour (sic) par les fouilles sont là, indiscutables. Non sans oublier les graffitis de navires sur les parois d'un "cachot". Ils sont la silhouette classique des embarcations à voile du XVIIIè siècle, avec leur château de poupe, les sabords et les grands mâts. Il les a vus ces bateaux, celui qui a fixé les contours, avec la pointe d'un clou, peut-être, et il est émouvant de penser à cet esclave, à cet homme enfermé, qui a peut-être confondu en un seul symbole la mer, le grand large et aussi la liberté et son désir de la posséder3."
Plus loin, en décrivant le micro-musée, il signalait :
"de part et d'autre de la porte d'entrée, le moulage des graffitis des bateaux du cachot placé sous l'escalier de l'habitation principale.4"
Pourtant, si l'on doit rendre à M. Mattioni le mérite d'avoir reconnu et préservé un vestige archéologique particulièrement rare, il serait temps de revenir sur ses interprétations, à la lumière des investigations archéologiques que nous avons effectuées sur le site et de la connaissance de l'histoire de la presqu'île à laquelle nous sommes parvenus aujourd'hui.

 


8La première cause des erreurs d'interprétation de M. Mattioni vient de ce que le dégagement complet des ruines n'a été achevé qu'en 1974 et qu'une étude des vestiges, avec un relevé architectural sommaire, n'a été entreprise qu'en 19865. L'étude d'archéologie menée en 1989 par Jean-François Barret s'est quant à elle cantonnée aux vestiges industriels.
M. Mattioni - comme C. Chanteur - croyait que l'escalier de pierre était extérieur au logis, ce qui rendait vraisemblable l'internement d'un esclave rebelle, voire dangereux :

"On accédait à l'étage par un escalier extérieur en pierre au-dessous duquel on avait aménagé un cachot.6" "L'escalier qui accède au second étage est extérieur.7"
Plan de localisation des graffitis

Agrandir Original (jpeg,

10En réalité, le dégagement des fondations et la restauration des murs ont fait apparaître un plan classique de grand'case du XVIIIe siècle colonial français, avec un escalier intégré au corps du logis, symétrique sur la façade d'un "cabinet" et dont le dessous faisait fonction de réserve8: comment croire qu'on ait enfermé un individu dangereux à l'intérieur de la maison ?
11L'analyse structurale des graffitis contribue, elle aussi, à invalider l'hypothèse de M. Mattioni.
12La restauration du mur et le nettoyage de l'enduit, en 2005-2006, ont permis de faire apparaître plus de gravures que n'en avait dénombré M. Mattioni. Nous en avons compté une dizaine, sur deux niveaux et en trois groupes, mais il en existait d'autres là où l'enduit s'est complètement désagrégé. Une partie des graffitis a été réalisée par un homme accroupi, une autre par un ou deux hommes debout. Seules celles du centre, en bas et en haut, les plus complètes et les mieux conservées, ont été relevées et étudiées durant les mois de mars à mai 2006.
13La conclusion de ce travail est que la répartition des gravures sur les parois, ainsi que l'inachèvement et la reprise de certaines, prouvent qu'il n'y a pas eu un mais plusieurs graveurs. L'hypothèse d'une exécution par la même main en plusieurs temps n'a pas été écartée sans examen, mais la différence de largeur et de profil des incisions, l'utilisation d'un outil tranchant et d'un clou - sans parler encore des sujets représentés qui s'intègrent à la mise en scène d'un événement bref et unique - la font repousser. Il y a bien eu plusieurs graveurs dans un même temps d'exécution, mais aurait-on enfermé plusieurs rebelles ensemble à l'intérieur de la maison ? A aucun moment ensuite, la documentation ne permet d'envisager que le réduit ait pu servir de prison civile ou militaire.
14Les dimensions du réduit voûté et la présence, au fond, d'une lucarne pour l'éclairage permettent seulement d'envisager qu'il ait été aménagé pour servir de chambre à un domestique de nuit, sachant que les occupants comptaient une dame âgée, la veuve Dubuc du Gallion mère, (+ 1769) et un infirme, Louisy Dubuc du Gallion (+ 1770). Un esclave domestique - valet de nuit ou servante - ne peut être tenu pour l'auteur des graffitis, pour des raison de temps disponible d'abord, pour des raisons de capacités techniques ensuite et par incompatibilité chronologique enfin.

III. Des graffitis marins

15Les graffitis sont ordinairement classés suivant leur nature, leur fonction, les graveurs ou scripteurs et les thèmes abordés.
16Obtenus par incision de l'enduit du mur à l'aide d'un instrument métallique pointu et tranchant (pour les traits) et d'un clou (pour les points), les graffitis de la Caravelle sont des dessins, sans date ni inscription quelconque. Les formes représentées excluent toute fonction de protection ou de reconnaissance religieuses (ex-voto), tout projet de fabrication ou de construction, mais font penser à la trace d'un passage ou au témoignage d'un événement. Il s'agira d'examiner si les scripteurs ont pu être des prisonniers, des gardes ou des membres d'un corps de métier, l'éventualité de pèlerins étant à écarter sans appel.
17Quant au thème, il est unique : il s'agit d'un ensemble de navires, les uns liés (groupe central), les autres isolés ou par petits groupes sans attache à droite, à gauche et au-dessus. Cette unité du thème donne encore plus de valeur à cet ensemble glyptographique, H. Cahingt rappelant en effet :
  • 9  CAHINGT, Henri : "Les graffiti" dieppois", 1957, p. 54.
"… les graffiti de navires doivent être considérés comme des sources sérieuses de documentation. Ils ont le net avantage sur les œuvres des artistes d'être souvent, plus que ces dernières, conformes au modèle présenté. L'artiste est facilement tenté de ne voir le navire que comme un élément, sujet à interprétation artistique… Il n'y a, le plus souvent, que le peintre, dit de la marine, qui ait ce respect. L'auteur du graffito est généralement un simple qui n'a pas le don d'invention et qui exprime, grossièrement peut-être, mais avec fidélité, ce qu'il a couramment sous les yeux. Et si le graffito isolé peut être considéré comme une preuve insuffisante, un ensemble de graffiti portant régulièrement la même indication, peut être considéré comme une preuve certaine de la réalité de tel ou tel caractère9".

Photographie des graffitis
Photographie des graffitis
  • 10  Identifiable sur la photographie de 1972, elle n'est plus visible aujourd'hui.
18La quille10 et le gouvernail du navire le plus important sont dessinés avec exactitude, ce qui suppose qu'ils sont apparus aux observateurs à marée descendante : aucun terrien, libre ou esclave, n'est capable d'y faire attention dans sa vie ordinaire, encore moins d'imaginer qu'ils existent. La voilure et les gréements sont peu détaillés mais parfaitement justes en formes, en positions et en proportions, mais ce qui est particulièrement technique est le dessin de l'antenne de charge avec le hauban supportant un filet pour permettre l'embarquement ou le débarquement des marchandises lourdes et volumineuses, ici des caisses. Les sabords et les ponts sont bien dessinés, mais cela n'est pas vraiment significatif. Ce qui frappe, c'est la justesse du rapport de taille entre les six bâtiments complets et celle de leurs proportions respectives. En outre, on reconnaît sans risque d'erreur une bouée d'amarrage et des câbles qui la relient à deux navires, eux-mêmes attachés à deux plus petits, soit un total de quatre bâtiments au mouillage.
19Tous les navires amarrés à la bouée et entre eux (quatre) sont représentés sans voile, en fait il n'y a qu'un gros navire, en haut à droite, qui semble croiser au large sous voiles.
20Le rendu des graffitis est également significatif : il comporte des reprises (ou "repentirs") dues à la maladresse des graveurs, à la relative grossièreté du support et à leur outillage, mais aucune erreur de tracé.

IV. Hypothèses sur les scripteurs

21La mise en relation du sujet des gravures avec le contexte culturel rend encore plus improbable leur exécution par un esclave, surtout à l'époque où la grand'case était habitée par ses maîtres (1740-1771).
  • 11 CAHINGT, Henri : "Les graffiti" dieppois", 1957, p. 69.
22On remarquera d'abord que les graffitis ne représentent que des navires et une bouée : de tels sujets ne sont en rien révélateurs de la présence d'un esclave ou d'un prisonnier enfermé. Tous les graffitis de cachots, connus par les études et publications de R. Villeneuve prouvent, qu'en cellule, l'homme ordinaire compte le temps (si le comput lui est connu), grave ses initiales (si l'écriture lui est connue) ou des signes ésotériques de protection ou de libération, mais surtout se dessine lui même, son visage et ses organes les plus frustrés par la détention. Il laisse parfois trace des éléments de son métier, mais jamais du souvenir de sa maison ou de la végétation extérieure. En outre, dans les civilisations traditionnelles qui ignorent l'hédonisme de notre société marchande, la mer ne fait même pas rêver ceux qui y travaillent11. Aux autres, elle n'inspire rien ou alors seulement de la crainte. En tout cas, dans l'Afrique traditionnelle comme dans l'Europe préindustrielle, la mer et les navires sont tout sauf des symboles de liberté.
  • 12 Sur les graffiti de La Rochelle (fin XVIIIè-début XIXè), comparables à ceux de la Martinique et exé (...)
23Au contraire, les graffitis de navires européens répertoriés pour les XVIIe et XVIIIe siècles sont presque toujours le fait d'hommes de la mer ou ayant fréquenté la mer, installés librement à terre, comme à Dieppe (XVIIe s.), ou prisonniers comme à Peterborough (Angleterre, 1er Empire), au Maroc (1er Empire) ou à La Rochelle (XVIIIe s.)12.
24Des graffitis similaires, représentant des navires existent sur l'îlet Chancel (anciennement îlet Monsieur puis Ramville) et sur les parois du "Château Perinnelle", à Saint-Pierre. Sur l'îlet, ils se trouvent sur la paroi d'un petit réduit à proximité des ruines de la poterie qui alimentait "La Caravelle". En fort mauvais état, ils attendent d'être photographiés, relevés et datés. Ceux de "Perinnelle", aujourd'hui invisibles, ont clairement été rattachés par les archéologues aux troupes de Marine qui casernèrent dans l'ancienne habitation des jésuites en 1762 puis en 1794-1802 : ils représentent des vaisseaux de haut bord à trois mâts du XVIIIe siècle. Ceux de "La Caravelle" pourraient dater, au plus tôt, de 1793, moment où l'habitation a été placée sous séquestre par les révolutionnaires puis occupée par les troupes, donc bien après son abandon par les propriétaires.

