mercredi 21 octobre 2020

ALBERT CAMUS

Le 4 Janvier 1960, alors qu'il avait prévu de rentrer à Paris en train, Albert Camus se laisse tenter par la proposition alléchante de Gaston Gallimard : regagner la capitale à bord de son nouveau bolide. Décision fatale car les deux hommes ne survivront pas à un tragique accident de la route. En hommage à ce grand écrivain, homme incarnant la noblesse même, voici un échange de lettres avec son premier instituteur, Louis Germain. Camus lui écrivit, quelque peu après avoir reçu le Prix Nobel de Littérature en 1957, une lettre de remerciement et ce magnifique instituteur lui répondit par une vibrante profession de foi en son métier et en l'école laïque.

19 novembre 1957

Cher Monsieur Germain,

J'ai laissé s'éteindre un peu le bruit qui m'a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon cœur. On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n'ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j'ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous. Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j'étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé. Je ne me fais pas un monde de cette sorte d'honneur mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l'âge, n'a pas cessé d'être votre reconnaissant élève.

Je vous embrasse, de toutes mes forces.

Albert Camus

...

30 Avril 1959

Mon cher petit,

(...) Je ne sais t'exprimer la joie que tu m'as faite par ton geste gracieux ni la manière de te remercier. Si c'était possible, je serrerais bien fort le grand garçon que tu es devenu et qui restera toujours pour moi « mon petit Camus».

(...) Qui est Camus ? J'ai l'impression que ceux qui essayent de percer ta personnalité n'y arrivent pas tout à fait. Tu as toujours montré une pudeur instinctive à déceler ta nature, tes sentiments. Tu y arrives d'autant mieux que tu es simple, direct. Et bon par-dessus le marché ! Ces impressions, tu me les a données en classe. Le pédagogue qui veut faire consciencieusement son métier ne néglige aucune occasion de connaître ses élèves, ses enfants, et il s'en présente sans cesse. Une réponse, un geste, une attitude sont amplement révélateurs. Je crois donc bien connaître le gentil petit bonhomme que tu étais, et l'enfant, bien souvent, contient en germe l'homme qu'il deviendra. Ton plaisir d'être en classe éclatait de toutes parts. Ton visage manifestait l'optimisme. Et à t'étudier, je n'ai jamais soupçonné la vraie situation de ta famille, je n'en ai eu qu'un aperçu au moment où ta maman est venue me voir au sujet de ton inscription sur la liste des candidats aux Bourses. D'ailleurs, cela se passait au moment où tu allais me quitter. Mais jusque-là tu me paraissais dans la même situation que tes camarades. Tu avais toujours ce qu'il te fallait. Comme ton frère, tu étais gentiment habillé. Je crois que je ne puis faire un plus bel éloge de ta maman.

J'ai vu la liste sans cesse grandissante des ouvrages qui te sont consacrés ou qui parlent de toi. Et c'est une satisfaction très grande pour moi de constater que ta célébrité (c'est l'exacte vérité) ne t'avait pas tourné la tête. Tu es resté Camus: bravo. J'ai suivi avec intérêt les péripéties multiples de la pièce que tu as adaptée et aussi montée: Les Possédés. Je t'aime trop pour ne pas te souhaiter la plus grande réussite: celle que tu mérites.

Malraux veut, aussi, te donner un théâtre. Je sais que c'est une passion chez toi. Mais.., vas-tu arriver à mener à bien et de front toutes ces activités ? Je crains pour toi que tu n'abuses de tes forces. Et, permets à ton vieil ami de le remarquer, tu as une gentille épouse et deux enfants qui ont besoin de leur mari et papa. A ce sujet, je vais te raconter ce que nous disait parfois notre directeur d'Ecole normale. Il était très, très dur pour nous, ce qui nous empêchait de voir, de sentir, qu'il nous aimait réellement. « La nature tient un grand livre où elle inscrit minutieusement tous les excès que vous commettez.» J'avoue que ce sage avis m'a souventes [sic] fois retenu au moment où j'allais l'oublier. Alors dis, essaye de garder blanche la page qui t'est réservée sur le Grand Livre de la nature.

