En gĂ©nĂ©ral, je n’aime pas trop les polĂ©miques, quelles qu’elles soient, je prĂ©fĂšre me concentrer sur les Ă©nergies positives qui aident Ă aller de l’avant (et c’est un travail de chaque jour !) mais il y a quelques jours, j’ai vu passer une conversation sur ma page entre Alain C. et Jacky F.
Clarisse Lavanant
Vous savez sans doute que j’ai adaptĂ© en breton la cĂ©lĂšbre chanson occitane « L’encantada » du groupe Nadau, avec bien Ă©videmment l’approbation de son crĂ©ateur. J’ai d’ailleurs reçu beaucoup de messages bienveillants et trĂšs Ă©mouvants avec aussi quelques-uns plus controversĂ©s comme celui de Jacky F. qui dit prĂ©fĂ©rer l’original parce que cela n’a rien Ă voir.
Jusqu’ici tout va bien, on a le droit d’aimer, de ne pas aimer ou de prĂ©fĂ©rer, mĂȘme si comme le lui fait remarquer Alain C., l’intĂ©rĂȘt d’une reprise, et d’autant plus d’une adaptation, n’est pas de refaire exactement la mĂȘme chose mais de s’approprier la chanson tout en la respectant, c’est un juste Ă©quilibre Ă trouver et c’est ce que j’ai essayĂ© de faire. Ce Ă quoi Jacky F. rĂ©pond que cela lui fait penser Ă un parisien qui tente de parler en patois. Alain C. lui rĂ©plique que la Bretagne n’est pas Ă Paris et que la langue bretonne n’est pas un patois, ce qui revient Ă insulter la Bretagne et sa ou ses langues. Jacky F. rĂ©torque qu’il aime la Bretagne, Alan (qu’il rebaptise “Alain”) Stivel (avec un seul « l ») et Manau… En ajoutant que comme je suis nĂ©e au Mans et que j’ai selon lui appris la langue Ă l’Ăąge de 25 ans, je ne suis pas bretonne (je prĂ©cise que Jacky F. ne se dit pas breton.) Alain C. lui rĂ©pond que toute ma famille maternelle et paternelle est originaire du LĂ©on depuis des gĂ©nĂ©rations et des gĂ©nĂ©rations et que comme beaucoup d’autres jeunes (ou moins jeunes) bretons j’ai appris la langue que l’on ne nous a pas transmise. Il lui rappelle Ă©galement qu’Alan Stivell (entre autres) est nĂ© en Auvergne et a aussi appris la langue Ă l’Ăąge adulte… M’est alors revenue la question issue de l’Ă©ternel dĂ©bat, Ă savoir : « Qu’est-ce qu’ĂȘtre breton ? » Faut-il obligatoirement ĂȘtre nĂ© en Bretagne sachant que le lieu de naissance est souvent un hasard et pour ma part une histoire douloureuse puisque je suis une grande prĂ©maturĂ©e qui aurait dĂ» voir le jour Ă Morlaix et qui a bien failli ne voir que la nuit ?
Quelqu’un nĂ© en Bretagne mais qui n’a pas forcĂ©ment d’attaches et qui n’y habite pas est-il quand-mĂȘme plus breton que celui qui n’y est pas nĂ© mais qui en est originaire ou que celui qui choisit d’y revenir ou d’y vivre ou bien encore de l’ĂȘtre, par choix identitaire ou territoire de coeur ? Un bretonnant est-il automatiquement plus breton qu’un non-locuteur et un locuteur de naissance est-il plus breton aussi que celui qui l’a appris (et que Jacky F. qualifie en plus avec finesse de chinois puis de vache espagnole !) ?
Il y aurait des questions Ă poser Ă l’infini, bien plus intĂ©ressantes que le personnage en question et c’est pour cela que j’en parle, qui renvoient au livre de Morvan Lebesque « Comment peut-on ĂȘtre breton ?» et notamment au fameux texte « La dĂ©couverte ou l’ignorance ».
Ătre breton ou plutĂŽt « se sentir breton », ne serait-ce pas avant tout l’authenticitĂ© d’un attachement, quel qu’il soit, qui ne se quantifie pas et que surtout personne ne peut dĂ©cider pour l’autre ? C’est valable d’ailleurs pour n’importe quelle autre identitĂ©.
Au bout du compte, je remercie Jacky F. qui me permet de publier une nouvelle fois cette citation que j’aime tant de Xavier Grall (pourtant nĂ© en Bretagne mais qu’il ne doit certainement pas connaĂźtre ni ne pourrait comprendre) et qui donne la rĂ©ponse que l’on ne trouve qu’Ă l’intĂ©rieur de soi :
« On ne naĂźt pas Breton, on le devient, Ă l'Ă©coute du vent, du chant des branches, du chant des hommes et de la mer. »
(Photo : Emmanuel Pain)
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