Relevé partiel par Marie-France Barouh, 2006
Relevé partiel par Marie-France Barouh, 2006
25Pour avoir pu représenter correctement les gréements et les proportions des parties des navires, les auteurs des graffitis étaient incontestablement, sinon des hommes de mer, du moins des hommes habitués à observer la mer et les embarcations, certainement pas des esclaves africains ayant voyagé à fond de cale et qui, par leurs cultures d'origine, ignoraient absolument tout des embarcations qui les transportaient. Par ailleurs, on voit mal comment des prisonniers graveurs auraient pu dessiner "sur le sujet", car, du fait de la disposition des lieux par rapport à la baie, ils ne pouvaient voir ni la mer ni le moindre navire du fond de leur "cachot" et devaient nécessairement se déplacer dehors pour observer.
26Les conclusions de l'étude des formes représentées sur le mur du dessous d'escalier et ce que l'on sait de l'abandon et de la ruine précoce de la grand'case (1771) conduisent à écarter sans appel toutes autres mains que celles d'hommes libres, familiers de la mer. Dans un premier temps, il faut donc penser que l'on a affaire au passe-temps de matelots ou de soldats de la marine qui se seraient réfugiés là pour se mettre à l'abri et certainement pas d'esclaves au cachot.

V. L'identification des navires

  • 13  Un dernier galion espagnol a fait relâche à Trinité en 1717, mais ce gros navire n'a jamais pénétr (...)
27Les galions espagnols n'ont disparu qu'à la fin du XVIIIe siècle, mais ce terme générique n'a jamais désigné un type précis de navire et le mot n'existe à la Martinique qu'en rapport avec la baie dans laquelle les Espagnols venaient relâcher avant l'arrivée des Français13. Il en va de même de la tartane et de la caravelle. En réalité, les graffitis ne représentent ni galion ni tartane, comme le croyait M. Mattioni, mais des bâtiments de guerre que la précision de leur rendu permet d'identifier avec certitude.

Identification des navires
Identification des navires
28Quatre bâtiments complets sont au centre, deux autres sont placés respectivement à gauche et au-dessus, un dernier ne subsiste qu'à moitié ; c'est à ces sept images que nous avons limité le travail d'identification.
29Recherchant d'abord des navires français, nous avons essayé de reconnaître, dans le groupe central, une goélette franche pour le plus important et deux sloops pour les plus petits, le second, moins lisible, demeurant inconnu.
30L'hypothèse des sloops a été confirmée, mais celle de la goélette a été rapidement écartée à cause des deux mâts de charge et de la forme du gouvernail.
31En poursuivant nos investigations, nous nous sommes étonnés du rassemblement autour d'une bouée de bâtiments aussi divers et nous avons fini par reconnaître dans le navire inconnu une canonnière et dans celui dessiné au-dessus une frégate. Dans le groupe central, la canonnière est vue de haut, par le travers arrière, alors que sur un graffiti placé à l'extrême droite elle se présente de côté, avec le même gréement caractéristique. Le château arrière de la frégate est inachevé ou détruit, mais le gréement des trois mâts ne laisse aucun doute.
32La reconnaissance de trois embarcations de guerre donnait dès lors une signification au rassemblement des navires et nous conduisait à rechercher dans l'histoire de la presqu'île les épisodes de relâches et de stationnement d'une flotte française ou ennemie.

VI. Histoire des invasions de la presqu'île

33Bien que depuis Blénac (1677-1693) les administrateurs de l'île n'aient cessé de venter le port de La Trinité et de pourvoir à sa défense, aucune flotte de guerre française n'y a jamais stationné. En revanche, c'est à quatre reprises qu'une escadre britannique s'y est présentée, soit pour effectuer un débarquement en 1759, 1762 et 1809, soit pour le simuler, en 1794.
  • 14  Voir en particulier PARES, Richard, War and Trade in the West Indies (1739-1763), London, Franck C (...)
  • 15 A View of the Port of La Trinité and all the north side of Martinique, vers 1765. National Maritim (...)
  • 16  RUSSETT, Allan, Dominic Serres R. A. : 1719-1793. War Artist to the Navy, Londres, Antique Collect (...)
34Les opérations navales de la guerre de Sept ans (1756-1763) nous sont mieux connues par la documentation britannique que par les sources ou études françaises14. Nous avons en particulier la chance de disposer d'une vue du port de la Trinité et du débarquement du 11 février 1762, peinte à l'huile par le Français Dominique Serres (1719-1793)15. Serres accompagna la flotte britannique en Nouvelle-Écosse et aux Antilles jusqu'à la fin de la guerre, s'installa à Londres en 1765 et devint peintre officiel de la marine16..Dessinées sur le sujet, sa toile et les gravures qui en ont été tirées permettent de reconnaître des vaisseaux de ligne, des frégates, des goélettes et des sloops mais pas de canonnière. Par ailleurs, on sait que ce débarquement n'a pas affecté la presqu'île de La Caravelle. Il est donc peu probable que les graffitis datent de cette époque.

Carte des opérations de 1794. La carte des opérations britanniques à partir d’Alexandre Moreau de Jones
Carte des opérations de 1794. La carte des opérations britanniques à partir d’Alexandre Moreau de Jones
35Serres n'a pas participé aux guerres de la Révolution et de l'Empire et personne, pas même le Révérend Cooper Wylliams, aumônier de la flotte britannique, ne nous a laissé d'images de l'attaque sur Trinité en 1794. Cependant, les représentations précises qu'il donne de l'attaque du Marin et de Fort de France permettent de comparer les navires de cette invasion avec les graffitis. En outre, la documentation écrite, française et anglaise, est particulièrement riche à propos de cet épisode et nous y avons trouvé la clé du mystère des graffitis.
36Les sources anglaises nous donnent le cadre de l'invasion et les détails de la flotte :
  • 17  DUFFY, M., Soldiers, sugar and sea power, 1987. p. 69 d'après Willyams, An account, 1796,p. 15‑16 (...)
"La flotte approcha de la Martinique à la fin de l'après midi du 4 (février), la division de Trinité composée de quatre vaisseaux (warships) sousles ordres de Thompson, avec près de 2.000 hommes de la 2de Brigade de Dundas, en même temps que le 2d Bataillon de Grenadiers et le 1er d'Infanterie légère, se séparèrent de l'ensemble du corps et firent route vers l'est de l'île. Après une autre nuit en mer, tandis que les troupes de débarquement de Trinité se mettaient en position, les attaquants se positionnèrent face à leur cible le 5 février17."
37Pelauque atteste que, du côté français, ces manœuvres ont été clairement perçues et que la présence à l'entrée de la baie du Galion de cinq bâtiments de guerre a bien été remarquée :
  • 18  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 95.
"D'après cette connaissance, ils se montrèrent le 4 février, et signalèrent leurs projets. ‑ Dans la matinée du 5, ils parurent encore élevés au plus à la distance de 4 lieues au‑dessus des côtes de la Tartanne, et après avoir louvoyé quelque tems dans cette partie, cinq bâtiments de guerre qui, avec quelques transports et quelques bateaux armés, composaient cette division, se déployèrent et mirent le Cap, les uns sur la Tartanne, d'autres sur la Caravelle, d'autres enfin sur le Robert18".
38Une lettre de Bellegarde à Rochambeau, rédigée par Pelauque, confirme le fait :
  • 19  DANEY, S., Documents, 1858, p. 172-173.
  • 20  DANEY, S., Histoire de la Martinique, 1963, 3, p. 229.
39"Trinité 18, 5me. mois, l'an 2me. (6 février) de la République une et indivisible
Citoyen Général,
J'ai passé la nuit et toute la matinée en observation. Voici l'état des choses : un vaisseau, deux frégates et trois transports avec trois bâtiments légers sont mouillés dans la baie du Gallion très près de terre et cinq gros bâtiments dont trois paraissent du 1er rang croisent dans les parages de la Tartane…19".
S. Daney explique que "le dessein de l'ennemi, en se partageant ainsi sur trois points, était de forcer aussi les Français à diviser leurs forces et de rendre, de cette manière, son débarquement plus facile20".
Mais avant de pouvoir débarquer, et même de pouvoir mouiller en sûreté, les Britanniques devaient réduire au silence les batteries côtières.
  • 21  Batterie de la Pointe de la Batterie ou batterie de la Pointe à Chaux.
  • 22  DUFFY, M., Soldiers, sugar and sea power, 1987. p. 74.
40"Dundas brisa de façon spectaculaire le dos de l'ensemble de la défense intérieure de l'île. Son débarquement à la baie du Galion le 5 se distingua par la conduite impétueuse du capitaine Robert Faulkner du sloop Zebra qui devait laisser une marque indélébile sur cette expédition. Faulkner conduisit l'escadre vers la baie du Galion et plaça son navire à proximité de l'une des batteries côtières21, chassant ses occupants par une bordée de canon. Les vaisseaux suivants s'enfilèrent dans le passage et Dundas débarqua sans opposition ses troupes dans l'obscurité. Le jour suivant, il fit mouvement vers Trinité22."
41Cette partie des évènements nous donne la certitude qu'une partie importante de la flotte d'invasion a stationné en face de l'habitation La Caravelle, à partir du 5 février 1794, qu'au moins un sloop de guerre a attaqué les batteries du nord de la baie du Galion et surtout que tous ces navires ont pu être observés, depuis la presqu'île, par des graveurs dont il reste à préciser l'identité grâce à une source française.
  • 23  Tous les détails biographiques proviennent du mémoire édité par Pelauque en 1795
42Dès 1793, Rochambeau avait confié la défense de la côte au vent (ou Capesterre) au lieutenant-colonel Bellegarde et à ses bataillons de Chasseurs de couleur. Grâce à son secrétaire, nous avons le récit détaillé des opérations menées par Bellegarde. Ancien avocat au conseil supérieur du Cap français et favorable aux idées nouvelles, Jean Marie Pelauque rencontre Rochambeau, devient son secrétaire le 14 janvier 1793 et s'embarque à sa suite pour la Martinique. Peu de temps après, il fait la connaissance de Bellegarde, quitte son maître et s'attache, toujours comme secrétaire, au colonel qui ne savait pas écrire.23. Grâce à lui nous connaissons les détails de la défense française de la Caravelle à peine évoquée par Rochambeau lui-même, S. Daney ou H. de Poyen.