Andrée me rappelle que nous t'avons vu et entendu à une émission littéraire de la télévision, émission concernant Les Possédés. C'était émouvant de te voir répondre aux questions posées. Et, malgré moi, je faisais la malicieuse remarque que tu ne te doutais pas que, finalement, je te verrai et t'entendrai. Cela a compensé un peu ton absence d'Alger. Nous ne t'avons pas vu depuis pas mal de temps...

Avant de terminer, je veux te dire le mal que j'éprouve en tant qu'instituteur laïc, devant les projets menaçants ourdis contre notre école. Je crois, durant toute ma carrière, avoir respecté ce qu'il y a de plus sacré dans l'enfant: le droit de chercher sa vérité. Je vous ai tous aimés et crois avoir fait tout mon possible pour ne pas manifester mes idées et peser ainsi sur votre jeune intelligence. Lorsqu'il était question de Dieu (c'est dans le programme), je disais que certains y croyaient, d'autres non. Et que dans la plénitude de ses droits, chacun faisait ce qu'il voulait. De même, pour le chapitre des religions, je me bornais à indiquer celles qui existaient, auxquelles appartenaient ceux à qui cela plaisait. Pour être vrai, j'ajoutais qu'il y avait des personnes ne pratiquant aucune religion. Je sais bien que cela ne plaît pas à ceux qui voudraient faire des instituteurs des commis voyageurs en religion et, pour être plus précis, en religion catholique. A l'École normale d'Alger (installée alors au parc de Galland), mon père, comme ses camarades, était obligé d'aller à la messe et de communier chaque dimanche. Un jour, excédé par cette contrainte, il a mis l'hostie « consacrée» dans un livre de messe qu'il a fermé ! Le directeur de l'École a été informé de ce fait et n'a pas hésité à exclure mon père de l'école. Voilà ce que veulent les partisans de « l'École libre » (libre.., de penser comme eux). Avec la composition de la Chambre des députés actuelle, je crains que le mauvais coup n'aboutisse. Le Canard Enchaîné a signalé que, dans un département, une centaine de classes de l'École laïque fonctionnent sous le crucifix accroché au mur. Je vois là un abominable attentat contre la conscience des enfants. Que sera-ce, peut-être, dans quelque temps? Ces pensées m'attristent profondément.

Sache que, même lorsque je n'écris pas, je pense souvent à vous tous.

Madame Germain et moi vous embrassons tous quatre bien fort. Affectueusement à vous.

Germain Louis

Source des textes : Albert Camus, Le premier homme. Image : AP/SIPA

Retrouvez les plus belles lettres des grands personnages sur le site Deslettres.fr

Depuis la mort de Samuel Paty, cette lettre d’Albert Camus à son premier instituteur devient virale

Quelques jours seulement après avoir reçu le prix Nobel de littérature, Albert Camus remerciait Louis Germain dans un superbe courrier.


Cette lettre a été écrite le 19 novembre 1957, quelques jours après que l’écrivain a reçu le prix Nobel de littérature. Albert Camus l’a destinée à Louis Germain, son premier instituteur, à qui il souhaitait rendre un hommage appuyé.


Un courrier qui, ces jours-ci, résonne, encore plus fort.


« 19 novembre 1957


Cher Monsieur Germain,

J’ai laissé s’éteindre un peu le bruit qui m’a entouré tous ces jours-ci avant de venir vous parler un peu de tout mon cœur.

On vient de me faire un bien trop grand honneur, que je n’ai ni recherché ni sollicité. Mais quand j’ai appris la nouvelle, ma première pensée, après ma mère, a été pour vous.

Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé.

Je ne me fais pas un monde de cette sorte d’honneur mais celui-là est du moins une occasion pour vous dire ce que vous avez été, et êtes toujours pour moi, et pour vous assurer que vos efforts, votre travail et le cœur généreux que vous y mettiez sont toujours vivants chez un de vos petits écoliers qui, malgré l’âge, n’a pas cessé d’être votre reconnaissant élève.

