François Bayrou fait face jeudi à une première épreuve avec l'examen à l'Assemblée nationale d'une motion de censure qui, même si elle ne devrait pas être adoptée, obligera les socialistes à clarifier leur position face au gouvernement
Nommé il y a trois semaines, le Premier ministre n'a pas demandé la confiance des députés mardi après sa déclaration de politique générale, car comme Michel Barnier, Gabriel Attal et Elisabeth Borne avant lui, il est privé de majorité.
En retour, les élus de La France insoumise, qui ne cessent de réclamer la démission d'Emmanuel Macron, ont déposé une motion de censure, la 150e de la Ve République.
Le texte est également signé par des députés communistes et écologistes. Mais par aucun socialiste.
Au PS, malgré de longues discussions, la décision de voter ou non la motion de censure a finalement été repoussée... à ce jeudi.
Après moult tergiversations, les 66 députés socialistes doivent déterminer si les concessions du gouvernement, notamment l'annonce d'un "conclave" de trois mois entre partenaires sociaux pour réviser la réforme des retraites, sont suffisantes pour arracher leur non-censure.
Un bureau national du PS est prévu à 12H30 avant ensuite une réunion du groupe à l'Assemblée. Le vote de cette motion de censure est prévu vers 17h30.
"On attend un courrier de Bayrou", a indiqué à l'AFP le secrétaire général du PS Pierre Jouvet, sans révéler les demandes du parti.
Selon le chef des sénateurs socialistes Patrick Kanner, après l'abandon des 4.000 suppressions de postes prévues à l'Education nationale, le gouvernement va aussi revenir sur l'allongement du délai de carence d'un à trois jours en cas d'arrêt maladie pour les fonctionnaires.
En conséquence, "à titre personnel", M. Kanner considère "que, puisque chaque jour nous obtenons des choses nouvelles, la responsabilité devrait nous amener à ne pas censurer".
"Il faut absolument que les socialistes n'aient qu'une seule position. Sinon, on envoie au gouvernement le signal qu'il peut faire du shopping chez nous et on envoie à Jean-Luc Mélenchon le signal qu'il peut faire du shopping chez nous. Il faut que le groupe vote comme un seul homme", plaide un député PS.
"Le compte n'y est pas"
"Les socialistes se sont ridiculisés et ont entaché la crédibilité du Nouveau Front populaire (...) La vie politique est binaire: si on ne vote pas la censure, on est dans le soutien au gouvernement", estime le coordinateur national de LFI Manuel Bompard, qui défendra la motion de censure.
Pour la cheffe des écologistes Marine Tondelier, "le compte n'y est pas", même avec l'engagement de François Bayrou de saisir le Parlement sur les retraites même en cas d'accord seulement partiel entre les partenaires sociaux.
"Les règles du jeu sont pipées" car "l'Assemblée nationale ne pourra se prononcer que ce sur quoi le Medef est d'accord", a-t-elle estimé.
La numéro un de la CFDT Marylise Léon estime cependant qu'une "opportunité inédite s'ouvre" pour discuter à la fois de l'âge de départ à 64 ans, la pénibilité et l'égalité hommes-femmes. Une intersyndicale se tiendra jeudi pour préparer la première réunion vendredi à Matignon au mode opératoire encore flou.
Dans le camp macroniste, la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a demandé aux socialistes "d'agir en responsabilité" car si le gouvernement est renversé, l'Assemblée ne pourra, par exemple, pas examiner dès lundi la loi d'urgence pour Mayotte.
Mais, de chute du gouvernement, il ne devrait pas y avoir puisque les députés RN ne voteront pas la motion de censure, voulant juger le gouvernement sur ses actes au moment du budget. Impossible alors pour la gauche, sans le RN, d'atteindre les 288 voix nécessaires.
Le vote servira donc surtout à clarifier le positionnement du PS vis-à-vis du gouvernement Bayrou, à l'approche des échéances décisives des budgets de l'Etat et de la sécurité sociale, avec la possibilité de recours au 49-3 et donc, en retour, de nouvelles motions de censure.
Le gouvernement espère achever la procédure budgétaire d'ici fin février pour que le pays puisse retrouver son cours normal de fonctionnement au 1er mars.
Il vise un effort de 32 milliards d'économies et 21 milliards de recettes pour ramener le déficit public à 5,4% du PIB en 2025, contre un niveau de 6,1% attendu pour 2024.
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