VII. Les gardes nationaux de La Trinité

  • 24  DANEY, S., Histoire, 3, p. 229. POYEN, H. de, Les guerres, 1896, p. 50. Les lieutenants de compagn (...)
43En février 1794, lors du débarquement britannique dans le quartier de La Trinité, "il y avait les trois compagnies (en réalité bataillons) d'hommes de couleur avec officiers blancs, commandés par Bellegarde, Edouard Meunier et l'Enclume24".
44Par une lettre reçue trop tard, Rochambeau laissait toute latitude à Bellegarde pour organiser la défense et plaçait sous ses ordres une compagnie de L'Enclume et la garde nationale de La Trinité :
45"du Lamentin 18, 5me mois l'an 2me (6 février)
  • 25  Fort Rochambeau, le nouveau nom donné au fort de La Trinité en 1793. DANEY, S., Histoire de la Mar (...)
  • 26  DANEY, S., Documents, (1857) 1960, p. 172.
46"J'ai appris à Saint-Pierre, à huit heures du soir, que le signal fait à République-Ville à quatre heures était que la Trinité demandait du secours. (…) Je vous laisse l'ordre par cette lettre de disposer de la garde nationale du Rochambeau25 et de Ste-Marie pour vous renforcer et veiller les parties du Robert, du François et de la Trinité. (…).26"
47Une lettre de Bellegarde à Rochambeau, rédigée par Pelauque, nous permet de connaître le mouvement de l'ennemi qui s'attaquait aux batteries du sud de la presqu'île pour libérer l'entrée de la baie du Galion :
48" depuis la Trinité 18, 5me mois, l'an 2me (6 février 1794)
  • 27  DANEY, S., Documents, (1857) 1960, p. 173-174.
49(…) Depuis hier, on tente du côté de Spoutourne un débarquement qui a toujours été empêché par la compagnie de mon frère et par celle de feu La Grenade. (…)27"
50Dans la journée du 4 février, Bellegarde avait déjà décidé de poster des troupes à l'extrémité méridionale de la presqu'île, mais une initiative du comité révolutionnaire le détermine à les déployer jusqu'à l'habitation Dubuc :
51"Bellegarde (…), reçut le 5 un arrêté des officiers municipaux de la Trinité, par lequel il étoit requis d'envoyer des forces suffisantes à la Caravelle et dans les environs pour s'opposer au débarquement".
  • 28  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 96.
52"D'après cet ordre, et d'après sa propre opinion qui le portoit à croire que ces points du vent de l'île, avoient besoin d'être soigneusement gardés, il envoya la première compagnie des chasseurs commandée par Hyacinthe, son frère à l'habitation la Spoutourne. ‑ La compagnie de Lagrénade commandée par Chamand, fut établie sur les hauteurs de la Tartane pour surveiller cette côte. ‑ Reinaud commandant de la garde nationale de la Trinité, se rendit à l'habitation de la Caravelle…28"
53Une note de Pelauque nous permet d'être certains de la présence de cette unité dans les murs de ce que l'on appelle aujourd'hui le "Château Dubuc":
  • 29  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 99 note 43.
54"Le soin de maintenir l'ordre dans les environs de la Trinité et dans le bourg auroit regardé lagarde nationale, mais elle étoit avec le commandant Reinaud à la Caravelle, pour y empêcher la descente des anglais29".
55Alors que les Chasseurs étaient presque tous des esclaves sortis des habitations, attirés par la promesse qu'avait faite Rochambeau de leur accorder la liberté au terme de leur service, les gardes nationaux étaient des gens des bourgs et des villes, tous libres et majoritairement blancs, pas toujours créoles, ou alors "petits blancs" gagnés aux idées révolutionnaires. Ces hommes du port de La Trinité, qui n'étaient sans doute pas des marins, sont envoyés sur l'avant poste le plus extrême de la presqu'île, sur l'habitation la Caravelle. Pendant qu'ils progressent à pied, observant la baie, Pelauque raconte :
56"Deux frégates et un vaisseau, pilotés apparemment par un pilote bien pratique de la baye du Gallion, y étaient entrés le 5 vers les quatre heures après midi avec une inconcevable facilité. - Ils avoient été suivis de deux transports et de deux bateaux armés, de manière qu'en cet état de choses, aux craintes que le débarquement s'effectuait à la Tartanne ou à la Caravelle où les ennemis se tenoient toujours en panne et assez près de terre, se joignaient les craintes non moins fondées de voir ce débarquement s'entreprendre à l'ouest de la baye du Gallion, vers la rivière de ce nom, ou du côté du Robert." (…)
  • 30  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 100. En fait les compagnies ont été envoyées le jour même ( (...)
57" Ces dispositions ainsi faites et envoyées à l'instant même au général, Bellegarde se rendit du côté de la Caravelle et de la Tartane où les bâtimens faisoient toujours le simulacre d'undébarquement ‑ Par cette raison il y laissa les trois compagnies qu'il avoit envoyé la veille, avec ordre de ne pas se déplacer sans nouvel avis30." (…)
  • 31  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 100.
58Au "Château Dubuc", les gardes nationaux cherchent un endroit pour échapper à la pluie. Pelauque precise en effet : "La soirée du 5 avoit été très pluvieuse. ‑ Cette pluie se renouvella souvent pendant la nuit, et la rendit obscure31". On sait que la toiture de la grand'case avait déjà disparu à cette date et qu'il n'y avait pas d'autre refuge que la cuisine et le dessous d'escalier : c'est dans ce dernier endroit que deux ou trois gardes se sont installés. Après avoir observé la flotte ennemie depuis le 4, ils allaient y rester de la fin de la journée du 5 au milieu de la nuit comme le raconte Pelauque :
  • 32  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 108.
  • 33  Lieu dit au sud du bourg de la Trinité, au bord de la rivière Epinette, où se retirèrent des Holla (...)
59"La nuit s'avançoit. ‑ Bellegarde, n'osant plus espérer des secours du second bataillon des chasseurs, se décida à rappeler Hyacinthe son frère, avec la compagnie qu'il avoit à Spoutoume. ‑ La garde nationale commandée par Reinaud, et la compagnie La Grenade reçurent le même ordre32(…) des chasseurs se hasarderent, avec success, à traverser le Petit Brésil33, pour porter à la redoute l'ordre de faire retraite". (…)
60"La compagnie de la Grenade, et celle des gardes nationales de la Trinité, qui étoient bien plus éloignées que celle d'Hyacinthe, ne pouvant pas nous joindre assez promptement, l'ennemi leur coupa la communication ‑ Il leur tua quelques hommes qui vouloient forcer le passage, ce qui les mit dans l'obligation de se retirer à la redoute (aujourd'hui Pointe La Martinière ou de la Batterie).
  • 34  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 111.
61"Ces deux compagnies et celle de Ponthonier qui commandoit alors ce poste, profitèrent de l'obscurité de la nuit, pour passer dans les pièces de Canes à sucre, entre les habitations Laurencin (aujourd'hui Desmarinières) et du Grand Fonds (aujourd'hui encore Grand Fond). ‑ De cette manière, il leur fut possible, mais avec beaucoup de peine, d'aller au fort de la République par le chemin du Verpré34".
62Ainsi s'achevait la nuit de la Caravelle pour les deux ou trois bons observateurs de la Garde nationale de La Trinité qui avaient eu le temps de laisser un souvenir des évènements dramatiques du 4 au 5 février 1794.

VIII. L'identification des graffitis

63Grâce aux sources françaises, il est possible d'affirmer que les navires représentés correspondent aux bâtiments britanniques qui ont stationné devant Tartane, devant la baie du Trésor et devant la baie du Gallion, une partie d'entre eux ancrés à quelques encablures de l'îlet Trésor pour simuler un débarquement et émietter la défense française. La confrontation entre les sources anglaises donnant la composition de la flotte avec les navires représentés a même permis de retrouver le nom de certains.
64Sur dix dessins, lisibles en 1972 ou aujourd'hui, nous avons reconnu :
  • Bouée d'amarrage (1),
  • Brick marchand, correspondant à un transport armé en flute (1),
  • Sloop de guerre (5 ou 6)
  • Canonnière (1 ou 2)
  • Frégate (1)
65D'après les archives britanniques, la partie de la flotte d'invasion postée à l'Est était composée de :
  • Vaisseau de second rang : Boyne (98 canons)
  • Vaisseaux de troisième rang : Vengeance (74 canons), Irresistible (74canons)
  • Vaisseaux de quatrième rang: Veteran (64 canons)
  • Frégates (8) dont La Blanche (32 canons)
  • Sloops de 16 canons : Zebra, Seaflower, Rattlesnake, Nautilus
  • Galiote à bombes : Vesuvius
  • Transports de 44 canons armés "en flute" : 3 dont 1 ravitailleur (storeship) : Dromedary
  • Canonnières : Spiteful, Tickler, Tiezer, Tormentor, Venom, Vexor
    • 35  DUFFY, M., Soldiers, 1987, p. 70-71.
    Navire hôpital (1)35.
66Pour des raisons nautiques, aucun vaisseau de haut-bord (premier à quatrième rang) n'a pu stationner à proximité de la côte, ni même venir s'ancrer près de l'îlet du Trésor à l'entrée de la Baie du même nom en contrebas du "Château Dubuc". Les gardes nationaux n'ont pu les observer que de loin puisqu'ils ont pénétré dans la baie du Galion à la nuit tombante et sous la pluie. Il en va de même pour le navire hôpital. En revanche, à l'exception de la galiote à bombes à laquelle aucun graffiti ne correspond, tous les autres bâtiments ont été représentés sur la paroi du dessous d'escalier :
  • 1 frégate avec ses trois mâts (n° 5) sans doute La Blanche, déjà venue en 1793 pour débarquer Gimat, chef des émigrés. Le dessin rappelle les frégates H.M.S. Diana et Unicorn, construites en 1794.
  • 1 navire à deux mâts en plein déchargement de caisses d'armes et de munitions (n° 2). La forme de sa coque et la baume arrière du grand mât font d'abord songer aux brigantins ou bricks anglais de la fin des années 1750, mais la forme de la poupe et l'emplacement du mât avant ne correspondent pas. En revanche, la liste anglaise signale les transports comme "armés en flûte", ce qui oriente l'identification. La flûte est à l'origine une construction hollandaise destinée au commerce qui évolue du XVIIe au XVIIIe siècle. Sa coque affecte la forme d'une caravelle avec une proue basse et une poupe arrondie vers le bas. En coupe, le pont apparaît plus étroit que la coque en dessous. A la fin du XVIIIe siècle, les navires marchands britanniques empruntent ces formes qui augmentent la capacité de charge, mais conservent le gréement du brick qui permet plus de vitesse et de meilleures allures. Ce type de bâtiment, dont le modèle est le brick Unicorn (1790), prend le nom de "brick marchand" au cours du XIXe siècle. Le dessin représente presque certainement le Dromedary, seul transport réservé aux marchandises dans la flotte de 1794.
  • 5 ou 6 sloops dont certains chargés de caisses d'armes. Appelé "naval sloop" ou "sloop of war" par l'utilisation que les Britanniques en font au XVIIIe siècle, le sloop ou "bateau bermudien" est une création originale de l'Amérique maritime originellement conçu pour se livrer à la contrebande. Il comporte un mât droit, une voile aurique et un foc, file 11 nœuds, porte 75 hommes et plus de 14 canons. Le Zebra destructeur des batteries figure sans doute parmi les graffitis, mais le chiffre de 5 ou 6 sloops est supérieur à celui de la liste des archives anglaises (4).
  • 1 ou 2 canonnières, car le dessin coupé en deux de l'extrémité droite pourrait aussi bien représenter un sloop. Avec son gréement caractéristique, la canonnière (gunboat) du XVIIIe siècle est armée d'un canon de 24 livres devant le mât et de deux caronades de 12. Après l'expédition de 1794, les Britanniques innovent en équipant le canon du H.M.S. Gunboat William (1795) d'une sorte de tourelle pivotante.
  • La correspondance entre la liste britannique et les graffitis est donc parfaite au niveau des types de navire ; la discordance en nombre s'explique par la présence ensemble de plusieurs scripteurs.
  • Une chose est sûre : sans les graffitis du dessous d'escalier, personne aujourd'hui n'aurait pu imaginer que la presqu'île avait connu un important épisode militaire et naval. Ignorés ou considérés comme des curiosités par les visiteurs, ces documents archéologiques seront désormais protégés, mis en valeur et expliqués grâce à la diligence du Parc naturel régional de la Martinique.