Je vous embrasse, de toutes mes forces.

Albert Camus »

À travers ce magnifique courrier, c’est toute une profession qui est honorée.


Remise de la Légion d'honneur, orchestre de la Garde républicaine, lettre d'Albert Camus... Retrouvez le programme de la cérémonie d’hommage à Samuel Paty.Son fils devient pupille de la Nation.

La France rend mercredi un hommage national à Samuel Paty à la Sorbonne, alors que sept personnes seront présentées dans la journée à un juge antiterroriste en vue d'éventuelles mises en examen après l'assassinat de l'enseignant. Voici le déroulé de la cérémonie.

>Début à 19h30

La cérémonie, en présence de 400 invités dont une centaine d'élèves d'établissements d'Ile-de-France, débutera à 19h30 dans la cour de la Sorbonne, lieu symbolique de l'esprit des Lumières et de l'enseignement.

>Écrants géants

L’hommage se déroulera en présence de la famille de l'enseignant et des corps constitués de l'État. Deux écrans géants seront installés devant la Sorbonne pour le public, rapporte BFMTV.

Selon l'Elysée, le président Emmanuel Macron devrait arriver un peu avant pour remettre la Légion d'honneur à titre posthume à l'enseignant et le faire commandeur des Palmes académiques


>Lettre d’Albert Camus

La lettre d'Albert Camus à son instituteur Louis Germain lu le jour où il a reçu le prix Nobel de littérature sera lue durant cette cérémonie, selon nos confrères de BFMTV.

>Garde républicaine et maîtrise de Radio France

Après l'arrivée du cercueil, un chant sera interprété par l'orchestre de la Garde républicaine et la maîtrise de Radio France et deux textes seront lus par des élèves et des enseignants.

 

>Discours d’Emmanuel Macron

Le chef de l'Etat prononcera ensuite un bref discours, suivi d'une minute de silence en hommage au professeur d'histoire-géographie.

 

En raison du couvre-feu en vigueur à Paris, la cérémonie devrait prendre fin à 20h30.

Sa mémoire a été saluée tout au long de la journée de mardi: des milliers de personnes ont participé à une marche blanche à Conflans-Sainte-Honorine pour dire non à la barbarie. Et l'ensemble des députés ont observé une minute de silence, réunis sur les marches du Palais Bourbon.

Samuel Paty, 47 ans, a été décapité vendredi près de son collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines)par un réfugié d'origine tchétchène de 18 ans, après avoir montré à ses élèves des caricatures de Mahomet lors d'un cours sur la liberté d'expression.


🖤 [Hommage à Samuel Paty]


Ce mercredi 21 octobre, devant l'hôtel de ville de Perros-Guirec, un rassemblement solidaire s'est déroulé en présence du Maire, Erven LÉON, des élus, des agents de la ville et des Perrosiens invités à se recueillir. Suite à l'hommage de monsieur le Maire, une longue minute de silence a été observée en soutien à la communauté éducative et en mémoire de Samuel PATY, professeur d’histoire-géographie, victime d’un attentat terroriste le vendredi 16 octobre à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines).



Citation de Gandhi lors du message d'Erven LÉON maire de Perros-Guirec : 

"La règle d'or de la conduite est la tolérance mutuelle, car nous ne penserons jamais tous de la même façon, nous ne verrons qu'une part de la vérité et sous des angles différents." Gandhi.



mardi 20 octobre 2020

TEMPÊTE BARBARA...

 MÉTÉO 





OBSERVATION

En fin de journée de lundi, la dépression Barbara circulait à l'est des Açores.

EVOLUTION

Dans la nuit de lundi à mardi, la dépression Barbara se décale encore plus à l'est de l'archipel des Açores et renforce progressivement en marge le vent de sud sur les crêtes pyrénéennes avec plus de 100 km/h sur l'ouest de la chaîne. Le vent d'autan continue lui aussi de se renforcer pour atteindre 70 km/h sur la plaine toulousaine et 90 km/h sur les hauteurs du Lauragais et la montagne Noire. 