Bibliographie

Sur les graffitis
- Auger-Sergent, Anne-Sophie, "Les graffitis à sujets maritimes de la Normandie", dans Cahiers Havrais de Recherche Historique, n° 55, 1996, p. 53-70.
- Cahingt, Henri, "Les graffiti" dieppois", dans Le navire et l'économie maritime, 1er Colloque international d'histoire maritime (1956), Paris, SEVPEN, 1957, p. 53-70.
- Cahingt, Henri, Les murs qui parlent, Dieppe, 1990.
- Bucherie, Luc, Enquêtes sur les graffiti de marins anglais, prisonniers de guerre en France au XVIIIe siècle, Académie des sciences, arts et belles lettres de Touraine, Mémoires, 2002.
- Bucherie, Luc, "Panorama des graffiti maritimes des côtes du Ponant", Actes du VIIe colloque international de glyptographie de Rochefort-sur-Mer, Centre international de Recherches Glyptographiques, Tome II, 3-8 juillet 1990.
- Graffiti marins des églises du Val de Saire. Réville, Quettehou, Morsalines, Musée Maritime de Tahitou, 2002.
- Le Roc’h Morgere, Louis, Navires mémoire de la mer, Paris, Rempart patrimoine vivant, 1990.
- Serander, Arnaud, "Les graffiti marins de l'église d'Hénouville", Hénouville Contact, n° 29, janvier 2000, p. 6.
- Site internet créé par Eric Leconte 2003 : http://graffitimarins.free.fr
Sur les grand'cases du XVIIIe siècle
- Cauna, Jacques de, "La création des grands domaines", Voyages aux Iles d'Amérique, Paris, Archives nationales, 1992, p. 179-183.
- Dearborn Edwards, Jay, and Kariouk Pecquet du Bellay de Verton, Nicolas. A Creole Lexicon. Architecture, Landscape, People, Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2004.
- Debien, Gabriel, "Les grand'cases des plantations à Saint-Domingue aux XVIIè et XVIIIè siècles", Annales des Antilles, n° 15, 1970, p. 1-39.
Sur le "Château Dubuc"
- Barret, Jean-Baptiste, Rapport de reconnaissance archéologique dans la presqu'île de la Caravelle, Fort-de-France, C.E.R.A., avril 1989, 5 p., 11 planches.
- Chauleau, Liliane, Notes sur l'habitation Dubuc, manuscrit, Archives départementales de la Martinique, sans date.
- Chanteur, Catherine, Château Dubuc, Mini-mémoire de Licence d'Histoire, 1986, levés d'architecte par Alix de Raynal.
- Huyghues-Belrose, Vincent, L'habitation La Caravelle dite "Château Dubuc", Trinité, Rapport d'enquête, Fort-de-France, SRA-PNRM, juin 1998.
- Mattioni, Mario, "Etude de la réserve de la Caravelle, 1ère phase : restauration et aménagement du château Dubuc", Parc naturel régional de la Martinique, a.u.p.t.m., juin, 1972, 8 p.
- Mattioni, Mario, Le Château Dubuc, Fort-de-France, SIVMANO, Imprimerie Désorrmeaux, sans date (1976 ?), 13 p.
- Soroptimist Club et EA du Galion, La Cabesterre – Terre vivante. 1645-1855, La Trinité, décembre 1988, multigraphié.
Sur l'histoire militaire de Trinité et de la presqu'île de la Caravelle
- Pelauque, J. M., Le mistère dévoilé, ou Exposition de quelques faits relatifs aux mouvements de la Martinique, depuis le 4 Février 1793, jusqu'au 24 Mars 1794, (Paris), De l'imprimerie de Pain, Passage Montré, (1795), 148 p. (BnF, LK 12 1158).
- Daney, Sidney, Histoire de la Martinique depuis la colonisation jusqu'en 1815, Fort-Royal, E. Ruelle, 1846, rééd. Fort-de-France, Société d'histoire de la Martinique, 1963, 3 vol.
- Daney De Marcillac, Sidney, Documents pour servir à l'histoire de la Martinique (1858), Fort-de-France, Société d'Histoire de la Martinique, 1980.
- Duffy, Michael, Soldiers, sugar and sea power : the British expeditions to the West Indies and against revolutionary France, Oxford, Clarendon Press, 1987.
- James, William, Naval History of Great Britain from the declaration of war by France…, London, Baldwin, Cradock & Joy, 1822-1824, 5 vol. Réédition en 6 vol., London, Conway Maritime Press, 2002.
- Willyams, Reverend Cooper, An account of the campaign in the West Indies in the year 1794, London, G. Nicol B. and J. White, J. Robson, 1796, réédition en fac simile Basse-Terre, Société d'Histoire de la Guadeloupe, 1990.
Cartographie
- "Carte de la Coste du Vent de l'Isle de la Martinique où les débarquement de l'armée Anglaise furent opérés par surprise en 1794 et 1809", CAOM, F3, 293 2/2.
- "Carte des débarquements Anglais de 1794, 1er juillet 1816", CAOM, DFC 16A 17 520 A.

Notes

1  La légende de cette photographie dit : "Un galion qui symbolisait la liberté dans l'esprit du prisonnier."
2  D'après Thierry Dorival, ingénieur de recherche à la DRAC, ces moulages n'ont jamais été faits.
3  MATTIONI, M., Le "Château" Dubuc, 1976 ?, p. 8.
4  MATTIONI, M., Le "Château" Dubuc, 1976 ?, p. 11-12.
5  CHANTEUR, C., Château Dubuc, 1986. Relevés par Alix de Raynal, architecte DPLG.
6  MATTIONI, M., Le "Château" Dubuc, 1976 ?, p. 9.
7  CHANTEUR, C., Château Dubuc, 1986, p. 32.
8  Voir DEBIEN, G., "Les Grand'cases", 1970, EDWARDS and KARIOUK, A Creole Lexicon, 2004 et mon étude sur l'habitation.
9  CAHINGT, Henri : "Les graffiti" dieppois", 1957, p. 54.
10  Identifiable sur la photographie de 1972, elle n'est plus visible aujourd'hui.
11 CAHINGT, Henri : "Les graffiti" dieppois", 1957, p. 69.
12 Sur les graffiti de La Rochelle (fin XVIIIè-début XIXè), comparables à ceux de la Martinique et exécutés par des corsaires britanniques capturés pendant la guerre de course, on se reportera à l'émission télévisée "Thalassa" du 7 août 1998 qui montre les procédés de moulage utilisés pour leur conservation et leur étude.
13  Un dernier galion espagnol a fait relâche à Trinité en 1717, mais ce gros navire n'a jamais pénétré dans la baie du Gallion, encore moins dans celle du Trésor.
14  Voir en particulier PARES, Richard, War and Trade in the West Indies (1739-1763), London, Franck Cass & Co Ltd, 1963 et JAMES, W., Naval History of Great…, 1822-1824, vol. 2.
15 A View of the Port of La Trinité and all the north side of Martinique, vers 1765. National Maritime Museum. Gravures par Peter Charles Carnot, Londres, vers 1769 et par G. Lizeidt, Augsbourg, vers 1770 (Collection des Prospects).
16  RUSSETT, Allan, Dominic Serres R. A. : 1719-1793. War Artist to the Navy, Londres, Antique Collectors' Club, 2005.
17  DUFFY, M., Soldiers, sugar and sea power, 1987. p. 69 d'après Willyams, An account, 1796,p. 15‑16 et archives PRO, Admiralty papers, ADM 2/1346 : Instructions to Jervis, 16 Nov. 1793.
18  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 95.
19  DANEY, S., Documents, 1858, p. 172-173.
20  DANEY, S., Histoire de la Martinique, 1963, 3, p. 229.
21  Batterie de la Pointe de la Batterie ou batterie de la Pointe à Chaux.
22  DUFFY, M., Soldiers, sugar and sea power, 1987. p. 74.
23  Tous les détails biographiques proviennent du mémoire édité par Pelauque en 1795
24  DANEY, S., Histoire, 3, p. 229. POYEN, H. de, Les guerres, 1896, p. 50. Les lieutenants de compagnies du bataillon de Chasseurs commandé par Bellegarde étaient son propre frèreHyacinthe, La Grenade et Octavius. La Grenade meurt avant le 4 février et Poyen, précise que "la compagnie d'Octavius appartenait au bataillon de gens de couleur du mulâtre L'Enclume".
25  Fort Rochambeau, le nouveau nom donné au fort de La Trinité en 1793. DANEY, S., Histoire de la Martinique, 1963, 3, p. 229.
26  DANEY, S., Documents, (1857) 1960, p. 172.
27  DANEY, S., Documents, (1857) 1960, p. 173-174.
28  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 96.
29  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 99 note 43.
30  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 100. En fait les compagnies ont été envoyées le jour même (5 février) comme Bellegarde et Pelauque l'indiquent plus haut.
31  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 100.
32  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 108.
33  Lieu dit au sud du bourg de la Trinité, au bord de la rivière Epinette, où se retirèrent des Hollandais du Brésil en 1654.
34  PELAUQUE, J. M., Le Mistère, 1795, p. 111.
35  DUFFY, M., Soldiers, 1987, p. 70-71.

Table des illustrations


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TitrePhotographie des graffitis
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TitreRelevé partiel par Marie-France Barouh, 2006
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TitreIdentification des navires
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TitreCarte des opérations de 1794. La carte des opérations britanniques à partir d’Alexandre Moreau de Jones
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Pour citer cet article

Référence électronique

Vincent Huyghues-Belrose et Marie-France Barouh, « Les graffitis de l'habitation La Caravelle dite « Château Dubuc » presqu’île de la Caravelle, commune de la Trinité Martinique », Études caribéennes [En ligne], 7 | Août 2007, mis en ligne le 04 février 2008, consulté le 26 mai 2015. URL : http://etudescaribeennes.revues.org/361  ; DOI : 10.4000/etudescaribeennes.361

AIMEE DUBUC DE RIVERY








Aimée du Buc de Rivery, la Martiniquaise "des Isles de l'Amérique"

La vie des Du Buc de Rivery à la Martinique


Aimée du Buc de Rivery
1ère partie
Aimée du Buc de Rivery, la Martiniquaise
 
AIMÉE DU BUC DE RIVERY FUT ENLEVÉE PAR LES PIRATES EN 1788, VENDUE COMME ESCLAVE BLANCHE CHEZ LES BARBARES EN ALGÉRIE (DITE ALORS LES  ETATS DE BARBARIE), DONNÉE EN GUISE DE CADEAU PAR LE DEY D’ALGER (BABA-MOHAMED-BEN-OSMAN) AU SULTAN ABDUL-HAMID IER DE TURQUIE. ELLE DEVINT SULTANE VALIDÉ ET MÈRE ADOPTIVE DE MAHMOUD II.
Cet article est issu, en partie, de l’ouvrage « La Saga des Du Buc » écrit en 2013 par Y.B. du Buc de Mannetot avec la collaboration de son cousin F. Renard-Marlet, dans lequel sont reproduits les portraits des membres de la famille Du Buc des Antilles et de Normandie, avec plans, cartes, textes anciens, preuves de noblesse, attestations notariées, lettres, photographies, lithographies, cartes postales anciennes, affiches, gravures, invitations, tableaux, pastels, gravures, état-civil, aveux seigneuriaux, ordonnances du roi, nominations, condamnations, commémorations…

 


 
          Mademoiselle Aimée du Buc de Rivery (1776-1817), fille d’aristocrates planteurs de la Martinique, dite « la naufragée sultane Nakchidil » est née le 4 décembre 1776 sur l’habitation de son père (domaine agricole, généralement appelé plantation, situé sur Pointe-La-Rose/Pointe-Marlet/Pointe-Royale sur la commune du Robert à la Martinique), baptisée en l’église du Robert de Martinique, fille de Henri Jacob du BUC de RIVERY, né le 19 juin 1748 au Robert, mort le 29 mai 1808 au Robert, agriculteur-planteur, maître d’habitation à Pointe-Royale, et Pointe-La-Rose, propriétaire de la sucrerie du Robert, membre du Directoire de l’Assemblée Coloniale, Intendant des Habitations du Buc de Bellefonds à la presqu’île de La Caravelle pendant l’absence de son cousin, marié le 24 mai 1773 au Robert à Marie Anne d’ARBOUSSET-BEAUFOND, née en 1739 morte en 1811. Aimée du Buc de Rivery fut enlevée par les pirates en 1788, vendue comme esclave blanche chez les barbares en Algérie, donnée en guise de cadeau par le Dey d’Alger (Baba-Mohamed-Ben-Osman) au Sultan Abdul-Hamid Ier de Turquie, convertie à la religion musulmane, élevée au rang de quatrième Kadine (4ème épouse du sultan Abdul-Hamid Ier) du harem du Palais de Topkapi à Constantinople, mère adoptive de Mahmoud II (futur Sultan), et devenue Sultane Validé « Nakchidil » ou « Nakshidil » , c’est-à-dire « Reine-Mère Empreinte du Cœur » ou « Reine-Mère la plus belle des belles » de l’Empire Ottoman (c’est-à-dire la Turquie actuelle). Elle fut élevée au rang de Sultane Validé grâce à son fils adoptif qui avait publié un hati-chérif (décret) afin de lui faire accéder à cette position suprême. Aimée avait surpassé dans la beauté, le charme, et l’amabilité les autres sultanes d’origine géorgienne ou circassienne. Aimée reçoit, à titre exceptionnel et avec autorisation du Sultan, les derniers saints-sacrements de l’Eglise Catholique par le Père Chrysostôme (Supérieur du Couvent des Capucins à Constantinople) et meurt le 10 novembre 1817 (ou le 23 décembre selon certains) d’une terrible fièvre au Palais de Béchiktash, résidence impériale en Turquie. Aimée du Buc de Rivery était la cousine de Josèphe Rose de Tascher de La Pagerie, future impératrice Joséphine et femme de Napoléon Ier. On dit qu’elle excella dans l’art de nouer les intrigues à la cour de Turquie. Aimée portait les titres suivants : « Princesse très illustre et chaste ; Couronne de la Continence ; Souveraine régnante ; Dame de très haut lignage, douée de qualités très pures et d’un caractère céleste ; Diadème du Sexe ; Maîtresse des Lieux Pieux, élevée à la Gloire la plus sublime ; Astre du Septième Ciel, et Pleine Lune parmi les Etoiles ; Nacre de l’Empire ; Première des Pierres Précieuses de la Couronnes Impériale ».
 

Aimée du Buc de Rivery, la Sultane Validé de Turquie: "Nackchidil"

 
Aimée du Buc de Rivery
 
Aimée du Buc de Rivery, la Turque
 
AIMÉE DU BUC DE RIVERY FUT ENLEVÉE PAR LES PIRATES EN 1788, VENDUE COMME ESCLAVE BLANCHE CHEZ LES BARBARES EN ALGÉRIE (DITE ALORS LES  ETATS DE BARBARIE), DONNÉE EN GUISE DE CADEAU PAR LE DEY D’ALGER (BABA-MOHAMED-BEN-OSMAN) AU SULTAN ABDUL-HAMID IER DE TURQUIE. ELLE DEVINT SULTANE VALIDÉ ET MÈRE ADOPTIVE DE MAHMOUD II.
Cet article est issu, en partie, de l’ouvrage « La Saga des Du Buc » écrit en 2013 par Y.B. du Buc de Mannetot avec la collaboration de son cousin F. Renard-Marlet, dans lequel sont reproduits les portraits des membres de la famille Du Buc des Antilles et de Normandie, avec plans, cartes, textes anciens, preuves de noblesse, attestations notariées, lettres, photographies, lithographies, cartes postales anciennes, affiches, gravures, invitations, tableaux, pastels, gravures, état-civil, aveux seigneuriaux, ordonnances du roi, nominations, condamnations, commémorations…
 
Aimée du Buc de Rivery
et écrit par sa famille !
Avec des documents
et des preuves encore
jamais dévoilés !
Sortie prévue fin 2014.
 
Site en suspension ! Il faut attendre la parution de ce livre évènement !
 
                                                                                Y.B. du Buc de Mannetot

En savoir plus sur http://editionsdubucparis.e-monsite.com/pages/aimee-du-buc-de-rivery-la-sultane-valide-de-turquie-nackchidil.html#RJPWd0lLJo0Hr3Th.99

 
 
 
 
 
 
 
 

Aimée Dubuc
 
La légende de la sultane Validé
 
 

 
Aimée Dubuc de Rivery est née en 1776 à Pointe Royale, au sud-ouest du Robert, en
Martinique.
Cette jeune cousine de Joséphine Rose Tascher de la Pagerie, la future Impératrice Joséphine, femme de Napoléon Ier, fut envoyée en France pour y parfaire son éducation.

Tandis qu'elle rejoignait sa famille, quelques années plus tard, le bateau qui la transportait fut attaqué par des corsaires au large des îles Majorque.
Selon la légende, la jeune fille fut emmenée à Alger comme esclave. Elle fut ensuite offerte par le Bey d’Alger à son sultan Abdulhamit Ier d’Istanbul.

Cette jeune créole de la Martinique aurait donné naissance au Sultan Mahmut II, ce qui lui aurait valu le titre de sultane Validé et qui signifie sultane-mère en turc.
 
Aimée Dubuc de Rivery
 
La légende de la sultane française

Aimée Dubuc de Rivery est née en 1776 à Pointe Royale, au sud-ouest du Robert, en Martinique.


Cette jeune cousine de Josèphe Rose Tascher de la Pagerie, la future Impératrice Joséphine, femme de Napoléon Ier, fut envoyée en France pour y parfaire son éducation.
Tandis qu'elle rejoignait sa famille, quelques années plus tard, le bateau qui la transportait fut attaqué par des corsaires au large des îles Majorque.
Selon la légende, la jeune fille fut emmenée à Alger comme esclave. Elle fut ensuite offerte par le Bey d'Alger à son sultan Abdulhamit Ier d'Istamboul.
Cette jeune créole de la Martinique aurait donné naissance au Sultan Mahmut II, ce qui lui aurait valu le titre de sultane Validé et qui signifie sultane-mère en turc.