Mardi matin, le vent de sud souffle de plus en plus violemment sur les Pyrénées avec des rafales à 130-140 km/h sur les crêtes les plus exposées. Le vent d'autan atteint 80 km/h sur la plaine toulousaine et souffle à 90-100 km/h dans les secteurs de Castres, Mazamet et Castelnaudary. Sur le Massif-Central, le vent de sud se renforce graduellement avec des rafales à 70-80 km/h sur les plateaux et crêtes exposés. Le vent de sud atteint 60-70 km/h en rafales sur le lyonnais et le Val de Saône.

Mardi après-midi, avec le rapprochement de la dépression Barbara le vent souffle en violente tempête sur les crêtes pyrénéennes avec des rafales à 150-160 km/h. En moyenne montagne, les rafales de vent atteignent 120-130 km/h. Le vent d'Autan se renforce à 90 km/h sur la plaine Toulousaine et atteint 100-110 km/h sur le Lauragais et la montagne Noire. Le vent de sud atteint 80-90 km/h sur les hauteurs et plateaux du Massif-Central, 70-80 km/h en vallées du Rhône et de la Saône.

Dans la soirée et la nuit de mardi à mercredi, ce sera la période la plus critique de l'épisode de vent violent. La dépression Barbara se creusera à 987 hPa sur le golfe de Gascogne et engendrera une violente tempête sur les cimes pyrénéennes avec des rafales de 150 à 160 km/h et localement 180 km/h en haute montagne. A moyenne altitude, les rafales atteindront 120 à 150 km/h. A plus basse alitude, au débouché de certaines vallées, les rafales de vent pourront atteindre 80 à 100 km/h. En Occitanie, l'Autan soufflera entre 80 et 100 km/h en plaine et 110-130 km/h sur les plateaux les plus exposées, notamment dans le département du Tarn. En Auvergne-Rhône-Alpes, le vent de sud soufflera fort sur les plateaux et crêtes exposées. Les rafales pourront atteindre 110-130 km/h, localement 140 km/h sur les monts du Forez et du lyonnais, les plateaux de Haute-Loire et du Vivarais. Sur la plaine du Gier, le Lyonnais et la vallée du la Saône, les rafales pourront atteindre 90 km/h.

Mercredi matin, le vent faiblira nettement sur les Pyrénées avec l'éloignement de la dépression vers le Nord. L'Autan baissera également d'intensité en Occitanie avec des rafales en deçà des 100 km/h. Le vent de sud soufflera encore fort en début de matinée en Auvergne-Rhône-Alpes et sur le sud de la Bourgogne avec des rafales de 80 à 90 km/h et localement plus de 100 km/h sur les crêtes exposées. Il s'essoufflera nettement à la mi-journée,  mettant ainsi fin à cet épisode de vent violent.

Si cet épisode tempétueux de vent de sud et d'Autan n'est pas rare à cette période de l'année, il nécessite une vigilance particulière en raison des risques de chutes d'arbres et de branches sur les chaussées et des risques de chutes d'objets venant des habitations. Cette tempête risque aussi d'entraîner des coupures d'électricité dans les secteurs les plus exposés


Cette semaine est marquée par une importante dégradation du temps. Une dépression très creuse, prénommée "Barbara" par la Météorologie Espagnole, va provoquer des vents tempétueux dans les Pyrénées et le Massif central, ainsi que dans les vallées exposées.

Entre un anticyclone installé sur l'Italie et une dépression nommée Barbara remontant du Portugal vers le golfe de Gascogne, le vent d'Autan et le vent du sud souffleront en tempête entre mardi et mercredi matin des Pyrénées au Massif-Central et dans la vallée de la Saône.
Les crêtes pyrénéennes, le Lauragais et la plaine toulousaine, les monts d'Auvergne et du lyonnais seront particulièrement exposés avec des rafales atteignant ou dépassant les 100 km/h et même 150 km/h pour les cimes pyrénénnes.

lundi 19 octobre 2020

L'OCTOGONE

 Mesures sanitaires 


 
 
Comme nous l'avons appris les salles de sports ont la possibilité de rester ouvertes, mais pour cela nous vous demanderons à toutes et à tous de respecter le protocole et les mesures d'hygiène, à savoir : 
 
-les cours seront limités désormais à 6 personnes pour répondre aux normes de sécurité
 
-le port du masque n’est pas obligatoire, mais libre à vous de le porter durant la séance, cependant aux abords de la salle vous devez impérativement porter votre masque
 
-vous devez vous désinfecter les mains en rentrant et  en sortant de la salle avce le gel hydroalcoolique mis a votre disposition  
 
-lors des seances avec utilisation de materiel vous devez desinfecter  votre matériel avant et apres utilisation 
 
-vous devez obligatoirement venir avec votre bouteille d’eau (pour limiter les allers-retours aux toilettes inutiles, vous devez également vous munir de votre serviette à chaque cours, pour éviter les projections de sueurs, une paire de chaussures spécifiques et dédiés uniquement à votre pratique en salle vous est exigé 
 
-le respect des gestes barrières est de rigueur, gardez vos distances, et même durant vos séances 
 
-pour les boxeurs et boxeuses, munissez-vous de votre paire de gant personnelle, nous vous en proposons à l’achat 
 
 -pour toutes personnes malades ne pas vous présenter aux cours, en cas de doutes merci de nous prévenir nous prendrons les mesures nécessaires. 
 
Nous faisons tous appel à votre compréhension et bon sens, afin que nous puisions rester ouvert et ce dans des conditions idéales, essayant de ne pas faire planner trop de contraintes, mais la mise en place de ces mesures de sécurité reste nécessaire, nous pourrons être amenés  à nous faire contrôler alors soyons préparéus.
Vous trouverrez ci-joint le protocole sanitaire mis en place par le prefet 
 
Sportivement 
L'Octogone 

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samedi 17 octobre 2020



TÉMOIGNAGE BOULEVERSANT D'UN PIERROTIN 


" Ich bin ein Berliner "

" je suis Charlie"

Qui va crier aujourd'hui :

" je suis Samuel Paty " !?


TÉMOIGNAGE BOULEVERSANT D'UN PIERROTIN 

PROF D'HISTOIRE

Je suis prof d’histoire

Nous sommes le samedi matin 17 octobre 2020. Le monde de l’éducation se réveille aujourd’hui avec horreur et stupéfaction. Personne n’arrive à croire ou à comprendre ce qui est arrivé. Le choc est encore plus brutal du côté de la France. La veille, notre collègue et prof d’histoire Samuel Paty a été lâchement assassiné pour avoir fait ce qui le passionnait et le motivait dans la vie : enseigner.

Enseigner, cet acte ou un professeur assure un partage d’informations, de concepts, de valeurs communes et de culture universelle à ses classes. Il est du devoir de l’enseignant de transmettre ces éléments aux élèves. Et ce, de façon à ce qu’ils comprennent et assimilent des connaissances, des techniques et des codes moraux, afin de pouvoir ensuite vivre en société dans le respect et l’harmonie.

Je ne peux décrire à quel point cette situation me touche. Ça me fait vivre un océan d’émotions allant de la tristesse à la colère, en passant par l’incompréhension et le dégout. Comme l’a déclaré le procureur anti-terroriste qui fait le point sur l’enquête : « On a assassiné un enseignant et la liberté de penser ».

Comment peut-on en venir à poser un geste d’une barbarie sans borne ?

Comment quelqu’un peut-il se radicaliser de la sorte, au point de commettre l’impardonnable ? Votre réponse est surement aussi valable que la mienne.

Il y a probablement des milliers de théories ou d’explications qui pourraient venir répondre à ces questions. Je suis convaincu que des milliers de personnes vont tenter de le faire. Et ça risque malheureusement d’aller dans tous les sens. Mais ce n’est pas le but de mon message aujourd’hui.

Voyez-vous, il serait très facile d’écrire un texte complet dénonçant avec violence et hargne cet acte inhumain. Il serait même surement apaisant de dénoncer et de pointer du doigt des coupables. D’assouvir notre désir de rétribution et de vengeance.