Lettre d'un témoin des funérailles de la sultane
Nous reproduisons ici, une lettre écrite par la Comtesse de la Ferté-Meun à Constantinople, le 15 aout 1817 et qui fut éditée à Paris en 1820. Il s'agit d'un témoignage d'époque, mais rien ne permet de dire qu'il s'agit de la réalité. L'histoire concerne une fille créole âgée d'à peine quatorze ans, capturée et vendue au harem de Topkapi pendant le règne du sultan Abdulhamit Ier (1774-1789). Son nom de harem était Naksidil. Elle était la mère de sultan Mahmut II et est ainsi devenue la validé de l'Empire ottoman.

"Constantinople, le 15 août 1817

La sultane Valide vient de mourir. J'ai vu qu'elle a été placée dans la crypte ou mausolée qu'elle avait commencé à faire construire il y a maintenant deux ans et que le Padishah s'est promis de terminer. J'ai vu le cercueil partir du palais. Deux pages l'ont transporté dans un des caïques couverts de Sultan qui ont traversé le Bosphore. Son palais était à côté de celui du Grand-Seigneur, près de Bechick-Tash (Besiktas). De nombreuses personnes de haut rang ont attendu sur l'autre rivage pour prendre la charge du cercueil, ainsi que le veut la coutume. On lutte pour l'honneur de porter, après sa mort, la personne qu'on a respectée dans la vie, ou la toucher au moins, ce qui est facile, même pour les Turcs ordinaires. Mais cette fois la sépulture était fermée et déposée au centre de la crypte qui est un immense salon teint dans les tons arabesques verts. En général, les tombeaux de sultans et sultanes sont des bâtiments où les vivants seraient très bien logés. Son altesse a envoyé le châle pour couvrir le sarcophage.
On lui dit que la sultane décédée était française, d'origine américaine, et qu'elle était née à Nantes ; on ajoute que quand elle avait à peine deux ans, embarquée avec ses parents pour l'Amérique, ils furent capturés par des corsaires et transportés à Alger où ses parents périrent. La petite fille a été achetée par un négociant slave qui a calculé qu'une beauté d'un âge si tendre le rembourserait un jour proportionnellement à l'éducation qu'il lui fournirait. Il n'a pas été déçu dans ses espoirs, puisqu' à l'âge de quatorze ans, d'une beauté resplendissante, elle fut vendue au Bey d'Alger en échange de l'hommage dû au Grand-Seigneur.
Elle a été envoyée au sultan Abdulhamit, qui l'a trouvée avenante et l'a élevée au rang de Kadin, c'est-à-dire d'épouse. Elle lui a donné Mahmut, le sultan régnant. Mahmut a toujours eu le plus grand respect pour sa mère. On lui dit qu'elle a surpassé dans la beauté, le charme et l'amabilité les Circassiennes ou Géorgiennes, ce qui n'étonne pas puisqu'elle était française. Le Grand-Seigneur a exaucé toutes les charités annuelles de Valide. Par exemple, lors de la célébration du point médian du Ramadan, des gâteaux appelés baklava sont distribués. C'est une pâte feuilletée, une bagatelle très riche mais néanmoins tout à fait exquise. On ne peut croire que cette philanthropie de la part de Valide est une question de 200.000 francs. Toutes les familles Janissaires, c'est-à-dire la ville entière de Constantinople, recevaient leur plat de Baklava.
La sultane est morte des suites d'une fièvre maligne. Son fils a refusé d'appeler un docteur, ainsi que le veut la pratique dans ce pays: si les patients succombent, on élimine l'homme qui a donné seulement le succin inutile. Il ne me semble pas que cette tradition donne au docteur turc une réussite plus grande ou une plus expertise que le nôtre. Nous avons fait ce que nous pouvions pour distraire le Grand-Seigneur, qui, depuis cet événement mortel, est plongé, dit-il, dans une douleur profonde. Les promenades en solitaire sont ses occupations préférées pour dissiper son chagrin.
Les Turcs ne portent jamais le deuil : la couleur noire a le même symbole pour eux que le bleu ou le vert en Europe. En général, la peine ne laisse pas des conséquences prolongées sur ces personnes qui aiment légèrement; qui manifestent moins d'affliction et de regrets que nous. L'habitude de recevoir tout comme une bénédiction du ciel rend leur souffrance presque insensible.
La sultane Valide affichait ouvertement Ali Efendi comme son favori, en second lieu seulement de son fils : le sultan continue à prodiguer sur lui sa dévotion. "C'est dans la mémoire de ma mère " dit-il "qu'il mérite ma bienveillance." Certainement il y a une âme française dans une telle qualité émouvante. "

La prophétie
extrait de La Grande Sultane par Barbara Chase-Riboud

"Elle s'appelait Euphémia David, expliqua Naksh-i-dil à l'Eunuque noir et à la Kiaya étonnés. C'était l'Obeah la plus connue de la Martinique. C'est elle qui m'a prédit mon destin. Elle détenait le secret de la vie, de la médecine, des poisons, des remèdes contre le mauvais œil. Elle savait lire le futur, le passé et le présent. Tous la craignaient, les Noirs comme les Blancs. Tuer un homme blanc était aussi facile pour elle que de briser un fétu de paille... avec sa magie noire..." (...)
Il était midi, ce jour de décembre 1776. La forteresse de pierre juchée sur un promontoire regardait la mer enfermée entre deux digues escarpées, ce qui la faisait ressembler davantage à un repère de pirates qu'à une demeure coloniale. Sur l'île de la Martinique, le luxe était rudimentaire, rare et importé. (...) Cette fête était donnée à l'occasion du baptême du nouveau-né d'une Grande Blanche. Tout le monde s'était assemblé autour du négrier français, le capitaine Marcel Dumas, qui venait d'arriver de Nantes avec sept cent trente nègres de premier choix. (...)
A la tombée de la nuit, alors que le bal battait son plein, je me suis éclipsée avec deux autres filles et mon esclave Angélique. En suivant la plage, nous sommes allées jusqu'à la hutte d'une célèbre Obeah, Euphémia David. De nous trois, une seule, Joséphine, croyait en la magie noire. Nous avions si peur que nous tenions d'une main notre chapeau de paille et de l'autre, la jupe blanche de celle qui nous précédait. L'Ikbal sourit. Cela lui faisait plaisir de raconter tout cela à Hitabetullah. Toutes ensemble nous formions un animal à six pattes, qui caracolait sur le chemin. La fille en tête tenait un bouquet de lis qui faisait penser à la crinière empanachée d'un poney au trot. Nous devions l'offrir à la sorcière.
Euphémia David était la fille mulâtre de John David, un aventurier irlandais. Elle appartenait à la grande et toute-puissante Mme Marie-Euphémia Désirée Tacher de la Pagerie Renaudin, et elle vivait à la plantation Le Robert, car en Martinique, toutes les plantations dignes de ce nom possédaient une Obeah. Africains, Créoles et mulâtres la révéraient, la consultaient et la craignaient. Nous sommes arrivées au moment où Euphémia s'y attendait le moins. C'était jour de repos à la plantation, et les esclaves s'étaient réunis. Nous avions très peur de rencontrer la Quimboiseuse, la magicienne, l'Obeah. C'était un personnage si redouté que lorsqu'un jeune esclave méritait quelques coups de fouet, on le menaçait de l'envoyer à Euphémia. Nous l'avons trouvée dans sa hutte, entourée d'une foule sombre et silencieuse. Un murmure surpris nous a accueillies quand nous avons poussé le rideau de palmes tressées. Puis ça a été le silence total. Nous avons regardé ce cercle de visages noirs, imaginant qu'une tempête allait surgir de la tête de la sorcière, ou que des centaines de serpents siffleraient à ses pieds, mais tout à fait prosaïquement, l'Obeah nous a dit : "Vous voyez, mes enfants, je n'exhale ni vapeurs étranges, ni fumées, ni flammes, ni volutes sulfureuses. Non, jolies Créoles, ne regrettez pas de m'avoir fait l'honneur de me rendre visite."
Puis l'Obeah s'est tournée vers l'est et a fait le signe de la croix. Ce n'était pas la croix des chrétiens, mais une croix aux bras égaux qui montraient les quatre points cardinaux. Et elle a dit en levant les bras : "Protégez- moi du mal venant de l'est." Elle s'est ensuite tournée vers le nord, le sud et l'ouest en disant : "Protégez- moi du mal venant du nord. Protégez- moi du mal venant de l'ouest. Protégez- moi du mal venant du sud." Après, elle a tracé un cercle dans le sens des aiguilles d'une montre, de l'est au sud et de l'ouest à l'est en suivant la course du soleil. Le cercle n'était pas uniquement destiné à tenir les forces du mal en échec mais à concentrer celles de la nature. A l'intérieur de ce cercle, elle a placé un petit brasier et après l'avoir allumé, elle y a fait brûler des herbes. Les vapeurs attiraient les esprits, et ceux-ci pouvaient prendre forme à l'aide de la fumée. Elle a jeté tour à tour de la coriandre, de la cigüe, du persil, du pavot noir, du fenouil, du bois de santal, de la jusquiame, de la férule, de la civette, du musc, de la myrrhe, de la mandragore, de l'opium, du soufre et la cervelle réduite en poudre d'un chat noir. Elle nous a regardées à travers la fumée puis elle s'est adressée à la plus âgée d'entre nous, à Mlle du B, qui avait vingt et un ans :
"Vous êtes douées d'une certaine maturité, et du talent de votre mère pour l'administration, ce qui est tout à fait indispensable pour diriger une maison. Vous épouserez votre cousin, un Grand Blanc de la Guadeloupe et mettrez au monde un seul enfant, une fille. Vous passerez une grande partie de votre vie au-delà de l'océan. Votre rôle sur cette planète sera éphémère, mais la fortune matérielle ne vous fera jamais défaut."
Ensuite, les yeux d'Euphémia ont tourné dans leurs orbites et d'une voix qui ressemblait au tonnerre sur le Mont Pelé, elle s'est tournée cette fois vers Joséphine Tascher. Elle, elle n'avait que treize ans.
"Vous épouserez un bel homme promis à une autre personne de votre famille. Cette jeune personne ne vivra pas longtemps. Vous aimez un Créole, mais jamais vous ne l'épouserez, et un jour vous devrez même lui sauver la vie. Les étoiles vous promettent deux mariages. Le premier de vos maris, un noble, est né en Martinique, mais il vit en France. Il est militaire. Vous passerez avec lui des moments heureux, mais comme vous serez tous les deux infidèles, vous serez désunis, après quoi le royaume de France connaîtra la Révolution et des troubles graves, et il périra de façon tragique, vous laissant avec deux enfants. Votre second mari sera d'origine européenne mais il aura la peau très foncée, pas de fortune et pas de nom. Néanmoins, il deviendra célèbre, le monde entier entendra parler de sa gloire et il conquerra toutes les nations. Vous serez célèbre, vous aussi, et on vous honorera plus qu'une reine, mais un jour, ce monde ingrat oubliera vos bonnes actions, et ne se souviendra que des mauvaises. Vous regretterez la vie douce et facile que vous meniez dans nos colonies." Elle s'arrêta un instant. "Vous reviendrez sur cette île, mais vous partirez pour la France, et à ce moment-là, une grande comète s'allumera dans le ciel, signe de votre destinée prodigieuse."
Et Euphémia s'est enfin adressée à moi, Mlle de S, poursuivit Naksh-i-dil en parlant aussi bas que dans un confessionnal. J'avais dix ans. Soudain l'Ikbal prit la même voix rauque que l'Obeah.
"Votre nouveau tuteur va bientôt vous envoyer en Europe parfaire votre éducation. Votre bateau sera capturé par des pirates algériens. Vous serez faite prisonnière et rapidement enfermée dans un couvent pour femmes d'une autre nation que la vôtre, ou dans une prison... Là, vous aurez un fils. Ce fils régnera glorieusement sur un empire, mais un régicide ensanglantera les marches de son trône. Quant à vous, vous ne jouirez jamais d'honneur public ni de gloire, mais vous régnerez, Reine voilée, invisible, vous vivrez dans un vaste palais où chacun de vos souhaits sera un ordre, et des esclaves innombrables, par milliers, vous serviront. Au moment même où vous vous sentirez la plus heureuse des femmes, votre bonheur s'évanouira comme un rêve, et une longue maladie vous conduira jusqu'à la tombe."


Légende ou réalité ?

Rien ne permet d'avoir des certitudes quant à la véracité du texte ci-dessus. En effet, une certaine Aimée-Rose du Buc, née le 19 décembre 1776 dans les îles américaines, a bien disparu en juillet 1788 lors de son retour de France en Martinique. Mais, ceci est en contradiction avec la date de naissance du sultan Mahmut II, en 1785.
Certaines sources turques indiquent que la sultane Naksidil, quatrième Kadin (épouse), de l’empereur, adopta le petit Mahmut, fils d’une autre femme du sultan, décédée prématurément et qui aurait aussi été d’origine créole.
Autre possibilité : Aimée-Rose du Buc et Aimée Dubuc de la Rivery, sont deux personnes différentes qui ont toutes deux disparut en mer.
Ce qui ne fait pas de doutes, ce sont les origines créoles de la sultane Naksidil. Ainsi, cette sultane devenue sultane-mère ou « validé » lors du règne de Mahmut II, avait même fait venir des sœurs catholiques de France pour parfaire l’éducation de son fils, que la population appelait : Gavur Sultan, c’est-à-dire, le sultan infidèle.
On est donc à peu près sur aujourd’hui, que la sultane-mère a gardé sa religion d’origine tout au long de sa vie et l'a même transmise à son fils sultan. Ainsi, et bien que l’on trouve des traces de dons à certaines fondations religieuses musulmanes de la part de la sultane et du sultan, aucun des deux personnages n’a laissé une mosquée impériale, comme il était de tradition de le faire, même pour les sultanes mères qui avaient gardé leur religion d’origine en secret.
Le sultan Mahmut II qui, de façade, pratiquait la religion musulmane, a laissé des traces importantes dans l’histoire de l’Empire ottoman. C’est sous son ordre, dicté du haut du mihrab de la mosquée du Sultan Ahmet (mosquée Bleue), que la garde impériale des janissaires fut dissolue. Un massacre général s’en suivit sur la place de l’Hippodrome et dans leur quartier de Vatan, autour de la mosquée de Fenari Isa.
Mahmut II fut apprécié des habitants chrétiens de l’empire, notamment les Arméniens grégoriens et les Grecs orthodoxes. Plusieurs églises et chapelles ont été construites sous son règne, avec son financement. L'église la plus importante est sans doute, celle de la Panaya à Balikli (Panaghia Balouklou).
Mahmut II a également laissé des traces dans l’architecture civile, comme sa fameuse bibliothèque à Nicosie (République de Chypre du Nord).



Ali Efendi

Ali Efendi était un janissaire amoureux de la sultane Naksidil. Fils d'un négociant de chevaux albanais et d'une Vénitienne catholique de Corfou, il était lieutenant du sultan Mahmut II.
Ali Efendi rencontra Naksidil en 1808, elle était déjà la sultane Valide, son fils était sultan, et Abdulhamit était mort depuis le 6 avril 1789.
Après que Naksidil ait présenté Ali en tant que son amoureux, Mahmut l'a promu au grade de Pacha, équivalent au rang principal d'aujourd'hui de général.
Après la mort de sa mère en 1837, Mahmut fit exécuter Ali Efendi.

Le mausolée de la sultane Naksidil
(Aimée Dubuc de la Rivery)
Naksidil Sultan (Aimée Dubuc de la Rivery) Türbesi
C'est sur la 4ème colline de Constantinople, dans l'immense enceinte du complexe de la mosquée de Fatiha (Mehmet le Conquérant), que se trouve le mausolée de la légendaire sultane.
Si rien n'est vraiment sur quant à l'histoire d'Aimée Dubuc de la Rivery, cousine de l'impératrice française Joséphine, on sait que, celle qui avait pour nom de harem Naksili Sultane et qui avait des origines martiniquaises, repose à cet endroit, tout près de la femme du Conquérant, une autre française, la sultane Gulbahar.
L'immense mausolée se présente comme un ensemble de bâtiments encerclés par un haut mur et séparés du reste du complexe de Fatih et même du cimetière impérial. Une partie du mausolée s'ouvre néanmoins sur l'extérieur et impose sa lourde façade dans un angle, formant ainsi un coté de deux ruelles.
Une école religieuse se trouve dans la cour, ainsi que d'autres mausolées plus petits et divers bâtiments.
Le siège du muftu (autorité religieuse) de la mairie de Fatih, se trouve ici et l'on est étonné que l'ensemble soit si peu entretenu, vu l'importance de l'endroit.
Le jardin n'est donc pas entretenu, pire que ça : des déchets de toutes sortes encombres la pelouse en broussaille, dont une voiture rouillée et l'entrée même du mausolée est bloquée par deux frigos. Les murs de l'ensemble des bâtiments sont dans un état assez dégénéré, tandis que la fontaine sur la façade extérieure à l'est, est pratiquement détruite.
Cet ensemble, qui reflète l'architecture ottomane religieuse du XIXe siècle, mériterait une complète restauration, qui n'est visiblement pas prévue au programme.

LE CHATEAU DUBUC

Le " Château Dubuc" apparaît pour la première fois sur les cartes de la Martinique datées de 1773.
C'est en 1657 que Pierre DUBUC, originaire de Normandie, débarque en Martinique.
Pour avoir participé à plusieurs expéditions contre les Indiens Caraïbes, il reçoit en récompense une concession dans la région de La Trinité où il s'installe à partir de 1671.

Balthazar, son deuxième fils, s'établit à la Caravelle sur l'Habitation Spoutourne mais c'est son petit-fils Louis Dubuc du Galion qui fixe dans la pierre la puissance de cette famille en construisant l'Habitation Caravelle qui devait devenir, par la suite, le "château Dubuc".

Les installations de cette Habitation sont, pour l'époque, considérables.
L'importance des dépôts en particulier l'isolement de l'Habitation laisse supposer la pratique d'autres activités que la production de sucre, à savoir la contrebande et le trafic d'esclaves.
Cependant, dès 1770, le Château Dubuc est progressivement abandonné à la suite du terrible cyclone de 1766 et de la gestion désastreuse qui découle de la participation des Dubuc à différentes batailles contre les Anglais.

C'est en 1974 que le SIATNO (Communauté des Communes) fit l'acquisition pour le compte du Parc Naturel Régional, alors en gestation, des 2,5 h de terrain d'assiette des ruines du Château.
Malgré les nombreuses difficultés à ravir les ruines de l'emprise des "figuiers maudits", le PNRM, dont une des missions consiste en la protection du patrimoine naturel et historique de la Martinique, poursuit un programme de restauration et de valorisation du site.

Le Château Dubuc est classé Monument Historique depuis 1991.

LA RESERVE NATURELLE DE LA CARAVELLE

La presqu'île de la Caravelle marque le profil atlantique de l'île d'un bras de terre de 10 km de long, perpendiculaire à la côte.

L'extrémité de la presqu'île n'a pas échappé à un déboisement partiel pour la culture de la canne et l'exploitation du bois.
Cependant, depuis le XVIIème siècle, sa position géographique extrême et l'âpreté de son climat très sec lui ont épargné plus qu'ailleurs des dégradations irréversibles.
C'est ce qui a permis la reconstitution progressive des milieux naturels, à la faveur du découpage particulier de ses côtes et de son relief accidenté en une mosaïque remarquable de végétation très diversifiée telle que : forêt sèche, fourrés, mangrove, forêt d'arrière plage, savane, flore de falaises.

Ces différents milieux constituent autant d'habitats pour un nombre important d'oiseaux sédentaires dont deux sont endémiques à la Martinique :
- La Gorge Blanche
- Le Carouge.

Cette Réserve Naturelle a une superficie de 422 ha dont 89% de propriété publique et vous permet de découvrir la flore et faune du littoral atlantique grâce à un petit et un grand sentier de randonnée.
Ces circuits offrent de remarquables points de vue sur la pointe de la presqu'île et permettent d'en découvrir les multiples milieux.