L’être humain à cette fâcheuse tendance à chercher la punir les responsables à tout prix pour faire guise de réparation face à un acte horrifique.

Œil pour œil, dent pour dent.

Comme si de répondre de façon brutale pouvait faire oublier ou pardonner un autre acte brutal. L’humain agit de la sorte depuis des millénaires. Et à voir notre histoire mondiale depuis les 5000 dernières années, c’est loin d’être un concept qui semble fonctionner. Comme si l’homme n’apprenait jamais de ses erreurs et de ses actions.   

Je suis d’avis qu’il ne faut pas répondre à la haine par la haine. Plus que jamais, pour combattre cette haine grandissante il n’y a qu’une seule solution, l’éducation. Alors pour répondre à cet acte inhumain, je vais continuer à chaque jour qui passe à enseigner à mes élèves, et à ceux qui me suivent, l’importance de l’éducation dans une société.

J’invite donc tous mes collègues aux quatre coins du monde à faire de même. Continuez à faire votre travail avec votre fougue et votre passion. Vous devez susciter la réflexion et le développement personnel chez vos élèves. Si nous ne le faisons pas, internet et ses coins les plus dépravés risquent de s’en charger à notre place. 

Notre travail est plus important que jamais

Nous sommes les derniers remparts de la société contre le chaos grandissant partout sur la planète. Nous devons donc nous assurer que la haine ne triomphe pas. Ce serait de faire gagner ceux qui tentent de la propager par tous les moyens.

Il est maintenant primordial, plus que jamais, de tout faire en notre pouvoir pour transmettre aux futures générations des valeurs universelles de justice, d’égalité, de tolérance, de liberté et de respect des autres.

C’est seulement en combattant l’ignorance et la haine par le développement des valeurs humaines universelles que nous pourrons un jour espérer mettre fin à ces actions horrifiques et inacceptables.

Comme mes collègues, l’histoire c’est ma passion. L’histoire c’est mon travail. L’histoire c’est le fondement de nos sociétés. L’histoire n’oublie pas. L’histoire nous survivra. L’histoire, c’est maintenant.

"Je suis Samuel Paty ". 

Je suis prof d’histoire.

-Jonathan le Prof St-Pierre


Suite

Vous n’aurez pas nos têtes

Edito

Par 

Publié le 

Un hussard est tombé. Sa tête a roulé. Dans ce pays, on a décapité des rois et des tyrans, quelques révolutionnaires. Qui aurait cru qu’un enseignant perdrait la sienne, quarante ans après l’abolition de la peine de mort, pour avoir voulu faire réfléchir ses élèves ?

Ce renversement, si symbolique, nous remplit d’effroi. Après tant d’attentats et de morts, nous devrions être habitués. Et pourtant non, chaque fois c’est pire.

La République se sait en danger. Comme elle l’était lorsque des forces obscurantistes ont voulu la renverser. Ce sont les instituteurs et les institutrices, nos enseignants, à qui l’on doit d’être des citoyens éclairés et non des sujets. S’en prendre à eux, c’est s’en prendre à nous tous, à la raison et à l’espoir. Les journalistes peuvent alerter, les policiers peuvent arrêter, mais nous ne sortirons jamais de ce cauchemar si les professeurs ne peuvent vacciner la prochaine génération contre ces propagandes qui nous déchirent. L’antidote, nous le savons, exige d’expliquer, inlassablement, l’histoire de ce pays, comment nous avons arraché nos libertés, l’importance d’endurer la divergence et l’offense, le blasphème et l’atteinte au sacré, sans répondre par la violence. C’est ce qui fonde notre liberté d’expression et toutes celles qui en découlent.

« QUI N’EST PAS LIBRE NE PEUT FORMER DES CITOYENS LIBRES. »

Un critique littéraire a osé tweeter, au lendemain de l’attentat, qu’il y aurait « des morts atroces » tant qu’on défendra le droit de blasphémer, en citant bien sûr une professeure de Berkeley. On hésite entre vomir et pleurer. Ce sont les tueurs qui provoquent ces morts, pas l’usage de nos libertés. Faire passer les victimes pour les bourreaux, voilà ce qui encourage les bourreaux à recommencer. Rien n’est plus vital, plus urgent, que remettre la pensée à l’endroit. Cette pédagogie devrait obséder l’école laïque. Ce n’est pas un écart ni un excès, c’est sa raison d’être, sa mission la plus sacrée.

Pour y parvenir, la République a besoin de tous ses hussards, héritiers de Ferdinand Buisson. Protestant et franc-maçon, il s’est battu toute sa vie pour que l’école publique laïque puisse transmettre l’esprit critique et protéger les élèves issus de minorités religieuses du catéchisme dominant. Il insistait pour qu’on forme les enseignants : « Qui n’est pas libre ne peut former des citoyens libres. »

Samuel Paty voulait former des esprits libres. Il en est mort, décapité par un fanatique de 18 ans. Qui l’a convaincu que l’école laïque persécutait les musulmans comme on opprime les Ouïghours ou les Tchétchènes ? Qui lui a mis cette idée dans le crâne ?

IL FAUT UN VÉRITABLE OBSERVATOIRE DE LA LAÏCITÉ

Un père de famille a sonné la charge contre l’enseignant dans une vidéo, en clamant qu’on aurait montré une photo d’homme nu censé représenter Mahomet à sa fille, avant d’en appeler au Collectif contre l’islamophobie et à sa meute. Tout était faux. Il devra en répondre, lui et les autres parents d’élèves, pour mise en danger de la vie d’autrui. Il faut aussi enquêter pour savoir si la hiérarchie a soutenu cet enseignant, comme elle aurait dû, contre cette mise en danger.

Puis il faudra se décider, pour de bon, à mener la bataille culturelle. Obliger les réseaux sociaux à réguler l’incitation au lynchage. Démanteler les officines de désinformation comme le CCIF et BarakaCity. Demander des comptes à leurs idiots utiles, à ces imbéciles qui confessionnalisent la jeunesse et lui apprennent à s’offenser de tout, à ces journalistes et à ces politiciens cyniques qui amalgament la liberté d’expression, la laïcité et la lutte contre le terrorisme avec une « guerre contre les musulmans ».

Il nous faut, pour de bon, un véritable Observatoire de la laïcité. Pour surveiller ces campagnes d’intoxication au lieu de les relayer !

Commençons par demander à tous les élèves et à leurs enseignants de regarder ensemble le documentaire de Daniel Leconte sur le procès de Charlie Hebdo et l’affaire des caricatures : « C’est dur d’être aimé par des cons ». Tout y est dit. Tout y est conté. Les enfants comprendront. Les adultes qui veulent continuer à leur laver le cerveau, nous les combattrons. Nous ne perdrons pas nos têtes parce que des fous veulent l’arracher. Nous continuerons à vivre.





Trente-quatrième jour : l’horreur et la pensée

YANNICK HAENEL · FRANÇOIS BOUCQ · 

34e jour. La décapitation d'un enseignant par un islamiste fait passer le procès au second plan.

EXCLU WEB
Dessin de Boucq

C’est très difficile d’écrire ce matin. Si j’assiste à ce procès, c’est parce que je crois que le mal ne doit pas être seulement dénoncé et combattu, mais pensé — c’est-à-dire expliqué. J’ai été professeur pendant plus de quinze ans en région parisienne, j’ai enseigné dans des collèges de banlieue où la violence sociale ne s’arrêtait jamais, et je sais combien s’efforcer chaque jour d’expliquer est fondamental. Expliquer n’est pas justifier, expliquer n’est pas provoquer.