Par ailleurs, un circuit d'interprétation traverse la Réserve jusqu'au phare et à la station météo, rejoint les falaises à travers bois et longe la côte d'anses en pointes jusqu'à la Baie du Trésor avant de remonter vers les ruines du Château Dubuc.

Texte tiré du site : [
www.crdp.ac-martinique.fr]
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
En savoir plus sur http://editionsdubucparis.e-monsite.com/pages/aimee-du-buc-de-rivery-et-sa-famille-des-isles-de-l-amerique.html#3235fhRhqV3TuKAi.99

samedi 23 mai 2015

L'ILET CHANCEL







Visite de l'îlet Chancel

  https://youtu.be/YbnVldInLCU

L'îlet Chancel est un des 10 ilets du Robert   , le plus au nord de la Baie du Robert (à part l'îlet Loup Garou) 
et c'est le plus grand ilet de la Martinique, le premier îlet le plus visité après l'ilet Madame. Il baigne dans l'océan Atlantique entouré de la pointe Rouge continentale, de l'îlet de la Grotte, ilet petit Piton, ilet à eaux et ilet aux Rats. 

  Anciennement appelé îlet Monsieur, puis îlet Ramville et l'îlet devient Chancel en 1891 (propriétaire  Mr Bally). Sa superficie est de 0.702405 km² (2.1 km x 960 m), il fait 80 hectares, possède une altitude maximale de 68 mètres et se trouve pourvu de plusieurs petites anses à sable blanc ainsi qu'un fond blanc à proximité.
     

6 raisons majeures de visiter l'îlet Chancel

1- Fond Blanc splendide



2- Présence d'iguanes très rare au monde (Iguana delicatissima)







 3- Voir un Figuier Maudit


 


  4- Voir un mûrier pays, espèce en voie d'extinction dans l'île



  5- Site archéologique



  6- Graffiti et mystère de ses auteurs



   
l'îlet Chancel est un espace protégé par Arrêté n° 053644 de protection de biotope, d’habitat naturel ou de site d’intérêt géologique datant du 21.11.2005, l'accès et la circulation est strictement interdite sauf à la plage du Trapèze et sur le site archéologique de l'ancienne poterie et four à chaux.  Ce patrimoine de la Martinique est également une propriété privée sur certains espaces, d'où la présence de grillages empêchant la libre circulation.
 

 

On accède à l'ilet Chancel uniquement par voie maritime, en bateau ou en kayak, principalement par deux lieux d'ancrage.     


 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 

Iguane des petites Antilles en danger d'extinction visible sur l'îlet Chancel  

Iguana delicatissima est une espèce endémique des petites Antilles en voie d'extinction principalement par manque d'habitat. Heureusement, sur l'îlet Chancel les iguanes ont été recensés au nombre de 400 (de plus de 3 ans d'âge) en 2004. 
Cette espèce rare trouve sur le territoire de l'îlet Chancel un environnement favorable et assez de protections environnementales pour développer sa population.
En visitant l'îlet Chancel, particulièrement sur le site archéologique, vous avez de grandes chances d'en voir ! Les mâles sont de couleur grise, les femelles très vertes. (dimorphisme sexuel très accentué pour cette espèce).

 

Site archéologique de l'îlet Chancel : Ancienne poterie et fours


 
 
 
Des vestiges de l'activité sucrière passée sont visibles sur l'îlet Chancel.
Vous pourrez voir les ruines d’un four à poterie, d’un cachot, d’un four à chaux, d’un puits ou encore d’un four à pain ; dont certains de ces vestiges sont classés comme monuments historiques au patrimoine de France. Il y aurait d'autres sites archéologiques non découverts, à repérer et documenter sur l'îlet d'où la visite régulière de scientifiques. (autorisés par arrêté préfectoral à arpenter tout l'îlet).
 

Les figuiers maudits de l'îlet Chancel

Le figuier maudit (plus connu sous son nom vernaculaire figuier étrangleur, désignant plusieurs espèces principalement du genre Ficus qui germent sur un arbre-hôte) est un arbre épiphyte typique des zones tropicales à la foret primaire ou secondaire avancée. Un oiseau (ou une chauve-souris présente sur l'îlet Chancel) dépose une de ses graines sur une branche d'un arbre quelconque et la graine devient elle même un arbre qui développe des racines aériennes vers le sol et des branches vers le ciel pour capter la lumière. Il se développe et étrangle l'arbre sur lequel le figuier maudit est né jusqu'à ce que l'arbre support meurt. Le figuier maudit est alors autonome et autoportant, avec un tronc creux (espace de l'ancien arbre). Sur l’îlet Chancel, vous verrez des figuiers maudits (près du site archéologique notamment), son intérêt écologique est majeur puisqu'il sert la prolifération des insectes.
 

Les graffitis de l'îlet Chancel

Situé dans une cavité du site archéologique, les graffitis de l'îlet Chancel représentant des bateaux ont fait couler beaucoup d'encre et aujourd'hui encore, on n'est pas absolument sûr de leurs origines.
 
La rumeur voulait que la cavité soit utilisée comme cachot et que d'anciens esclaves y aient dessiné les bateaux qui les avaient transportés d'Afrique en Martinique. Théorie démentie après que certains scientifiques se soient penchés sur le problème. Il semble plus probable que ce soit des dessins exécutés par des soldats de la marine ou marins au XVIIIème siècle.

Plage du Trapèze de l'îlet Chancel

La plage du Trapèze est une plage paradisiaque. Eau translucide, fond blanc, une vraie carte postale ! D'ailleurs de nombreux résidents s'y retrouvent le week-end.
 
    

Le mûrier Pays

Le mûrier Pays (Maclura tinctoria) est en voie d'extinction en Martinique ( espèce rarissime qui était déjà virtuellement éteinte à la fin du siècle dernier, selon DUSS ) et pourtant en voie de reconquête sur l'îlet Chancel (forme juvénile). Son intérêt écologique et majeur pour l'îlet et sa présence rarissime est une bonne nouvelle pour l'îlet Chancel.
 

Grand fond blanc de l'îlet Chancel

C'est le grand spot touristique de la Baie du Robert. Point de rendez-vous de tous les amoureux de beaux espaces naturels, les fonds blancs de Martinique   émerveillent immanquablement les voyageurs de passage et le fond blanc de l'îlet Chancel y est pour beaucoup.   

Vidéo Ilet Chancel




 

 

 

Pour repérer les iguanes

Si vous ne voyez pas d'iguanes du premier coup d'oeil, cherchez les bien, ils sont bien là.
Tout d'abord, écoutez bien... On les entend facilement se déplacer au sol, une fois le bruit repéré, il est plus facile de les trouver.
Ensuite regardez en l'air aux heures chaudes ou après la pluie, les iguanes se reposent sur les branches des arbres. Il y en a toujours au moins un entre les racines et les branches du très gros figuier maudit au milieu du site.

 

Observer la faune et flore de l'îlet Chancel (pas uniquement sa plage), c'est un magnifique refuge naturel

Cet îlet accueille une faune et flore des plus intéressantes pour les passionnés de nature.
Côté faune, vous remarquerez peut-être la présence de chauves-souris (il y a des grottes sur une partie non visitable de l'île) mais aussi des oiseaux migrateurs plus rares comme l'Aigle Pêcheur ou sédentaires comme la Tourterelle Pays.
Côté flore, là aussi, vous trouverez fleurs et essences de bois intéressantes comme le Ti Baum (Croton flavens) ou le joli Poirier Pays (Tabebuia heterophylla). On a parlé bien sûr du très rare Mûrier Pays mais évoquons également le prunier de bord de mer qui permettra de développer un peu d'ombre sur l'îlet Chancel (et donc apportera plus de fraîcheur, l'îlet Chancel subit un climat sec, au sol dégradé à cause de la sur-exploitation mais la nature est vivace et reprend des couleurs, même si l'îlet est exsangue de cours d'eau).

   



        


Carte GPS accès ilet Chancel
Carte GPS accès ilet Chancel


Sources îlet Chancel et quelques lectures informatives conseillées

  Arrêté de protection de biotope, d’habitat naturel ou de site d’intérêt géologique sur http://inpn.mnhn.fr/docs/espacesProteges/apb/FR380073320051121.pdf

Lire cette fiche descriptive complète sur l'Ilet Chancel à télécharger sur http://www.martinique.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/FICHE25_cle24dc5b.pdf
.
Etudes scientifiques sur les graffitis des ilets en Martinique particulièrement de l'habitation La Caravelle dite « Château Dubuc » presqu’île de la Caravelle, commune de la Trinité Martinique, on y parle rapidement des graffitis de l'îlet Chancel, dont j'ai recopié l'extrait qui nous concerne  -->
 
 
 http://etudescaribeennes.revues.org/361?lang=en   
" Pour avoir pu représenter correctement les gréements et les proportions des parties des navires, les auteurs des graffitis étaient incontestablement, sinon des hommes de mer, du moins des hommes habitués à observer la mer et les embarcations, certainement pas des esclaves africains ayant voyagé à fond de cale et qui, par leurs cultures d'origine, ignoraient absolument tout des embarcations qui les transportaient. Par ailleurs, on voit mal comment des prisonniers graveurs auraient pu dessiner "sur le sujet", car, du fait de la disposition des lieux par rapport à la baie, ils ne pouvaient voir ni la mer ni le moindre navire du fond de leur "cachot" et devaient nécessairement se déplacer dehors pour observer. 26Les conclusions de l'étude des formes représentées sur le mur du dessous d'escalier et ce que l'on sait de l'abandon et de la ruine précoce de la grand'case (1771) conduisent à écarter sans appel toutes autres mains que celles d'hommes libres, familiers de la mer. Dans un premier temps, il faut donc penser que l'on a affaire au passe-temps de matelots ou de soldats de la marine qui se seraient réfugiés là pour se mettre à l'abri et certainement pas d'esclaves au cachot."
Intéressante étude d'un Master Ecologie 2 ème année Mention Gestion de la Biodiversité Conservation de l'iguane des Petites Antilles Iguana delicatissima en Martinique : Suivi des populations sur l'îlet Chancel et réintroduction sur l'îlet Ramiers par Ourly Laurent http://www.donnees.martinique.developpement-durable.gouv.fr/telecharge/Rapport%20iguane%20des%20Petites%20Antilles.pdf