La parole de la justice dont nous faisons l’expérience à ce procès ne suffit pas ; aucune parole ne se suffit à elle-même, surtout pas celle de la répression. Penser la violence, penser le mal, penser le crime, penser la terreur politique, penser l’islamisme radical, penser les religions, penser la foi, penser le blasphème, aucune parole n’est de trop pour le faire : la pensée appelle la pensée, c’est-à-dire le dialogue. Penser, ça veut dire demander à quelqu’un ce qu’il pense. Les professeurs font ainsi avec leurs élèves. Penser avec les autres veut dire mettre en rapport des idées, les moduler, les nuancer, les faire avancer ou les faire reculer. Ça n’a jamais lieu tout seul : il faut, pour penser, plusieurs paroles. La mise en présence des paroles pour penser, c’est l’expérience à quoi nous prenons part ici, au Tribunal de Paris, depuis plus d’un mois ; et c’est l’expérience à quoi prennent part tous les enseignants et tous les élèves chaque jour, à l’école.

Qu’on assassine un professeur parce qu’il essaie de penser avec ses élèves, qu’on le tue parce qu’il se tue à essayer d’expliquer, comme tous les enseignants, qu’on ne tue pas quelqu’un qui ne pense pas comme vous, c’est non seulement une abomination, mais c’est aussi un attentat contre l’école elle-même, contre l’idée même d’éducation, contre la pensée, contre le fait de se parler, contre le fait de demander à quelqu’un ce qu’il pense. C’est une tentative pour nier l’éducation. Car que font les professeurs, que faisait ce professeur d’histoire avant d’être mis à mort ? Il expliquait ce que signifie être libre en France. Cela s’appelle l’éducation civique, et c’est la chose la plus importante qui soit dans les écoles, celle qui s’avère la plus nécessaire : la société française est en proie à une attaque incessante contre ses valeurs, c’est pourquoi expliquer ces valeurs est devenu si urgent, c’est pourquoi penser est plus que jamais décisif. Ce professeur d’histoire était si scrupuleux qu’il a pris la précaution, avant de montrer des caricatures de Mahomet, de prévenir ses élèves que cela pouvait éventuellement les déranger. Sa pensée était si scrupuleuse qu’elle allait jusqu’à se mettre à la place des possibles offensés, et qu’elle devançait l’éventuelle offense pour expliquer que selon la loi et la raison, et aussi selon le bon sens, il n’y a pas d’offense, aucune volonté d’offenser, et aucune raison de se sentir offensé. L’intelligence comprend cela. Mais en plus de l’intelligence, qui s’apprend, notamment à l’école, il y a, en France, un droit et une liberté : celle de penser, de s’exprimer, de rire et de croire. Droit et liberté de croire en la religion qu’on aime, qu’elle soit musulmane, juive ou catholique, ou autre ; droit et liberté de ne croire en rien. Lorsque cet homme a pris soin de penser la possibilité de l’offense et a expliqué pourquoi il n’y avait pas offense, il a fait ce que font tous les enseignants : non pas imposer leur pensée, mais se mettre à la place de leurs élèves, et leur expliquer. Les enseignants, en France, vont-ils devoir arrêter d’expliquer ? Vont-ils devoir se censurer, et donc se taire ? L’école doit-elle s’arrêter ? La France n’en finit plus de découvrir que le crime est par nature obscurantiste, et que l’obscurantisme ne cherche qu’à tuer la lumière et à nier l’esprit. Nous sommes tous des enseignants : nous expliquons, nous pensons, nous parlons avec les autres. Cela s’appelle vivre et être libre.  

Une phrase de Nietzsche me revient, elle dit : « Un homme offensé est un homme qui ment ». Les tueurs qui se disent offensés par les caricatures de Mahomet mentent pour justifier leur volonté de tuer ; ils mentent sur l’Islam, ils mentent sur Mahomet. Un homme qui aime sa religion, un homme qui chérit sa foi, que celle- ci soit musulmane, juive, catholique ou autre, n’est jamais offensé, surtout pas par l’humour. Un homme qui aime sa religion pense et parle avec les autres : il parle de ce qu’il aime, il parle de sa religion. Parlons de religion, pensons les religions. Continuons à enseigner, à comprendre, à expliquer, à écouter toutes les paroles.

jeudi 15 octobre 2020

VIGILANCE ORANGE 🌧🌧🌧🌧🌧😡😡😡

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